Cahiers Louis Josserand n°1 du 28 juillet 2022 :

[Doctrine] La jurisprudence de la cour d’appel de Lyon relative au cautionnement (2016-2020)

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N2360BZG

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par Le Master 2 Culture judiciaire (Université Jean Moulin Lyon 3), promotion 2020-2021* – Sous la direction du Professeur Pascale Deumier - avec l’aide du Professeur Olivier Gout - Équipe Louis Josserand – Université Jean Moulin Lyon 3

le 28 Juillet 2022

*Liste des contributeurs : Rémi Antoine, Olivia Charrier, Candice Desseigne, Agathe Detz, Juline Hugouvieux, Laurène Klak, Maé Lallemand, Marion Lamelyn, Syriane le Dantec, Myriam Maama, Alix Marchaud, Cédric Marroco-Sage, Lucas Montessuy, Marine Olivier, Léo Pacard-Flammini, Juliette Saintin, et Albanne Sutter.

Mots-clés : jurisprudence, cautionnement 

Cet article présente une étude réalisée par le Master 2 Culture judiciaire (Université Jean Moulin Lyon 3) de septembre à février 2021, et dont l’objet est le contentieux relatif au cautionnement par la cour d’appel de Lyon. Cette analyse a pris en compte les arrêts rendus du 1er janvier 2016 au 9 octobre 2020 par cette cour. En utilisant la base jurisprudence du site Lexis 360, nous avons étudié 429 arrêts, qui touchaient à divers problèmes de droit, tant sur les conditions de formation que d’exécution du contrat de cautionnement. Afin de rendre notre propos le plus pertinent possible, nous avons décidé de focaliser notre attention sur cinq problèmes de droit, particulièrement caractérisés par leur fréquence, et leur intérêt sur le plan juridique. Le premier objectif de cette étude est d’analyser concrètement la manière qu’ont les juges du fond d’appréhender les problèmes de droit relatifs au cautionnement.

Case law, surety

This article focuses on a study conducted by the students from the Judicial Culture Master’s law degree (Master 2 Culture judiciaire of University Jean Moulin Lyon 3) from September 2020 to February 2021. The paper looks into the issue of dispute relating to surety in the Court of Appeal of Lyon. This study has analysed rulings handed down by this Court of Appeal from 1st January 2016 to 30th September 2020. Using Lexis 360, a website offering extensive legal ressources, 429 rulings dealing with several legal issues relating from the formation to the performance of the surety’s contract have been reviewed. To be as relevant as possible, it has been decided to focus on five particularly difficult legal issues, which appear to be both the most frequent and relevant to this article. The primary purpose of this study is to analyse in concreto the way Lyon’s Court of Appeal judges comprehend the legal issues relating to surety.

Ce travail ayant été réalisé dans le cadre de notre Master 2 Culture judiciaire, nous avons dû travailler tous ensemble, et choisir une approche méthodologique précise afin de réaliser un rapport sur la jurisprudence de la cour d’appel de Lyon, relative au cautionnement. Pour analyser les 429 arrêts rendus par la cour d’appel sur cette thématique, nous avons élaboré trois types de grilles : une de droit commun et deux de droits spéciaux, à savoir la loi sur les baux d’habitation de 1989 et le Code de la consommation. En effet, en matière de cautionnement, le droit spécial trouve majoritairement à s’appliquer et notamment le Code de la consommation, qui s’applique dans 357 arrêts sur 429.

La détermination des problèmes de droit récurrents est ce qui a le plus orienté notre analyse. Ces problèmes de droit étaient divers. D’une manière générale, ils se rencontrent à toutes les étapes d’existence du contrat de cautionnement, de sa formation à son extinction. En utilisant deux critères, celui de la fréquence et celui de la pertinence, nous nous sommes rendu compte que cinq problèmes de droit méritaient notre attention. Par ordre d’importance, il s’agit de la disproportion du contrat de cautionnement, les manquements au devoir d’information, l’erreur sur le formalisme de l’engagement de la caution, les vices du consentement et enfin le manquement au devoir de mise en garde.

Pour étudier la façon dont la cour d’appel de Lyon répond à ces différentes questions, nous commencerons par analyser les problèmes de droit relatifs aux conditions de validité du contrat de cautionnement (I), puis ceux relatifs à son exécution (II).


I. Les conditions de validité du contrat de cautionnement

Au titre des conditions de validité du contrat de cautionnement, le problème majeur est celui de la disproportion de l’engagement (A). On retrouve aussi celui concernant les vices du consentement, dont l’erreur et le dol (B), et celui qui a trait au formalisme de l’engagement de la caution (C).

A. La disproportion de l’engagement de la caution : la prétention principale des justiciables dans la recherche de la remise en cause du cautionnement

Disproportion comme condition de validité. Nous avons fait le choix de traiter la disproportion dans les conditions de validité du contrat, dans la logique du Code de la consommation, qui est le fondement légal le plus invoqué.

Observations statistiques. Dans plus de 50 % des arrêts de la cour d’appel de Lyon, la disproportion de l’engagement se trouve invoquée. Sur la totalité des 429 arrêts traités, la disproportion a été en cause dans 225 arrêts.

Une prétention majoritaire appuyée par le droit positif. L’article L. 341-4 du Code de la consommation N° Lexbase : L1602LRR prévoit qu’un « créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ». Cet article a un champ d’application large concernant les parties : la caution doit être une personne physique, mais peu importe qu’elle soit commerçante ou dirigeante de société. Ainsi, l’associé gérant peut se prévaloir de la disproportion du cautionnement (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 5 juillet 2018, n° 16/02073 N° Lexbase : A3084XW7). De même, la protection s’applique à toute caution personne physique, qu’elle soit profane ou avertie. Le créancier doit avoir la qualité de professionnel, tel qu’assureur ou banquier. Aussi, le contrat de cautionnement, en raison des parties qui sont en jeu, se prête à la disproportion.

La disproportion présente également l’avantage de ne pas mettre en cause directement le créancier. Il s’agit d’une analyse factuelle entre deux ordres de grandeur : le montant de l’engagement par rapport au patrimoine de la caution. Il n’y a donc pas d’impact sur la réputation du créancier professionnel, à l’inverse d’un manquement au devoir de mise en garde, qui fait état d’une faute du créancier professionnel.

Du point de vue de la preuve de la disproportion, il existe une division de la charge de la preuve fondée notamment sur l’article L. 341-4 du Code de la consommation N° Lexbase : L1602LRR. De ce fait, la disproportion de l’engagement est un moyen double. En effet, la caution peut s’en servir pour prouver l’existence de la disproportion au moment de la souscription de l’engagement. Réciproquement, le créancier professionnel peut s’en servir pour prouver l’existence de ce qu’on nomme « le retour à meilleure fortune ». Caution et créancier sont donc, selon les arrêts, partie intimée ou partie appelante, faisant valoir leurs prétentions respectives sur la base du même moyen, à savoir la disproportion de l’engagement.

Par ces avantages, on peut comprendre l’attractivité de ce moyen juridique par les requérants.

L’appréciation de la disproportion : une appréciation souveraine et in concreto des juges du fond. Notre travail de recherche démontre que la reconnaissance du caractère disproportionné du cautionnement n’est pas consacrée de façon majoritaire. Autrement dit, il ne suffit pas d’invoquer la disproportion pour qu’elle soit automatiquement admise par les juges du fond.

Au regard des données chiffrées, nous avons observé que les juges du fond soumettent la question de la disproportion du cautionnement à une appréciation souveraine et in concreto. Ils apprécient, au regard des circonstances particulières du cas d’espèce qui leur est soumis, si l’engagement de la caution est disproportionné par rapport à ses ressources personnelles. Par conséquent, nous avons pu analyser une forte casuistique dans les arrêts portant sur le contentieux de la disproportion, entraînant une imprévisibilité de la jurisprudence en la matière. C’est ce qui explique que dans son appréciation, la cour d’appel de Lyon relève minutieusement tous les éléments d’actif et de passif de la caution (en ce sens : CA Lyon, 1re ch. civ. A, 5 juillet 2018, n° 16/03325 N° Lexbase : A2674XWX).

Parallèlement, nous avons observé que si la disproportion est peu retenue, c’est parce que la reconnaissance du caractère disproportionné du cautionnement est étroitement liée à la détermination subjective des biens et revenus de la caution. Pour ce faire, les juges du fond s’en tiennent aux déclarations faites par la caution au moment de son engagement. À titre d’exemple, cela est explicité dans un arrêt de la première chambre civile A de la cour d’appel de Lyon en date du 21 mars 2019 n° 16/06850 N° Lexbase : A5511Y4U : « l’appréciation de la disproportion doit être effectuée au vu des déclarations de la caution concernant ses biens et revenus ». Or la caution peut avoir tendance à présenter son patrimoine sous un jour favorable au moment de conclure, ne reflétant pas sa véritable situation financière et empêchant ainsi, ultérieurement, l’observation de la disproportion quand la caution l’invoque.

Une appréciation circonscrite à la disproportion manifeste. N’étant généralement pas consacrée par les juges du fond, il semble que la disproportion soit appréciée de manière relativement stricte par les juges de la cour d’appel de Lyon. Il résulte d’ailleurs des exigences légales, l’existence d’une disproportion dite « manifeste », que la cour a notamment explicitée dans un arrêt du 10 octobre 2019 (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 10 octobre 2019, n° 17/04221 N° Lexbase : A8238ZQ8). Il est nécessaire qu’au jour de la conclusion du contrat ou, le cas échéant, au jour où la caution sera actionnée, il y ait une certitude quant au fait que le montant du contrat de cautionnement excède les capacités financières de la caution.

L’analyse précise des arrêts rendus par la cour d’appel en la matière permet de constater que, dès lors que l’on procède à un rapport entre le montant du contrat de cautionnement et l’actif de la caution, dans 70 % des cas, le montant du contrat de cautionnement représentait moins de 100 % de son actif. Cela permet de donner un premier élément de réponse quant à l’appréciation de la disproportion manifeste par ces juges ; on pourrait avoir l’impression que les juges sont face à des cautions qui s’engagent pour des montants qui ne semblent finalement pas toujours particulièrement élevés par rapport à leurs capacités. Mais quand on prend en compte la totalité du passif de la caution (en incluant le contrat de cautionnement) par rapport à l’actif, celui-ci est supérieur à l’actif dans 74 % des cas. Si on compare l’intégralité du passif aux seuls revenus annuels, la disproportion est plus flagrante : dans 100 % des cas, le passif est supérieur aux revenus. On voit donc que la disproportion manifeste suppose un rapprochement flagrant entre le taux d’actif et le taux de passif. Inversement, si ceux-ci ne sont pas comparables, et que le taux de passif est bien inférieur, la disproportion ne sera pas retenue. Il est possible ici de mentionner un arrêt (CA Lyon, 3e ch. civ. A, 28 avril 2016, n° 15/04121 N° Lexbase : A4036RL3) : l’appelant invoquait la disproportion de son engagement pour un montant de 82 160 euros, tandis qu’il avait déclaré des revenus mensuels de 6 000 euros ainsi qu’un patrimoine immobilier de 1,3 million d’euros. Dans ces conditions la disproportion n’a pas été reconnue par les juges du fond, car le rapport entre actif et passif ne le justifie pas.

Preuve de la disproportion. C’est à la caution d’apporter la preuve du caractère manifeste de la disproportion. À ce propos, dans un arrêt (CA Lyon, 3e ch. A, 5 janvier 2017, n° 15/08142 N° Lexbase : A7952SY8), les juges n’ont pas été en mesure de consacrer le caractère manifestement disproportionné de certains engagements, à défaut de renseignements suffisants quant au patrimoine et ressources personnelles.

La disproportion est donc un moyen très invoqué, mais peu retenu. Toujours dans les conditions de validité, on trouve les vices du consentement qui, à côté de la disproportion, sont moins prisés par les justiciables.

B. Les vices du consentement : le dol et l’erreur

Considérations préalables sur les autres vices du consentement (hormis le dol et l’erreur). On peut remarquer que le vice du consentement tendant à la violence économique n’a pas été invoqué par les requérants à l’exception d’un arrêt (CA Lyon, 3e ch. A, 13 septembre 2018, n° 17/04662 N° Lexbase : A4299X4Y). Mais, dans cet arrêt, la cour d’appel a préféré reconnaître le dol. Le lien de dépendance aurait sûrement pu être caractérisé, mais pas l’octroi d’un avantage manifestement excessif. La quasi-absence de la violence économique dans le contentieux peut aussi s’expliquer par sa consécration législative en 2016, lors de la réforme du droit des obligations, alors que la plupart des arrêts traités concernent des contrats souscrits avant 2016, pour laquelle la jurisprudence était encore hésitante. D’ailleurs, dans un arrêt du 8 décembre 2016 (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 8 décembre 2016, n° 14/01752 N° Lexbase : A5350SYS), bien que la cour d’appel parle de « violence économique », elle se fonde pourtant pour rejeter la demande sur la violence classique telle qu’envisagée par les articles 1112 N° Lexbase : L1200AB3 et 1131 anciens du Code civil N° Lexbase : L1231AB9.

Observations statistiques générales. Dans les trois types de grilles, les vices du consentement largement invoqués sont l’erreur et le dol. Ils représentent 67 arrêts sur 429. Cela représente donc environ 15,6 % du contentieux (arrondi au 10e près). Le vice du consentement n’est donc pas un moyen très invoqué par les justiciables. 66 % des arrêts concernent le dol (44 arrêts), et 34 % des arrêts concernent l’erreur (23 arrêts). L’erreur est donc un moyen moins avancé que le dol.

Analyses statistiques du contentieux relatif au dol. Dans 89 % des cas (soit 39 arrêts), il n’a pas été retenu par la cour d’appel. Ainsi, les 11 % d’admission représentent 5 arrêts. Sur les 5 arrêts où le dol a été retenu, on retrouve les deux hypothèses classiques de la réticence dolosive et des manœuvres frauduleuses.

Appréciation des manœuvres frauduleuses. Celles-ci sont reconnues dans deux arrêts. Dans un arrêt (CA Lyon, 3e ch. A, 13 septembre 2018, n° 17/04662 N° Lexbase : A4299X4Y) il était question de la régularisation du contrat de cautionnement initial, qui devait être rapide pour que la caution obtienne les fonds. Il y a ici la prise en compte d’un caractère temporel : l’urgence à laquelle étaient confrontées les parties pour pouvoir obtenir leur crédit. Dans la deuxième hypothèse, on retrouve un cas classique de manœuvre frauduleuse à savoir un mensonge non équivoque (CA Lyon, 8e ch., 26 juin 2018, n° 17/05754 N° Lexbase : A9267XTE).

Refus des manœuvres frauduleuses. Nous pouvons évoquer une hypothèse qui concerne le cas où la banque ne donne pas assez d’informations à la caution sur l’application d’un organisme de garantie tiers nommé OSEO (CA Lyon, 3e ch. A, 12 avril 2018, n° 16/09175 N° Lexbase : A8783XKI ; CA Lyon, 1re ch. civ. B, 13 juin 2017, n° 16/02814 N° Lexbase : A6094WH8) ou encore le fait que la banque n’a pas donné assez d’informations sur la cession d’un fonds de commerce, alors que cette cession est extérieure au contrat de cautionnement (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 18 septembre 2018, n° 17/01828 N° Lexbase : A2107X78). Ces hypothèses recouvrent largement celles de la réticence dolosive (infra), ce qui montre que la distinction entre les deux types de dol n’est pas forcément très établie en pratique. Les requérants préfèrent invoquer généralement la réticence dolosive.

La réticence dolosive : distinction avec les autres vices du consentement. Elle se distingue parfois difficilement de l’erreur, car cette dernière peut porter sur la solvabilité du débiteur. Or la réticence dolosive peut également venir de la connaissance par le créancier de la situation irrémédiablement compromise du débiteur (CA Lyon, 3e ch. A, 3 octobre 2019, n° 17/08119 N° Lexbase : A3679ZQC ; CA Lyon, 1re ch. civ. A, 15 juin 2017, n° 15/05447 N° Lexbase : A0167WIZ). Aussi, ces deux vices peuvent être invoqués simultanément, donnant parfois lieu à une seule motivation par la cour (CA Lyon, 3e ch. A, 11 octobre 2018, n° 17/00782 N° Lexbase : A1386YGG ; CA Lyon, 3e ch. A, 11 octobre 2018, n° 17/00783 N° Lexbase : A1098YGR).

Le dol peut aussi se distinguer difficilement du devoir de mise en garde, surtout lorsqu’il porte sur la solvabilité du débiteur. À ce titre, la cour d’appel rappelle que le requérant doit bien prouver l’existence d’une réticence dolosive, indépendamment du devoir de mise en garde (CA Lyon, 3e ch. A, 24 octobre 2019, n° 18/03655 N° Lexbase : A4691ZSK). Dans ce même arrêt, la cour d’appel rappelle que la qualité de caution non avertie n’a pas d’incidence sur le contentieux concernant le dol, a contrario de celui concernant le devoir de mise en garde.

La réticence dolosive : incidence des parties au contrat. La qualité de la personne a pu tout de même être un élément pris en compte par les juges du fond lorsque la réticence dolosive portait sur l’insolvabilité du débiteur. La cour prend en compte le fait que les cautions soient les parents du débiteur (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 11 juin 2019, n° 17/07606 N° Lexbase : A0184ZEK), ou le fait que la caution soit la personne physique gérante de l’entreprise cautionnée (CA Lyon, 3e ch. A, 3 octobre 2019, n° 17/08119 N° Lexbase : A3679ZQC).

Lien entre réticence dolosive et devoir d’information. Nous pouvons citer l’hypothèse de la rétention d’informations tenant à l’absence de transmission d’éléments essentiels du crédit garanti (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 2 juillet 2020, n° 18/02277 N° Lexbase : A21503QP). La réticence dolosive est liée au devoir d’information, très prégnant dans le contentieux relatif au cautionnement. Les requérants invoquent parfois directement des dispositions de droit spécial, autre que le Code de la consommation, prévoyant un devoir d’information pour justifier l’existence d’une réticence dolosive (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 18 septembre 2018, n° 17/01828 N° Lexbase : A2107X78) ; ici, la réticence dolosive invoquée se fondait expressément sur le devoir d’information des articles L. 141-1 et suivants du Code de commerce N° Lexbase : L7634LBD.

La réticence dolosive concernant la situation irrémédiablement compromise du débiteur. Outre le fait que la qualité de la caution pouvait jouer (supra), un autre critère a pu être pris en considération : le critère du temps. C’est en se fondant sur ce critère, notamment, le délai entre la souscription de l’engagement et la dénonciation, que la cour a pu déduire une réticence dolosive (CA Lyon, 3e ch. civ. A, 7 avril 2016, n° 15/01156 N° Lexbase : A7280RBA). Cela concerne aussi le délai entre la souscription de l’engagement de la caution et l’intervention d’une procédure collective, qui est apprécié strictement : un délai de deux mois entre la souscription de l’engagement de la caution et le début de la procédure collective ne suffit pas à prouver une réticence dolosive (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 20 décembre 2018, n° 16/04067 N° Lexbase : A3674YRI). A fortiori, un délai de cinq mois ne suffit pas non plus (CA Lyon, 3e ch. A, 3 octobre 2019, n° 17/08119 N° Lexbase : A3679ZQC). En outre, le fait que les comptes du débiteur aient été déficitaires au moment de la souscription du contrat de cautionnement et le refus d’un prêt à ce débiteur ne suffisent pas non plus à prouver la réticence dolosive (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 11 juin 2019, n° 17/07606 N° Lexbase : A0184ZEK).

Cela montre que l’appréciation de la réticence dolosive concernant la situation irrémédiablement compromise du débiteur est très stricte, à tel point qu’elle n’a jamais été reconnue par la cour d’appel de Lyon entre 2016 et 2020.

La réticence dolosive concernant des éléments du contrat de cautionnement. La réticence dolosive peut concerner d’autres informations dont l’importance est déterminante pour le consentement de la caution. Notamment, cela a été retenu concernant le montant des échéances, le coût de l’assurance et le taux effectif global du contrat (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 2 juillet 2020, n° 18/02277 N° Lexbase : A21503QP ; CA Lyon, 1re ch. civ. A, 21 janvier 2016, n° 14/04153 N° Lexbase : A3228N4C). Pour autant, on ne peut pas en déduire un principe général. En effet, dans un autre arrêt rendu par la cour d’appel, celle-ci dit que l’absence de ces mêmes informations ne peut constituer une réticence dolosive en l’absence de tout autre élément.

Des cas de réticences dolosives ont également pu être invoqués par les requérants concernant le manque de compréhension de la portée de leur engagement. Généralement, il était question de contrats annexes au contrat de cautionnement initial, souscrits avec des organismes de garantie (cela concerne principalement la garantie OSEO). En effet, ils l’invoquent de manière récurrente (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 13 juin 2017, n° 17/02814 ; CA Lyon, 3e ch. civ. A, 12 avril 2018, n° 16/09175 N° Lexbase : A8783XKI), croyant que cette garantie empêcherait les cautions d’être appelées en paiement. Les requérants évoquent ainsi une réticence dolosive, mais la cour apprécie strictement la portée de l’engagement de la caution en faisant une distinction entre les différents contrats. Il s’agirait ici d’un critère formel (contrats distincts) et non matériel, permettant d’assurer d’autant plus le principe d’effet relatif des contrats. La cour d’appel rappelle que le caractère inexpérimenté de la caution ne compte pas afin d’apprécier si celle-ci a compris son engagement dans le cautionnement initial (CA Lyon, 3e ch. A, 11 octobre 2018, n° 17/00783 N° Lexbase : A1098YGR).

Dès lors, la cour s’attache à l’engagement pris par écrit (CA Lyon, 3e ch. A, 11 octobre 2018, n° 17/00783 N° Lexbase : A1098YGR), et interprète celui-ci de manière littérale (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 6 novembre 2018, n° 17/03707 N° Lexbase : A0911YKX), qui considère que l’inscription « la société OSEO garantit à hauteur de 50 % », ne signifie pas que l’engagement de la caution en ait pour autant été réduit). Il y a une distinction stricte faite entre les contrats, et a fortiori entre les parties au contrat avec lesquelles la caution s’engage. Pour toutes ces raisons, nous observons que la reconnaissance du dol est strictement encadrée.

Analyse du contentieux relatif à l’erreur. Sur les 23 arrêts où l’erreur a été invoquée, celle-ci n’a jamais été retenue par la cour d’appel.

Appréciation de l’erreur par la cour d’appel. En théorie, elle ne peut concerner que l’erreur sur l’étendue des garanties, ou sur la solvabilité du débiteur, qui semblent être des qualités essentielles dans le cadre d’un contrat de cautionnement.

Le mécanisme de l’erreur sur la solvabilité du débiteur n’a presque pas été invoqué, ce qui peut s’expliquer par le fait que, dans une grande majorité des cas, spécifiquement dans le cadre du droit de la consommation, la caution est souvent le dirigeant personne physique du débiteur personne morale. Dès lors, les deux étant les mêmes personnes, il est préférable d’invoquer la disproportion. Dans des cas isolés, des hypothèses faisant référence à l’erreur sur la solvabilité du débiteur ont pu être invoquées, mais c’est la réticence dolosive qui a été retenue (supra). Nous pouvons expliquer cela par le fait que la réticence dolosive s’apprécie en fonction du comportement du créancier, alors que l’erreur s’analyse du point de vue de la caution. Dans la mesure où le créancier est une banque ayant des informations sur le débiteur, il semble plus adéquat que les cautions invoquent la réticence dolosive.

Toutefois, il a plus souvent été question de l’erreur sur l’étendue des garanties que la caution a elle-même souscrit avec un organisme de garantie tiers. Cette erreur est souvent invoquée avec la réticence dolosive démontrant que la frontière avec celle-ci semble floue, à tel point que les deux moyens sont parfois avancés en même temps (CA Lyon, 3e ch. civ. A, 11 octobre 2018, n° 17/00783 N° Lexbase : A1098YGR), donnant lieu à la même motivation par la cour. Il s’agit ici d’une erreur sur l’étendue des garanties, puisque cela concerne les clauses contenues dans un engagement unilatéral avec l’organisme de garantie OSEO. La cour, comme pour la réticence dolosive, distingue bien ce contrat du contrat de cautionnement qui lie la caution au créancier. En effet, la cour d’appel fait ici encore une application stricte de l’effet relatif des contrats puisqu’elle ne retient pas l’erreur lorsque le requérant s’est trompé sur les termes d’un autre contrat (CA Lyon, 3e ch. A, 18 mai 2017, n° 16/00920 ; CA Lyon, 1re ch. civ. B, 18 septembre 2018, n° 17/01828 N° Lexbase : A2107X78).

Après avoir évoqué les conditions de fond de la validité du contrat de cautionnement, nous allons nous intéresser à présent aux conditions de forme.

C. Les conditions de forme : l’erreur sur le formalisme de l’engagement de caution

Observations statistiques. La question de l’erreur sur le formalisme de l’engagement de cautionnement est le troisième problème de droit le plus récurrent rencontré par la cour d’appel de Lyon. Entre 2016 et 2020, elle a fait l’objet de 73 arrêts sur 429 et a concerné toutes les chambres. Parmi ces 73 arrêts, 13 relèvent de l’application de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH, 56 du droit de la consommation et 4 dépendent du droit commun.

Le critère de reconnaissance d’une erreur sur le formalisme. Il s’agit de comprendre comment les chambres caractérisent ou rejettent la constitution d’une erreur sur le formalisme. Nous constatons que sur 73 arrêts rendus entre 2016 et 2020 relatifs à ce problème de droit, les chambres ont retenu cette erreur vingt-huit fois ce qui représente 38 % des affaires. Plusieurs erreurs sont fréquemment caractérisées par les chambres, mais la plus courante concerne les carences de certains mots ou de certains morceaux de phrases dans les actes de cautionnement. À titre d’exemple, la troisième chambre civile A a pu retenir ce motif six fois sur ses 10 décisions retenant l’erreur de formalisme.

Pour les autres motifs ayant caractérisé l’erreur de formalisme selon la cour d’appel, il s’agit principalement de l’absence de signature de la caution, le fait que l’engagement ne soit pas rédigé directement de la main de la caution comme le prévoit la loi, ou encore l’absence de durée de l’engagement ou du montant de la caution en lettres. Cependant, il apparaît difficile de dégager plusieurs critères communs entre les chambres qui permettent de retenir l’erreur de formalisme tant les situations traitées divergent entre elles. Un arrêt (CA Lyon, 8e ch., 12 septembre 2017, n° 15/07075 N° Lexbase : A4463WRQ ) illustre cela puisque la cour n’a pas retenu l’erreur de formalisme pour absence de montant en lettres alors qu’elle l’a fait en 2018 dans un autre arrêt.

C’est donc en général l’absence d’un élément devant figurer dans les mentions manuscrites qui est le principal critère retenu par la cour pour caractériser l’erreur de formalisme.

La non-reconnaissance de l’erreur. Les cas où l’erreur de formalisme n’est pas retenue par la cour d’appel représentent la majeure partie des arrêts. En effet, sur notre échantillon général de 73 décisions, 45 arrêts ne retiennent pas l’erreur de formalisme, ce qui représente 62 % de refus. Après l’analyse qualitative d’un échantillon d’une quinzaine de ces arrêts, nous pouvons distinguer quelques critères justifiant ce refus. Tout d’abord, la cour d’appel écarte l’erreur de formalisme dans les cas où les parties font preuve d’une mauvaise foi manifeste. Les chambres choisissent soit de rejeter cette prétention, soit de la requalifier en dol. C’est le cas lorsque la caution revendique que l’écriture apposée sur l’engagement de caution ne relève pas de sa main, mais que l’expert graphologique atteste du contraire (CA Lyon, 3e ch. civ. A, 20 septembre 2018, n° 15/07007 N° Lexbase : A4516X7E). Ensuite, les chambres rejettent aussi l’erreur lorsque l’engagement correspond à une autre forme de cautionnement et que ce dernier peut ainsi être requalifié. Par exemple, dans un arrêt (CA Lyon, 8e ch., 8 novembre 2018, n° 17/04762 N° Lexbase : A8404YKH), les juges ont considéré que l’absence du mot « solidairement » ne constitue pas une erreur, mais une requalification de l’engagement en un cautionnement simple.

La position jurisprudentielle de la cour en matière de nullité selon les différents types d’erreurs. Bien qu’une erreur puisse être reconnue, celle-ci n’entraîne pas nécessairement la nullité. Cette subtilité est introduite par un arrêt de la Cour de cassation entre les erreurs matérielles et les erreurs qui affectent le sens et la portée de l’engagement (Cass. civ. 1, 11 septembre 2013, n° 12-19.094, FS-P+B+I N° Lexbase : A1490KLR) et semble avoir été reprise par les juges du fond. Cette distinction a permis d’analyser les effets de cette erreur lorsqu’elle est retenue, afin de déterminer si elle entache ou non la compréhension et le sens du contrat pour la caution.

Analyse du régime des nullités en application de la loi de 1989 sur les baux d’habitation. Si la réforme du 23 novembre 2018 a permis de simplifier considérablement le formalisme en exigeant simplement une signature de la caution à la suite des mentions dactylographiées, le contentieux avant 2018 a été particulièrement dense notamment sur la retranscription des mentions manuscrites de l’article 21-1 de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH. C’est ce contentieux qui a été abordé devant la cour d’appel de Lyon. Cette dernière ne retient pas, comme étant une nullité, l’absence de montant du cautionnement en lettres, même lorsque ce montant en lettres est mentionné, mais erroné. En effet, par une application littérale d’un texte silencieux sur ce sujet, les juges du fond se gardent de prononcer une nullité, n’allant ainsi pas au-delà du texte de loi. Cependant, en cas d’erreur sur un montant de la caution en lettres, la cour d’appel va adopter un raisonnement quelque peu différent puisqu’elle va retenir l’erreur et prendre en compte l’effet que peut avoir cette dernière sur la compréhension de l’engagement par la caution. Ainsi, nous avons pu voir dans les motivations de la cour, la prise en compte des conséquences de cette erreur sur « la portée réelle » de l’engagement de la caution (CA Lyon, 8e ch., 4 juillet 2017, n° 16/03429 N° Lexbase : A8901WLA). Les juges vont dès lors considérer qu’une erreur sur le montant en lettre n’est pas significative.

De manière plus générale, la nullité sera systématiquement prononcée par les juges en cas d’absence significative des mentions prévues par l’article 22-1 de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH. Toutefois, les juges font preuve d’une certaine souplesse lorsqu’ils sont face à des rectifications assez rapides de l’erreur (dans un délai de 24 h) ou en cas de régularisation dans un second engagement de caution.

Analyse du régime des nullités en application du Code de la consommation. Nous avons pu relever des problématiques similaires entre ce contentieux et celui de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH. C’est notamment le cas pour l’absence du montant de la caution en lettres (CA Lyon, 3e ch., 6 avril 2017, n° 15/05604 N° Lexbase : A4183UX9). La cour a adopté le même raisonnement que précédemment énoncé, en restant fidèle à la lettre du texte.

En cas d’absence ou de rajout de mots, de phrases, la cour va analyser au plus près du cas d’espèce l’impact que peuvent avoir ces erreurs sur la portée réelle de l’engagement. Toutefois, une assez grande marge de manœuvre est laissée à la cour dans l’appréciation de l’erreur, puisque parfois, l’absence de deux mots, « paiement » (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 31 janvier 2019, n° 17/00180 N° Lexbase : A6939YUK) et « caution » (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 26 avril 2018, n° 16/00159 N° Lexbase : A9678XLZ) n’aura pas les mêmes conséquences. En effet, l’absence du premier n’entraîne pas la nullité alors que l’absence du second conduit à une nullité de l’engagement.

Toutefois, une question semble être assez spécifique et récurrente au formalisme du cautionnement dans ce contentieux. Si l’absence totale de signature de la part de la caution entraîne systématiquement la nullité du contrat (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 17 janvier 2019, n° 16/09264 N° Lexbase : A3817YTK), la place de la signature fait l’objet d’une application stricte des textes de la part de la cour. En effet, elle a considéré qu’une signature apposée au milieu des mentions manuscrites « affecte la portée des mentions imposées par la loi, dès lors que la signature manifeste le consentement de son auteur » (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 31 janvier 2019, n° 15/05787 N° Lexbase : A7399YUL). La nullité est ainsi systématiquement prononcée.

Analyse du régime des nullités en application du droit commun. Le contentieux sur le formalisme des engagements de caution sur le fondement du droit commun est minime. En effet, il représente 4 décisions sur les 73 rendues entre 2016 et 2020. L’article de référence concernant le formalisme en droit commun est l’article 2292 du Code civil N° Lexbase : L0134L8H qui dispose que « le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l’étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ». Cependant, le peu d’arrêts rendus dans ce contentieux l’ont été en application d’autres articles du Code civil, adaptés à la situation qui se présentait à la cour d’appel. Nous constatons tout de même que la distinction entre erreur matérielle et erreur qui altère la compréhension de la portée et de l’étendue de l’engagement est également applicable en droit commun. En effet, dans un arrêt (CA Lyon, 3e ch. A, 18 février 2016, n° 14/01818 N° Lexbase : A7792Q84), la cour considère que la mention manuscrite apposée par la caution, bien qu’erronée, n’a pas affecté la validité du contrat de cautionnement puisque la caution a parfaitement pris connaissance de l’étendue de son obligation en lisant la mention prérédigée. Une comparaison des trois autres décisions faisant application du droit commun nous démontre que l’erreur sur le formalisme n’est jamais constatée puisque la cour d’appel rejette les prétentions de la caution ou bien statue de nouveau en ordonnant la vérification de l’écriture et de la signature de la caution. Ainsi, le peu de décisions rendues à propos du formalisme en droit commun ne permet pas d’établir des points de comparaison intéressants avec les autres contentieux.

Après avoir évoqué les problématiques liées aux conditions de formations du contrat, nous allons nous intéresser aux questions de droit soulevées lors de l’exécution du contrat de cautionnement.

II. Le contentieux relatif à l’exécution du contrat de cautionnement

À ce titre, les devoirs à la charge du créancier représentent l’essentiel du contentieux, que ce soit concernant le manquement au devoir d’information du créancier envers la caution (A), ou concernant le manquement au devoir de mise en garde (B).

A. Le manquement au devoir d’information de la caution

Observations statistiques générales. Ce contentieux représente 20 % de la totalité des arrêts que nous avons étudiés (86 sur 429). Le manquement au devoir annuel d’information a été retenu dans 66 % des cas par la cour d’appel, c’est-à-dire dans 57 arrêts, et ne l’a pas été dans 34 % des cas, c’est-à-dire dans 29 arrêts. La reconnaissance du manquement au devoir annuel d’information par la cour d’appel l’a été sur le fondement de trois articles différents : l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L7564LBR (36 arrêts, soit 56 % des cas), l’article L. 341-6 du Code de la consommation N° Lexbase : L1154K7U (19 arrêts, soit 33 % des cas), et enfin par une combinaison des articles L. 314-17 N° Lexbase : L1202K7N et L. 333-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L1161K77 (2 arrêts, soit 4 % des cas).

Statistiques sur la sanction du manquement. La sanction du manquement au devoir annuel d’information est la déchéance des intérêts, mais la cour d’appel n’a pas toujours prononcé cette sanction, alors même qu’elle a retenu le manquement. Sur les 57 arrêts où la cour d’appel a retenu le manquement, elle a prononcé la déchéance des intérêts dans 93 % des cas (53 arrêts), et ne l’a pas prononcé dans 7 % des cas (4 arrêts). En effet, dans certains cas, la cour d’appel a considéré que le non-respect de l’obligation d’information n’avait pas d’incidence sur le montant de la créance. C’est notamment le cas lorsque le montant réclamé par le créancier est inférieur au montant pour lequel la caution s’est engagée (CA Lyon, 3e ch. A, 24 septembre 2020, n° 18/00728 N° Lexbase : A79723US), ou inférieur au montant des sommes restant dues (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 20 septembre 2018, n° 16/02010 N° Lexbase : A4375X78).

L’obligation d’informer la caution annuellement sur le montant de l’engagement. À travers l’étude de la jurisprudence de la cour d’appel de Lyon, il a été analysé que tous les articles existants n’ont pas forcément été mis en exergue par les juges du fond au visa de leurs décisions. C’est le cas notamment du droit commun avec l’article 2293 du Code civil N° Lexbase : L0162L8I concernant le contrat indéterminé dans son montant. Cela peut s’expliquer, notamment, par le fait que le droit commun trouve peu à s’appliquer face aux droits spéciaux.

En revanche, deux articles ont été de nombreuses fois rappelés. Il s’agit de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L7564LBR, qui concerne le contrat de cautionnement établi entre un établissement de crédit et une caution choisie par l’entreprise, en général le dirigeant de cette dernière, et de l’article L. 341-6 du Code de la consommation N° Lexbase : L1154K7U, qui concerne le contrat de cautionnement entre un créancier professionnel et une personne physique. Ces deux articles font peser sur le créancier l’obligation de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement.

Si cela n’est pas respecté, les juges du fond de la cour d’appel de Lyon le sanctionnent, et il s’avère que la sanction est identique pour les deux articles : la déchéance des pénalités ou intérêts de retards échus.

En pratique, les statistiques ont montré que sur les 57 arrêts où le manquement au devoir d’information a été retenu, 24 d’entre eux ont été rendus au visa de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L7564LBR, et 30 d’entre eux ont été rendus au visa de l’article L. 341-6 du Code de la consommation N° Lexbase : L1154K7U, et ce pour diverses raisons.

Par exemple, concernant les modalités de forme de l’information à la caution, elle avait considéré, dans un arrêt du 16 juin 2016 (CA Lyon, 3e ch. A, 16 juin 2016, n° 14/05454 N° Lexbase : A2015RTS), qu’il y avait manquement au devoir d’information annuel sur le montant de l’engagement, lorsque le créancier avait envoyé un simple courrier à la caution à la mauvaise adresse.

De surcroît, concernant les modalités de fond, les juges ont considéré, dans un arrêt du 11 mai 2017 (CA Lyon, 3e ch. A, 11 mai 2017, n° 16/00008 N° Lexbase : A5448WCR), que l’envoi des courriers par la banque aux cautions ne correspondait pas à une information complète et exhaustive sur leurs engagements et leur terme, était de nature à engendrer la reconnaissance d’un manquement au devoir d’information annuel.

Concernant la charge de la preuve en tant que telle, dans un arrêt du 28 mai 2020 (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 28 mai 2020, n° 17/00484 N° Lexbase : A38763MI), la cour avait considéré que les listings établis unilatéralement par la banque correspondant aux lettres envoyées dans le cadre de son obligation d’information ne suffisaient pas, ou encore, dans un arrêt du 13 décembre 2018 (CA Lyon, 3e ch. A, 13 décembre 2018, n° 17/05991 N° Lexbase : A3656YQH), que le simple fait de verser au dossier des copies de lettres d’information ne prouve pas l’envoi de ces lettres. En outre, dans un arrêt du 29 novembre 2018 (CA Lyon, 3e ch. A, 29 novembre 2018, n° 17/01186 N° Lexbase : A5062YNS), elle avait aussi affirmé que le fait pour une banque de ne pouvoir fournir la preuve qu’elle a bien informé la caution, car elle utilisait un système automatisé, n’était pas de nature à la déresponsabiliser de son devoir d’information. Nous observons donc que les juges du fond apprécient largement le manquement au devoir d’information.

En effet, nous comprenons que ce qui importe est la preuve que rapporte ou non le créancier. Généralement, lorsqu’une banque, par exemple, ne parvient pas à prouver qu’elle a bien informé la caution, par n’importe quels moyens d’ailleurs, la cour d’appel est catégorique et statue sur le manquement au devoir d’information annuel et sanctionne donc par la déchéance des intérêts.

Cependant, la cour d’appel rappelle que la preuve du devoir d’information par le créancier ne comprend pas la preuve du fait que la caution ait bien reçu l’information envoyée (Cass. civ. 1, 2 octobre 2002, n° 01-03.921, publié au bulletin N° Lexbase : A9105AZA).

L’obligation d’informer la caution de la défaillance du débiteur. Elle se retrouve à l’article L. 314-17 du Code de la consommation N° Lexbase : L1202K7N, qui concerne le contrat de cautionnement de crédit, y compris immobilier, consenti à des particuliers et à l’article L. 333-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L1161K77 qui concerne le contrat de cautionnement de personnes physiques qui s’engagent au profit d’un créancier professionnel.

L’idée générale de ces deux articles est que le créancier professionnel doit informer la caution personne physique de la défaillance du débiteur, et ce, dès le premier incident de paiement non régularisé. La sanction est la même pour les deux articles, on peut notamment la trouver à l’article 47 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 N° Lexbase : O6802BT4 : la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.

Sur 57 arrêts où la cour d’appel a décidé de retenir le manquement au devoir d’information de la part du créancier, il s’est avéré que trois d’entre eux ont été rendus aux visas des articles L. 314-17 N° Lexbase : L1202K7N et L. 333-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L1161K77.

En pratique, les raisons pour lesquelles le manquement au devoir d’information sur la défaillance du débiteur a pu être retenu sont diverses et démontrent une forme de sévérité de la part des juges d’appel envers les créanciers et donc, par extension, révèlent une réelle protection pour la caution, avertie ou non. Par exemple, concernant la preuve de l’information de la caution, dans un arrêt du 24 septembre 2020 (CA Lyon, 3e ch. A, 24 septembre 2020, n° 18/00728 N° Lexbase : A79723US), la cour considère que l’assignation en paiement ne peut pas constituer la preuve du respect de cette obligation par la banque.

Concernant la défaillance du débiteur en tant que telle, dans un arrêt du 26 janvier 2016 (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 26 janvier 2016, n° 14/02395 N° Lexbase : A6758N43), la cour d’appel de Lyon a considéré que l’arrêt du paiement des obligations du débiteur pendant plusieurs mois sans que la banque ne prévienne le créancier est un manquement à ce devoir. De plus, les juges du fond avaient indiqué que le fait qu’il n’y ait pas de preuve d’information de la défaillance du débiteur après le premier incident de paiement du débiteur caractérise le manquement au devoir d’information.

Enfin, concernant le statut de la caution, dans un arrêt du 8 juin 2017 (CA Lyon, 3e ch. A, 8 juin 2017, n° 16/03895 N° Lexbase : A0083WHK) les juges du fond ont affirmé que l’obligation d’information de la banque à la caution sur la défaillance s’applique, quelles que soient les fonctions que la caution occupe, et donc même si la caution est cogérante de la société. Ainsi, une caution gérante d’une société, société qui se trouve être le débiteur principal du contrat de cautionnement, détient les mêmes droits d’information qu’une caution qui n’a pas de visu et de lien direct avec les activités du débiteur principal. Ainsi, la cour d’appel respecte littéralement les articles L. 314-17 N° Lexbase : L1202K7N et L. 333-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L1161K77.

Les juges, à travers toutes leurs décisions, protègent réellement la caution, sûrement du fait qu’il s’agit d’une personne physique. Cela est intéressant, car leurs décisions peuvent dissuader les créanciers professionnels, notamment au travers de la sanction qui en découle.

Après avoir étudié le devoir annuel d’information, nous allons évoquer le devoir de mise en garde, qui en cas de manquement, peut entraîner l’engagement de la responsabilité du créancier.

B. Le devoir de mise en garde

Objectifs du devoir de mise en garde. Le devoir de mise en garde a pour finalité d’alerter la caution de manière circonstanciée. Il a vocation à la protéger contre son propre endettement personnel et l’insolvabilité du débiteur principal né de l’octroi du prêt garanti. À cet effet, il impose au prêteur de prévenir la caution des risques d’endettement et de vérifier sa capacité financière au regard de ses revenus et de son patrimoine.

L’incidence du caractère averti ou non averti de la caution. Pour que le devoir de mise en garde incombe au prêteur, il faut que ce dernier se trouve face à une caution non avertie en principe, c’est-à-dire celle qui n’est pas à même, par les connaissances ou informations en sa possession, d’apprécier les risques liés à l’opération qu’elle cautionne. C’est sur l’appréciation in concreto de cette qualité avertie ou non que se cristallise une grande partie de la jurisprudence de la cour d’appel de Lyon concernant le devoir de mise en garde, et il s’avère que cette question relève essentiellement de la casuistique.

Il est toutefois permis, avec une analyse approfondie de cette jurisprudence, de dégager une tendance générale en la matière. Jusqu’à un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 22 mars 2016 (Cass. com., 22 mars 2016, n° 14-20.216, FS-P+B N° Lexbase : A3599RAK), il était de jurisprudence constante que la qualité de dirigeant social faisait présumer le caractère averti. Mais dans cet arrêt, la Cour de cassation affirme que le fait qu’une caution soit avertie « ne pouvait se déduire de sa seule qualité de dirigeant et associé de la société débitrice principale ». Depuis lors, la cour d’appel applique systématiquement ce raisonnement et s’emploie à faire ressortir le caractère averti ou non de la caution à travers l’analyse de circonstances particulières (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 28 avril 2016, n° 14/01940 N° Lexbase : A4705RLT). Pour ce faire, la cour se réfère aux compétences réelles de la caution en tenant compte de sa formation, de son expérience professionnelle, de l’ancienneté dans l’exercice de ses fonctions, de son implication dans l’activité de la société débitrice, ou encore de son âge (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 10 novembre 2016, n° 15/01619 N° Lexbase : A3930SGN), et ce sur la base de curriculum vitae ou de certificats de travail (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 24 octobre 2019, n° 17/04436 N° Lexbase : A4936ZSM). Le contrat cautionné est également un élément étudié par la cour d’appel dans son raisonnement pour retenir le caractère averti ou non de la caution. À titre d’exemple, la cour d’appel de Lyon, dans un arrêt du 3 mars 2016 (CA Lyon, 3e ch. A, 3 mars 2016, n° 14/09238 N° Lexbase : A1136QES), ne se contente pas de constater que la caution est dirigeante pour retenir qu’elle est avertie, mais retient qu’elle a, en outre, la qualité de gérant du titulaire du compte, dont la seule question de l’ouverture d’une ligne de crédit était discutée, et qu’elle est donc présumée connaître la situation de son entreprise. Ladite caution ne peut alors revendiquer l’exécution d’un quelconque devoir de mise en garde.

Ainsi, la caution avertie ne peut en principe rechercher la responsabilité de la banque, sauf dans une hypothèse. Il s’agit du cas où la banque aurait eu sur son patrimoine, ses revenus et ses facultés de remboursement prévisibles, en l’état du succès escompté de l’opération financée, des informations qu’elle aurait elle-même ignorées.

Ce n’est qu’une fois la qualité de caution, avertie ou non, envisagée que la cour d’appel de Lyon s’emploie à vérifier le caractère disproportionné ou non de l’engagement de caution qui est une condition cumulative.

L’analyse de la disproportion manifeste existante entre le montant du cautionnement et les ressources de la caution par les juges du fond. Le thème de la disproportion est central dans la question du cautionnement, elle peut être le cœur du litige, mais peut également s’ajouter à d’autres problématiques telles que le devoir de mise en garde. Dans ce cadre, elle représente 62 arrêts sur 429. Sur les 62 arrêts concernant le devoir de mise en garde, seulement 2 ont retenu le manquement au devoir. Autrement dit, 97 % ne l’ont pas retenu.

Concernant l’appréciation de cette disproportion, il faut que le cautionnement crée un risque d’endettement excessif chez la caution compte tenu de ses capacités financières, c’est-à-dire au regard de son revenu et du montant du cautionnement, selon la cour d’appel de Lyon (CA Lyon, 3e ch. A, 9 novembre 2017, n° 16/05529 N° Lexbase : A3145WY7).

Le juge est alors tenu de vérifier si le montant de l’emprunt dépasse les facultés de remboursement de l’emprunteur ou de la caution, dans le cadre d’une analyse in concreto (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 22 mars 2016, n° 14/04771 N° Lexbase : A7599Q9C). La situation maritale de la personne est souvent également prise en compte par les juges pour ce faire (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 29 novembre 2018, n° 16/09026 N° Lexbase : A5378YNI).

Nous nous sommes questionnés sur l’utilisation, par la cour d’appel, de cette notion « d’endettement excessif » en lieu et place de la notion de disproportion manifeste. Aussi, nous avons pu constater qu’au travers de cette notion, les juges avaient tendance à examiner minutieusement les capacités de remboursement, et notamment les revenus. Or dans le cadre de la disproportion manifeste, l’analyse est faite sur la totalité du patrimoine en question. De plus, les juges du fond apprécient particulièrement la capacité financière de la caution et non l’opportunité économique de l’opération financée (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 18 septembre 2018, n° 17/01828 N° Lexbase : A2107X78).

La caution doit, comme en matière de disproportion manifeste, démontrer que lors de la conclusion de son engagement, sa situation financière ne lui permettait pas de faire face au remboursement des prêts consentis. À titre d’exemple, dans un arrêt de la cour d’appel (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 17 janvier 2019, n° 16/04430 N° Lexbase : A4133YTA), la caution n’a pu produire aucun élément comptable établissant qu’à la date de conclusion de l’accord, les engagements pris de réduction du découvert étaient inadaptés aux capacités financières de la société. Il semblerait alors que le devoir de mise en garde de la banque ait pour corollaire un devoir de la caution de mettre à disposition de la banque les documents nécessaires pour apprécier l’éventuel risque d’endettement.

L’étendue du devoir de mise en garde et son application au sous-cautionnement. La cour d’appel a été saisie de la question de savoir si la caution était elle-même tenue d’un devoir de mise en garde envers la sous-caution. Les juges du fond ont estimé que la protection instituée par les articles L. 331-1 nouveau et suivants du Code de la consommation N° Lexbase : L1165K7B consacrés au crédit ne peut être invoquée par la caution que dans ses rapports avec le dispensateur de crédit (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 10 novembre 2016, n° 15/01619 N° Lexbase : A3930SGN).

La charge de la preuve du devoir de mise en garde. En ce qui concerne la charge de la preuve, la cour d’appel (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 28 mars 2019, n° 17/04434 N° Lexbase : A7812Y7H) a rappelé qu’il appartient à l’emprunteur qui invoque le manquement d’une banque à son obligation de mise en garde d’apporter la preuve de l’inadaptation de son engagement par rapport à ses capacités financières ou d’un risque d’endettement qui serait né de l’octroi du crédit. Il appartient alors à la banque qui soutient être dispensée de cette obligation de prouver que l’emprunteur est averti et, lorsque l’existence de l’obligation de mise en garde de la banque est établie, il lui appartient d’établir qu’elle a rempli son obligation.

Lien entre la disproportion et le devoir de mise en garde. Yves Picod nous fait part d’un constat que nous avons également pu remarquer au travers du raisonnement de la cour : le devoir de mise en garde a vocation à s’effacer lorsque l’engagement de la caution est proportionné et, à l’inverse, ce devoir d’alerte se justifie en raison du constat d’une disproportion (Y. Picod, « Devoir de mise en garde de la caution et exigence de proportionnalité : le chemin sinueux de l’autonomie, Cour de cassation, com. 1er juillet 2020 », AJ contrat 2020, p. 572). Cependant, l’absence de disproportion ne légitime pas nécessairement une dispense d’alerter les cautions profanes sur les conséquences de leur engagement. Il faut donc distinguer l’exigence de proportionnalité et le devoir de mise en garde. De plus, le devoir de mise en garde ne s’impose qu’aux cautions non averties, contrairement à l’exigence de proportionnalité.

Les juges du fond se focalisent donc sur l’analyse de la création par le cautionnement d’un risque d’endettement excessif chez la caution compte tenu de ses capacités financières. Cela permet de saisir pourquoi les juges du fond font fi de l’emploi de la notion autonome de disproportion, qui est plus vague. Aussi, l’importance de cette différence est illustrée au travers des divergences de sanctions encourues en cas de manquement au devoir de mise en garde ou de disproportion manifeste.

Les conséquences du défaut de mise en garde par les juges du fond. Le terrain des sanctions constitue un enjeu majeur pour les parties, puisque la survie du contrat peut en dépendre et la sanction applicable en cas de manquement au devoir de mise en garde est moins avantageuse pour la caution qui s’en prévaut que celle applicable en cas de disproportion manifeste, car il s’agit d’une question de responsabilité civile. En effet, le manquement au devoir de mise en garde est sanctionné par l’allocation de dommages et intérêts, qui sont généralement d’un montant égal à celui pour lequel la caution est appelée ; alors que la sanction en cas de disproportion manifeste est l’impossibilité de se prévaloir de l’engagement de caution. La sanction est également moins avantageuse que celle applicable en cas de vice du consentement qui est la nullité pure et simple du contrat.

Cette différence est expliquée clairement par la cour d’appel : la sanction d’un manquement du banquier dispensateur de crédit à son obligation de mise en garde réside dans la réparation de la perte de chance pour la caution de ne pas contracter ; elle donne lieu le cas échéant à l’octroi de dommages-intérêts, mais ne prive pas le banquier de la possibilité de se prévaloir du cautionnement ni n’entraîne la décharge de la caution (CA Lyon, 1re ch. civ. A, 28 mars 2019, n° 17/04434 N° Lexbase : A7812Y7H). Tant l’enjeu des sanctions est important, les parties peuvent parfois aller jusqu’à arguer que le prêteur a manqué à son devoir de mise en garde à tel point que cela constituerait un vice du consentement, pour obtenir une sanction plus avantageuse. Mais la cour d’appel de Lyon refuse catégoriquement ce genre de raisonnement (CA Lyon, 1re ch. civ. B, 18 octobre 2016, n° 15/04394 N° Lexbase : A2580R83).

Pour cette raison, dans les arrêts, le manquement au devoir de mise en garde est un moyen quasi toujours subsidiaire ou infiniment subsidiaire, après une demande de nullité pour vice du consentement ou une demande en disproportion manifeste. Aussi, lorsque la cour d’appel tranche en faveur d’une disproportion, elle s’attarde rarement sur la question du défaut de mise en garde, et lorsqu’elle tranche en faveur d’une nullité, il n’y a pas lieu de se pencher sur la question puisque le contrat de cautionnement est nul en tout état de cause.

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