La lettre juridique n°568 du 1 mai 2014 : Éditorial

In vino poeanas : de l'ambiguïté du principe de précaution

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

le 01 Mai 2014


Tandis qu'un juge bourguignon condamnait un viticulteur bio à 500 euros d'amende pour avoir refusé de traiter ses vignes aux pesticides, malgré un arrêté préfectoral le lui imposant afin d'endiguer une épidémie dangereuse pour le secteur viticole, les juges bordelais condamnaient le propriétaire exploitant d'un cru périgourdin pour l'usage de pesticides, justement, usage ayant causé une maladie professionnelle à l'une de ses employés, alors qu'il ne pouvait pas ignorer leur dangerosité.

Dans le premier cas, la découverte de foyers de flavescence dorée près de Beaune avait obligé les autorités à prémunir l'ensemble des exploitations du secteur contre le développement mortifère du parasite ; le viticulteur condamné arguant au contraire de l'absence de nécessité d'user de pesticides toxiques pour l'environnement sur sa propre exploitation non infectée. Dans le second cas, l'exploitant viticole avait commis une faute "inexcusable" pour avoir exposé l'une de ses employés au pesticide Cabrio Top, moins de 24 heures après sa pulvérisation dans les vignes, provoquant céphalées, irritations de la peau et vomissements... et hospitalisation d'urgence.

Point d'incohérence, pourtant, dans tout cela ; mais ces deux affaires révèlent, une nouvelle fois, d'abord, que le principe de précaution est d'application complexe et nécessite une "Somme téléologique" au cas par cas à lui tout seul. Ensuite, si Montaigne, bordelais de son Etat, préférait douter que savoir, le doute ne profite plus aux innocents. Dans un cas, comme dans l'autre, la dangerosité révélée ou potentielle de l'infection comme celle du pesticide oblige à agir ; et parfois même de manière parfaitement opposée. L'essai n'est plus admis, la sécurité sanitaire exige des résultats certains sur le terrain. L'itérative remontrance judiciaire doit d'autant plus raisonner qu'une récente étude montre les effets perturbateurs endocriniens sur des enfants d'une exposition aux pesticides.

On pensait naïvement que tous les chemins menaient au rhum, quand finalement, avec ou sans pesticide -c'est selon-, ils doivent mener au bon vin. Si Pline l'Ancien recommandait l'usage de l'arsenic comme insecticide et croyait percevoir la vérité dans le vin, le juge contemporain tempère les ardeurs du naturaliste antique en rappelant que dans le vin peut résider la sanction...

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