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N2368BZQ
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par Julia Pinier-Rafer et Chloé Leduque, Doctorantes, Équipe de rechercher Louis Josserand, Université Jean Moulin Lyon 3
le 28 Juillet 2022
♦ CA Lyon, 6e ch., 8 avril 2021, n° 20/01598 N° Lexbase : A82234NU
♦ CA Lyon, 1re ch. civ. B, 16 mars 2021, n° 19/02620 N° Lexbase : A12344LB
♦ CA Lyon, 6e ch., 18 février 2021, n° 19/07991 N° Lexbase : A64534HH
♦ CA Lyon, 1re ch. civ. B, 2 février 2021, n° 19/07127 N° Lexbase : A33014EY
♦ CA Lyon, 1re ch. civ. B, 1 décembre 2020, n° 19/03727 N° Lexbase : A348338I
Un récent rapport de l’Insee sur le transport relevait dernièrement que durant l’année 2017, les ménages français ont consacré « 11 % de leur revenu disponible à la voiture » (T. Mainaud, Insee Première, n° 1855, avril 2021 [en ligne]). C’est ainsi qu’après le logement et l’alimentation, celle-ci constitue la part la plus importante des dépenses d’un ménage. Devenir propriétaire d’un véhicule n’est donc pas, en soi, un acte anodin. Qu’il soit neuf ou d’occasion, cet achat conséquent est régulièrement à l’origine de contentieux, principalement parce que les biens achetés ne sont pas toujours conformes aux stipulations contractuelles, qu’il s’agisse d’un simple défaut de conformité ou d’un véritable vice caché.
Pour pallier ces situations, l’acquéreur d’un véhicule peut faire appel à diverses actions juridiques, et notamment recourir à celle prévue par l’article 1641 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8 : la garantie des vices cachés. Le vendeur doit en effet garantir l’acquéreur contre les vices d’une chose qui pourraient la rendre impropre à l’usage auquel elle était destinée. Cette action permet donc à l’acquéreur dont le véhicule présente un vice indécelable au moment de la vente et le rendant totalement ou partiellement impropre à son usage normal – en l’occurrence la circulation – d’obtenir du vendeur, selon son souhait, la résolution du contrat (action rédhibitoire) ou la diminution du prix (action estimatoire).
Les magistrats, qu’il s’agisse des cours d’appel ou de la Cour de cassation, sont régulièrement appelés à se prononcer sur des questions touchant aux contentieux en matière de garantie des vices cachés. Rien d’étonnant alors à ce que la cour d’appel de Lyon, sur la période allant du mois de décembre 2020 au mois de mai 2021, ait pu juger non moins de cinq affaires y afférant. La lecture de ces décisions permet de retracer la mise en œuvre des conditions et effets de la garantie légale pour constater que les juges lyonnais règlent très strictement cet abondant contentieux.
I. Les conditions de mise en œuvre de la garantie des vices cachés
Pour invoquer la garantie des vices cachés, il est nécessaire que l’acquéreur démontre l’existence d’un vice inhérent à la chose qu’il vient d’acheter. En application de l’article 1641 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8, le vice doit alors présenter une gravité suffisante en rendant le bien impropre à son usage normal. Il doit, en outre, être nécessairement antérieur à la vente et ne pas être apparent.
Un vice non apparent. S’agissant, tout d’abord, de la condition tenant au caractère caché du vice, celui-ci doit donc être invisible et ignoré de l’acheteur. C’est le cas notamment « lorsqu’il ne se révèle pas à l’occasion de vérifications immédiates et d’investigations normales » (JurisClasseur Civil Code > articles 1641 à 1649, fasc. 30 : vente – Garantie légale contrats les vices cachés – Objet de la garantie : le vice caché, J. Huet). Les magistrats font alors preuve de bienveillance à l’égard de l’acquéreur profane, puisqu’il est généralement admis que le vice a effectivement un caractère non apparent lorsque le seul moyen de le découvrir est d’avoir recours à une expertise (v. not. en matière de véhicule automobile, CA Versailles, 25 mars 1988, D. 1988, IR 136 : est caché, le défaut du véhicule qui ne pouvait être décelé qu’après des essais sur des terrains variés, avec un moteur froid, et dont la découverte nécessitait des connaissances techniques supérieures à celle d’un automobiliste lambda ; de manière générale, v. Cass. civ. 3, 14 mars 2012, n° 11-10.861, FS-P+B N° Lexbase : A8791IEC, RDC 2013, p. 161, obs. Ph. Brun). C’est ainsi que la cour d’appel de Lyon suit une jurisprudence constante en la matière pour la vente de véhicule. Elle a pu considérer, en ce sens, que la corrosion importante d’une camionnette d’occasion décelée postérieurement à la vente par le biais d’un contrôle technique était un vice caché rendant le véhicule impropre à son usage normal. Dans cette affaire, les magistrats du second degré estimèrent que l’acheteur, au moment de la vente, ne pouvait déceler les vices affectant le véhicule par un examen à l’œil nu, ceux-ci n’ayant pu être révélés qu’après avoir placé le véhicule sur un pont élévateur et avoir réalisé un contrôle technique poussé. Ce n’est donc que postérieurement à la vente que les défauts affectant le bien – une corrosion perforant le châssis – pouvaient être décelés, obligeant alors la cour d’appel à constater leur caractère non apparent. Partant, la juridiction lyonnaise a pu alors prononcer la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés, tout en accompagnant cette sanction de l’engagement de la responsabilité du vendeur professionnel (CA Lyon, 6e ch., 18 février 2021, n° 19/07991 N° Lexbase : A64534HH).
Un vice antérieur à la vente et d’une gravité suffisante. Le caractère non apparent du vice ne suffit pas à prononcer la résolution de la vente sur le fondement de l’article 1641 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8. Il est nécessaire, en outre, que celui-ci soit antérieur à la vente, bien que la lettre des textes ne fasse pas expressément mention de cette exigence. Ces conditions sont cumulatives. Cependant, la preuve de l’antériorité n’est pas aisée à rapporter et il est nécessaire de préciser qu’elle pèse toujours sur l’acquéreur. Il ne s’agit là que des conséquences logiques de la règle selon laquelle la charge de la preuve pèse sur celui qui réclame l’exécution d’une obligation (C. civ., art. 1353 N° Lexbase : L1013KZK), ce dernier devant donc démontrer que les conditions d’application sont réunies (L. Leveneur, obs. sous Cass. civ. 1, 20 mai 2010, n° 08-21.576, F-D N° Lexbase : A3750EX8, Contrats conc. cons. 2010, comm. 199). La cour d’appel de Lyon a d’ailleurs eu l’occasion de rappeler, par un arrêt en date du 2 février 2021, les exigences légales en la matière. En l’espèce, entre la conclusion de la vente d’une voiture et la date du contrôle technique qui n’a constaté aucun défaut majeur le rendant impropre à la circulation, l’acquéreur du véhicule parcourut 524 kilomètres. Lors du premier trajet effectué avec ledit véhicule, celui-ci constata certains défauts, notamment sur les feux de croisement et de position, la fixation des roues et l’inclinaison du volant. Il demanda en appel la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés. La cour en refusa toutefois l’application de manière lapidaire. Elle estima, notamment, que le caractère antérieur du vice n’était pas démontré, puisque l’acquéreur avait parcouru une longue distance entre la conclusion du contrat et la constatation des désordres par le contrôle technique, et qu’il ne produisait pas d’élément de preuve suffisant pour établir l’antériorité du vice.
De plus, s’il est classiquement admis que le vice doit présenter une gravité suffisante de sorte qu’il rende la chose impropre à l’usage auquel elle est destinée (v. not. CA Nîmes, 18 décembre 1980, D. 1983, p. 29, note Ch. Larroumet pour des défauts d’agrément ne constituant pas un vice caché ; à l’inverse, Cass. civ. 1, 7 mars 2000, n° 97-17.511, publié au bulletin N° Lexbase : A4429CG7), cette gravité fait l’objet d’une appréciation différente en fonction des particularités d’espèce. Plus précisément, il faut remarquer qu’en matière de vente de biens d’occasion, les magistrats font preuve d’une plus grande sévérité en exigeant que les éléments relevés fassent état de « défauts d’une particulière gravité ». En la matière, l’acquéreur ne peut légitimement s’attendre à recevoir un bien d’une qualité équivalente à celle d’un bien neuf. S’il doit faire preuve d’une vigilance toute particulière (Cass. civ. 1, 10 mars 1993, n° 91-12.319, publié au bulletin N° Lexbase : A5735AHU, RTDCom. 1994. 98, obs. B. Bouloc), il ne peut, quoi qu’il en soit, espérer recourir aux sanctions de l’article 1641 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8 dans les mêmes conditions lorsqu’il achète un bien neuf ou un bien d’occasion. C’est ce que prend soin de rappeler la cour d’appel dans l’arrêt sous examen. En l’espèce, le vice caché n’est pas avéré suivant les constatations du contrôle technique, car « en matière de véhicule d’occasion, la garantie des vices cachés ne peut s’appliquer qu’à des défauts d’une particulière gravité échappant à l’examen attentif au moment de l’achat et rendant le véhicule impropre à l’usage auquel il était normalement destiné en tant que machine d’occasion, de tels véhicules présentant nécessairement un état d’usure ». La solution n’est pas nouvelle, la cour d’appel de Paris ayant eu l’occasion d’affirmer, dès 1963 que « l’acheteur doit s’attendre, en raison même de l’usure dont il est averti, à un fonctionnement d’une qualité inférieure à celui d’un véhicule neuf sortant de l’usine ; il faut admettre ainsi qu’en matière de vente d’automobiles d’occasion, la garantie prévue par l’article 1641 du Code civil ne peut s’appliquer qu’à des défauts d’une particulière gravité […] rendant le véhicule impropre à l’usage auquel il était normalement destiné en tant que machine d’occasion » (CA Paris, 6 novembre 1963, Gaz. Pal. 1964, p. 314 ; D. 1964, p. 253 ; RTDCiv. 1964, p. 573 et s., obs. G. Cornu.).
L’arrêt de la cour d’appel de Lyon présente donc le double avantage pour les juges lyonnais, de rappeler la stricte application des conditions cumulatives de l’article 1641 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8 (vice caché et antérieur à la vente) et les particularités d’appréciation de celles-ci en matière de vente de véhicules d’occasion (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 2 février 2021, n° 19/07127 N° Lexbase : A33014EY).
La charge de la preuve. Pour que la garantie des vices cachés trouve matière à s’appliquer, le vice ne doit pas simplement être caché et antérieur à la vente. Il doit, de plus, être prouvé par l’acquéreur (Cass. com., 12 octobre 2004, n° 03-12.632, FS-P+B N° Lexbase : A6135DDL). La cour d’appel a d’ailleurs eu l’occasion de rappeler cet impératif (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 16 mars 2021, n° 19/02620 N° Lexbase : A12344LB). Les juges lyonnais apportent un soin tout particulier à l’analyse de la preuve du vice caché par l’acquéreur en énonçant clairement qu’il « appartient à [celui-ci] de démontrer que sont réunies les diverses conditions de mise en œuvre [de l’article 1641 du Code civil], en ce qui concerne l’existence du vice, sa gravité, son caractère apparent et son antériorité par rapport à la vente ». Ils raisonnent alors sur la base d’une appréciation in concreto de chaque cas d’espèce, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière (v. en ce sens, Cass. com., 6 juillet 1999, n° 97-15.351, publié au bulletin N° Lexbase : A5196AWD, DMF 2000, p. 523, obs. Ph. Delebecque). Cette appréciation casuistique est d’autant plus frappante que dans l’arrêt du 18 février 2021, la cour d’appel accepte de caractériser l’existence d’un vice caché au regard d’une corrosion ayant endommagé le châssis, alors même qu’il a pu être jugé, par le passé, que l’état extrêmement dégradé d’un véhicule de quarante-cinq ans lié à une corrosion avancée, était un vice apparent dont l’acquéreur avait pu se convaincre lui-même (Cass. civ. 1, 1er juillet 2012, n° 10-27.250 N° Lexbase : A3544ICA, RD 2013, p. 161, obs. Ph. Brun). Enfin, les magistrats rappellent implicitement que le doute profite toujours au vendeur en refusant de faire jouer la garantie étudiée, « faute pour la société [se prévalant du vice caché], d’établir le caractère défectueux du châssis ».
La transmission de l’action dans le cadre d’une chaîne de contrats. L’arrêt du 16 mars 2021 est également l’occasion, pour la Cour, de rappeler que « dans le cadre d’une chaîne de contrats, l’action résultant d’un vice caché se transmet avec la chose de sorte qu’elle peut être exercée par le sous-acquéreur à la fois contre le vendeur intermédiaire et contre le vendeur originaire » (ibid.). En l’espèce, l’action qui fut rejetée faute de preuve, avait toutefois été déclarée recevable contre le vendeur en ce qu’elle avait été exercée par l’assureur de l’appelante contre le vendeur originaire. Or en la matière, il est établi de longue date que la garantie des vices cachés se transmet automatiquement avec le bien aux acquéreurs successifs (Cass. ass. plén., 7 février 1986, n° 83-14.631 et 84-15.189, publié au bulletin N° Lexbase : A2559AAZ, GAJC, t. 2, 13e éd., 2015, n° 268). La cour d’appel de Lyon applique donc strictement la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de chaînes de contrats.
En somme, quant au contentieux relatif aux conditions de mise en œuvre de la garantie des vices cachés devant la cour d’appel de Lyon, les juges demeurent fidèles, au fil des décisions, aux conditions de l’article 1641 du Code civil. Il en va de même quant aux effets de l’action.
II. Les effets de la garantie des vices cachés
Les effets de l’action : restitution du prix et indemnisation de l’acquéreur – Les effets de la garantie des vices cachés sont doubles. Au terme de l’article 1644 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8, « l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix [action rédhibitoire], ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix [action estimatoire] ». Le Code laisse donc à l’acquéreur le droit d’opter en faveur d’une de ces deux actions et lui accorde, en outre, la possibilité de bénéficier d’une indemnisation au titre du préjudice subi (sur le caractère autonome de l’action indemnitaire, v. not. Cass. com., 1 décembre 1984, Bull. civ. III, n° 352 ; Cass. com., 19 juin 2012, n° 11-13.176, FS-P+B N° Lexbase : A5033IP4, RTD civ. 2012, p. 741, obs. P.-Y. Gautier). Ainsi, seul le vendeur de mauvaise foi engage sa responsabilité lorsqu’il avait connaissance des vices au moment de la vente (C. civ., art. 1645 N° Lexbase : L1748ABD). Au contraire, s’il ignorait leur existence, il sera seulement tenu de restituer le prix et les frais occasionnés par le contrat (C. civ., art. 1646 N° Lexbase : L1749ABE). Classiquement, la jurisprudence fait peser sur le vendeur professionnel une présomption de mauvaise foi (Cass. civ. 1, 19 janvier 1965, n° 61-10.952, publié au bulletin N° Lexbase : A8455AXG, D. 1965, p. 389 ; plus spécialement à propos d’un garagiste, v. Cass. civ. 1, 9 octobre 1979, n° 78-12.502, publié au bulletin N° Lexbase : A4538AZ4, Bull. civ. I, n° 241). À l’inverse, les choses se compliquent sensiblement lorsque le vendeur est profane, comme en témoigne un arrêt de la juridiction lyonnaise en date du 8 avril 2021. Dans les faits, à la suite d’une vente de véhicule d’occasion entre particuliers, l’acquéreur a assigné en justice le vendeur afin que soit prononcée la résolution de la vente et la condamnation de ce dernier au paiement de dommages et intérêts pour des dysfonctionnements rendant le véhicule impropre à son usage. Le vendeur, profane, a été condamné à la restitution du prix, mais sa responsabilité, en revanche, ne fut pas engagée faute d’avoir pu démontrer qu’il avait connaissance des vices affectant le véhicule. Les deux parties ont interjeté appel. Après une jonction des procédures, la cour d’appel de Lyon a finalement confirmé la résolution de la vente. Mais à la différence de la première instance, le vendeur fut également condamné à une indemnisation des frais d’assurance. Cette condamnation en appel s’explique par les preuves rapportées par l’acquéreur (fausses factures) – qui n’étaient pas établies devant les juges du premier degré – démontrant que le vendeur ne pouvait ignorer les défauts du véhicule au moment de la vente. Par cette décision, les juges lyonnais rappellent expressément qu’aucune présomption de connaissance du vice ne pèse sur le vendeur profane. C’est bel et bien à l’acquéreur de démontrer que le vendeur non professionnel ne pouvait ignorer les vices inhérents à la chose au moment de la conclusion du contrat (CA Lyon, 6e ch., 8 avril 2021, n° 20/01598 N° Lexbase : A82234NU).
Encore une fois, les juges lyonnais restent fidèles aux sanctions classiques attachées à la garantie. Sans surprise, le constat n’est pas différent quant aux délais de l’action.
Les délais de l’action : les délais biennal et quinquennal. Pour que la garantie s’applique, encore faut-il respecter les délais stricts imposés par celle-ci. Selon l’article 1648 alinéa 1er du Code civil N° Lexbase : L9212IDK, l’action rédhibitoire doit être intentée dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Cependant, celle-ci est également enfermée dans le délai de prescription quinquennale de droit commun imposé en matière d’actions personnelles ou mobilières (C. civ., art. 2224 N° Lexbase : L7184IAC). La Cour de cassation rappelle régulièrement ce principe (v. notamment Cass. civ. 1, 8 avril 2021, n° 20-13.493, F-P N° Lexbase : A12774PY). Ici encore, la cour d’appel de Lyon reste fidèle à la lettre du Code. En l’espèce, un couple a acheté une Chevrolet le 20 juillet 2010 à un concessionnaire de la marque, pour un prix de 24 900 euros. Les acquéreurs constatent des désordres affectant le véhicule en 2014. Mais ce n’est que le 21 juillet 2015 qu’ils assignent le concessionnaire et la société Chevrolet France en garantie des vices cachés, et ce afin d’obtenir une diminution du prix cinq ans après la conclusion de la vente. Le double délai encadrant la garantie conduit toutefois les magistrats à rejeter leur demande, en première instance comme en appel. Le couple disposait en effet de deux ans pour agir à compter de la découverte du vice en 2015. Théoriquement, l’action en garantie n’était pas prescrite selon l’article 1648 du Code civil, le vice ayant été découvert moins d’un an auparavant. C’était toutefois sans compter sur la mise en œuvre de l’article 1648, car sur le terrain du droit commun, l’action était prescrite depuis le 20 juillet 2015. C’est pourquoi, très logiquement, sans s’attarder sur la vérification de la réunion des conditions de mise en œuvre de la garantie, la cour d’appel a confirmé le jugement de première instance en déclarant simplement l’action irrecevable sans aucune autre forme de justification (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 1 décembre 2020, n° 19/03727 N° Lexbase : L9212IDK). L’on peut néanmoins regretter, sur ce point, le manque de motivation des juges lyonnais, qui, laissant le soin au concessionnaire et à la société Chevrolet de développer, dans leurs conclusions, l’analyse du délai de prescription de la garantie, ne rappellent pas le principe et se contentent de déclarer l’action irrecevable. Cette motivation succincte est malheureuse tant la question de la prescription en matière de vices cachés peut parfois susciter des difficultés. L’on pense notamment aux problématiques liées à la recevabilité des actions en matière de ventes successives de véhicules automobiles entachés d’un vice découvert tardivement par le dernier acquéreur (v. notamment en ce sens, Cass. civ. 1, 6 novembre 2019, n° 18-21.481, publié au bulletin N° Lexbase : A3969ZUK, obs. H. Gourdy, « La fonction du délai de prescription de droit commun en matière de garantie des vices cachés : une mise à l’épreuve », D. 2020, p. 919). Mais tel n’est déjà plus le débat…
Finalement, il ressort de cette analyse que l’action en garantie des vices cachés lors d’une vente de véhicule fait l’objet d’un lourd contentieux devant la cour d’appel de Lyon. En quelques mois, pas moins de cinq arrêts ont été rendus sur la question. Pourtant, la juridiction lyonnaise demeure très conservatrice et n’accorde que peu de place à l’originalité. Les règles relatives à la garantie sont strictement appliquées par les juges. Or le contentieux ne se tarit pas. Peut-être, au fond, acheteurs et vendeurs de véhicules mériteraient d’être davantage informés sur cette garantie pour diminuer les conflits… Un nouveau rôle pour les assureurs pourrait-il alors être en train de se dessiner ?
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