La sous-évaluation systématique du montant des transactions intervenues entre les parties et le caractère occulte des avantages ainsi consentis peuvent être de nature à démontrer l'intention libérale caractérisant un avantage indirect rapportable au sens de l'article 843 du Code civil (
N° Lexbase : L9984HN4). Telle est la solution qui se dégage d'un arrêt rendu le 21 octobre 2015 (Cass. civ. 1, 21 octobre 2015, n° 14-24.926, F-P+B
N° Lexbase : A0191NUM). En l'espèce, M. P. était décédé le 29 mars 2004, laissant pour lui succéder son épouse commune en bien, et ses deux filles, Mmes G. et B.. Auparavant, M. P. et son épouse avaient cédé à Mme B. et à son mari leur exploitation agricole et des terres agricoles prises à bail par ces derniers ; Mme G. avait assigné sa mère et sa soeur en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage en demandant qu'il soit jugé que ces cessions constituaient des donations indirectes justifiant le rapport à la succession de la différence entre le prix de vente de ces biens et leur valeur réelle ; Mmes P. et B. faisaient grief à l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Orléans (CA Orléans, 23 juin 2014, n° 12/00502
N° Lexbase : A8655MRY) de dire que cette dernière devrait rapporter à la succession de M. P. une certaine somme correspondant aux avantages consentis par ses parents, faisant valoir, en premier lieu, que l'intention libérale de nature à caractériser l'existence d'une donation déguisée n'était pas rapportée. En vain. La Haute juridiction retient que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel avait estimé que la sous-évaluation systématique du montant des transactions intervenues entre les parties et le caractère occulte des avantages ainsi consentis démontraient la volonté manifeste des époux P. de gratifier leur fille. En second lieu, les requérantes faisaient valoir que, dans le cadre de la recherche d'un éventuel avantage indirect au sens de l'article 843 du Code civil, la valeur vénale d'une parcelle agricole, vendue de son vivant par le
de cujus à l'un de ses héritiers devait être fixée à la date de sa vente en prenant en considération la moins-value résultant de l'existence d'un bail rural grevant cette parcelle, quand bien même ce bail aurait-il été consenti à l'héritier acquéreur. L'argument est également rejeté par la Haute juridiction qui retient que c'est à bon droit que la cour d'appel avait décidé que les terrains agricoles litigieux devaient être estimés comme libres de bail dès lors que cette estimation, destinée à assurer l'égalité entre les copartageants, concernait un bien qui, par l'effet de son attribution à l'héritier qui en était preneur et de la réunion sur la tête de celui-ci des qualités incompatibles de propriétaire et de fermier, avait cessé d'être grevé du bail dont il était auparavant l'objet.
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