L'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux juridictions des ordres professionnels qu'en ce qui concerne les constatations matérielles des faits que le juge pénal a retenues et qui sont le support nécessaire de sa décision. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat, dans une décision du 30 décembre 2013 (CE 5° et 4° s-s-r., 30 décembre 2013, n° 356775, mentionné aux tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A8548KQN ; cf. l’Ouvrage "Procédure pénale" N° Lexbase : E2168EUT). En l'espèce, à la suite d'une enquête de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), reposant sur l'analyse des facturations établies par l'officine de M. B., entre le 1er août 2005 et le 31 janvier 2007, qui avait révélé de nombreuses anomalies, le directeur de la caisse primaire et le médecin conseil, chef du service médical placé auprès de cette caisse, ont porté plainte contre ce pharmacien devant la section des assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des pharmaciens. Par une décision du 10 mars 2010, celle-ci a prononcé, à l'encontre de M. B., la sanction de l'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux pour une durée de deux ans, dont un an avec sursis. M. B. ainsi que la caisse primaire et le médecin conseil ont fait appel de cette décision. Pour rejeter l'appel formé par M. B. et faire droit à celui de la CPAM et du médecin conseil près celle-ci, la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, après avoir relevé que M. B. avait fait l'objet d'une condamnation pénale par l'effet d'un arrêt de la cour d'appel du 22 septembre 2009 et énoncé que cette décision de justice devenue définitive s'imposait à elle quant à la matérialité des faits retenus à l'encontre de l'intéressé "
et à leur qualification pénale d'escroquerie", a estimé que l'argumentation développée par M. B. pour établir que les anomalies qui lui étaient reprochées ne procédaient pas d'une intention frauduleuse, s'analysait comme une contestation des faits établis "
et caractérisés par le juge pénal" et était, par suite, inopérante. A la suite de cette décision, M. B. s'est pourvu en cassation. Le Conseil d'Etat retient qu'en statuant ainsi, alors que l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux ne s'imposait à elle qu'en ce qui concernait la matérialité des faits et qu'il lui appartenait d'apprécier l'intention dans laquelle l'intéressé avait agi, la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des pharmaciens a commis une erreur de droit. Par conséquent, M. B. est fondé à demander l'annulation de la décision.
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