Réf. : Cass. soc., 19 octobre 2022, n° 21-15.533, FS-B N° Lexbase : A02008QH
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par Lisa Poinsot
le 02 Novembre 2022
► En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l'un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d'examiner l'ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l'évaluation qu'il fait de l'indemnité à allouer au salarié.
Faits et procédure. Une salariée saisit la juridiction prud’homale en premier lieu pour voir prononcer la résiliation de son contrat de travail. Avant le prononcé de la décision judiciaire, son contrat de travail est rompu à l’initiative de l’employeur. De ce fait, la salariée conteste devant la juridiction prud’homale le bien-fondé de son licenciement.
La cour d’appel (CA Nancy, 25 mars 2021, n° 19/03401 N° Lexbase : A35904MW) déclare, tout d’abord, le licenciement de la salariée nul, en ce que l’employeur a reproché à celle-ci d’avoir saisi la juridiction prud’homale d’une demande en résiliation de son contrat de travail. Elle considère que ce grief est constitutif d’une atteinte à une liberté fondamentale.
Les juges du fond condamnent, ensuite, l’employeur à verser à la salariée la somme de 38 110 euros, équivalent à seize mois de salaire, pour licenciement nul. La cour d’appel retient, à ce titre, que les barèmes dit « Macron », prévus à l’article L. 1235-3 du Code du travail N° Lexbase : L1442LKM, ne sont pas applicables en cas de violation d’une liberté fondamentale. En outre, elle considère qu’il n’y a pas lieu d’examiner les autres griefs visés par la lettre de licenciement pour apprécier l’existence d’une cause réelle et sérieuse.
Enfin, l’arrêt ordonne à l’employeur de rembourser les allocations de chômage versées à la salariée à la suite de son licenciement, dans la limite de six mois.
L’employeur forme un pourvoi en cassation en soutenant que :
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi en précisant, selon l’article L. 1235-1 du Code du travail N° Lexbase : L8060LGM, que si l’employeur ne demande pas expressément aux juges d’examiner les autres griefs justifiant le licenciement du salarié, ces derniers n’ont pas à le faire d’office.
En l’espèce, la cour d’appel a retenu que l’un des griefs invoqués par l’employeur portait atteinte à la liberté fondamentale de la salariée d’agir en justice et a constaté que l’employeur ne critiquait pas, à titre subsidiaire, la somme réclamée par cette dernière en conséquence de la nullité du licenciement.
En pratique, lorsque l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, le licenciement est nul. Néanmoins, l’employeur a la faculté de demander aux juges si les autres motifs sont fondés et d’en tenir compte pour la fixation de l’indemnité versée au salarié qui n’est pas réintégré, dans le respect du plancher de six mois, prévu à l’article L. 1235-3-1 du Code du travail N° Lexbase : L1441LKL.
Autrement dit, en cas de demande expresse de l’employeur, le juge doit apprécier les autres causes de licenciement pour déterminer le montant de l’indemnité versée au salarié.
Par ailleurs, la Haute juridiction précise que le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées ne peut être ordonné que dans les cas limitativement énumérés par l’article L. 1235-4 du Code du travail N° Lexbase : L0274LM4, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La nullité du licenciement, Les conséquences pécuniaires, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E86274QL. |
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