L'utilisation, par un salarié, de son temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles il perçoit une rémunération de son employeur constitue un abus de confiance ; c'est ainsi que, dans un arrêt rendu le 19 juin 2013, la Cour de cassation confirme la condamnation des prévenus pour abus de confiance et recel et corruption de salarié, au titre d'une entente lucrative aux termes de laquelle le premier incitait les clients d'un centre de rééducation à faire confectionner leur prothèse définitive par le second, lequel utilisait à cet effet des moulages que l'autre fabriquait pendant ses heures de travail et avec le matériel du centre ; en échange de ce service, il recevait une rétrocession de 30 % du coût des appareillages, sous la forme, dans un premier temps, d'un salaire versé par la société de l'autre, puis sous la forme de paiement des factures
via une société constituée à cette fin (Cass. crim., 19 juin 2013, n° 12-83.031, FS-P+B+R
N° Lexbase : A1808KHG ; cf. l’Ouvrage "Droit pénal spécial" N° Lexbase : E1999EYP). En l'espèce, ces faits avaient été reconnus tant par M. F. que par M. D., ce dernier indiquant notamment qu'il n'aurait pas eu la possibilité d'effectuer des prestations pour les patients du centre de rééducation s'il n'avait pas accepté de rémunérer M. F. Les juges avaient relevé encore que la captation de clientèle au profit de M. D. était imputable personnellement à M. F., qui, de par ses fonctions, était en contact avec les patients ayant besoin d'un appareillage définitif et en situation de les conseiller quant au choix du prothésiste ; en outre, il était le seul à avoir tiré un avantage de l'orientation de la clientèle vers un prothésiste quasi-unique. Les juges ajoutaient, enfin, que ni l'autorisation accordée en 1990 à M. F. pour exercer à titre exceptionnel une activité professionnelle à l'extérieur du centre, par le docteur H., alors directeur salarié, ni l'attestation de la veuve du docteur V., selon laquelle ce dernier, qui avait été directeur salarié du centre de 1993 à 1997, aurait été informé, dès le mois de mars 1994, de l'existence de la société S., ni enfin les déclarations de M. F. selon lesquelles il aurait informé les directeurs de l'existence de la société S. n'étaient de nature à démontrer que les prévenus agissaient avec l'autorisation de l'association, dès lors que M. F. avait indiqué ultérieurement qu'il n'avait pas évoqué avec les directeurs salariés du centre l'entente lucrative avec M. D. et qu'aucun avenant au contrat de travail de M. F., lequel comportait une clause d'exclusivité, n'avait été conclu par la suite. La Cour de cassation estime qu'en l'état de ces motifs, fondés sur l'appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, et dès lors que l'utilisation, par un salarié, de son temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles il perçoit une rémunération de son employeur constitue un abus de confiance, la cour d'appel a justifié sa décision.
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