Réf. : Rapport annuel de la Cour de cassation
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N9649BE4
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le 07 Octobre 2010
- Cass. soc., 20 novembre 2007, n° 06-41.212, Société Cofiroute, FP-P+B+R (N° Lexbase : A7171DZM) : "la période d'essai étant destinée à permettre à l'employeur d'apprécier la valeur professionnelle du salarié, la cour d'appel, qui a constaté dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que la résiliation du contrat de travail était intervenue au cours de la période d'essai pour un motif non inhérent à la personne du salarié, a décidé à bon droit qu'elle était abusive" (lire nos obs., Rupture du contrat de travail en période d'essai : l'étau se resserre, Lexbase Hebdo n° 283 du 28 novembre 2007 - édition sociale N° Lexbase : N2219BDK).
En interdisant à l'employeur de justifier la rupture de l'essai par un motif non inhérent à la personne du salarié, la Cour de cassation a souhaité mettre en oeuvre l'exigence de bonne foi entre contractants (C. civ., art. 1134, al. 3 N° Lexbase : L1234ABC ; C. trav., art. L. 120-4 N° Lexbase : L0571AZ8, art. L.1222-1, recod. N° Lexbase : L9750HWZ). Si le rapport annuel précise le fondement de la solution, il ne répond malheureusement à aucune des interrogations suscitées par la décision (voir nos obs., Rupture du contrat de travail en période d'essai : l'étau se resserre, préc.). Il semblait, en effet, paradoxal de justifier le licenciement d'un salarié, hors période d'essai, lorsque la suppression de son emploi résulte de difficultés économiques réelles et sérieuses, mais de considérer, dans la même hypothèse, que l'employeur ne pourrait pas rompre le contrat de travail du salarié en période d'essai sans commettre d'abus. Apparemment, la Cour de cassation n'a pas été frappée par ce paradoxe, soucieuse, uniquement, de lutter contre ce qui s'analysait comme une décision prise de mauvaise foi. Il conviendra, par conséquent, d'attendre les prochaines décisions pour voir quelle sera l'analyse de la Haute juridiction lorsque la bonne foi de l'employeur sera évidente et qu'il ne pouvait pas conserver le salarié à son service.
- Cass. soc., 27 mars 2007, n° 05-41.921, Société Dimension Data, FS-P+B+R (N° Lexbase : A7974DUU) : "lorsque le salarié refuse une mesure de rétrogradation disciplinaire notifiée après un premier entretien préalable, l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement au lieu de la sanction refusée doit convoquer l'intéressé à un nouvel entretien ; [...] il en résulte que le délai d'un mois prévu par l'article L. 122-41 du Code du travail (N° Lexbase : L5579ACM, art. L. 1332-2, recod. N° Lexbase : L0255HXQ) court à compter de la date fixée pour ce nouvel entretien" (lire nos obs., Précisions sur la procédure applicable au salarié qui refuse une modification disciplinaire du contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 255 du 4 avril 2007 - édition sociale N° Lexbase : N6276BAP).
Le rapport annuel confirme, ici, que c'est essentiellement "dans un souci de simplification" qu'il a été décidé "que, quelle que soit la sanction envisagée à l'origine, une sanction disciplinaire ou un licenciement, l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement au lieu d'une rétrogradation disciplinaire refusée doit convoquer le salarié à un nouvel entretien".
Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
- Cass. soc., 11 janvier 2007, n° 05-40.626, Société centrale pour le financement de l'immobilier (Socfim), FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4828DTY) : "en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant, dès lors qu'à cette date le salarié est toujours au service de son employeur" (lire nos obs., Date d'effet de la résiliation judiciaire du contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 245 du 25 janvier 2007 - édition sociale N° Lexbase : N7973A98).
Faute, pour le Code civil, de comporter la moindre précision quant à la date d'effet de la résiliation judiciaire, c'est à la jurisprudence qu'est revenu le rôle de la déterminer. Or, il convient de constater que l'unanimité ne règne pas en la matière, puisque ont été retenus la date à laquelle le débiteur a cessé de remplir ses obligations (Cass. civ. 3, 28 janvier 1975, n° 73-13.420, SA Ent. Labbé et Cie c/ Société San Remo, publié N° Lexbase : A2689CKS), le jour de la demande en justice (Cass. com., 12 octobre 1993, n° 91-17.621, Société Locafrance et autre c/ Mme Moins et autres, publié N° Lexbase : A6474ABE) ou, encore, le jour où a été rendu l'arrêt qui la prononce (Cass. civ. 3, 13 mai 1998, n° 96-18.358, M. Hervais et autre c/ M. Inizan, publié N° Lexbase : A2811AC4).
Jusqu'à l'arrêt rapporté, la Chambre sociale n'avait pas véritablement adopté une position tranchée sur la question. Toutefois, et s'agissant du cas particulier de la résiliation judiciaire d'un contrat d'apprentissage, il avait été décidé que "le juge qui prononce la résiliation judiciaire du contrat d'apprentissage peut en fixer la date au jour où l'une des parties a manqué à ses obligations ou au jour où la demande de résiliation a été formée" (Cass. soc., 1er octobre 2003, n° 01-40.125, FS-P N° Lexbase : A6587C9T ; lire les obs. de S. Martin-Cuenot, L'extension des sommes garanties par l'AGS, Lexbase Hebdo n° 90 du 16 octobre 2003 - édition sociale N° Lexbase : N9088AAT). Sans doute, cette décision n'avait-elle pas échappé à la partie requérante qui reprochait, précisément, à la cour d'appel d'avoir fixé la date d'effet de la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du prononcé de l'arrêt, alors qu'elle ne pouvait en fixer la date qu'au jour où l'employeur a manqué à ses obligations ou au jour où la demande en résiliation a été formée.
Rejetant le pourvoi, la Cour de cassation fait produire effet à la résiliation au jour de la date de la décision judiciaire, dès lors qu'à cette date, le salarié est toujours au service de son employeur. Cette solution ne s'explique que par des considérations très pragmatiques. En effet, ainsi que le rappelle le rapport, "le contrat de travail, à la différence des autres contrats à exécution successive, comporte [...], au-delà de la prestation de travail proprement dite, une série d'autres droits concernant la personne du salarié et sa famille : couverture sociale de base, complémentaire, régimes de prévoyance, droit à la retraite de base et complémentaire, droits au titre de diverses allocations, etc.. Une application rétroactive de la résiliation du contrat de travail est de nature à remettre en cause tellement d'éléments qu'elle relève donc de ce qu'un arrêt de la première chambre civile du 7 juin 1995 qualifiait 'd'impossibilité pratique' [Cass. civ. 1, 7 juin 1995, n° 93-15.485, Editions Glénat c/ Monsieur Bourgeon, publié N° Lexbase : A7814ABZ]. Au surplus, dans un nombre non négligeable de cas, notamment, lorsque la résiliation prononcée par le premier juge a fait l'objet d'un appel, ou lorsque c'est la cour d'appel qui la prononce, les effets de la résiliation pourraient remonter loin dans le temps, aggravant encore les effets pervers de la rétroactivité".
Cette décision laissait, cependant, subsister certaines interrogations importantes, principalement au regard de l'éventualité d'un concours de la demande de résiliation judiciaire et d'autres modes de ruptures intervenant après elle, mais avant le jugement et ayant la caractéristique de rompre immédiatement ou à bref délai le contrat de travail : prise d'acte de la rupture, licenciement, départ ou mise à la retraite.
Dans un important arrêt rendu le 15 mai 2007, et qui, lui aussi, fait l'objet d'une mention dans le rapport sous examen, la Cour de cassation a précisé que le juge, s'il considère que la demande de résiliation judiciaire est justifiée, doit fixer la date de la rupture non pas à la date de la demande, ni à celle du manquement constaté, et pas davantage à la date de la décision judiciaire, mais au jour de l'envoi de la lettre de licenciement (Cass. soc., 15 mai 2007, n° 04-43.663, FS-P+B+R N° Lexbase : A2434DW3).
Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
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