Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif dispose, sans jamais y être tenu, de la faculté de joindre deux ou plusieurs affaires, y compris lorsqu'elles concernent des contribuables ou des impositions distincts. La jonction est donc, par elle-même, insusceptible d'avoir un effet sur la régularité de la décision rendue et ne peut, par suite, être contestée en tant que telle devant le juge d'appel ou devant le juge de cassation. Tel est le principe énoncé par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 23 octobre 2015 (CE Section, 23 octobre 2015, n° 370251, publié recueil Lebon
N° Lexbase : A0319NUD). En l'espèce, le tribunal administratif de Rouen (TA Rouen, 29 juin 2010, n° 0601600-0603307) a été successivement saisi d'une demande contentieuse formée par le requérant et dirigée contre des rappels de TVA, puis d'une réclamation introduite par celui-ci, tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu. Le tribunal a alors joint cette demande et cette réclamation, pour les rejeter par un unique jugement. Cette jonction n'a pas été contestée par les juges d'appel (CAA Douai, 30 mai 2013, n° 10DA01065
N° Lexbase : A8688MQT). Par la suite, à l'appui de son pourvoi devant le Conseil d'Etat, le ministre a soulevé un unique moyen, tiré de l'erreur de droit commise par les juges d'appel en ne relevant pas d'office l'irrégularité dont les premiers juges auraient entaché la procédure juridictionnelle, du fait de la jonction à laquelle ils avaient procédé. Toutefois, sur ce point, la Haute juridiction n'a pas fait droit à la demande du ministre. En effet, pour les juges suprêmes, en se bornant à critiquer la jonction opérée par le tribunal administratif et l'erreur de droit qu'aurait commise la cour en ne la censurant pas d'office, le ministre, qui ne fait état d'aucune irrégularité entachant l'arrêt attaqué qui aurait résulté de la jonction à laquelle les premiers juges avaient procédé, n'est pas fondé à en demander, par ce seul moyen, l'annulation. Cette décision est tout à fait inédite et ne se repose sur aucune base légale telle que la jurisprudence ou la législation. Elle repose seulement sur l'intérêt d'une bonne administration de la justice qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle (v. notamment : Cons. const., 3 décembre 2009, décision n° 2009-595 DC, cons. 4
N° Lexbase : A3193EPX) .
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