Réf. : Cass. civ. 3, 24 octobre 2007, n° 06-17.295, Société Lloyd's France, venant aux droits de la société Lloyd's de Londres, FS-P+B (N° Lexbase : A8492DY8)
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par David Bakouche, Professeur agrégé des Facultés de droit
le 07 Octobre 2010
En l'espèce, l'assureur d'une société civile immobilière, qui avait fait réaliser une chambre froide, subrogé dans les droits de son assurée, a demandé la garantie du maître d'oeuvre et de son assureur. Ce dernier reprochait aux juges du fond d'avoir déclaré l'action recevable alors que, selon le pourvoi, l'action directe de la victime ou de l'assureur subrogé dans les droits de la victime, qui trouve son fondement dans le droit de la victime à la réparation de son préjudice, se prescrit par le même délai que son action de droit commun contre le responsable, si bien que la cour d'appel, qui avait relevé que l'action de l'assureur contre l'assuré responsable était prescrite, ne pouvait dans le même temps déclarer recevable et non prescrite l'action directe exercée par l'assureur subrogé dans les droits de la victime contre l'assureur du responsable. L'argument reposait, en somme, sur la connexité, et donc la dépendance, existant entre l'action directe et l'action en responsabilité évoquée plus haut. Le pourvoi est, cependant, rejeté, la Cour de cassation affirmant, en effet, que "le maître de l'ouvrage, dans les droits et actions duquel [l'assureur] était subrogé, pouvait actionner directement l'assureur de responsabilité des constructeurs, cette action directe n'étant pas subordonnée à la mise en cause de l'assuré", si bien que "la cour d'appel en a exactement déduit que l'action directe de l'assureur subrogé dans les droits de la victime était recevable".
La solution, fondée sur l'autonomie de l'action directe par rapport à l'action en responsabilité, autonomie qui implique qu'il ne soit pas nécessaire pour la victime de mettre en cause l'assuré responsable, confirme l'orientation prise par la jurisprudence depuis deux arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation des 29 février et 7 novembre 2000 (3), confirmée par la suite (4), orientation qu'une partie de la doctrine appelait d'ailleurs de ses voeux (5). Alors, en effet, que le premier des deux arrêts avait admis que l'assuré responsable pouvait être mise en cause soit par la victime, soit par l'assureur lui-même, le second avait nettement affirmé que "la recevabilité de l'action directe n'est pas subordonnée à l'appel en la cause de l'assuré par la victime". La solution doit être prouvée : comme on l'a justement fait remarquer, ne pas admettre la possibilité de pouvoir discuter la responsabilité du présumé responsable en son absence aurait conduit à considérer que les intérêts du tiers lésé n'ont pas la priorité, alors même que c'était cet argument qui avait présidé à la reconnaissance de l'action directe par la Cour de cassation.
(1) Cass. civ., 13 décembre 1938, DP 1939, 1, 33, note M. Picard.
(2) Voir, not., Cass. civ. 1, 11 octobre 1994, n° 92-15.347, Société Lilloise d'assurances et de réassurances c/ Caisse nationale de prévoyance de la SNCF et autres (N° Lexbase : A7009AB9), RGAT 1994, p. 1212, note J. Beauchard.
(3) Cass. civ. 1, 29 février 2000, n° 97-11.811, Compagnie Eagle Star c/ Mme Amina X, ès qualités de représentant légal des biens de son fils (N° Lexbase : A5145AWH), RDimm. 2000, p. 363, obs. G. Durry, RGDA 2000, p. 581, obs. J. Kullmann, Resp. civ. et assur. 2000, n° 12, chr. H. Groutel ; Cass. civ. 1, 7 novembre 2000, n° 97-22.582, Société Thomson CSF c/ Compagnie Préservatrice Foncière assurances et autre (N° Lexbase : A7747AHE), JCP éd. G, 2001, II, 10456, note J. Bigot.
(4) Cass. civ. 3, 15 mai 2002, n° 00-18.541, Société Gestion immobilière Rhône-Alpes Geira c/ Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Les Hameaux de Val-d'Isère, FS-P+B (N° Lexbase : A6580AYD), Bull. civ. III, n° 98.
(5) G. Courtieu, La mise en cause de l'assuré pour l'exercice de l'action directe : un archaïsme, Resp. civ. et assur. 1995, Chron. 14.
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