La lettre juridique n°760 du 8 novembre 2018 : Concurrence

[Brèves] Distribution sélective et restrictions à la vente en ligne : première application de la jurisprudence «Coty» par l’ADLC

Réf. : Aut. conc., 24 octobre 2018, décision n° 18-D-23 (N° Lexbase : X1558AUA)

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[Brèves] Distribution sélective et restrictions à la vente en ligne : première application de la jurisprudence «Coty» par l’ADLC. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/48713276-breves-distribution-selective-et-restrictions-a-la-vente-en-ligne-premiere-application-de-la-jurispr
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par Vincent Téchené

le 07 Novembre 2018

► Est sanctionné à hauteur de 7 millions d'euros un fabricant pour avoir empêché ses distributeurs agréés de vendre en ligne ses produits. Tel est le sens d’une décision de l’Autorité de la concurrence du 24 octobre 2018 (Aut. conc., 24 octobre 2018, décision n° 18-D-23 N° Lexbase : X1558AUA).

 

L’ADLC énonce d’abord qu’il est possible pour un fabricant de réserver la vente de ses produits à un réseau de revendeurs spécialisés pour des exigences légitimes telles que la vente de produits de haute qualité ou technicité. En l'espèce, l'Autorité ne remet pas en cause le recours à la distribution sélective pour des produits qui, comme ceux vendus par le fabricant, tels que les tronçonneuses, débroussailleuses, élagueuses, sécateurs à batterie, justifient la mise en place de services d'assistance et de conseil afin d'en préserver la qualité et d'en assurer le bon usage. La nécessité de contrôler le respect de ces obligations et de préserver son image de marque peut, par ailleurs, justifier l'interdiction de la vente en ligne des produits concernés sur des plateformes tierces mise en place par le fabricant.

 

Toutefois, elle juge qu’en exigeant une remise en main propre de ce type de produits par le distributeur à l'acheteur et donc en imposant soit un retrait en magasin, soit une livraison en personne au domicile de l'acheteur, le fabricant a de facto interdit la vente de ses produits à partir des sites Internet de ses distributeurs. Or, cette remise en main propre n'est imposée par aucune réglementation nationale ou européenne portant sur la commercialisation des produits en cause. Aucun contact direct entre le distributeur et l'acheteur ou aucune démonstration ne sont exigés. Seule la remise d'une notice d'utilisation dans la langue de l'acheteur avec la mention de certaines informations spécifiques pour les produits dangereux est obligatoire.

 

Ainsi, en imposant cette remise en main propre, le fabricant a retiré tout intérêt à la vente en ligne pour les distributeurs et consommateurs, qui n'ont ainsi pas pu pleinement faire jouer la concurrence entre les distributeurs et bénéficier de prix plus intéressants (jusqu'à 10 % moins cher).

 

Au vu de ces éléments, l'Autorité de la concurrence a prononcé une sanction de 7 millions d'euros à l'encontre du fabricant. Elle lui a par ailleurs enjoint de modifier ses contrats de distribution sélective afin de stipuler, en termes clairs, que les distributeurs agréés ont la possibilité de procéder à la vente en ligne, sans exiger une remise en main propre auprès de l'acheteur.

 

Par cette décision, l'Autorité se prononce pour la première fois sur les possibilités de distribution sélective et de restrictions à la vente en ligne depuis l'arrêt «Coty» de la CJUE du 6 décembre 2017 (CJUE, 6 décembre 2017, aff. C-230/16, N° Lexbase : A5558W4M ; lire N° Lexbase : N1663BXU), qui a clarifié le cadre communautaire applicable à la distribution sélective sur internet. Cette décision a ainsi vocation à préciser le cadre applicable en France pour les différents secteurs et produits, au-delà du secteur de la motoculture.

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