Lexbase Pénal n°41 du 23 septembre 2021 : Droit pénal général

[Brèves] Exclusion de l'application immédiate de dispositions relatives à la prescription de l'action publique : conformité à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-926 QPC, du 9 septembre 2021 (N° Lexbase : A921543P)

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[Brèves] Exclusion de l'application immédiate de dispositions relatives à la prescription de l'action publique : conformité à la Constitution. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/72213331-brevesexclusiondelapplicationimmediatededispositionsrelativesalaprescriptiondelactionpu
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par Adélaïde Léon

le 21 Septembre 2021

► L’article d’une loi qui prévoit que ce texte ne peut avoir pour effet de prescrire des infractions qui, au moment de son entrée en vigueur, avaient valablement donné lieu à la mise en mouvement ou à l’exercice de l’action publique à une date à laquelle la prescription n’était pas acquise, organise l’application dans le temps de ladite loi et ne fixe pas de règle relative à la prescription de l’action publique ; cette disposition n’instituant ni une peine ni une sanction, le grief tiré de la méconnaissance du principe de rétroactivité de la loi pénale plus douce ne trouve pas à s’appliquer.

Rappel de la procédure. Le Conseil constitutionnel a été saisi par la Cour de cassation (Cass. crim., 2 juin 2021, n° 21-80.726, F-D N° Lexbase : A92544UB) d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité de l’article 4 de la loi n° 2017-242, du 27 février 2017, portant réforme de la prescription en matière pénale (N° Lexbase : L0288LDZ) lequel prévoit que la loi en question ne pouvait avoir pour effet de prescrire des infractions qui, au moment de son entrée en vigueur, avaient valablement donné lieu à la mise en mouvement ou à l’exercice de l’action publique à une date à laquelle, en vertu des dispositions législatives alors applicables et conformément à leur interprétation jurisprudentielle, la prescription n’était pas acquise.

Motifs de la requête. Il était fait grief à ces dispositions de faire obstacle à l’application immédiate de l’article 9-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L6211LLM) créé par ladite loi.

Cet article limitait le report du point de départ de la prescription de l’action publique des infractions occultes ou dissimulées. Si ce dernier court à compter du jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique, il ne peut toutefois excéder douze années révolues pour les délits et trente années révolues pour les crimes à compter du jour où l’infraction a été commise.

Les dispositions de l’article 4 auraient donc eu pour effet de méconnaître le principe de rétroactivité de la loi pénale plus douce (DDHC, art. 8 N° Lexbase : L1372A9P) et auraient permis que des poursuites perdurent pour des infractions anciennes et dont ni la nature ni la gravité ne le justifiait, méconnaissant ainsi des exigences relatives à la prescription de l’action publique (DDHC, art., 8 et 16 N° Lexbase : L1363A9D).

En prévoyant de telles dispositions transitoires, le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence et, alors que cette loi avait pour but de remédier à l’imprescriptibilité de faire des infractions occultes ou dissimulées, méconnu les principes de précisions, intelligibilité et accessibilité de la loi.

Enfin, le principe d’égalité n’aurait lui aussi pas été respecté puisque le texte permettait que de mêmes faits, commis à la même date, soient soumis à des règles de prescriptions différentes selon qu’ils avaient ou non fait l’objet de poursuites avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.

Décision. Le Conseil constitutionnel déclare conforme l’article 4 de la loi n° 2017-242, du 27 février 2017.

Selon le Conseil, il résultait des dispositions contestées que le nouveau régime de prescription ne s’appliquait pas aux infractions commises avant le 1er mars 2017, lorsqu’elles avaient valablement donné lieu à la mise en mouvement ou à l’exercice de l’action publique à une date à laquelle la prescription n’était pas acquise selon les dispositions législatives alors en vigueur. Les Sages jugent que ces dispositions n’instituent ni une infraction ni une peine, mais portent sur les règles relatives à la prescription de l’action publique. Le grief tiré de la méconnaissance du principe de rétroactivité de la loi pénale plus douce n’a donc pas vocation à leur être appliqué et est, de ce fait, écarté.

Le Conseil rappelle par ailleurs qu’il appartient au législateur de fixer les règles relatives à la prescription de l’action publique qui ne soient pas manifestement inadaptées à la nature ou à la gravité des infractions. Or, les dispositions en cause ont pour objet d’organiser l’application dans le temps de la loi du 27 février 2017, non de fixer des règles relatives à la prescription de l’action publique. Elles ne contreviennent donc pas, par leur nature, aux exigences relatives à la prescription de l’action publique lesquelles découlent des articles 8 (nécessité des peines) et 16 (garantie des droits) de la DDHC.

Jugeant que l’article 4 de la loi présentée ne méconnaît pas non plus le principe d’égalité devant la loi, le Conseil constitutionnel le déclare conforme à la Constitution.

Pour aller plus loin : v. Farah Safi, ÉTUDE : L'application de la loi pénale dans le temps, Les lois relatives à la prescription, in Droit pénal général, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E1430GA9).

 

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