C'est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise que l'administration doit apprécier, pour déterminer le caractère déductible d'une charge, si les opérations litigieuses correspondent à des actes relevant d'une gestion commerciale normale. Indépendamment du cas de détournements de fonds rendus possibles par le comportement délibéré ou la carence manifeste des dirigeants, il n'appartient pas à l'administration, dans ce cadre, de se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par l'entreprise et notamment pas sur l'ampleur des risques pris par elle pour améliorer ses résultats. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 13 juillet 2016 (CE Sect., 13 juillet 2016, n° 375801, publié recueil Lebon
N° Lexbase : A2108RXD). En l'espèce, la société requérante a consenti à une autre société d'importants concours financiers entre le 31 décembre 2000 et le 31 décembre 2004. Au titre des exercices clos en 2003 et 2004, elle a constitué des provisions pour risque de non-recouvrement de ces créances. A l'issue de la vérification de comptabilité dont la société a fait l'objet, l'administration fiscale a réintégré dans le résultat de l'exercice clos en 2004 une somme de 7 560 500 euros correspondant à une fraction de la provision constituée à hauteur de 11 237 561 euros, au motif que la requérante n'avait pas agi dans le cadre d'une gestion commerciale normale. L'administration a remis en cause, à due concurrence, le report déficitaire auquel la banque avait procédé au titre des exercices clos le 31 décembre 2005 et 2006. Toutefois, la Haute juridiction n'a pas donné raison à l'administration. En effet, les juges du fond avaient, à tort, considéré que l'ensemble des circonstances de l'espèce devait être regardée comme révélant une "
prise de risque inconsidérée de la banque" (CAA Versailles, 19 décembre 2013, n° 11VE04035
N° Lexbase : A7783MLT). Néanmoins, il fallait seulement rechercher si les décisions en cause étaient conformes à l'intérêt de l'entreprise, sans s'interroger sur l'ampleur des risques pris. Cette décision consacre de nombreuses jurisprudences récentes mettant en avant la place prépondérante de l'intérêt de l'entreprise afin de déterminer la déductibilité d'une dépense (TA Poitiers, 3 décembre 2015, n° 1300249
N° Lexbase : A7909N3C, CE 9° et 10° s-s-r., 10 février 2016, n° 371258, mentionné aux tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A7061PKQ, CE 9° et 10° s-s-r., 15 février 2016, n° 376739, mentionné aux tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A1013PL4) .
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