Réf. : Ass. plén., 23 octobre 2015, n° 13-25.279, P+B+R+I (N° Lexbase : A8615NTA)
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N9927BU9
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par Sébastien Tournaux, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux
le 11 Novembre 2015
Résumé
Les dispositions de l'article 3 de l'avenant "Mensuels" du 2 mai 1979 à la Convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne (N° Lexbase : X0668AEH) ne confèrent pas au lieu de travail un caractère contractuel et signifient seulement qu'en cas de non-acceptation par le salarié de la modification envisagée du lieu de travail, l'employeur qui n'entend pas renoncer à la modification doit prendre l'initiative de la rupture du contrat de travail en engageant une procédure de licenciement. Le refus de la modification du lieu de travail par les salariés, pour la justification duquel aucune raison légitime n'était avancée, caractérisait une faute grave rendant impossible la poursuite de leur relation contractuelle de travail. |
Commentaire
I - L'affaire
Les faits. Conformément aux indications portées par leurs contrats de travail, trois salariés étaient employés au sein d'un établissement situé à Rungis. En raison d'une restructuration interne de l'entreprise, l'employeur les informa de leur mutation dans des locaux situés dans le 8ème arrondissement de Paris, tout en respectant un délai de prévenance qui semblait suffisant.
Considérant qu'il s'agissait d'une modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail, les salariés refusèrent la modification de lieu de travail. Ils continuèrent à se présenter de manière systématique à l'établissement de Rungis. Face à cette attitude, l'employeur licencia les salariés pour faute grave.
Les règles applicables. Si on laisse pour le moment de côté les règles prétoriennes applicables au lieu de travail, on peut immédiatement constater, dans cette affaire, que les contrats de travail des salariés et le statut collectif applicable à l'entreprise paraissaient à première vue contradictoires.
D'un côté, en effet, les contrats de travail comportaient chacun une clause de mobilité dont la zone géographique d'effet était limitée à la région parisienne, cela en indiquant que le lieu de travail initial était situé à Rungis.
D'un autre côté, l'article 3 de l'avenant "Mensuels" du 2 mai 1979 à la Convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne, comporte des dispositions intéressant le lieu de travail.
Ainsi, le texte dispose que l'engagement d'un salarié doit être confirmé à l'issue de la période d'essai par une lettre stipulant notamment "l'établissement dans lequel cet emploi doit être exercé". Le texte poursuit surtout en prévoyant que "toute modification de caractère individuel apportée à un des éléments ci-dessus fera préalablement l'objet d'une nouvelle notification écrite" et que "dans le cas où cette modification ne serait pas acceptée par l'intéressé, elle sera considérée comme une rupture de contrat de travail du fait de l'employeur et réglée comme telle".
La procédure. Déboutés en première instance de leurs demandes visant à contester les licenciements, les salariés interjetèrent appel devant la cour de Paris qui confirma le jugement prud'homal, en décidant que l'article 3 de l'accord n'avait pas "pour effet de conférer automatiquement au lieu de travail un caractère contractuel ni de statuer par avance sur le bien-fondé du licenciement consécutif au refus du salarié".
Cette décision fut cassée par la Chambre sociale de la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 26 septembre 2012 (1) qui jugea que les stipulations du contrat de travail n'étaient pas plus favorables que celles de l'accord collectif, alors que les salariés "n'avaient pas accepté de modification de l'établissement où ils exerçaient leur emploi, ce dont il résult[ait] que la rupture du contrat était imputable à l'employeur".
La cour d'appel de Paris, à nouveau saisie, résista à la position de la Chambre sociale, en considérant que l'accord collectif n'avait pas pour effet de contractualiser le lieu de travail des salariés et que leurs refus d'une modification du lieu de travail, pourtant prévue par la clause de mobilité, constituaient des fautes dont la gravité résultait de l'obstruction systématique à laquelle ils s'étaient livrés (2).
La solution. Les salariés formèrent un nouveau pourvoi afin de voir fixée la doctrine de la Cour de cassation, et la Chambre sociale décida de renvoyer l'affaire devant l'Assemblée plénière de la Cour de cassation.
Par un arrêt rendu le 23 octobre 2015, l'Assemblée plénière contredit la solution rendue par la Chambre sociale en 2012 et rejette donc le pourvoi formé contre le second arrêt de la cour d'appel de Paris dont elle avalise le raisonnement, en jugeant que les dispositions conventionnelles "ne confèrent pas au lieu de travail un caractère contractuel et signifient seulement qu'en cas de non-acceptation par le salarié de la modification envisagée du lieu de travail, l'employeur qui n'entend pas renoncer à la modification doit prendre l'initiative de la rupture du contrat de travail en engageant une procédure de licenciement".
S'agissant de la qualification de faute grave, l'Assemblée plénière ajoute que l'attitude d'obstruction systématique des salariés malgré le respect par l'employeur d'un délai de prévenance suffisant permettait à la cour d'appel de considérer que "leurs refus, pour la justification duquel aucune raison légitime n'était avancée, caractérisait une faute grave rendant impossible la poursuite de leur relation contractuelle de travail".
Premiers éléments. La décision rendue par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation doit être analysée sous deux aspects.
Elle présente, d'abord, l'intérêt de permettre de faire le point sur l'influence des multiples sources du droit du travail sur la détermination du lieu de travail du salarié. Le travail d'articulation entre les contrats de travail et l'accord collectif était rendu d'autant plus délicat que les formules employées par l'accord collectif n'étaient pas d'une grande clarté et devaient, par conséquent, être interprétées par le juge.
L'interprétation aboutissant, ensuite, à atténuer les effets de l'accord collectif sur la détermination du lieu de travail, c'est une analyse plus classique du caractère fautif du refus d'un changement des conditions de travail qui devait être menée.
II - L'interprétation téléologique de l'accord collectif de travail
Le contrat de travail, siège naturel des règles encadrant le lieu de travail. Le lieu de travail du salarié constitue l'un des éléments de la relation de travail qui peut, selon les cas, relever du domaine du contrat de travail ou des simples conditions de travail.
Le lieu de travail est un élément du contrat de travail, d'abord, lorsque les parties ont stipulé une clause de sédentarité, c'est-à-dire une clause prévoyant expressément, de manière claire et précise, que le lieu de travail est contractualisé. Cette situation est exceptionnelle puisque, depuis la fin du XXème siècle (3), la jurisprudence considère qu'à défaut d'une telle clause précise, l'employeur est libre de modifier le lieu de travail du salarié, à condition que celui-ci reste situé dans une même zone géographique. L'indication du lieu de travail dans le contrat de travail, sans contractualisation expresse, ne constitue qu'une clause informative (4).
Ensuite, lorsque le lieu de travail indiqué au contrat n'a que valeur informative, c'est le secteur géographique de travail dans lequel est situé ce lieu de travail initial qui fait figure d'élément essentiel du contrat de travail et que l'employeur ne peut modifier unilatéralement. La taille du secteur géographique et, par conséquent, les limites du pouvoir de l'employeur en la matière, doit être appréciée de manière objective en fonction de la distance géographique entre les deux lieux de travail, des moyens de transport et de communication à la disposition du salarié, etc. (5). Le changement de lieu de travail à l'intérieur des limites de ce secteur géographique est un simple changement des conditions de travail.
Enfin, la taille de ce secteur géographique peut être modifiée par le jeu d'une clause de mobilité qui l'étendra aux seules conditions que le secteur géographique envisagé soit précisément délimité (6) et que l'employeur ne se réserve pas le droit, par la clause, d'en modifier unilatéralement les frontières (7).
Ces règles peuvent toutefois être perturbées par des dispositions conventionnelles portant elles aussi sur le lieu de travail
L'influence de l'accord collectif sur le lieu de travail. Sans aucun doute, le lieu de travail des salariés de l'entreprise ou de la branche peut faire l'objet de dispositions conventionnelles. D'abord, parce que ces questions relèvent bien du domaine de la négociation collective, ensuite parce que l'article L. 2254-1 du Code du travail (N° Lexbase : L2417H9E) règle l'éventuel conflit qui peut survenir entre les dispositions conventionnelles et le contrat de travail, socle naturel des règles relatives au lieu de travail. Ainsi, les clauses conventionnelles "s'appliquent aux contrats de travail conclus [...] sauf stipulations plus favorables".
Il est, par exemple, permis aux partenaires sociaux de prévoir que les salariés placés dans son champ d'application seront soumis à une clause de mobilité, à la condition qu'ils soient informés, au moment de l'embauche, de l'existence de l'accord collectif, et qu'ils soient mis en mesure d'en prendre connaissance (8).
A l'inverse, certains accords collectifs peuvent durcir le régime juridique du lieu de travail en prévoyant clairement que le lieu de travail stipulé dans le contrat de travail aura valeur contractuelle et ne pourra donc être modifié, même dans les limites de la zone géographique de travail. De telles dispositions sont toutefois bien rares, et l'on trouve plus fréquemment des textes alambiqués qui ne prévoient pas clairement que le lieu de travail est contractualisé mais semblent offrir au salarié le droit de refuser la modification (9).
Les difficultés ne proviennent pas du domaine conventionnel mais de la manière dont les textes sont rédigés par les partenaires sociaux.
L'interprétation des dispositions conventionnelles. Comme Madame Depommier le rappelle parfaitement dans le rapport joint à l'arrêt (10), les dispositions conventionnelles sont souvent susceptibles de multiples interprétations. Cela était le cas en l'espèce puisque les partenaires sociaux se sont abstenus de disposer clairement que le lieu de travail était un élément du contrat de travail ou que l'accord du salarié était obligatoire.
Certains termes de l'article 3 de l'accord laissaient penser que le lieu de travail était contractualisé. Ainsi, par exemple, la référence à une "modification de caractère individuel" fait spontanément penser à une modification d'un élément essentiel du contrat de travail, tout comme l'éventualité que la modification ne soit pas "acceptée par l'intéressé", ce qui laisse entendre que le salarié aurait la faculté de refuser la modification.
D'autres, au contraire, incitent à penser que le lieu de travail n'est pas contractualisé. Comme en cas de refus d'un changement des conditions de travail, le refus de la modification sera considéré comme une rupture du fait de l'employeur (11), c'est-à-dire à l'initiative de l'employeur par un licenciement. L'exigence que le lieu de travail soit indiqué au salarié, dans la lettre d'engagement ou par écrit au moment du changement de lieu évoque elle aussi le caractère informatif de la clause du contrat de travail.
Les règles d'interprétation d'un accord collectif de travail sont globalement calquées sur les méthodes d'interprétation de la loi. C'est d'abord la lettre du texte qui doit être analysée, dans une approche exégétique. Si cette approche est infructueuse, en particulier s'agissant de textes dont on peine à identifier l'intention exacte de ses rédacteurs, l'interprète peut adopter l'analyse retenue pour une disposition législative portant sur le même objet ou, en dernier recours, s'engager dans la voie d'une interprétation téléologique (12).
Le choix d'une interprétation téléologique. Confrontée à une disposition conventionnelle ambiguë en matière de lieu de travail, la Chambre sociale de la Cour de cassation a souvent considéré que l'accord contractualisait le lieu de travail, qu'il était donc plus favorable que le contrat de travail, et que ses dispositions s'imposaient à l'employeur, comme cela fut d'ailleurs le cas dans la première décision rendue par la Chambre sociale, en 2012, sur cette affaire (13).
Ce raisonnement pouvait toutefois sembler anachronique (14). En effet, les accords collectifs prévoyant des dispositions similaires à celles de l'article 3 de l'accord en cause avaient pour objectif de paralyser les effets de la jurisprudence relative à la modification du contrat de travail avant 1987. On se souviendra qu'à cette époque, le salarié qui refusait une modification de son contrat de travail était considéré comme démissionnaire, que la modification soit ou non substantielle. En renversant le principe et en imputant la rupture à l'employeur, ces accords faisaient une application de la jurisprudence "Raquin" avant l'heure.
Or, la jurisprudence a évolué et la rupture suivant une modification refusée est désormais toujours imputable à l'employeur, celui-ci conservant la possibilité de démontrer l'existence d'une cause réelle et sérieuse. Dans ce nouveau contexte juridique, l'article 3 de l'accord collectif était privé de but. Lui trouver une nouvelle raison d'être allait bien au-delà des fonctions d'interprétation du juge.
Un reniement de la lettre de l'accord collectif. Si l'on comprend parfaitement cette argumentation, il n'est pas possible d'ignorer totalement que le texte n'a pas seulement de l'importance s'agissant des effets du refus d'une modification ou d'un changement des conditions de travail.
L'emploi, à plusieurs reprises, du terme "modification" par le texte, peine à convaincre d'une volonté de contractualisation du lieu de travail, car il a été rédigé à une époque où la distinction entre modification du contrat de travail et changement des conditions de travail n'existait pas.
En revanche, la référence à une modification qui "ne serait pas acceptée" par l'intéressé suscite davantage l'interrogation. Pour que le salarié puisse ne pas accepter une modification, il faut qu'un droit au refus lui soit ouvert. Prévoir l'hypothèse d'un refus pouvait tout aussi bien être interprété comme manifestant le droit au refus et donc la qualification contractuelle. Le droit de refuser va de pair avec le refoulement de la modification unilatérale du contrat de travail, sans s'intéresser encore au régime juridique de la rupture du contrat de travail qui s'ensuivra.
Comment l'accord collectif peut-il évoquer l'hypothèse de non-acceptation par le salarié et, dans le même temps, le juge conclure que le lieu de travail n'est pas contractualisé, qu'il peut donc être modifié librement par l'employeur -dans les limites du secteur géographique- sans que le salarié ait le droit de s'y opposer ? A titre de comparaison, le changement des conditions de travail ne peut être refusé par le salarié, ce refus est illicite, et c'est précisément pour cela qu'il justifie un licenciement pour motif disciplinaire.
Les signes d'une interprétation opportuniste. L'interprétation du texte aurait pu être dédoublée. En considérant, d'une part, que la faculté de refuser, offerte clairement par le texte, avait pour conséquence une contractualisation du lieu de travail. En concluant, d'autre part, que le régime du refus, l'imputation de la rupture à l'employeur, n'avait plus véritablement d'objet depuis l'introduction de la jurisprudence "Raquin". Le régime conventionnel aurait alors été interprété comme la conséquence logique de tout refus par le salarié d'une modification du contrat de travail : l'employeur peut prendre la responsabilité de le licencier, le licenciement sera justifié à condition que la proposition de modification ait elle-même reposé sur une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Malgré l'argument historique avancé par l'avocat général et le rapporteur, l'interprétation menée par la Cour de cassation entend finalement s'inscrire dans un mouvement plus général du droit du travail de promotion de la mobilité. La fin du XXème siècle a vu le développement des clauses de mobilité et la rétrogradation des clauses du contrat de travail relatives au lieu de travail en simples clauses informatives. Le début du XXIème siècle a vu encore se développer toutes sortes de mobilités, par les accords de mobilité qui peuvent imposer une mobilité au salarié, nonobstant la rédaction de leur contrat de travail, par l'invention des périodes de mobilité volontaire sécurisée. Et l'on parle déjà, pour demain, du nomadisme professionnel.
Voilà une bien curieuse volte-face du droit français qui, pendant cent cinquante ans, a cherché à sédentariser la main-d'oeuvre, pour finalement, aujourd'hui, promouvoir la mobilité tous azimuts.
Une fois admis que l'accord collectif n'avait pas pour effet de contractualiser le lieu de travail, la qualification des faits fautifs répondait à une démarche beaucoup plus classique.
III - L'appréciation classique de l'existence d'une faute grave
L'analyse de l'appréciation de la faute du salarié en cas de refus du changement de lieu de travail ne mérite qu'une attention moindre.
La Chambre sociale de la Cour de cassation juge de manière constante que le refus d'un salarié de changer de lieu de travail dans un même secteur géographique est constitutif d'une faute professionnelle (15). Pour autant, ce manquement ne suffit pas, "à lui seul", à qualifier une faute grave (16), quand bien même une clause de mobilité aurait été stipulée au contrat (17). Le contrôle léger de la qualification de faute grave par la Chambre sociale (18) lui permet de préciser que l'ancienneté, les antécédents disciplinaires, le niveau de responsabilité, les fonctions exercées, l'attitude de l'employeur pouvant expliquer la faute ou encore les circonstances particulières entourant le manquement, peuvent influer sur la qualification de faute grave.
Il faut donc un élément aggravant, s'ajoutant au refus, pour que le manquement soit qualifié de faute grave. C'est à cette fin que la Chambre sociale met en exergue le respect par l'employeur d'un "délai de prévenance suffisant" et l'attitude persistante d'obstruction des salariés qui ont continué à se présenter de "manière systématique" sur leur ancien lieu de travail (19). La Chambre sociale en conclut qu'aucune "raison légitime" ne pouvait excuser le refus et permettre de ne retenir qu'une faute sérieuse.
Les deux premiers arguments ne surprennent pas puisqu'ils peuvent être perçus comme des éléments supplémentaires venant aggraver le comportement des salariés (20). La conclusion tirée est plus surprenante, parce qu'elle semble exiger du salarié qu'il justifie d'une raison légitime pour obtenir l'allègement de la qualification en faute sérieuse.
Etonnant, d'abord, parce que la charge de la preuve de la gravité de la faute repose sur les épaules de l'employeur, même s'il est vrai que la pratique judiciaire du débat probatoire s'apparente davantage à un dialogue qu'à un monologue.
Intriguant, ensuite, car il ressort de cette approche une sorte de renversement du raisonnement. Au lieu de considérer que la faute est sérieuse et que, si un élément s'y ajoute, elle pourra être qualifiée de faute grave, l'exigence d'une raison légitime laisse penser que la qualification spontanée est une faute grave qui pourrait être excusée en cas de raison légitime.
A la réflexion toutefois, il ne s'agit là que d'une illustration du caractère très pragmatique et empirique du processus de qualification de la faute grave. La Chambre sociale ne raisonne pas ici sur deux, mais sur trois temps : le manquement, à lui seul, n'est pas une faute grave ; les circonstances aggravantes permettent de qualifier la faute grave ; cette qualification pourrait tomber si des raisons légitimes justifiaient les comportements fautifs ou aggravants du salarié.
Pour conclure, on peut enfin penser que la "raison légitime" exigée par la Chambre sociale aurait pu être identifiée. D'abord, en raison de l'ambiguïté de la disposition conventionnelle dont on a vu qu'elle était susceptible de plusieurs interprétations. Ensuite, en raison de la position constante de la Chambre sociale de la Cour de cassation interprétant jusqu'ici ces dispositions comme ayant pour effet de contractualiser le lieu de travail. S'il n'y a, certes, pas de droit acquis à une jurisprudence constante (21), le refus des salariés aurait parfaitement pu être analysé comme une erreur de droit dont on peine à croire qu'il ne s'agisse pas alors d'une raison légitime de refuser la modification.
(1) Cass. soc., 26 septembre 2012, n° 11-20.452, F-D (N° Lexbase : A5981ITP).
(2) CA Paris, 11 septembre 2013, Pôle 6, 9ème ch., 11 septembre 2013, n° 12/10306 (N° Lexbase : A9557KK8).
(3) Cass. soc., 16 décembre 1998, n° 96-40.227 (N° Lexbase : A4538AG8) ; Dr. soc., 1999, p. 566, note Ph. Waquet ; Cass. soc., 4 mai 1999, n° 97-40.576 (N° Lexbase : A4696AGZ) ; Les grands arrêts du droit du travail, 4ème éd., D., 2008, n° 51.
(4) Cass. soc., 3 juin 2003, n° 01-40.376, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A6993CK9) ; Dr. soc., 2003, p. 884, obs. J. Savatier.
(5) V. Ph. Waquet, Le renouveau du contrat de travail, RJS, 1999, p. 383.
(6) Cass. soc., 12 juillet 2006, n° 04-45.396, F-P+B (N° Lexbase : A4407DQB) et nos obs., La précision de la zone géographique de la clause de mobilité : principe et sanction, Lexbase Hebdo n° 227 du 14 septembre 2006 - édition sociale (N° Lexbase : N2633AL4).
(7) Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-45.846, FS-P+B (N° Lexbase : A9457DPX) et les obs. de G. Auzero, La clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application, Lexbase Hebdo n° 221 du 29 juin 2006 - édition sociale N° Lexbase : N0070AL8).
(8) Cass. soc., 27 juin 2002, n° 00-42.646 (N° Lexbase : A0076AZT).
(9) V. les exemples cités par Madame J. Depommier, rapport, pp. 21-23.
(10) Ibid..
(11) Une interprétation plus causaliste pourrait être retenue en considérant qu'il n'est pas seulement ici question d'initiative mais d'imputabilité de la rupture, auquel cas d'ailleurs ces termes rapprocheraient le texte d'une approche contractualiste.
(12) J.-Y. Frouin, L'interprétation des conventions et accords collectifs de travail, RJS, 3/96, p. 137 ; M.-L. Morin, Le dualisme de la négociation collective à l'épreuve des réformes : validité et loyauté de la négociation, application et interprétation de l'accord, Dr. soc., 2008, p. 24.
(13) En se limitant aux décisions rendues après l'élaboration de la distinction entre modification du contrat de travail et changement des conditions de travail, v. par ex. Cass. soc., 4 février 2003, n° 01-40.384, F-P (N° Lexbase : A9035A4E) ; Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-45.388, F-D (N° Lexbase : A8551DPE) ; Cass. soc., 18 octobre 2006, n° 05-42.558, F-D (N° Lexbase : A2111DSY) ; Cass. soc., 19 septembre 2013, n° 11-28.657, F-D (N° Lexbase : A4938KLH).
(14) V. en ce sens J. Depommier, préc. ; v. également l'avis de l'avocat général Madame C. Courcol-Bouchard.
(15) Cass. soc., 24 juin 1992, n° 88-44.805 (N° Lexbase : A9343AAB) ; Cass. soc., 25 juin 1992, n° 88-42.498 (N° Lexbase : A1540AAB).
(16) Cass. soc., 23 février 2005, n° 03-42.018, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A8789DGM) ; Cass. soc., 11 mai 2005, n° 03-41.753, F-P+B (N° Lexbase : A2319DIQ) ; Cass. soc., 12 mai 2015, n° 14-10.408, F-D (N° Lexbase : A8613NHH).
(17) Cass. soc., 23 janvier 2008, n° 07-40.522, FS-P+B+R (N° Lexbase : A1079D4Q).
(18) Cass. soc., 30 novembre 2010, n° 08-43.499, FS-P+B (N° Lexbase : A6257GMP) et nos obs., Le contrôle de la qualification de faute grave : refus de la modification du lieu de travail et propos désobligeants du salarié, Lexbase Hebdo n° 422 du 6 janvier 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N0336BRU).
(19) Pour une illustration récente, v. Cass. soc., 24 juin 2015, n° 13-25.522, FS-P+B (N° Lexbase : A9797NLG) et les obs. de Ch. Radé, L'obligation pour le salarié en fin de détachement de réintégrer son poste d'origine, Lexbase Hebdo n° 620 du 9 juillet 2015 - édition sociale (N° Lexbase : N8291BUM).
(20) Quoique l'on pourrait discuter avec Madame Courcol-Bouchard, préc., p. 22, de l'obstination des salariés à refuser le changement du lieu de travail, qui pourrait être vue comme une simple manifestation du refus et du fait de se présenter sur l'ancien lieu de travail étant destiné à éviter de se voir reprocher un abandon de poste.
(21) Cass. soc., 22 septembre 2010, n° 09-40.968, FS-P+B+R (N° Lexbase : A2304GAL).
Décision
Ass. plén., 23 octobre 2015, n° 13-25.279, P+B+R+I (N° Lexbase : A8615NTA). Rejet (CA Paris, 11 septembre 2013, Pôle 6, 9ème ch., 11 septembre 2013, n° 12/10306 N° Lexbase : A9557KK8, statuant sur renvoi après cassation, Cass. soc., 26 septembre 2012, n° 11-20.452, F-D N° Lexbase : A5981ITP). Textes concernés : Avenant "Mensuels" du 2 mai 1979 à la Convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne, art. 3 (N° Lexbase : X0668AEH). Mots-clés : lieu de travail ; contrat de travail ; accord collectif de travail ; licenciement disciplinaire. Lien base : (N° Lexbase : E2290ETY). |
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