Lexbase Social n°623 du 3 septembre 2015 : Temps de travail

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives au repos dominical et au travail en soirée

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

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N8671BUP

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par Sébastien Tournaux, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

le 07 Septembre 2015

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC), apporte de sensibles modifications aux dérogations au repos dominical et, dans une moindre mesure, au régime du travail de nuit. La loi semble en permanence chercher un équilibre entre l'assouplissement des conditions des dérogations d'une part, le développement de contreparties pour les salariés concernés, d'autre part. L'exigence d'un accord collectif préalable prévoyant des contreparties et le volontariat des salariés concernés sont, ainsi, quasiment généralisés aux dérogations temporaires. Dans le même temps, les dérogations géographiques sont simplifiées et le nombre de dimanches concernés par les dérogations municipales est augmenté. A la marge, la loi apporte quelques modifications aux dérogations bénéficiant de droit aux commerces alimentaires et aux procédures préfectorales de dérogation ou de fermeture des établissements le dimanche. Les dispositions législatives apportent des modifications aux dérogations préfectorales (I), aux dérogations accordées sur un fondement géographique (II) et aux dérogations accordées par les municipalités (III).
Commentaire

I - Dérogations préfectorales aux règles relatives au repos dominical ou hebdomadaire

A - Dérogation au repos dominical

1 - Durée de la dérogation

Lorsque le repos simultané de tous les salariés d'un établissement le dimanche est préjudiciable au public ou compromet le fonctionnement normal de l'établissement, le préfet peut, en application de l'article L. 3132-20 du Code du travail (N° Lexbase : L0473H9E), autoriser que le repos soit pris un autre jour que le dimanche, du dimanche midi au lundi à midi, le seul dimanche après-midi avec un repos compensateur d'une journée par quinzaine ou par roulement, à tout ou partie des salariés.

Cette dérogation préfectorale a toujours été considérée comme une dérogation temporaire. L'article L. 3132-21 du Code du travail (N° Lexbase : L0474H9G) disposait, avant la loi du 10 août 2009 (1), que cette dérogation était accordée pour "une durée limitée", limitation que la loi avait déplacé à l'article L. 3132-25-4, alinéa premier (N° Lexbase : L6308IED). En outre, la dérogation préfectorale prenait place dans un paragraphe 3 intitulé "Dérogations temporaires au repos dominical", ce titre étant modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour viser désormais les "autres dérogations au repos dominical".

L'article 241 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 réaffirme clairement le caractère temporaire de la dérogation préfectorale et fixe la durée maximale de celle-ci. L'article L. 3132-21 du Code du travail (N° Lexbase : L2083KGA) prévoit, désormais, que les autorisations ne peuvent être accordées que pour une durée qui ne peut excéder trois ans. La durée de trois années n'a pas été choisie par hasard puisque le Conseil d'Etat avait jugé qu'il s'agissait d'un délai suffisant alors que le texte n'exigeait qu'une durée limitée (2). Le maintien du caractère temporaire de l'autorisation était nécessaire. Il permet, en effet, de mesurer si les conditions exigées par l'article L. 3132-20 du Code du travail (fermeture préjudiciable au public ou au fonctionnement normal de l'établissement) sont toujours réunies après l'écoulement d'un certain temps, ce qui peut parfaitement ne plus être le cas.

2 - Procédure d'autorisation préfectorale

Avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, la procédure préalable à l'arrêté préfectoral d'autorisation était établie par l'article L. 3132-25-4 du Code du travail (N° Lexbase : L6308IED). En particulier, l'autorisation devait être précédée d'un avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie, de la chambre des métiers et des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés de la commune.

Cette procédure n'est que très légèrement remaniée. Par mesure de simplification, le texte qui l'encadre quitte le giron des dispositions relatives aux dérogations de nature géographique pour être placé à l'article L. 3132-21 du Code du travail. Aux différents organismes déjà consultés est ajouté l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunal, à la condition que celui-ci bénéficie d'une fiscalité propre.

La plus importante innovation réside dans l'exemption de ces avis en "cas d'urgence dûment justifiée" et lorsque la dérogation n'excède pas trois dimanches. Cette mesure s'ajoute à celle existant déjà en cas d'urgence et qui permet de supprimer temporairement le repos hebdomadaire des salariés d'un établissement (3). L'urgence permet donc, d'une part, de suspendre le repos hebdomadaire pour le personnel concerné, d'autre part de demander au préfet une autorisation de faire travailler le personnel de l'entreprise le dimanche sans que l'autorité administrative soit contrainte de recueillir les avis habituels.

Ces deux mesures sont plus complémentaires que concurrentes. Ainsi, la suspension du repos hebdomadaire répond à des conditions d'urgence plus strictes que l'exemption d'avis permettant au préfet d'autoriser le travail dominical pendant trois dimanches au plus (4). En outre, il convient de bien comprendre que l'urgence ne justifie pas, à elle seule, la dérogation au repos dominical, mais dispense seulement le préfet des habituelles demandes d'avis préalables. Cela a pour effet d'accélérer la procédure mais ne modifie en rien les conditions de fond de l'autorisation préfectorale qui ne peut être délivrée qu'en cas de préjudice au public ou de compromission du fonctionnement normal de l'établissement (5).

B - Arrêtés préfectoraux de fermeture

S'agissant toujours des prérogatives préfectorales en matière de repos hebdomadaire, l'article 255 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ajoute un nouvel alinéa à l'article L. 3132-29 du Code du travail (N° Lexbase : L2094KGN), relatif aux arrêtés préfectoraux de fermeture hebdomadaire.

Rappelons que ce texte permet au préfet, si un accord est intervenu entre organisations patronales et syndicales, d'ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la zone géographique concernée pendant toute la durée du repos hebdomadaire. Le nouvel alinéa prévoit qu'à la demande des organisations syndicales représentatives des salariés ou des employeurs d'une zone géographique concernée, lorsqu'elles expriment la volonté de la majorité des membres de la profession, le préfet abroge l'arrêté de fermeture.

L'ajout de cette faculté d'abrogation à la demande des membres de la profession légalise un procédé qui était déjà admis par la jurisprudence administrative (6). C'est, d'ailleurs, précisément parce que le préfet avait la faculté de réviser ou d'abroger l'arrêté à tout moment et qu'il était contraint de le faire si la majorité des intéressés le lui demandait que le Conseil constitutionnel a considéré que l'atteinte à la liberté d'entreprendre portée par l'article L. 3132-29 du Code du travail restait proportionnée (7).

Le nouveau texte répond surtout à une préoccupation soulevée à l'occasion des travaux parlementaires (8) : il fallait mettre les partenaires sociaux en mesure de revenir sur des accords parfois très anciens et qui ne prenaient, d'ailleurs, généralement pas la forme d'accords collectifs au sens du droit du travail, mais d'accords atypiques moins formalisés (9). On peut, de prime abord, être étonné que les organisations patronales ou les organisations syndicales puissent seules demander l'abrogation d'un arrêté dont la genèse résulte d'une volonté commune. Il devrait, toutefois, être assez rare que l'opinion de ces deux groupes diverge. Si le secteur géographique ou la profession concernée comporte un important effectif salarié, les organisations syndicales pourraient souhaiter le maintien d'un jour de fermeture fixe tandis que les organisations patronales voudraient éviter une distorsion de concurrence entre les entreprises employant des salariés et les autres.

II - Dérogations géographiques aux règles relatives au repos dominical ou au travail de nuit

L'article 242 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 modifie le plan du Code du travail à l'intérieur d'une sous-section 2 consacrée aux dérogations au repos dominical" (10). Le troisième paragraphe s'intitule désormais "autres dérogations au repos dominical" et la loi y intègre un second sous-paragraphe intitulé "dérogations sur un fondement géographique". Cette nouvelle subdivision encadre les dérogations permises dans les zones touristiques internationales (A), dans les zones touristiques (B), dans les zones commerciales (C) et dans les zones d'emprise d'une gare à grande affluence (D).

A - Les zones touristiques internationales (ZTI)

1 - Définition et délimitation des ZTI

La loi crée un nouvel article L. 3132-24 du Code du travail (N° Lexbase : L2084KGB) (11), dont l'objet est d'autoriser les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services et qui sont situés dans une ZTI à donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel.

Le II de l'article L. 3132-24 du Code du travail dispose que les ZTI sont délimitées par les ministres chargés du Travail, du Tourisme et du Commerce, après avis du maire, du président de l'établissement public d'intercommunalité et des organisations patronales et syndicales intéressées. Ces zones seront créées "compte tenu du rayonnement international de ces zones, de l'affluence exceptionnelle de touristes résidant hors de France et de l'importance de leurs achats". Compte tenu de la rédaction du texte, ces critères semblent devoir se cumuler. Plusieurs quartiers parisiens devraient naturellement entrer dans cette définition (Champs-Elysées, Boulevard Haussmann, Butte Montmartre, etc.), mais d'autres lieux pourraient être concernés, par exemple, en bord de mer, pour certaines stations balnéaires.

On notera que, contrairement aux communes touristiques ou thermales et aux zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente qui, jusqu'à la loi, permettaient seules des dérogations au repos dominical en raison de l'affluence touristique, la décision de classement et de délimitation d'une ZTI ne relève pas des autorités locales mais bien d'un arrêté ministériel. Malgré les multiples avis requis, on dénote donc une volonté d'arbitrer au plus haut quelles zones pourront bénéficier de ces dérogations poussées au principe du repos dominical mais, aussi, au régime du travail de nuit.

C'est certainement en raison des atteintes importantes à ces principes que le III du nouvel article impose au gouvernement d'établir une évaluation économique et sociale des pratiques d'ouverture des commerces dans la zone créée, trois ans après la délimitation d'une ZTI.

2 - Dérogation au repos dominical

- Etablissements concernés

La dérogation au repos dominical dans les ZTI est donc permise par l'article L. 3132-24, I du Code du travail. Elle concerne les établissements de vente au détail, sans distinction, comme cela était déjà le cas dans les communes ou zones touristiques (12).

La loi précise, toutefois, que les établissements de vente au détail bénéficient de cette dérogation lorsqu'ils "mettent à disposition des biens et des services" (13). La cohabitation, dans cette définition, d'un "établissement de vente au détail" et de la mise à disposition "de services" est ambiguë, d'abord, parce que l'on ne peut vendre un service (14), ensuite, parce que les établissements qui ont principalement pour objet de mettre à disposition des services ne sont pas des établissements de vente au détail. Un établissement bancaire situé dans une zone de grande affluence touristique internationale, par exemple, délivre des services sans être un établissement de vente au détail (15). Enfin, parce que la conjonction "et" peut donner le sentiment que les établissement devront à la fois mettre à disposition des biens et des services pour bénéficier de la dérogation, ce qui ne traduit probablement pas la volonté du législateur. Sans doute aurait-il été préférable de conserver la simple référence aux établissements de vente au détail qui pouvaient déjà, à titre accessoire, fournir quelques services en complément des biens dont ils faisaient commerce.

Des règles particulières sont réservées, par la loi, aux commerces de détail alimentaire visés par l'article L. 3132-13 du Code du travail (N° Lexbase : L2093KGM) et qui bénéficient de plein droit de la possibilité de donner le repos dominical à partir de 13 heures le dimanche. Ainsi, le nouvel article L. 3132-25-5 du Code du travail (N° Lexbase : L2086KGD) prévoit, dans les ZTI et les zones d'emprise des gares visées à l'article L. 3132-25-6 du Code du travail (N° Lexbase : L2085KGC), qu'après 13 heures, les établissements peuvent donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel selon les modalités prévues aux articles L. 3132-25-3 (N° Lexbase : L2088KGG) et L. 3132-25-4 (N° Lexbase : L2087KGE) (couverture par un accord collectif et volontariat, cf. infra). Cette dérogation ne sera pas ouverte aux commerces alimentaires des nouvelles zones touristiques et zones commerciales qui ne pourront donc ouvrir que jusqu'à 13 heures.

- Obligation de couverture par un accord collectif

Avancée significative au regard du droit antérieur, l'article L. 3132-25, I (N° Lexbase : L2091KGK), in fine, prévoit que le repos hebdomadaire peut être donné par roulement "dans les conditions prévues aux articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4" du Code du travail. Ces textes, qui imposent la conclusion d'un accord collectif de travail préalable et conditionnent le travail du dimanche au volontariat des salariés, étaient, jusqu'alors, réservés aux dérogations préfectorales et à celles applicables aux périmètres urbains de consommation exceptionnelle (PUCE). Ces protections vont désormais bénéficier aux salariés privés de repos dominical dans les ZTI (16). Les articles 246 et 247 de la loi y apportent, toutefois, quelques aménagements.

Il est d'abord ajouté un II à l'article L. 3132-25-3, qui prévoit que les établissements situés dans les ZTI ne pourront bénéficier de la dérogation qu'à la condition d'être couverts par un accord collectif de branche, de groupe, d'entreprise, d'établissement, d'un accord "conclu au niveau territorial" ou d'un accord conclu dans les conditions mentionnées aux II, III et IV de l'article L. 5125-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0649IXC), c'est-à-dire d'un accord conclu en respectant la procédure imposée aux accords de maintien de l'emploi négocié par des élus ou par un salarié mandaté par un syndicat. S'agissant de cette procédure, la lecture de l'exposé des motifs du projet de loi permet de comprendre que le législateur ne souhaitait pas qu'une négociation dérogatoire classique (17), par application des articles L. 2232-21 et suivants du Code du travail (N° Lexbase : L5837IEW), puisse suffire à satisfaire l'obligation de couverture. En cas d'absence de syndicat représentatif dans l'établissement, l'accord conclu par un élu ou par un salarié mandaté devra donc être approuvé, non par une commission paritaire de branche, comme cela est le plus souvent le cas, mais par la majorité des salariés de l'établissement s'exprimant par referendum. La procédure spéciale de conclusion des accords de maintien de l'emploi n'est toutefois pas reprise lorsque l'accord collectif d'entreprise ou d'établissement est conclu par un délégué syndical : une audience de 30 % suffit, il n'est pas nécessaire que les syndicats signataires soient majoritaires.

Il semble possible de déduire du caractère précis de cette liste d'accords collectifs qu'elle soit limitative, cela d'autant que le I de l'article L. 3132-25-3 du Code du travail impose toujours la conclusion d'un "accord collectif", sans autre précision, préalablement à la mise en place d'une dérogation préfectorale. Ainsi, par exemple, un accord d'UES ne devrait pas être en mesure de satisfaire à l'obligation de couverture.

La catégorie des accords conclus "à un niveau territorial" laisse perplexe (18). Il ne s'agit pas, en effet, d'une catégorie juridique clairement identifiée en droit du travail. Des accords de branche sont parfois conclus à des niveaux infra-nationaux, dans une région, un département, voire une ville. Pour autant, les accords de branche étant déjà envisagés par le texte, la référence aux accords "à un niveau territorial" ne devrait pas se confondre avec ceux-ci. Il ne pourrait donc s'agir que d'accords interprofessionnels à des niveaux infra-nationaux dont on ne trouve aujourd'hui illustration que dans les territoires ultramarins (19). Ces accords sont dépourvus d'encadrement juridique, ce qui pourrait en particulier poser difficulté s'agissant de la mesure de la représentativité des syndicats signataires aujourd'hui, des organisations patronales signataires demain. Mesurée dans les entreprises, dans les branches d'activité et au niveau national et interprofessionnel, aucune règle ne prévoit le calcul de la représentativité au niveau local et interprofessionnel. Quel résultat aux élections professionnelles sera considéré comme suffisant ? Le Centre de traitement des élections professionnelles pourra-t-il effectuer ce calcul à partir des données recueillies pour la mesure de la représentativité au plan national ? Ces accords sont-ils susceptibles d'être étendus ? Autant de questions qui permettent de douter que le recours à ce type de négociation puisse s'opérer sans fort risque de contentieux ultérieur.

Quoiqu'il en soit, la négociation de branche devrait être le siège privilégié de l'encadrement des dérogations dans les ZTI puisque l'article 246 II de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 impose aux syndicats et organisations patronales, dans les branches ou au niveau des professions, d'ouvrir, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, des négociations sur les thèmes des articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du Code du travail.

Comme cela était le cas pour les accords préalables aux dérogations préfectorales ou aux dérogations dans les PUCE, l'accord collectif devra prévoir les contreparties salariales accordées aux salariés privés de repos dominical, des engagements en termes d'emploi pour les publics en difficulté ou les personnes handicapées, des mesures pour faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle et devra fixer des contreparties pour compenser les charges induites par la garde des enfants des salariés qui travailleront le dimanche. Le III de l'article L. 3132-25-3 ajoute que l'accord collectif -ou la décision unilatérale de l'employeur dans le cadre d'une dérogation préfectorale- doit fixer "les conditions dans lesquelles l'employeur prend en compte l'évolution de la situation personnelle des salariés privés du repos dominical". Cette disposition est bien vague, cela d'autant qu'elle semble en partie redondante, avec les dispositions du II qui imposent déjà que les accords prennent en considération ces éléments. On peut imaginer que l'accord devra prévoir une procédure d'évaluation de l'évolution de la situation des salariés, par des entretiens périodiques ou des échanges privilégiés avec les services de santé au travail, par exemple. Le caractère très vague de cette disposition pourrait, toutefois, elle aussi, donner lieu à contentieux sur le modèle des accords encadrant les conventions de forfait en jours dont le contenu, que la loi ne précisait guère, est aujourd'hui étroitement surveillé par la Chambre sociale de la Cour de cassation. On peut ainsi s'attendre à ce que des mesures concrètes et effectives soient exigées afin que le droit au respect de la vie personnelle et familiale soit véritablement garanti.

La faculté de priver les salariés de l'établissement de repos dominical sans accord collectif, déjà prévue, elle aussi, pour les dérogations préfectorales et les anciennes PUCE, est maintenue. Elle est cependant réservée aux établissements comptant moins de onze salariés, ce qui devrait concerner nombre de petits commerces de ces zones touristiques, mais qui n'empiète pas sur les compétences des institutions représentatives du personnel, qui font, dans ce cas, défaut. Le texte impose que les salariés concernés soient consultés sur les mesures et contreparties précédemment évoquées et que le travail dominical soit approuvé par la majorité d'entre eux. Seuls pourront donc s'exprimer, lors du scrutin, les salariés amenés à travailler le dimanche, et non l'ensemble des salariés de l'établissement. Le franchissement du seuil de onze salariés ouvre une période de transition de trois années après laquelle l'établissement devra être couvert par un accord collectif.

- Extension du volontariat

L'article 247 étend, ensuite, l'exigence de volontariat des salariés concernés, lequel n'était, jusqu'ici, requis que pour les dérogations préfectorales et les PUCE. Le modèle existant est repris (pas de prise en considération du refus de travailler le dimanche au moment de l'embauche, pas de mesure discriminatoire en raison de ce refus, pas de faute ou de motif de licenciement), mais le texte ajoute que l'accord collectif ou, dans les entreprises de moins de onze salariés, les mesures prises par l'employeur, doivent prévoir les modalités de prise en compte d'un changement d'avis du salarié privé de repos dominical.

Sur ce point encore, le texte est ambigu. Il ne donne pas clairement un droit au retour au repos dominical pour le salarié, mais impose que les modalités de prise en compte de son changement d'avis soient négociées. Ces mesures pourraient prendre pour modèle celles prévues par le troisième alinéa de l'article L. 3132-25-4 du Code du travail pour les dérogations préfectorales prises sans accord préalable. On pourrait imaginer, par exemple, un droit de retour conditionné à l'absence de désorganisation du fonctionnement de l'entreprise ou qui ne pourrait être refusé après un certain nombre de demandes, tout comme il est parfaitement envisageable d'aller jusqu'à conférer, par un accord, un véritable droit de retour au salarié.

Le dernier alinéa de l'article L. 3132-25-4 prévoit, enfin, que l'employeur doit prendre toute mesure nécessaire pour "permettre aux salariés d'exercer personnellement leur droit de vote au titre des scrutins nationaux et locaux lorsque ceux-ci ont lieu le dimanche".

3 - Travail en soirée

L'article 254 de la loi créée un nouvel article L. 3122-29-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1647KG4) en vue de faciliter le travail de nuit dans les zones touristiques internationales et de contrecarrer la position de la Chambre sociale de la Cour de cassation qui avait considéré, dans l'affaire "Sephora", s'agissant des boutiques de cette enseigne situées sur les Champs-Elysées, que le travail de nuit est "exceptionnel", "ne peut pas être le mode d'organisation normal du travail au sein d'une entreprise et ne doit être mis en oeuvre que lorsqu'il est indispensable à son fonctionnement" (20).

Comme l'évoquent l'intitulé du chapitre Ier du titre 3 de la loi du 6 août 2015 et le dernier alinéa du nouvel article L. 3122-29-1 du Code du travail, le texte semble créer une nouvelle catégorie de temps de travail dit "travail en soirée", qui ne serait plus du travail de jour mais dont le régime ne sera pas entièrement aligné sur celui du travail de nuit.

Ainsi, dans les seules ZTI, les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services peuvent reporter le début de la période de travail de nuit jusqu'à minuit (21). La possibilité de faire travailler des salariés entre 21 heures et minuit dans ces établissements est conditionnée à la couverture de l'établissement par un accord collectif similaire à celui organisant la dérogation au repos dominical et présentant, par conséquent, les mêmes difficultés (22).

La loi est toutefois bien plus dirigiste s'agissant du contenu de l'accord. Les heures de travail en soirée seront obligatoirement majorées et, contrairement au travail dominical, un seuil minimal de majoration est fixé au double de la rémunération normalement due, l'accord pouvant naturellement prévoir une majoration plus importante. A cela s'ajoute, sans qu'il soit nécessaire que l'accord le prévoie, que ces heures de travail donnent lieu à repos compensateur équivalent en temps.

L'accord devra prévoir, pour les salariés employés en soirée, "la mise à disposition d'un moyen de transport pris en charge par l'employeur qui permet au salarié de regagner son lieu de résidence". Cette mesure semble bien plus stricte que la simple prise en charge partielle des frais de transport prévue par l'article L. 3261-2 du Code du travail (N° Lexbase : L2712ICG). L'idée semble être d'éviter que des salariés soient contraints d'utiliser des transports en communs durant la nuit. Concrètement, cette obligation est très contraignante car elle implique que l'employeur mette à disposition du salarié un véhicule de fonction ou qu'il s'acquitte de frais de taxi pour que le salarié soit reconduit jusqu'à son domicile qui, en région parisienne, peut être fort éloigné.

L'accord devra encore prendre des mesures destinées à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle et des mesures de compensation des charges liées à la garde d'enfants. Il devra fixer les conditions de prise en compte de l'évolution de la situation du salarié et de son choix de ne plus travailler en soirée, ce choix produisant un effet immédiat pour les salariées enceintes. Les salariés employés en soirée bénéficieront des dispositions spécifiques au travailleur de nuit en matière de santé au travail (23), à condition, toutefois, de pouvoir être considérés comme travailleur de nuit, c'est-à-dire d'effectuer entre 21 heures et minuit le nombre d'heure minimal fixé par l'article L. 3122-31 du Code du travail (N° Lexbase : L0387H99).

Ces mesures, destinées à permettre la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle, d'une part, à garantir la protection de la santé des salariés, d'autre part, résultent très directement de la position adoptée par la Conseil constitutionnel qui avait mis en balance ces deux droits fondamentaux avec la liberté d'entreprendre (24). Les partenaires sociaux devront prendre grand soin du contenu des accords collectifs qui seront négociés pour permettre le travail en soirée, au risque de les voir subir une destinée similaire à celles des accords encadrant les forfaits en jours.

Enfin, comme pour la dérogation au repos dominical dans les ZTI, seuls les salariés volontaires, ayant donné leur accord écrit, peuvent travailler entre 21 heures et minuit (25). Cela ne constitue pas un changement important sur le fond, puisque le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit a toujours été considéré comme une modification du contrat de travail qui nécessitait, par conséquent, l'accord du salarié (26). L'évolution est plus significative sur la forme. Le principe demeure celui du consensualisme, tant au stade de la formation du contrat de travail, que de sa modification en cours de relation. L'exigence d'un écrit manifestant l'accord du salarié déroge à ces règles avec l'objectif, difficile à atteindre, d'être certain que le salarié comprenne qu'il a le choix.

Si l'on tire un bilan de ces dispositions, on comprend que le régime institué constitue une nouvelle dérogation au caractère exceptionnel du travail de nuit qui évite pudiquement cette dénomination pour préférer celle de travail en soirée. Les contreparties sont, toutefois, loin d'être négligeables et l'on s'aperçoit assez clairement que le régime de ces heures de travail en soirée est très protecteur des salariés, bien davantage que celui du travail de nuit classique, pour lequel les majorations de salaire ne sont pas fixées par la loi, le volontariat n'est pas formellement requis et la mise à disposition d'un moyen de transport n'est pas prévue. Sous réserve des doutes que le volontariat du salarié inspire toujours, le compromis semble valable car les coûts importants engendrés par le travail en soirée pour les établissements concernés devraient être absorbés par l'activité accrue que ces nouveaux horaires permettront.

B - Les zones touristiques (ZT)

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 retouche les dispositions applicables au repos dominical dans les zones touristiques. Outre que le dispositif est grandement simplifié dans la forme, d'importants changements de fond sont également apportés.

Les anciennes et complexes références aux communes touristiques, aux communes thermales ou aux zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente disparaissent au profit d'une nouvelle appellation, plus simple, de zone touristique. Le nouvel article L. 3132-25 du Code du travail (N° Lexbase : L2091KGK) prévoit, ainsi, que les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services, pourront donner le repos hebdomadaire par roulement lorsqu'ils se situeront dans une zone touristique caractérisée "par une affluence importante de touristes". Ce critère semble moins restrictif que celui "d'affluence exceptionnelle" qui permettait, jusqu'ici, de délimiter certaines zones touristiques, ce qui compense la disparition des autres critères antérieurs (référence aux communes thermales ou au zones d'animation culturelle).

Comme pour les ZTI (27), l'article L. 3132-25 renvoie, désormais, aux articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du Code du travail : les dérogations au repos dominical dans les établissements situés dans des ZT devront avoir été prévues et encadrées par un accord collectif ou par des mesures patronales unilatérales dans les établissements de moins de onze salariés. Seuls les salariés volontaires pourront être privés de repos dominical. Il s'agit, en théorie, d'une évolution très importante qui devrait, en pratique, être difficile à mettre en pratique, en particulier s'agissant du volontariat. Un travailleur saisonnier est-il vraiment en position de refuser de travailler le dimanche et, surtout, la protection de son refus (contre le refus d'embauche ou contre les mesures discriminatoires) peut-elle véritablement être effective ?

La délimitation des zones touristiques résultera d'une procédure établie par l'article L. 3132-25-2 (N° Lexbase : L2089KGH) et partagée avec la délimitation des zones commerciales. Le maire d'une commune touristique ou le président de l'établissement public intercommunal, si le territoire concerné dépasse celui d'une commune, présentera une demande de délimitation ou de modification au préfet de région. La demande doit être motivée et comporter une étude d'impact qui permet de justifier l'opportunité de créer ou de modifier la zone. Le préfet de région, avant de procéder à la création ou à la modification d'une ZT, devra recueillir de nombreux avis (28). Ces avis seront réputés avoir été pris dans un délai de deux mois après saisie des organes consultatifs (29) et le préfet de région dispose d'un délai de six mois pour statuer sur la demande de délimitation (30). Cette procédure donne le sentiment d'une grande collégialité et d'une concertation approfondie de l'ensemble des acteurs locaux. Il ne faut toutefois pas s'y tromper, il ne s'agit toujours que de consultations qui ne lient pas le préfet de région, lequel demeure libre d'accepter ou non la demande de délimitation.

La nouvelle procédure pouvait faire craindre une grande remise à plat des zones touristiques telles qu'elles sont aujourd'hui définies. En effet, la liste des communes ou zones touristiques et thermales résultait, jusqu'ici, de décisions préfectorales, au niveau des départements (31). La modification de l'autorité compétente dans la loi aurait dû permettre aux administrés intéressés de demander l'abrogation des arrêtés préfectoraux antérieurs à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 (32). L'article 257 de la loi vient toutefois opportunément organiser la transition entre l'ancien et le nouveau système.

Ainsi, les communes ou zones touristiques désignées par arrêté préfectoral avant la publication de la loi constituent de plein droit des zones touristiques, au sens du nouvel article L. 3132-25 du Code du travail. L'obligation de couverture par un accord collectif et le volontariat des salariés employés le dimanche ne s'appliquent aux salariés employés des ZT qu'à compter du premier jour du vingt-quatrième mois suivant la publication de la loi, soit au 1er août 2017. Cette date, placée au coeur de la saison estivale, est bien peu judicieuse, si bien qu'il faut espérer que les partenaires sociaux parviendront à s'entendre avant la date ultime.

C - Les zones commerciales (ZC)

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 retouche l'un des dispositifs innovants qu'avait mis en place la loi n° 2009-974 du 10 août 2009. En effet, la dérogation ouverte dans les périmètres urbains de consommation exceptionnelle par l'ancien article L. 3132-25-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6345IEQ) disparaît et est remplacée par une dérogation permise dans les zones commerciales. Ce dispositif, nettement éclipsé par la création des zones touristiques internationales, pourrait toutefois déployer d'importants effets.

Comme pour les ZT et les ZTI, seront concernés les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et services. Ces établissements pourront donner le repos hebdomadaire par roulement lorsqu'ils se situeront dans une zone commerciale caractérisée par "une offre commerciale et une demande potentielle particulièrement importantes". On ne peut que se féliciter de la suppression de l'ancien critère des PUCE reposant sur l'existence d' "habitudes de consommation dominicale" qui avait clairement pour effet de régulariser des situations de travail dominical illicites. Autre changement, sous réserve des précisions qui seront apportées par les décrets d'application, les zones commerciales ne seront plus nécessairement situées dans des "unités urbaines" de plus d'un million d'habitants. Des ZC devraient donc pouvoir être créées en dehors des agglomérations parisienne, marseillaise et lilloise. Le texte ajoute que la délimitation des ZC devra, le cas échéant, tenir compte de la proximité immédiate d'une zone frontalière.

Les nouvelles zones commerciales seront créées en fonction de deux critères. Le premier est celui de l'existence d'une "offre commerciale [...] particulièrement importante" : seuls les grands ensembles commerciaux devraient donc être concernés, mais la loi reste peu disserte sur la taille de ces ensembles qui devra être mieux définie par décret (33). Le second est l'existence d'une "demande potentielle particulièrement importante" qui vise cette fois la clientèle de ces ensembles et reprend donc un critère déjà existant pour délimiter les PUCE.

En fonction des dispositions réglementaires qui viendront compléter ce dispositif, la création de zones commerciales pourrait donc être beaucoup plus simple que l'ancienne dérogation ouverte dans les PUCE.

La procédure de délimitation ou de modification des ZC est identique à celle applicable aux ZC (34). L'obligation de couverture par un accord collectif et l'exigence que seuls les salariés volontaires soient privés de repos dominical sont également reprises. Des dispositions viennent encore aménager la transition entre les dérogations ouvertes dans les PUCE et celles permises dans les ZC. Les PUCE créés avant la loi constituent de plein droit des ZC. Les accords collectifs ou décisions unilatérales qui devaient impérativement prévoir des contreparties pour les salariés concernés sont maintenus pendant deux ans. Si un accord collectif est conclu au cours de cette période de deux ans, il se substitue à la décision unilatérale antérieure de l'employeur et s'applique à sa place. Quoique le texte ne le précise pas, les accords collectifs en vigueur devront être révisés pour être conformes aux exigences des articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du Code du travail.

D - Les gares à grande affluence

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 apporte une dernière nouveauté au domaine des dérogations géographiques au repos dominical puisque l'article L. 3132-25-6 du Code du travail (N° Lexbase : L2085KGC) crée une dérogation pour les établissements de vente au détail mettant à disposition des biens et des services "situés dans l'emprise d'une gare qui n'est pas incluse" dans une ZTI "compte tenu de l'affluence exceptionnelle de passagers dans cette gare". Les commerces alimentaires qui bénéficient de la dérogation permanente de droit jusqu'à 13 heures le dimanche pourront, comme dans les ZTI, donner le repos hebdomadaire par roulement.

Les commerces situés à proximité des grandes gares françaises bénéficieront donc désormais d'une dérogation au repos dominical, comme cela est depuis longtemps le cas pour les aéroports (35). La dérogation sera, toutefois, plus difficile à obtenir, puisqu'il ne s'agit pas d'une dérogation permanente de droit. Seules les gares visées par arrêté conjoint des ministres des Transports, du Travail et du Commerce bénéficieront de cette dérogation. Les ministres seront tenus de recueillir de nombreux avis locaux mais (36), surtout, ne pourront cibler que les gares fréquentées par une affluence exceptionnelle de passagers.

Si ce critère reste imprécis et que l'on espère, à nouveau, que les décrets d'application permettront d'identifier ce qu'est une affluence exceptionnelle de passagers, on peut imaginer que seules les gares des grandes métropoles seront concernées par cette dérogation. Les obligations de couverture par un accord collectif et de volontariat des salariés sont, une fois encore, reprises, et s'appliquent donc à l'ensemble des dérogations au repos dominical reposant sur un fondement géographique.

III - Dérogations municipales aux règles relatives au repos dominical

La loi apporte quelques modifications à la dérogation municipale au repos dominical qui permettait, jusqu'ici, au maire d'une commune, d'accorder cinq dimanches d'ouverture aux établissements situés sur le territoire de la commune.

La loi ne va pas aussi loin que ce qu'avait envisagé le gouvernement dans son projet initial. Ainsi, les commerces ne bénéficieront pas de cinq dimanches de droit, dont le nombre aurait pu être porté jusqu'à douze par le maire, ce qui évitera aux mairies qui n'avaient jusqu'ici jamais pris d'arrêté d'ouverture, d'être contraintes de le faire. La loi modifie le nombre maximal de dimanches pour lesquels le maire peut autoriser le travail dominical qui passe de cinq à douze.

La procédure est toutefois renforcée si le nombre de dimanche dépasse cinq. A l'avis du conseil municipal, exigé dans tous les cas, s'ajoute alors celui de l'organe délibérant de l'établissement public intercommunal dont la commune est membre. L'avis devra être "conforme", ce qui confère un véritable droit de véto à l'échelle intercommunale, droit de véto qui devra, toutefois, être exprimé, puisque, faute d'avis donné dans un délai de deux mois, celui-ci sera réputé être favorable. Même si cette mesure pourrait donner lieu à des disputes de basse politique dans certaines agglomérations, il faut toutefois mettre à son crédit la recherche d'une certaine harmonie sur l'ensemble d'un territoire.

La liste des dimanches concernés doit être établie au plus tard le 31 décembre pour l'année suivante. Cette dérogation pourra donc être pleinement utilisée à compter de 2016. Pour l'année 2015, l'article 250 autorise le maire à arrêter des dérogations pour neuf dimanches, sachant qu'il ne reste que quatre mois avant 2016.

L'article 253 de la loi crée un nouvel article L. 3132-27-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1646KG3) qui étend à la dérogation municipale l'exigence de volontariat des salariés. L'organisation de contreparties par accord collectif n'est, en revanche, pas exigée, puisque l'article L. 3132-27 (N° Lexbase : L6323IEW) reste inchangé et impose déjà certaines mesures (doublement de la rémunération, repos compensateur, etc.), ce qui n'empêche d'ailleurs pas qu'un accord collectif améliore ces contreparties.

Quelques mesures accessoires viennent s'ajouter à ce nouveau régime. Dans les établissements de commerces de détail alimentaire dont la surface de vente dépasse 400 m², les jours fériés travaillés sont déduits des dimanches municipaux dans la limite de trois (art. 250 I, 2°). Les employeurs des établissements qui bénéficient de la dérogation municipale doivent prendre toute mesure nécessaire pour que les salariés puissent participer aux scrutins nationaux ou locaux organisés au cours d'un dimanche travaillé (art. 252). Enfin, la loi impose aux mairies de soumettre au conseil municipal, lors des débats relatifs à la désignation des dimanches concernés par la dérogation, la question de l'ouverture des bibliothèques de la commune (art. 250, II).


(1) Loi n° 2009-974 du 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations (N° Lexbase : L6524IED).
(2) CE 4° et 1° s-s-r., 20 octobre 1993, n° 143024, publié aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1056ANG).
(3) C. trav., art. L. 3132-4 (N° Lexbase : L0458H9T).
(4) L'article L. 3132-4 du Code du travail permet cette suspension "en cas de travaux urgents dont l'exécution immédiate est nécessaire pour organiser des mesures de sauvetage, pour prévenir des accidents imminents ou pour réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments de l'établissement" alors que la dispense d'avis se contente d'une "urgence dûment justifiée".
(5) Ces conditions peuvent toutefois rejoindre celles de l'article L. 3132-4 du Code du travail, par exemple, lorsque la dispense d'avis découle du besoin de réaliser des travaux urgents, lesquels sont nécessaires au fonctionnement normal de l'établissement.
(6) Le préfet pouvait déjà être "tenu d'abroger une réglementation fondée sur un accord qui ne répondrait plus à l'opinion de la majorité des commerçants intéressés", CE 4° et 1° s-s-r., 5 mars 1986, n° 41739 , inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A5597AMA).
(7) Cons. const., 21 janvier 2011, n° 2010-89 QPC (N° Lexbase : A1522GQG), cons. 5, et les obs. de Ch. Radé, Repos dominical : le Conseil constitutionnel valide l'article L.3132-29 du Code du travail, Lexbase Hebdo n° 426 du 3 février 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N1801BR7).
(8) V. les débats devant la commission spéciale du Sénat.
(9) Pour le juge administratif, cet accord "n'a pas d'effet juridique propre et n'a pas la nature d'un accord collectif", v. CE 1° et 6° s-s-r., 15 mai 2006, n° 277361, publié aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6531DPL).
(10) Sous-section 2 de la section 2 du chapitre 2 du titre III du livre Ier du Code du travail : C. trav., art. L. 3132-12 et s. (N° Lexbase : L0466H97).
(11) L'ancien article L. 3132-24 du Code du travail (N° Lexbase : L0479H9M) avait été abrogé par le Conseil constitutionnel à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité, v. Cons. const., 4 avril 2014, n° 2014-374 QPC (N° Lexbase : A4068MII) et les obs. de Ch. Radé, Sephora et le travail le dimanche : comme un parfum de droits de l'Homme, Lexbase Hebdo n° 567 du 17 avril 2014 - édition sociale (N° Lexbase : N1831BUD) ; RDT, 2014, p. 484, obs. M. Grévy.
(12) La loi n° 2009-974 du 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations, avait supprimé, pour les zones et commerces touristiques, la référence aux établissements de vente au détail "qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel". Voir nos obs., Le paradoxe de la loi du 10 août 2009 : réaffirmation du principe du repos dominical et extension des hypothèses dérogatoires, Lexbase Hebdo n° 362 du 10 septembre 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N7432BLT).
(13) Cette distinction entre biens et services avait été supprimée par la loi n° 2009-974 du 10 août 2009, ibid..
(14) Sur un plan technique, la définition du Code du travail semble, tout simplement, opérer une confusion -certes classique dans le langage courant- entre contrat de vente et contrat d'entreprise.
(15) Autre qu'un bureau de change qui bénéficie d'une dérogation permanente de droit, v. C. trav., art. R. 3132-5 (N° Lexbase : L6772IZT).
(16) Et d'une manière générale, pour toutes les dérogations sur un fondement géographique, cf. infra.
(17) V. l'étude d'impact, tome 3, p. 12.
(18) Les interrogations soulevées par les parlementaires de la commission spéciale du Sénat n'ont pas été entendues, v. art. 76 du Rapport de la Commission spéciale du Sénat.
(19) En particulier en Nouvelle Calédonie, v. sur la question A. Bugada, Contribution à l'étude de l'interprofession . - A propos de l'accord interprofessionnel de Polynésie française relatif à la prime à l'emploi, JCP éd. S, 2010, 1039. On peut également faire référence à l'accord régional interprofessionnel sur les salaires en Guadeloupe, dit "accord Bino", conclu le 26 février 2009.
(20) Cass. soc., 24 septembre 2014, n° 13-24.851, FS-P+B (N° Lexbase : A3412MXN). Plus généralement sur cette affaire, v. Cons. const. n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014 (N° Lexbase : A4067MIH) et les obs. de Ch. Radé, Sephora et le travail le dimanche : comme un parfum de droits de l'Homme, préc.
(21) Si la période de travail de nuit commence au-delà de 22 heures, la période de nuit s'achève à 7 heures, et non à 6 heures, comme le prévoit, par principe, l'article L. 3122-29 du Code du travail (N° Lexbase : L0385H97).
(22) Cf. supra.
(23) C. trav., art. L. 3122-37 (N° Lexbase : L0393H9G), art. L. 3122-39 (N° Lexbase : L0395H9I), art. L. 3122-42 (N° Lexbase : L0398H9M) à L. 3122-45.
(24) Cons. const., n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014, préc..
(25) Le refus du salarié de travailler en soirée ne peut être considéré comme une faute, comme un motif de licenciement, donner lieu à un refus d'embauche ou à une mesure discriminatoire.
(26) Cass. soc., 7 avril 2004, n° 02-41.486, FS-P+B (N° Lexbase : A8426DBP).
(27) Cf. supra.
(28) Conseil municipal des communes concernées, organisations syndicales et patronales, organe délibérant de l'établissement public intercommunal, comité départemental du tourisme.
(29) Délai ramené à un mois en cas de simple modification.
(30) Délai ramené à trois mois en cas de simple modification.
(31) Le transfert au préfet de région de cette compétence répond à une tendance d'accroissement des pouvoirs de cette autorité administrative engagée depuis 2010, v. en part. le décret n° 2010-146 (N° Lexbase : L5726IG8) du 16 février 2010 modifiant le décret n° 2004-374 (N° Lexbase : L1781DYM) du 29 avril 2004, relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements.
(32) Sur l'abrogation des actes administratifs unilatéraux en cas de changement de circonstances de droit, v. CE, Ass., 10 janvier 1964, Syndicat national des cadres des bibliothèques, Rec. CE, 1964, p. 17.
(33) Précision programmée par le gouvernement, v. l'étude d'impact du projet de loi, tome 3, p. 11.
(34) Cf. supra. La consultation du comité départemental du tourisme est toutefois remplacée par une consultation de la chambre du commerce et de l'industrie et de la chambre des métiers.
(35) Dérogation permanente de droit, v. C. trav., art. R. 3132-5 (N° Lexbase : L6772IZT).
(36) Avis du maire, du président de l'établissement public intercommunal, des représentants des employeurs et des salariés des établissements concernés, avis réputés pris dans un délai de deux mois suivant la saisine des personnes concernées.

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