Lexbase Affaires n°50 du 5 décembre 2002 : Droit financier

[Le point sur...] Le nouveau projet de directive sur les offres publiques

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par Anne Ollier, SGR - Droit boursier et financier

le 01 Octobre 2012

La Commission européenne a présenté le 2 octobre dernier, le nouveau projet de 13ème directive sur les offres publiques (N° Lexbase : X2787ABT). Cette directive, dont l'origine remonte à 1989, a toujours été considérée comme une étape essentielle dans l'intégration du marché européen des capitaux. Cependant, elle a été confrontée à une série de projets ayant tous échoués démontrant, ainsi, la difficile harmonisation du droit boursier, droit extrêmement sensible, auquel les Etats sont fortement attachés. Suite au dernier échec dû au vote négatif du Parlement européen le 4 juillet 2001 par 273 voix contre 273, M. Frits Bolkestein, commissaire chargé du marché intérieur, a mis en place un groupe de travail présidé par le professeur Jaap Winter. Ce groupe de travail était chargé de présenter de nouvelles recommandations. Le rapport a été présenté le 10 janvier 2002 et a considérablement influencé le nouveau projet.

Le rapport du Groupe de travail Jaap Winter

Il s'est axé essentiellement sur trois points correspondant aux trois questions auxquelles le groupe était chargé de répondre :

- L'égalité des conditions de jeu en matière d'offres publiques d'acquisition. Le groupe estime, que pour instaurer l'égalité des conditions, deux éléments sont indispensables. Le premier, est qu'en cas d'offres publiques d'acquisition, la décision finale doit appartenir aux actionnaires et le second, qu'il doit y avoir proportionnalité entre le capital supportant le risque ultime et le contrôle. Par cela, le groupe entend que : "seules les parts du capital social conférant au détenteur un droit illimité sur les bénéfices de la société ou sur sa valeur nette de liquidation doivent normalement lui conférer un droit de contrôle proportionnel au risque assumé. Les titulaires de ces droits illimités sur les bénéfices et sur l'actif net d'une société sont les mieux placés pour prendre les décisions affectant cette société, puisqu'ils supporteront les conséquences ultimes de leurs décision s". Cependant, ces deux points peuvent être soumis à des perturbations. C'est pourquoi, le groupe de travail a proposé un principe de neutralisation de ces mécanismes en cas d'offres publiques. Par ce principe de neutralité, dès lors que l'offrant a acquis au moins 75 % du capital supportant le risque ultime d'une société, les dispositions des statuts et autres documents constitutifs, contraires aux principes de la prise de décision par l'actionnaire et de proportionnalité entre participation au capital supportant le risque ultime et le contrôle, ne doivent plus s'appliquer. Mais, le groupe a prévu des exceptions à l'application de ce principe.
De plus, le groupe recommande que les sociétés cotées soient tenues de publier des informations complètes sur la structure de leur capital et celle de leur contrôle.

- Le prix équitable à payer en cas d'offre obligatoire. Le groupe estime que, si l'on veut garantir une protection adéquate des actionnaires minoritaires, il est crucial d'exiger de l'offrant qu'il propose un prix équitable en cas d'offre obligatoire. Les recommandations formulées par le groupe ont été suivies par le projet. Elles seront donc abordées dans la partie consacrée au projet de directive.

Le retrait obligatoire et le rachat obligatoire après une offre publique d'acquisition. Le groupe estime que les dispositifs du retrait obligatoire ainsi que du rachat obligatoire doivent être généralisés à l'ensemble des Etats membres. Le nouveau projet contient de nouvelles dispositions sur ce sujet.

Le projet de directive

Le nouveau projet de directive reprend les principes fondamentaux adoptés à l'unanimité par la précédente proposition et, y adjoint de nouvelles dispositions. Les principes repris sont les suivants :

- égalité de traitement pour tous les détenteurs de titres de la société visée qui se trouvent dans des situations identiques ;

- les personnes auxquelles l'offre est adressée doivent disposer des délais et des informations nécessaires pour leur permettre de prendre une décision suffisamment fondée à propos de l'offre ;

- l'organe d'administration ou de direction de la société visée doit agir dans l'intérêt de la société considérée dans son ensemble ;

- il est interdit de créer des faux marchés pour les titres de la société visée, de l'offrant ou de toute autre société concernée par l'offre ;

- les sociétés visées ne doivent pas être gênées dans la conduite de leurs affaires pendant une période plus longue que celle raisonnablement requise pour une offre d'achat de leurs titres.

Quant aux nouvelles dispositions, elles visent, notamment, à renforcer la sécurité juridique des opérations d'offres publiques d'acquisition et à assurer la protection des actionnaires minoritaires lors de telles opérations. Ainsi, ce nouveau projet innove dans quatre domaines. En premier lieu, il instaure un droit de retrait obligatoire (squeeze out) qui confère à l'actionnaire majoritaire d'une société le droit d'exiger des actionnaires minoritaires de cette société la vente de leurs titres à un prix approprié. Et, inversement, ce projet contient un dispositif de rachat obligatoire (sell-out) qui donne à tout actionnaire minoritaire le droit de contraindre l'actionnaire majoritaire à lui racheter sa participation à un prix approprié.

La proposition détermine également les modalités de fixation du prix à payer en cas d'offre obligatoire. Est considéré comme équitable, le prix le plus élevé payé pour les mêmes titres par l'offrant, pendant une période de six à douze mois précédant l'offre.

Le troisième domaine, concerne les règles proposées afin d'assurer l'égalité des conditions de jeu. En vue d'améliorer la transparence et la publicité, les sociétés seront tenues de publier dans leur rapport annuel des informations complètes sur la structure de leur capital et celle de leur contrôle. Pour supprimer les obstacles illicites au transfert de titres, une fois l'offre publiée, aucune restriction à un tel transfert inscrite dans les statuts ou dans des conventions contractuelles ne pourra être opposée à l'auteur de l'OPA durant la période autorisée pour l'acceptation de l'offre. Consciente de l'évolution incessante des marchés, la directive a prévu une clause de révision : cinq ans après son entrée en vigueur, la Commission proposera, si nécessaire, de modifier les dispositions relatives à l'égalité des conditions de jeu.

Enfin, concernant la protection des salariés, il n'est pas rajouté de nouvelles obligations par rapport au dernier projet. Mais, la proposition indique expressément qu'il y a lieu d'appliquer les différentes dispositions communautaires en la matière comme la directive 94/45/CE (N° Lexbase : L9997AUS) concernant les comités d'entreprises européens, la directive 98/59/CE (N° Lexbase : L8165AUX) sur les licenciements collectifs et la directive 2002/14/CE (N° Lexbase : L7543A8U) relative à l'information et la consultation des salariés.

Selon M. Frits Bolkestein, Commissaire chargé du marché intérieur : "cette nouvelle proposition apporte des réponses concrètes au Parlement européen qui, l'année dernière, avait rejeté la précédente proposition". Et il déclare "être profondément convaincu que cette proposition a maintenant tous les atouts pour une adoption rapide par le Conseil et le Parlement. C'est une proposition équilibrée et raisonnable, qui évite l'écueil des positions extrêmes qui auraient pu l'envoyer dans l'Enfer de Dante sans porte de sortie".

Après plus de treize ans de gestation, la directive relative aux OPA semble être en phase terminale même si, selon certains, des difficultés futures risquent de surgir quant aux règles concernant l'égalité des conditions de jeu.

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