Lexbase Social n°965 du 23 novembre 2023 : Licenciement

[Actes de colloques] Le contrôle des PSE en questions

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N7417BZQ

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par Pierre Bailly, Conseiller doyen honoraire à la Cour de cassation

le 21 Novembre 2023

Mots-clés : PSE • coemploi • Dreets • recours • discrimination • égalité • prescription • transfert

Cet article est issu d’un dossier spécial consacré à la publication des actes du colloque intitulé « Le plan de sauvegarde de l'emploi : 10 ans après la loi du 14 juin 2013 », qui s’est tenu le 14 juin 2023 à Toulouse, et organisé par Frédéric Géa, Professeur à l’Université de Lorraine, et Sébastien Ranc, Maître de conférences à l'Université de Toulouse Capitole.

Le sommaire de ce dossier est à retrouver en intégralité ici N° Lexbase : N7441BZM


La réforme du contrôle des PSE en 2013 et l’attribution du contentieux s’y rapportant au juge administratif ont laissé subsister ou fait apparaître de nouvelles questions, qui n’ont pas toujours obtenu de réponse juridictionnelle. Il en est ainsi notamment de la question du coemploi et de celles qui portent sur l’autorité de décisions « atypiques » prises par le Dreets, sur le contrôle de l’égalité de traitement, distinguée des discriminations, sur le délai de prescription de l’action des salariés licenciés, et sur la portée des dispositions qui, en 2016, ont autorisé une dérogation aux effets de l’article L. 1224-1 du Code du travail.


Les dispositions de la loi du 14 juin 2013 qui, dans le prolongement de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier précédent, a transféré le contentieux des plans sociaux, à l’administration du travail et, en cas de contestation, au juge administratif, ont eu pour objectif d’éviter tout chevauchement des ordres de juridiction, en clarifiant la répartition des compétences entre le juge de l’administration et celui des contrats de travail. Cependant, malgré cette volonté de prévenir des contentieux pouvant nuire à une préparation rapide des PSE, certains aspects de la réforme laissent place à des questionnements qui ne trouvent pas toujours de réponse incontestable. Cinq interrogations seront ici évoquées.

I. Première question : à la recherche du véritable (co)employeur

Sur cette première question, deux observations s’imposent : 

             1°/ Le coemploi n’a pas disparu, mais son champ d’application s’est réduit. Depuis l’arrêt AGC du 25 novembre 2020 [1], doit être caractérisée une immixtion permanente d’un tiers dans la gestion économique et sociale de l’entreprise entraînant une perte totale d’autonomie. C’est à cette condition que le « voile de la personnalité morale » peut être levé.

Un arrêt du 22 novembre 2022 [2] rappelle la nécessité d’une « ingérence continuelle et anormale » dans la gestion de l’entreprise, entraînant une éviction des organes de direction, privés de pouvoir réel, autrement dit, une perte totale d’autonomie de l’employeur.

Les conséquences de la constatation d’une telle situation anormale en cas de licenciement économique sont lourdes :  nécessité d’établir un PSE impliquant les deux employeurs conjoints (selon l’effectif), sous peine de nullité des licenciements, ce qui conditionne la valeur du PSE ; effet sur la cause de rupture, qui doit s’apprécier en considération des deux employeurs conjoints, de sorte qu’une cessation d’activité de la société dominée ne suffit plus à justifier des licenciements économiques.

             2°/ Le coemploi n’est pas retenu par la jurisprudence administrative, de sorte que la Dreets n’a pas à se prononcer sur l’existence d’une telle situation [3]. Le juge administratif met en œuvre un autre critère qui lui est plus familier.  La société qui demande la validation ou l’homologation du PSE doit être le véritable employeur, distingué d’un employeur « transparent », c’est-à-dire fictif. Une application de cette différence d’approche peut être trouvée dans un arrêt qui se prononce sur l’autorisation de licencier un salarié protégé [4]. Dans ses conclusions, le rapporteur public Raphael Cambon, a relevé la proximité des deux notions et considéré qu’une hésitation était permise dans cette procédure.

Ces observations débouchent sur deux questions, dont la réponse relève des deux ordres de juridiction respectifs :

  • le Dreets doit-il nécessairement et systématiquement vérifier que l’auteur du PSE est bien le véritable employeur, en l’absence de toute contestation sur ce point, dans le court délai dont il dispose pour se prononcer ?
  • le rejet par le juge administratif d’un moyen fondé sur une contestation de l’identification de l’employeur prive-t-il le juge du contrat de travail du pouvoir de se prononcer sur une situation de coemploi, avec les conséquences qui en résultent ?

À la première question, il semble que l’on puisse répondre par la négative, en considérant que, comme lorsqu’il s’agît de déterminer l’étendue d’un groupe  pour se prononcer sur la valeur d’un PSE[5], l’administration n’est tenue de statuer sur cette question qu’à la condition qu’elle lui ait été soumise et que des éléments suffisants lui aient été fournis. Cette approche pragmatique peut se justifier par le bref délai de 15 ou 21 jours [6] dont dispose le Dreets pour prendre sa décision sur la demande d’homologation ou de validation. Quant à la seconde question, à partir du moment où l’administration et son juge ne se sont pas prononcés sur un état de coemploi, soit parce que ça ne relève pas de leur pouvoir dans le cadre du contrôle du PSE, soit parce que ce n’était pas invoqué devant eux, la compétence du juge judiciaire pour en connaître subsiste. Cela ne paraît pas douteux dans le cadre d’une contestation de la cause économique, puisque cet aspect des licenciements échappe au Dreets. On peut hésiter à admettre que le juge du contrat de travail ait le pouvoir de juger que, quoique le PSE ait été homologué ou validé définitivement, les licenciements sont atteints de nullité parce que le coemployeur n’a pas établi de plan. Cependant, un des premiers commentateurs de la réforme de 2013 a estimé que l’absence de PSE établi ou négocié par le  coemployeur devait nécessairement conduire à l’annulation des licenciements [7]. La situation est différente si ce grief a été soumis à l’administration puis au juge administratif et si la décision rendue dans le cadre du contrôle du PSE l’écarte en excluant toute fictivité. Car si les critères mis en œuvre pour identifier une situation de coemploi ne recoupent pas totalement les éléments permettant de caractériser la « transparence » d’un employeur, la proximité des deux notions, qui se rejoignent en ce qu’elles impliquent la domination totale d’un tiers, paraît empêcher les salariés licenciés d’invoquer les effets d’un état de coemploi devant la juridiction du travail quand l’administration du travail ou son juge s’est prononcé, pour l’exclure, sur un grief pris du caractère fictif de la société qui les a licenciés, sachant  que l’autorité de la chose jugée d’une décision de la juridiction administrative s’étend aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif [8].   

II. Deuxième question : décision « atypique » du Dreets

Tout part d’un arrêt de la chambre sociale du 14 décembre 2022 [9], commenté par Frédéric Géa sous un titre révélateur des interrogations qu’il a suscitées [10].

Était en cause l’opinion exprimée par un inspecteur du travail et notifiée au CSE et aux délégués syndicaux, selon laquelle le projet de PSE qui lui était soumis ne constituait pas « l’outil juridique adéquat » les conditions requises par l’article L. 1233-61 du Code du travail N° Lexbase : L7291LHI (nombre des licenciements) n’étant pas remplies, s’agissant de projets de transfert des contrats de travail dans une autre structure.

Cette position a conduit l’employeur à renoncer à la demande de validation du PSE et des syndicats à demander au juge judiciaire d’ordonner l’interruption de la procédure en cours, en soutenant que l’opinion exprimée par l’administration du travail ne constituait qu’un simple avis, qui n’empêchait pas de saisir le juge du contrat de travail, pour faire constater la nullité des ruptures en l’absence d’un PSE nécessaire. Cependant, la décision d’incompétence de la cour d’appel n’a pas été cassée par la chambre sociale qui retient dans son arrêt qu’on était en présence d’une décision administrative faisant grief, intervenue dans le cadre des pouvoirs que l’article L. 1233-24-1 du Code du travail attribue à l’administration, de sorte que, faute de recours, cette décision s’imposait au juge judiciaire. Un rapprochement peut être fait avec un arrêt rendu en 2016 [11] relatif au licenciement des salariés protégés, où il a été jugé que le refus de l’inspecteur du travail de se prononcer sur une demande d’autorisation de licenciement en raison de l’absence de statut protecteur de l’intéressé constituait une décision faisant grief, de sorte qu’en cas de contestation sérieuse de sa légalité, le juge du contrat de travail devait surseoir à statuer jusqu’à ce que le juge administratif se soit prononcé sur cette exception d’illégalité.

Il convient de rappeler à cette occasion que, s’agissant des décisions prises par le Dreets au cours de l’instruction de la demande d’homologation ou de validation, l’article L. 1235-7-1 du Code du travail N° Lexbase : L0653IXH exclut tout recours distinct de celui dont peut faire l’objet la décision de validation ou d’homologation. Or, en l’occurrence, il n’y a pas de décision de cette nature, puisque la procédure s’est achevée par le retrait de la demande de validation. Faut-il alors considérer qu’on est en présence d’une décision de rejet du Dreets, mettant fin à la procédure ? Quel est le point de départ du délai du recours que voudrait former un salarié contre une telle « décision » ?

Un rapprochement peut être fait avec une autre situation soumise à la chambre sociale : celle dans laquelle, bien que les conditions exigées par le Code du travail (effectif de l’entreprise en l’occurrence) ne soient pas remplies, l’employeur établit un PSE (négocié en l’espèce) qu’il soumet à l’administration du travail et que celle-ci valide. Les salariés licenciés peuvent-ils se plaindre devant le juge prud’homal de discriminations contenues dans ce PSE, pour congé de fin de carrière qu’il prévoit, malgré cette décision de validation ? L’employeur opposait à cet égard que la décision de validation rendait la juridiction judiciaire incompétente. Mais un arrêt rendu par une formation restreinte [12] a admis la compétence judiciaire, considérant que la validation du PSE n’était pas légalement obligatoire et qu’on se trouvait en présence d’une application volontaire des dispositions sur les PSE, qui ne relevait pas du contrôle de l’administration du travail et ne pouvait faire obstacle à la compétence du juge prud’homal. Toutefois, on est en droit de se demander si, en ce cas, la décision de validation administrative ne devait pas faire l’objet d’un recours pour cesser de produire ses effets.

III. Troisième question : discrimination et égalité de traitement

Selon une jurisprudence sociale constante et ancienne, le principe de l’égalité de traitement est applicable aux PSE, de sorte qu’une différence de traitement entre des salariés qui se trouvent dans une situation comparable au regard d’un avantage prévu dans le PSE doit être justifiée par une raison objective, pertinente et non discriminatoire.

Trois arrêts peuvent être évoqués à ce propos : les deux premiers, interprétés a contrario, rendus le 29 juin 2017 et tous deux commentés au Rapport annuel de la Cour de cassation [13], qui écartent ce principe en raison d’une différence de situation à propos de PSE distincts et successifs ; et un arrêt du 23 octobre 2013, selon lequel une indemnité refusée à des salariés se trouvant dans la même situation que d'autres porte atteinte à l’égalité de traitement [14].

Mais pour le Conseil d’État, si le Dreets doit s’assurer de l’absence de discrimination illicite, il ne doit toutefois pas se prononcer au regard du principe d’égalité [15]. On observera toutefois que, dans cette affaire, le PSE avait été négocié et fait l’objet d’un accord majoritaire, de sorte qu’il est très probable qu’une atteinte à l’égalité de traitement n’aurait pu être valablement invoquée devant la juridiction du travail puisqu’en ce cas il existe une présomption de justification des différences, qui est difficilement contestable. Mais la question subsiste pour les PSE non négociés.

On peut alors considérer qu’en présence d’un PSE établi unilatéralement, un salarié privé d’une mesure que le plan (même homologué) attribue à d’autres se trouvant dans la même situation pourrait se plaindre de cette différence de traitement injustifiée devant le juge du travail, même en cas de décision d’homologation, puisque le contrôle du Dreets et du juge administratif ne porte pas sur ce point. Il pourrait ainsi revendiquer, dans un contentieux prud’homal, un avantage que le PSE lui refuse, sans que soit méconnue la séparation des pouvoirs.

IV. Quatrième question : prescription

Il faut rappeler qu’avant la loi du 14 juin 2013 N° Lexbase : L0394IXU, la loi du 18 janvier 2005 N° Lexbase : O0083ARI avait instauré deux délais abrégés de prescription des contestations des licenciements économiques :

  • un délai 12 mois pour l’action en contestation de la régularité ou de la validité du licenciement (au lieu de la jurisprudence antérieure appliquant le délai de droit commun de 5 années) ;
  • un délai de 15 jours pour les irrégularités affectant la procédure de consultation des IRP sur le projet de l’employeur.

La loi du 14 juin 2013 a fixé un seul délai de 12 mois pour toutes les contestations relatives à la régularité et la validité de la procédure de licenciement, à compter de la dernière réunion du CSE ou, pour les salariés, à compter de la notification du licenciement. L’ordonnance n° 2017-1387 N° Lexbase : L7629LGN a ensuite simplifié la rédaction de ce texte, en désignant « toute contestation portant sur le licenciement économique », mettant ainsi fin à une jurisprudence qui, en la matière, distinguait selon que la contestation du licenciement mettait en cause sa validité en raison d’un manquement aux obligations régissant le PSE, ou qu’elle portait sur la cause du licenciement.

Deux arrêts de la Chambre sociale rendus 2019 et 2020 conduisent à s’interroger sur l’application de ce délai de 12 mois, lorsque la procédure de vérification du PSE par le juge administratif s’achève par une décision d’annulation de l’homologation ou de la validation intervenant plus d’une année après la notification du licenciement, sachant qu’une telle décision d’annulation emporte des effets spécifiques et radicaux lorsqu’elle repose sur l’insuffisance des mesures contenues dans le PSE, savoir la nullité du licenciement et une obligation de réintégration, sauf en cas de procédure collective.  Dans ces deux arrêts, rendus dans des contextes différents, la Chambre sociale a retenu la même solution : le point de départ du délai de prescription reste toujours celui de la notification de la décision au salarié, peu important que la décision administrative d’annulation soit intervenue après l’expiration du délai annal. L’arrêt du 11 septembre 2019 [16] a été rendu dans un cas où la décision de validation du PSE avait été annulée par la cour administrative d’appel deux ans après la notification du licenciement, le pourvoi dirigé contre son arrêt étant ensuite rejeté par une décision rendue six mois avant l’introduction de l’instance.  Pour considérer que l’action en nullité du licenciement n’était pas prescrite, la cour d’appel avait jugé que le délai courait à partir de la dernière décision relative à l’annulation du PSE, en faisant référence aux articles 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC et L. 1471-1 du Code du travail N° Lexbase : L1453LKZ, qui font courir les délais de prescription à partir du jour où le demandeur a eu connaissance des faits qui lui permettent d’exercer son action. Mais cette motivation a été censurée en retenant comme point de départ la date de notification du licenciement. L’autre arrêt, du 8 juillet 2020 [17], réitère cette même position.

L’inconvénient de cette orientation rigoureuse c’est que, lorsque la procédure contentieuse relative au PSE, dure plus d’une année avant qu’une décision d’annulation ne soit prononcée – situation qui devrait toutefois rester exceptionnelle compte tenu des délais impératifs imposés aux juridictions administratives – le salarié ne peut plus faire valoir devant la juridiction du travail les conséquences de l’annulation sur son licenciement, notamment l’obligation de réintégration qui en résulte, si la nullité repose sur l’insuffisance des mesures contenues dans le plan homologué ou validé à tort.

Il ne lui est certes pas interdit d’agir avant de connaître l’issue de ce contentieux administratif, mais on peut difficilement lui imposer de fonder cette action anticipée sur une nullité de la décision d’homologation ou de validation qui n’a pas été prononcée lorsqu’il saisit la juridiction du travail. Il s’exposerait d’ailleurs en ce cas, si l’annulation espérée n’est pas retenue, au risque de devoir supporter les charges du procès, en application de l’article 700 du Code de procédure civile N° Lexbase : L5913MBM, voire des dommages-intérêts si son action était jugée téméraire et à ce titre abusive. Ne pourrait-il alors se prévaloir d’une atteinte excessive à son droit de soumettre ses prétentions au juge ?

D’autant que, même si la nullité du licenciement n’est pas encourue, en raison de la cause d’annulation de la décision administrative, la chambre sociale considère que cette annulation (fondée en l’occurrence sur le caractère non majoritaire de l‘accord) permet au salarié licencié de s’en  prévaloir – ce qu’il ne peut faire auparavant – pour demander sur le fondement de l’article L. 1235-16 du Code du travail N° Lexbase : L2151KGR, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors qu’il n’existait jusqu’alors aucune raison de former une telle demande si le motif économique n’était pas discutable [18].

On comprend bien que la brièveté du délai de contestation du licenciement est destinée à éviter les conséquences d’une remise en cause tardive de la rupture, surtout lorsqu’elle se traduit par une annulation du licenciement emportant obligation de réintégration, mais peut-on pour autant priver les salariés de la possibilité de tirer les conséquences de l’annulation sans les priver de leur droit de recours au juge ?

V. Question supplémentaire : PSE et L. 1224-1 du Code du travail

La loi « Travail » du 8 août 2016 N° Lexbase : L8436K9C, dans un article 94, a introduit une dérogation aux effets de l’article L. 1224-1 du Code du travail N° Lexbase : L0840H9Y destiné à favoriser, à l’occasion du contrôle administratif des PSE une restructuration de l’entreprise passant par la cession d’entités économiques emportant le maintien d’une partie seulement des emplois, afin d’éviter la fermeture d’un ou plusieurs établissements. Ce texte, intégré à l’article L. 1233-61 du Code du travail N° Lexbase : L7291LHI, prévoit expressément en ce cas qu’une partie des contrats de travail soit exclue des effets du transfert, le changement d’employeur ne s’opérant que « dans la limite du nombre des emplois qui n’ont pas été supprimés ». La rédaction de ce texte, sa portée et son efficacité réelle ont été discutées, toute comme sa conformité aux obligations issues de la Directive n° 2001/23 du 12 mars 2001 N° Lexbase : L8084AUX [19].

On ne s’intéressera ici qu’aux questions posées par le contrôle du Dreets sur ce type de disposition incluse dans un PSE, qui ne devrait pas être utilisé pour contourner les effets de l’article L. 1224-1 du Code du travail, afin de répondre aux exigences d’un repreneur, hors procédure collective.

La question principale porte sur le contrôle du lien causal qui doit exister entre le transfert partiel et le maintien d’une partie seulement des emplois afin d’assurer leur maintien à l’occasion de la cession de l’entreprise. L’article suivant [20] ajoute d’ailleurs aux mesures que peut prévoir le plan les actions favorisant la reprise de tout ou partie des « activités » en vue d’éviter la fermeture d’établissements (i.e., de limiter l’ampleur des licenciements), tandis que l’article L. 1233-57-19 N° Lexbase : L8630LGQ a été également modifié pour organiser à cet effet la consultation du CSE et l’harmoniser avec celle qui régit la recherche d’un repreneur. À cet égard si la CJUE, interprétant la directive, admet que le cessionnaire procède à des licenciements économiques pour des raisons économiques, techniques ou d’organisation, envisagées par l’article 4 de la Directive, elle prohibe, hors procédure collective, des licenciements décidés à l’occasion du transfert de l’entité économique à seule fin de satisfaire aux exigences d’un repreneur parce que ce genre d’arrangement méconnaît l’objectif de maintien des emplois. Un salarié licencié dans ce cadre dérogatoire pourrait donc se prévaloir d’un maintien de son emploi avec le cessionnaire, notamment si le PSE concerne un employeur investi de prérogatives de puissance publique puisque, dans ce cas, une non-conformité à la directive pourrait conduire à écarter cette dérogation légale. 


[1] Cass. soc., 25 novembre 2020, n° 18-13769, FP-P+R+I N° Lexbase : A551137A.

[2] Cass. soc., 22 novembre 2022, n° 20-23.206, FS-B N° Lexbase : A35968UQ.

[3] CE, 4e-5e ch. réunies, 17 octobre 2016, n° 386306, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6652R9A.

[4] CE, 1e-4e ch. réunies, 28 avril 2023, n° 453087, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A70159SM.

[5] CE, 1e-4e ch. réunies, 21 juillet 2023, n° 435896, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A08151C8.

[6] C. trav., art. L. 1233-57-4 N° Lexbase : L8638LGZ.

[7] P. Morvan, Restructurations et licenciements économiques, Lexisnexis, Actualité, 2013, p. 85.

[8] Cass. civ. 1, 15 juin 2016, n° 15-21.628, F-P+B N° Lexbase : A5452RT4.

[9]  Cass. soc., 14 décembre 2022 n° 21-14.304, FS-B N° Lexbase : A49528ZG.

[10] F. Géa, Trouble(s) dans la jurisprudence sur les PSE, RDT, 2/23.

[11]  Cass. soc., 19 mai 2016, n° 14-26.662, FS-P+B N° Lexbase : A0854RQP.

[12]  Cass. soc., 16 janvier 2019, n° 17-17.475, FS-D N° Lexbase : A6636YTX.

[13]  Cass. soc., 29 juin 2017, 2 arrêts, n° 16-12.024, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A1626WLS et n° 15-21.008, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A1625WLR.

[14] Cass. soc., 23 octobre 2013, n° 12-23.457, FS-P+B N° Lexbase : A4764KNR.

[15] CE, 1e-4e ch. réunies, 10 octobre 2018, n° 395280, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7732YE4.

[16]  Cass. soc., 11 septembre 2019, n° 18-18.414, FS-P+B N° Lexbase : A4772ZN3.

[17] Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 18-25.352, FS-P+B N° Lexbase : A11103RK.

[18] Cass. soc., 13 janvier 2021, n° 19-12.522, FS-P+I N° Lexbase : A23064CE.

[19] V. not. Frédéric Géa, Quand transférer rime avec liquider, RDT, 2016, p. 341.

[20] C. trav., art. L. 1233-62 N° Lexbase : L7290LHH.

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