Les documents établis par le général de Chasseloup-Laubat et ses subordonnés dans l'exercice de leurs fonctions doivent être considérés comme des archives publiques. Telle est la solution de l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 21 octobre 2015 (Cass. civ. 1, 21 octobre 2015, n° 14-19.807, FS-P+B+I
N° Lexbase : A7078NTC). En l'espèce M. X, descendant du général François de Chasseloup-Laubat, qui a commandé le corps du génie durant plusieurs campagnes napoléoniennes, a décidé d'aliéner en partie, à l'occasion d'une vente publique organisée en 2003, divers plans, dessins, croquis et cartes conservés par sa famille depuis le décès de son ancêtre, en 1833. Le ministre de la Défense s'est opposé à cette vente et a assigné M. X en revendication de ces documents. Si le tribunal administratif initialement saisi a reconnu la qualité d'archives publiques à ces documents et enjoint à M. X de les restituer, que le Tribunal des conflits, saisi par le Conseil d'Etat, a décidé que les tribunaux judiciaires étaient compétents pour connaître de ce litige (T. confl., 9 juillet 2012, n° 3857
N° Lexbase : A8454IQ8 et lire
N° Lexbase : N3128BTZ). Pour rejeter l'action en revendication du ministre de la Défense et dire que les documents en question constituaient des archives privées, la cour d'appel énonce, d'une part, que les documents étaient, en grande partie, des "doubles ou copies", ainsi qu'il était d'usage d'en conserver sous l'Empire, d'autre part, que l'administration, en acceptant cette pratique au regard du fonds d'archives dont elle connaissait l'ampleur et la nature, avait, implicitement mais nécessairement, reconnu le caractère privé de ces archives et avait orienté sa revendication sélective dans le seul but de combler les manques dans les collections de l'Etat. L'arrêt sera censuré au visa des articles L. 211-4 (
N° Lexbase : L1436IEW) et L. 212-1 (
N° Lexbase : L0243IBM) du Code du patrimoine, ensemble l'article L. 2112-1 du Code de la propriété des personnes publiques (
N° Lexbase : L0403H4P) par la Cour de cassation : en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure le caractère public de ces archives, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme il le lui était demandé, si les documents n'avaient pas été établis par le général de Chasseloup-Laubat et ses subordonnés dans l'exercice de leurs fonctions, n'a pas donné de base légale à sa décision.
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