Lexbase Fiscal n°529 du 30 mai 2013 : Fiscalité internationale

[Questions à...] Convention fiscale France - Canada : la base de relations étroites entre les deux Etats - Questions à Louise Houle, Partner, Heenan Blaikie (Montréal, Canada)

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[Questions à...] Convention fiscale France - Canada : la base de relations étroites entre les deux Etats - Questions à Louise Houle, Partner, Heenan Blaikie (Montréal, Canada). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/8222005-questions-a-convention-fiscale-france-canada-la-base-de-relations-etroites-entre-les-deux-etats-ques
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par Sophie Cazaillet, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

le 30 Mai 2013

La France et le Canada ont toujours eu des relations très étroites, au vu de l'histoire mêlée de ces deux Etats. Notamment, les questions d'immigration ont toujours fait l'objet d'ententes entre ces pays. Les expatriations sont en nombre important, que ce soit dans un sens ou dans un autre. Outre la question de l'immigration, les flux économiques et juridiques sont denses. Ainsi, l'étude des relations fiscales conventionnelles existantes est indispensable et un préalable à tout engagement. Aujourd'hui, le Canada est une terre pleine de promesses pour les entreprises, leurs salariés, les étudiants, les entrepreneurs. Le Québec, province du Canada, et qui dispose du pouvoir de signer ses propres conventions fiscales internationales, a signé une convention avec la France dont les stipulations sont très proches de celles de la Convention franco-canadienne. De par sa proximité culturelle avec la France, et sa proximité géographique avec les Amériques, le Canada est un pays entre deux mondes, une passerelle ou un objectif. En 2010, près de 7 000 français avaient rejoint le Canada. Comment leur situation fiscale est-elle appréhendée dans pareil cas ? Pour en savoir plus sur les relations fiscales entre la France et le Canada, notamment au travers de la Convention fiscale franco-canadienne, signée à Paris le 2 mai 1975, Lexbase Hebdo - édition fiscale a interrogé Louise Houle, Partner, Heenan Blaikie (Montréal, Canada).

Lexbase : Pouvez-vous nous exposer la qualité des relations franco-canadiennes, notamment en termes d'immigration ?

Louise Houle : Les relations franco-québécoises sont celles qui sont les plus favorables à l'immigration des résidents de la France vers le Canada. Cette proximité culturelle entre la France et le Québec, ce partage de la même langue et plusieurs similitudes en matière industrielle facilitent l'adaptation au Québec par les immigrants de la France.

Le Québec, ayant son propre programme d'immigration distinct du programme fédéral (Canada), permet aux résidents de la France de se qualifier plus facilement aux exigences de pointage aux fins de l'immigration. En effet, un nombre de points important est automatiquement accordé aux immigrants de langue française. Le reste du pointage est attribué aux éléments suivants : l'âge, le niveau de scolarité, le domaine de formation, les séjours et/ou la famille présente au Québec. Un pointage additionnel est accordé pour la connaissance de la langue anglaise. De nombreux Français obtiennent des permis de travail sous le programme "Expérience internationale" (P.V.T. et Permis jeunes professionnels). De plus, le Québec et la France ont signé des "Ententes" favorisant la mobilité des professionnels leur permettant ainsi la reconnaissance de leurs qualifications universitaires et de leur droit d'exercice dans la province de Québec, le tout sujet à certaines formalités auprès de l'ordre professionnel auquel ils appartiennent.

Au niveau de l'imposition, le Canada et le Québec désirent favoriser l'immigration des gens fortunés. Un congé fiscal de cinq ans est accordé lorsqu'une fiducie d'immigration est mise en place avant l'arrivée au Canada et avant l'émission du visa de résident permanent. Les revenus générés par les actifs détenus par la fiducie d'immigration, ainsi que toute distribution de capital aux bénéficiaires, ne sont pas imposables au Canada pour les premiers 60 mois de résidence permanente au Canada.

Lexbase : Quel est le régime fiscal applicable aux particuliers au Canada (taxation des revenus du travail, du capital et des revenus de capitaux mobiliers) ?

Louise Houle : Tout d'abord, il faut savoir que le Canada a un régime fédéral d'imposition pour les résidents du Canada. Les individus sont assujettis à l'impôt fédéral à des taux progressifs calculés sur leurs revenus imposables. Le taux d'imposition fédéral marginal est de 29 %, applicable aux revenus supérieurs à 135 055 dollars canadiens. Des taux d'imposition moindres (15 % - 29 %) s'appliquent aux revenus imposables inférieurs à ce montant. Les individus qui résident au Canada ont notamment droit à des crédits d'impôts personnels, des crédits d'impôts pour dons et pour dépenses médicales. A cela s'ajoute un régime d'imposition propre à chaque province. Quant à la province de Québec, elle a choisi de percevoir elle-même les impôts provinciaux des résidents du Québec.

Bien entendu, le taux d'imposition provincial varie d'une province à l'autre. En 2013, les taux d'imposition combinés (fédéral et provincial) applicables au revenu d'emploi sont :

  • Canada et province de l'Ontario : 49,53 %
  • Canada et province du Québec : 49,97 %
  • Canada et province de l'Alberta : 39 %
  • Canada et province de la Colombie-Britannique : 43,70 %

Il est important de savoir qu'au Canada, il n'existe pas ce concept de "charges sociales", ni d'impôt sur la fortune, ni de droits sur les successions, ni d'impôts sur les mutations à titre gratuit, tels que vous les connaissez en France.

Quant au revenu des dividendes, il est imposé à un taux moindre (38,22 % ou 38,54 % -impôt fédéral et impôt Québec-, selon qu'il s'agisse d'un dividende déterminé ou autre). Enfin, les plus-values (gains en capital) sont imposées à un taux combiné (Canada-Québec) de 25 %.

Lexbase : Quelles sont les spécificités de la Convention fiscale franco-canadienne ?

Louise Houle : La Convention fiscale franco-canadienne est similaire aux autres conventions fiscales signées par le Canada, sauf qu'elle prévoit des mesures spéciales afin d'éviter la double imposition quant à l'impôt sur la fortune et à l'impôt sur les mutations à titre gratuit. En effet, au décès, le Canada et le Québec imposent les plus-values (gains en capital) accumulées du vivant par une disposition présumée des biens en immobilisation lors du décès. La Convention fiscale accorde ainsi un crédit d'impôt afin d'éviter toute double imposition au décès. Cette Convention contient aussi les clauses usuelles d'échange d'informations et de procédure amiable, mais ne contient pas la clause d'assistance mutuelle en matière de perception d'impôts impayés.

Une des particularités est que la Convention s'applique aux "personnes" et que celles-ci incluent spécifiquement les trusts. La France n'a pas l'habitude d'offrir une reconnaissance fiscale aux trusts.

Lexbase : La Convention fiscale franco-canadienne ne prévoit pas de levée du secret bancaire. Pensez-vous que ce soit un enjeu dans les relations entre les deux pays ?

Louise Houle : La Convention fiscale franco-canadienne permet l'échange de renseignements par les autorités fiscales compétentes relativement aux impôts visés, à savoir l'impôt sur le revenu et sur la fortune. Ainsi, toute information fiscale afférente à des revenus générés par des comptes bancaires au Canada est disponible sur demande par les autorités fiscales françaises.

Le concept de secret bancaire, tel qu'il est connu en Suisse, n'existe pas au Canada. Il existe cependant au Canada une obligation de confidentialité pour le banquier envers son client, mais ce devoir de confidentialité reste assujetti à l'obligation pour le banquier de fournir des informations aux demandes des administrations fiscales canadienne et québécoise.

Ce que la Convention fiscale franco-canadienne ne prévoit cependant pas est "l'assistance mutuelle" en cas de saisie au Canada pour dettes fiscales dues au Trésor français. Le Canada a accepté d'accorder l'assistance mutuelle dans certaines de ses conventions fiscales les plus récentes ou l'a accordée par protocole distinct. Semblable protocole n'existe pas entre le Canada et la France pour l'instant.

Lexbase : La Convention fiscale franco-québecoise diffère-t-elle sensiblement de la Convention franco-canadienne ?

Louise Houle : Nous avons une Convention fiscale entre la France et le Québec depuis le 1er septembre 1987, modifiée le 3 septembre 2002. Ceci est unique pour le Québec. Le Québec a l'habitude de ratifier et d'être lié par les conventions fiscales signées au niveau fédéral, sans adopter de convention fiscale particulière. La France est la seule exception.

La Convention fiscale franco-québécoise couvre spécifiquement les mêmes impôts que la Convention fiscale franco-canadienne, notamment l'impôt sur le revenu et sur la fortune. Il est donc assuré pour un résident de la province de Québec ou de la France, possédant des biens dans l'autre juridiction ou ayant des revenus dans les deux juridictions, de ne pas subir de double imposition quant à son impôt sur le revenu.

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