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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction
le 27 Mars 2014
Selon la Cour, c'est ce régime d'exonération discriminatoire qui emporte la contrariété du dispositif français au principe de libre circulation des capitaux promu et protégé par l'Union. En effet, implicitement, mais nécessairement, ce dispositif ne permet pas à certaines sociétés établies dans un autre Etat membre de fournir des éléments de preuve permettant d'établir l'identité de ses actionnaires personnes physiques, pour échapper à la taxation. Comme le laisse entendre, cette semaine, dans nos colonnes, Frédéric Dieu, Commissaire du Gouvernement près le Tribunal administratif de Nice, la présomption de fraude est, ici, irréfragable ; c'est en cela que le dispositif ne peut être maintenu en l'état.
Instauré dans le souci de pénaliser les montages mis en place afin d'éviter l'assujettissement à l'impôt sur les grandes fortunes (IGF), puis à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), au titre de la détention d'immeubles situés en France, en interposant une personne morale dont le siège était à l'étranger, c'est un énième dispositif de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales qui tombe. C'est non seulement la théorie des dominos qui s'applique, mais c'est la politique fiscale française de dissuasion qui est progressivement remise en cause.
Pour rester dans la métaphore géopolitique, la dissuasion consiste en la peur, dans les deux camps, de l'utilisation par l'autre d'une arme. Si c'était le cas, "l'agressé" répliquerait avec les mêmes armes et, en raison de la puissance et des effets de ces armes, les avantages d'être l'agresseur sont quasi nuls. La stabilité de cette configuration, où deux adversaires se dissuadent ainsi mutuellement, dépend avant tout de la capacité de l'agressé à frapper l'autre après avoir subi une première frappe. Du nucléaire à la fiscalité, il y a un pas que l'on peut franchir avec un brin de provocation, tant le contexte s'assimile à une "lutte", où, d'un côté, l'Etat souhaite conserver toute sa capacité régalienne de lever l'impôt et lutter contre l'évasion fiscale ; et, de l'autre, les contribuables rivalisent d'imagination pour établir des montages juridiques permettant la moindre taxation (démarche, au demeurant, validée, dans son principe, par le juge fiscal lui-même).
"La seule fin pour laquelle les hommes sont autorisés, individuellement ou collectivement, à intervenir dans la liberté d'action d'un de leurs semblables, est la protection de soi-même" écrivait John Stuart Mill dans Pour la liberté. La formule s'applique, également, à l'Etat percepteur. Il s'agit alors de repenser, dans le cadre communautaire, la dissuasion fiscale afin de prévenir l'évasion tout en instaurant confiance économique et consentement à l'impôt.
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