La lettre juridique n°630 du 22 octobre 2015 : Fiscalité internationale

[Jurisprudence] L'Assemblée plénière de la Cour de cassation adopte une règle de raison (à propos de l'interprétation de la Convention franco-monégasque relative à l'imposition des successions)

Réf. : Ass. plén., 2 octobre 2015, n° 14-14.256, P+B+R+I (N° Lexbase : A0098NSG)

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N9584BUI

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par Thibaut Massart, Professeur et Codirecteur du Master Fiscalité de l'entreprise à l'Université Paris-Dauphine, PSL Research University

le 22 Octobre 2015

1. A travers un arrêt du 2 octobre 2015, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation réaffirme clairement la primauté des conventions fiscales internationales sur le droit interne (Ass. plén., 2 octobre 2015, n° 14-14.256, P+B+R+I). Cette approche semble s'opposer frontalement au principe de subsidiarité du droit conventionnel prôné par le Conseil d'Etat. Pour la Haute juridiction administrative, les conventions fiscales ne doivent, en effet, être appliquées qu'après vérification préalable de la correcte application du droit interne. La fracture est-elle consommée entre la Cour de cassation et le Conseil d'Etat ? En réalité, en observant attentivement la méthode effectivement suivie par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation dans cette affaire, l'opposition ne paraît nullement flagrante. La Haute juridiction affirme avec force "qu'en vertu de la hiérarchie des normes, il convient de se référer, d'abord, aux conventions internationales". Certes, mais avant même d'appliquer la Convention dans cette affaire, l'Assemblée plénière mobilise le droit interne pour qualifier les biens litigieux. Il s'agissait, en l'espèce, de parts sociales d'une société monégasque qui sont qualifiées de "biens incorporels de nature mobilière", alors même que cette société possédait de nombreux biens immobiliers en France. Fort de cette analyse préalable, la Haute juridiction applique alors scrupuleusement la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950, relative au droit de mutation à titre gratuit (N° Lexbase : L6725BHK). La Cour de cassation déclare que ces parts relevaient de l'article 6 de la Convention, qui vise les actions ou parts sociales, et non de l'article 2, qui concerne les immeubles et droits immobiliers. Comme cet article 6 prévoit que, si le de cujus était domicilié, au moment de son décès, dans l'un des deux Etats, lesdits biens ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans cet Etat, la cour d'appel en a exactement déduit que l'imposition des parts sociales transmises par le décès de leur titulaire résidant à Monaco relevait de cet Etat et non de la France. 2. La méthode suivie par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, ce qu'elle donne en réalité une priorité au droit interne pour qualifier les biens et qu'elle interprète littéralement la Convention, se rapproche très sensiblement de la grille d'analyse utilisée par le Conseil d'Etat. Il n'est donc nullement certain que la solution retenue par la plus Haute juridiction de l'ordre judiciaire aurait été différente si le Conseil d'Etat avait été sollicité pour résoudre ce conflit.

Avant d'analyser plus avant cette décision (II), il nous semble nécessaire de revenir sur l'ensemble du traitement judiciaire de cette affaire, car l'arrêt de l'Assemblée plénière clôt un long contentieux (I).

I - Un long contentieux

3. Avant d'aborder la décision attaquée et d'étudier la présente décision de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (A), il semble indispensable de reprendre le contentieux depuis son origine afin de mettre en relief la première cassation intervenue dans cette affaire à travers l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 9 octobre 2012 (Cass. com., 9 octobre 2012, n° 11-22.023, F-P+B N° Lexbase : A3451IUD) (B).

A - L'origine du contentieux, les décisions du fond et l'arrêt de la Cour de cassation du 9 octobre 2012

4. Cet arrêt clôt un contentieux de plus de 15 ans entre l'administration fiscale et les héritiers d'un marocain qui résidait à Monaco. Le défunt détenait des parts sociales d'une société monégasque qui possédait plusieurs immeubles en France. Comme les héritiers résidaient en France, ils déposèrent une déclaration de succession devant l'administration fiscale française. Cette dernière prétendit que ces parts sociales devaient être rentrées dans l'actif successoral taxable en France. Pour étayer cette affirmation, l'administration se fondait sur l'article 750 ter du CGI (N° Lexbase : L9528IQX). Cet article distingue plusieurs cas selon la situation de résidence du défunt et des héritiers. L'article 750 ter 2°, alinéa 1er, du CGI précise que sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit "les biens meubles et immeubles, que ces derniers soient possédés directement ou indirectement, situés en France", lorsque le défunt est non-résident de France. On soulignera, pour faire bonne figure, que c'est l'article 23 de la loi de finances pour 1999 (loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 N° Lexbase : L1137ATB), dont l'entrée en vigueur a eu lieu le 1er janvier 1999, qui a étendu les cas d'imposition en France avec la notion d'immeubles possédés indirectement introduite au 2° de l'article 750. Peu importe la forme de la personne morale. L'article 750 ter 2°, alinéa 2, du CGI mentionne d'ailleurs que "tout immeuble ou droit immobilier est réputé possédé indirectement lorsqu'il appartient à des personnes morales [...] dont le donateur ou le défunt, seul ou conjointement avec son conjoint, leurs ascendants ou descendants ou leurs frères et soeurs, détient plus de la moitié des actions, parts ou droits". Cette situation était celle de l'espèce puisque le défunt détenait conjointement avec ses frères et soeurs plus de la moitié des parts. L'article 750 ter 2°, alinéa 4 poursuit en mentionnant que "sont également considérées comme françaises les actions et parts de sociétés ou personnes morales non cotées en bourse dont le siège est situé hors de France et dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits immobiliers situés sur le territoire français, et ce à proportion de la valeur de ces biens par rapport à l'actif total de la société". Or, la société monégasque détenait un vaste ensemble immobilier en France.

Selon ces règles, pourraient être considérés comme immeubles situés en France tous les titres de sociétés françaises ou étrangères qui détiennent principalement des immeubles situés en France (1). Il en est de même de toutes les participations de plus de 50 % dans des sociétés qui détiennent, même de manière secondaire, des immeubles en France.

L'administration fiscale estimait même que les parts sociales étaient taxables sur la base du 3° de cet article qui vise "les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France, [...] et généralement toutes les valeurs mobilières françaises ou étrangères de quelque nature qu'elles soient, reçus par l'héritier [...] qui a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B (N° Lexbase : L1010HLY)". Comme les héritiers étaient résidents de France, cette disposition était éventuellement susceptible de s'appliquer.

5. Mais ces règles de territorialité ne s'appliquent en principe qu'à défaut de conventions internationales conclues avec la France en matière de droits de mutation à titre gratuit (2). Or, la France avait conclu le 1er avril 1950 avec la Principauté de Monaco une Convention tendant à éviter les doubles impositions et à codifier les règles d'assistance en matière successorale. Cette Convention conclue avant l'élaboration du modèle OCDE de 1982 n'évoque pas la situation des immeubles possédés indirectement. Son article 2, paragraphe 1er indique que "les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux Etats contractants ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'Etat où ils sont situés". Tandis que son article 6 précise que "les actions ou parts sociales, [...] et tous autres biens laissés par un ressortissant de l'un des deux Etats auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5, seront soumis aux dispositions suivants, a) Si le de cujus était domicilié au moment de son décès dans l'un des deux Etats, lesdits biens ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans cet Etat".

6. Arguant de cette Convention, les héritiers ont alors assigné le directeur des services fiscaux pour contester l'imposition en France des parts de la société en cause et obtenir la restitution de la somme de 1 694 933 euros versée à ce titre.

7. Pour conforter sa position, l'administration fiscale excipait un échange de lettres (non ratifié) intervenu le 16 juillet 1979 entre les deux gouvernements dont il ressortait que "pour l'application du paragraphe 1er de l'article 2 de la Convention [...], les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans l'Etat où ils sont situés". L'administration prétendait que cet échange de lettres ne devait pas être interprété comme un accord destiné à limiter l'application de l'article 2 de la Convention franco-monégasque aux seules parts ou actions de société de construction ou d'attribution, mais à l'inverse comme un accord élargissant la portée de l'article 2 à des parts sociales de sociétés particulières. L'administration indiquait, en conséquence, qu'il fallait appliquer l'article 2, paragraphe 2 de la Convention mentionnant que "la question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier sera résolue d'après la législation de l'Etat dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé". L'administration prétendait ainsi que l'article 2 de la Convention portait également sur les parts sociales des sociétés à prépondérance immobilière.

8. Par jugement du 25 mars 2010, le tribunal de grande instance de Nice a estimé que l'article 750 ter du CGI était inapplicable à la succession en raison de la suprématie du droit conventionnel international. D'autant que la société monégasque "ne relevait pas du type de sociétés visées par l'échange de lettres du 16 juillet 1979" et que, dans ces conditions, les parts sociales appartenant au de cujus "devaient, en application de l'article 6 de la Convention franco-monégasque, dès lors que celui-ci était domicilié à Monaco, être assujetties aux droits de mutation dans la Principauté de Monaco". C'était donc à tort que la proposition de rectification se fondait sur cet article. La direction des services fiscaux a été condamnée à rembourser aux héritiers la somme de 1 694 933 euros outre intérêts dans les termes de l'article L. 208 du LPF (N° Lexbase : L7618HEU).

Sur appel de la direction générale des finances publiques, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt du 3 mai 2011, confirmé le jugement.

9. Mais, saisie d'un pourvoi, la Chambre commerciale de la Cour de cassation, réunie en formation plénière, censura, par un arrêt du 9 octobre 2012 (3), cette dernière décision dans toutes ses dispositions, au visa de "l'article 2 de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950 interprété par les lettres échangées entre les gouvernements français et monégasque le 16 juillet 1979". Pour la Cour de cassation, d'une part, seuls les biens auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 et 5 de la Convention relèvent de l'article 6, d'autre part, l'échange de lettres étend le champ d'application du § 1er de l'article 2 de la Convention, et enfin, il résulte du § 2 de l'article 2 de la Convention que la question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier doit être résolue d'après la législation de l'Etat dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé. Force est d'admettre que cet arrêt était pour le moins déroutant et difficile à interpréter. La grille de lecture pouvait être la suivante (4). Dans un premier temps, dans la mesure où l'article 6 est une sorte de clause générale qui a vocation à concerner tous les biens dont le statut n'est pas spécifiquement envisagé par un autre article de la Convention, il appartenait aux juges du fond de vérifier que le bien considéré ne ressortait pas de l'une des catégories de biens visées par les autres articles. Dans un second temps, s'agissant de l'article 2, peu importait que la société dont les parts étaient en cause ne répondait pas à la définition de celles qui étaient concernées par l'échange de lettres entre les deux gouvernements, puisque cet échange de lettres n'avait pas vocation à définir, mais seulement à étendre le champ d'application de cet article. Enfin, il incombait au juge du fond, confronté à la question du caractère immobilier d'un bien ou d'un droit, de se référer, en application du § 2 de l'article 2, à la législation de l'Etat dans lequel était situé le bien considéré, en l'occurrence, implicitement, à la législation française. Toutefois, même en suivant scrupuleusement cette méthode, la solution ne s'imposait pas d'elle-même, car, par exemple, il n'est nullement évident d'affirmer qu'en droit français, les parts ou les actions d'une société à prépondérance immobilière peuvent être qualifiées de biens ou de droits immobiliers.

10. La doctrine, dans son ensemble, s'était montrée particulièrement critique à l'encontre de cette décision (5). Certains ont souligné que l'échange de lettres du 16 juillet 1979 ne pouvait avoir étendu le champ d'application de la Convention, car un simple accord entre fonctionnaires ne peut étendre le champ d'application d'un traité international (6). A supposer même que l'échange de lettres ait été applicable, la doctrine soulignait que la décision paraissaît en méconnaître la portée réelle puisque cet échange ne vise que les sociétés véritablement transparentes sur un plan fiscal, et non pas toutes les sociétés à prépondérance immobilière, de même que cet échange de lettres ne couvrait pas non plus la possession d'immeubles par personnes interposées. Selon une opinion doctrinale modérée (7), la Cour de cassation aurait avant tout reproché à la cour d'appel d'avoir insuffisamment analysé le traitement en droit interne des titres de sociétés détenant des immeubles et la juridiction de renvoi devait ainsi affiner son analyse avant de conclure à l'absence d'imposition en France.

Mais, pour débouter à nouveau l'administration fiscale, la cour d'appel de renvoi d'Aix-en-Provence persista dans l'analyse qu'avaient faite les magistrats du fond.

B - La décision attaquée et l'arrêt de l'Assemblée plénière du 2 octobre 2015

11. Pour la cour de renvoi, la société monégasque n'est pas une société d'attribution concernée par l'échange de lettres du 16 juillet 1979. Si, au regard des articles 750 ter du CGI, la société apparaît comme une société à prépondérance immobilière, au regard de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950 à laquelle il convient de se référer en vertu de la hiérarchie des normes, cette société relève de l'article 6 de cette Convention qui vise spécifiquement les parts sociales. La fiscalité applicable est donc celle de la Principauté de Monaco.

12. Sans surprise, l'administration fiscale se pourvut en cassation en affirmant que, contrairement aux allégations de la cour d'appel de renvoi, l'échange de lettres du 16 juillet 1979 ne restreignait pas la portée de l'article 2 de la Convention franco-monégasque. Il est vrai que la Chambre commerciale de la Cour de cassation, en censurant les premiers juges par sa décision du 9 octobre 2012, avait justement affirmé que l'échange de lettres étendait le champ d'application du § 1er de l'article 2 de la Convention.

13. L'échange de lettres entre les gouvernements étendait-il ou restreignait-il la portée de l'article 2 de la Convention ? Telle était, semble-t-il, la question posée à l'Assemblée plénière de la Cour de cassation.

Mais la Haute assemblée ne répond pas à cette question. Elle estime que l'échange de lettres invoqué par le moyen est un motif surabondant utilisé par la cour de renvoi pour justifier sa décision. Pour la Haute juridiction, la cour d'appel pouvait valablement, en invoquant la hiérarchie des normes, se référer d'abord aux conventions internationales. Or, en retenant que les parts de la société monégasque constituaient des biens incorporels de nature mobilière, il était possible d'affirmer qu'au regard de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950, la société monégasque relevait de l'article 6, qui vise les actions ou parts sociales, et non de l'article 2, qui concerne les immeubles et droits immobiliers. Or, l'article 6 prévoit que, si le de cujus était domicilié, au moment de son décès, dans l'un des deux Etats, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans cet Etat, si bien que la cour d'appel pouvait exactement en déduire que l'imposition des parts sociales transmises par le décès de leur titulaire résidant à Monaco relevait de cet Etat et non de la France.

II - Analyse critique de l'arrêt

14. A travers cette décision, la Cour de cassation propose une méthode de lecture des conventions fiscales. D'une manière parfaitement claire, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation indique qu'il faut d'abord se référer aux conventions fiscales avant d'aborder le droit interne (A). D'une manière plus implicite, mais manifeste, la Haute cour prône également une lecture littérale des conventions fiscales (B). Par ailleurs, la Haute juridiction avance une qualification juridique précise pour les parts sociales des sociétés à prépondérance immobilière, ces dernières étant qualifiées de "biens corporels de nature mobilière" (C).

A - Le principe de primauté du droit conventionnel

15. Cet arrêt met en relief la difficulté de définir une méthodologie de lecture des conventions fiscales, en particulier en ce qui concerne les interactions entre le droit interne et la Convention fiscale.

A priori, la solution est donnée par l'article 55 de la Constitution (N° Lexbase : L0884AH9) qui affirme très explicitement que "les Traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie". L'article 55 instaure une hiérarchie des normes en plaçant les conventions internationales au-dessus de la loi nationale. Le droit fiscal ne devrait, en théorie, nullement échapper à ce principe.

16. Pourtant, le Conseil d'Etat considère que les conventions fiscales ne doivent être appliquées qu'après vérification préalable de la correcte application du droit interne (8). Tel est, en résumé, le principe de subsidiarité des conventions fiscales. Mais lorsque les conventions fiscales s'appliquent, elles l'emportent alors sur le droit interne. C'est le principe de primauté du traité sur la loi, qui vaut en matière fiscale comme ailleurs.

Le principe de subsidiarité est a priori un principe favorable au contribuable qui repose sur deux postulats (9). D'une part, le contribuable ne doit, de toutes les façons, pas être imposé si la loi interne ne l'impose pas. D'autre part, la convention fiscale qui vise précisément à éviter les doubles impositions peut permettre au contribuable d'échapper à l'impôt lorsque la loi interne lui est défavorable. Ces postulats forment ce que d'éminents fiscalistes ont qualifié de principe de non-aggravation. Ce principe implique que la situation d'un contribuable ne peut être aggravée par l'application d'une convention fiscale, dont la raison d'être est précisément la protection des contribuables par la recherche de l'élimination des doubles impositions. La supériorité conventionnelle ne joue donc qu'à sens unique, à titre de garantie. Elle peut alléger ou supprimer des obligations fiscales, mais non les aggraver ou en créer de nouvelles.

Cependant, dès sa naissance, le principe de non-aggravation fut accablé par le malheur. D'abord, la génitrice naturelle de tous les grands principes du droit fiscal, à savoir la plus Haute juridiction administrative, ne reconnut jamais la maternité d'un tel précepte. Il faut avouer que plusieurs dispositions du CGI prévoient que lorsque l'imposition de revenus est attribuée à la France par une convention fiscale, ils y sont passibles soit de l'impôt sur le revenu, soit de l'impôt sur les sociétés. Ces textes permettent ainsi de soumettre à l'impôt certains revenus alors même que le droit interne ne le permettrait pas. Né sous X, pupille de la doctrine, le principe de non-aggravation a ensuite souffert d'une maladie dégénérative fatale. A force d'attaques jurisprudentielles répétées et mortelles, dont la dernière remontait au 12 juin 2013 (CE 3° et 8° s-s-r., 12 juin 2013, n° 351702, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A5884KGZ), le principe de non-aggravation s'est définitivement éteint avec un arrêt rendu le 12 mars 2014 (CE 9° et 10° s-s-r., 12 mars 2014, n° 362528, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6800MGX). A travers cette décision, le Conseil d'Etat réussit l'exploit d'instaurer une double imposition en se fondant sur une convention bilatérale dont l'objet consistait précisément à éviter les doubles impositions.

Avec la disparition du principe de non-aggravation, la question de la survie du principe de subsidiarité devait inévitablement se poser. D'autant que le présent arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation semble porter un coup mortel au principe de subsidiarité.

17. En affirmant qu'en vertu de la hiérarchie des normes, il convient de se référer, d'abord, aux conventions internationales, la Haute cour se dégage incontestablement de la méthode posée avec précision à l'arrêt précité du 28 juin 2002. Il convient, à ce sujet, de rappeler que le Conseil d'Etat avait considéré "que si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu'il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer (en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office) si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale".

A vrai dire, ce n'est pas la première fois que la Cour de cassation opte pour une méthode différente de celle proposée par le Conseil d'Etat.

18 Dans un arrêt du 19 janvier 2010 (Cass. com., 19 janvier 2010, n° 08-20.936, F-D N° Lexbase : A4649EQA), relatif à l'application de la Convention franco-saoudienne (N° Lexbase : L6661BH8), la Chambre commerciale retenait "que selon la Convention fiscale franco-saoudienne, les actions, parts ou autres droits détenus dans une société dont les actifs sont constitués pour plus de 50 % par des biens immobiliers situés dans un Etat contractant, ou des droits portant sur de tels biens immobiliers, sont considérés comme des biens immobiliers situés dans cet Etat, [...] que le requérant est propriétaire de 99 % des parts de deux sociétés, qui détiennent respectivement 90 % et 10 % d'une autre société, propriétaire de deux chalets situés à Courchevel, que ces sociétés ont des actifs constitués pour plus de 50 % par des biens immobiliers en France, et qu'il détient 99 % des actions d'une société, qui possède 100 % du capital d'une autre société, laquelle détient 100 % d'une société française, propriétaire d'un bien immobilier à Paris ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, dont il résulte que les actifs des sociétés en cause étaient constitués, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par des biens immobiliers situés en France, la cour d'appel a décidé à bon droit que les parts et actions de ces sociétés devaient être considérées comme des biens immobiliers situés en France au sens de l'article 14 A paragraphe 1 et 2 de la Convention ; que le moyen n'est pas fondé". Comme le soulignait Jean-Luc Pierre en commentant cette décision, "à la différence du Conseil d'Etat, la Cour de cassation, qui se réfère directement aux dispositions de la Convention en vigueur entre la France et l'Arabie Saoudite, ne conjugue pas la règle de supériorité des conventions bilatérales sur la loi nationale avec celle de subsidiarité desdites conventions" (10). Mais l'éminent fiscaliste soulignait également qu'"eût-elle retenu la règle de subsidiarité des conventions fiscales, la Haute juridiction judiciaire n'aurait pas pour autant adopté une solution autre que celle du rejet du pourvoi : les dispositions des deuxième et quatrième alinéas de l'article 750 ter, 2° du CGI auraient été considérés comme justifiant l'assujettissement du requérant au titre de la valeur des biens immobiliers situés en France, et celles de l'article 14 A de la Convention comme n'amenant pas à écarter un tel assujettissement, même dans la situation où ces biens sont détenus par l'intermédiaire d'une chaîne de sociétés" (11).

19. Dans un autre arrêt, en revanche, la Chambre commerciale, en appliquant le principe de supériorité du droit conventionnel, a rendu une décision qui s'écarte sensiblement de celle qui aurait été prise si le principe de subsidiarité avait été appliqué. Cet arrêt du 26 octobre 2010 (12) concernait un avenant publié le 23 août 2005 à la Convention du 18 mai 1963 entre la France et la Principauté de Monaco, relatif à l'impôt sur la fortune (N° Lexbase : L6726BHL) : "Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'avenant ne fait pas de discrimination entre les Français résidant à Monaco et tend à aligner leur situation sur celle des Français résidant en France ; qu'il retient encore qu'il prend en compte la situation particulière de la Principauté vis-à-vis de la France, et est fondé sur un motif d'intérêt général, éviter l'évasion fiscale ; qu'il relève que les négociations entre la France et Monaco qui se sont déroulées au cours de l'année 2001 ont abouti à un accord le 18 octobre 2001, que la mesure, ainsi que son entrée en vigueur à compter du 1er janvier 2002, ont été publiquement annoncées le 24 octobre 2001, puis en 2002, ce qui a incité les contribuables concernés à anticiper l'entrée en vigueur du texte ; qu'il ajoute qu'il a été prévu d'accorder à ces derniers de larges facilités de paiement, et qu'aucune pénalité n'a été appliquée sur la période 2002-2005 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que l'avenant, qui ne procédait à aucune discrimination, ménageait un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de la protection des droits des contribuables, la cour d'appel a légalement justifié sa décision". Comme le souligne Jean-Pierre Maublanc, la Cour de cassation s'est affranchie du principe de subsidiarité des conventions fiscales internationales, et "l'avenant litigieux a été, en l'absence totale de loi interne, invoqué par la seule administration pour l'ériger en fondement direct de l'ISF dû à raison de leur patrimoine mondial par certains Français domiciliés dans la Principauté. L'avenant du 26 mai 2003 a donc fondé à la fois la domiciliation et l'imposition en France, par exception à des solutions pourtant regardées comme solidement établies" (13).

20. Dans notre affaire, qu'en est-il ?

Assurément, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation proclame que la méthode à suivre consiste à analyser en priorité la Convention.

Mais, contre toute attente, au lieu de se livrer à une analyse de la Convention franco-monégasque, la Cour de cassation utilise le droit interne pour qualifier les parts sociales de la société monégasque. Ces parts sont qualifiées de "biens incorporels de nature mobilière". Nous retrouvons ici une parfaite application du principe de priorité du droit interne sur le droit conventionnel.

En effet, en vertu de la supériorité du droit conventionnel, pour déterminer quel article de la Convention fiscale s'applique, il faudrait, en principe, d'abord savoir comment elle qualifie le bien. Néanmoins, lorsque la Convention n'est pas suffisamment précise, la jurisprudence a une nette tendance à faire prévaloir les définitions données par le droit interne. En pratique, le basculement au droit interne est fréquent, puisque lorsque la Convention ne définit pas un terme qu'elle emploie, celui-ci a, en principe, le sens que lui donne le droit de l'Etat qui applique la Convention (14).

21. On notera que la cour d'appel d'Aix-en-Provence avait d'ailleurs résolument adopté le principe de subsidiarité des conventions fiscales en énonçant, après avoir analysé la nature de la société monégasque et ses règles de fonctionnement, que "vue au travers du prisme des règles des articles 750 ter et 990 D (N° Lexbase : L5483H9X) du CGI français, la société (monégasque) est une société à prépondérance immobilière. Mais au regard de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950, cette société relève de l'article 6 de la Convention et non de son article 2".

22. Dans notre espèce, il n'est pas possible d'affirmer que l'Assemblée plénière a appliqué, implicitement, l'article 2, paragraphe 2 de la Convention qui indique que "la question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier sera résolue d'après la législation de l'Etat dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé". En effet, les biens dont on cherche la qualification ne sont naturellement pas les immeubles situés en France puisque leur caractère ne posait aucune difficulté. Le débat concernait des parts sociales donnant droit à une quote-part du capital d'une société civile particulière de droit monégasque répondant aux articles 1679 et suivants du Code civil monégasque. Or, ces parts sociales étaient localisées à Monaco et non en France. En conséquence, c'est le droit monégasque qui aurait dû être appliqué pour déterminer si ces parts sociales devaient être qualifiées de biens meubles ou d'immeubles. Telle n'a pas été la démarche suivie par la Haute juridiction judiciaire qui ne s'est nullement intéressée à la législation monégasque.

23. Sans conteste, et malgré sa pétition de principe, l'Assemblée plénière s'est donc d'abord livrée à une qualification des parts sociales selon le droit français avant d'appliquer la Convention fiscale entre la France et Monaco.

La méthode suivie par la Haute juridiction de l'ordre judiciaire ne se distingue ainsi pas vraiment de celle prônée par la Haute juridiction de l'ordre administratif.

Les juridictions se rejoignent également lorsqu'elles adoptent une interprétation littérale des conventions.

B - L'interprétation littérale de la Convention

24. On soulignera, pour être précis, que cette affaire mobilisait en réalité deux conventions fiscales : la Convention franco-marocaine du 29 mai 1970 (N° Lexbase : L6722BHG), et la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950. Mais l'application de la première Convention qui, dans son article 5, précisait que "les ressortissants de l'un des Etats contractants ne peuvent être soumis à une imposition autre ou plus lourde que celle à laquelle seraient assujettis les nationaux de l'autre Etat dans la même situation" ne posait aucune difficulté puisque les magistrats du fond en avaient à juste titre déduit que "la succession du de cujus, de nationalité marocaine, domicilié fiscalement à Monaco, revenant à des héritiers français demeurant en France, ne peut être traitée, pour ce qui concerne les héritiers, différemment de celle d'un Français domicilié à Monaco". L'on peut ainsi comprendre que l'Assemblée plénière se soit concentrée uniquement sur l'interprétation de la Convention franco-monégasque.

25. Deux articles pouvaient s'appliquer et le choix de l'article pertinent s'avérait fondamental.

L'article 2 de la Convention franco-monégasque comporte deux paragraphes.

Le premier indique que "les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux Etats contractants ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'Etat où ils sont situés", tandis que le second pose que "la question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier sera résolue d'après la législation de l'Etat dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé".

Quant à l'article 6, il mentionne que "les actions ou parts sociales, fonds d'Etat, obligations, créances chirographaires ou hypothécaires et tous autres biens laissés par un ressortissant de l'un des deux Etats auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5, seront soumis aux dispositions suivantes : si le de cujus était domicilié au moment de son décès dans l'un des deux Etats, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans cet Etat".

26. Cet article 6 pose une difficulté d'interprétation, car l'on peut se demander si la formule "auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5" ne concerne que le "et tous autres biens" ou qu'elle se rapporte également aux biens énumérés au début de la phrase, à savoir "les actions ou parts sociales, fonds d'Etat, obligations, créances chirographaires ou hypothécaires". Si l'on considère que la formule ne concerne que les "et tous les autres biens", il en ressort inévitablement que les actions ou parts sociales relèvent par nature de l'article 6 et, par conséquent échappent, dans tous les cas, au régime spécifique des immeubles. Si l'on estime, au contraire, que la formule vise également les actions ou parts sociales, l'article 6 se présente comme une règle générale applicable à tous les biens qui ne sont pas concernés par les articles spécifiques qui le précédent, c'est-à-dire les articles 2 à 5. Autrement dit, certaines actions ou parts sociales pourraient parfaitement rentrer dans le champ d'application de l'article 2, dès lors que ces actions ou parts sociales présentent un caractère immobilier.

Alors que la Chambre commerciale Cour de cassation avait résolument opté pour la seconde lecture en indiquant que "seuls les biens auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5 de ladite Convention relèvent dudit article 6", la cour d'appel de renvoi a persisté à retenir la première interprétation, la plus étroite, en précisant, entre autres arguments pour débouter l'administration fiscale, que l'article 6 "vise spécifiquement les parts sociales".

27. Indiscutablement, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation censure sur ce point l'analyse qu'avait faite la Chambre commerciale, en indiquant, après avoir qualifié les parts sociales en cause de biens incorporels de nature mobilière, que la société monégasque "relevait de l'article 6, qui vise les actions ou parts sociales".

Cette solution peut se justifier en considérant que pour déterminer l'article pertinent dans une convention fiscale, il faut en principe se référer à l'article le plus précis, car ce dernier prévaut normalement sur le plan plus général en raison de la règle "specialia generalibus derogant" (15). Or, les parts sociales sont une catégorie très particulière de biens alors que l'article 2 vise une catégorie générale, à savoir les immeubles et les droits immobiliers.

28. Il n'en reste pas moins que la lecture que l'Assemblée plénière fait de l'article 6 est curieuse dans la mesure où il ne fait aucun doute que certaines actions ou parts sociales, dès lors qu'elles sont investies "dans une entreprise commerciale, industrielle ou autre", rentrent dans le champ d'application de l'article 5 de la Convention (16). De la même manière, certaines actions ou parts sociales peuvent avoir un caractère immobilier et, par conséquent, rentrer dans le champ d'application de l'article 2. L'échange de lettres en les Gouvernements français et monégasque du 16 juillet 1979 précise d'ailleurs que "pour l'application du paragraphe 1er de l'article 2 de la Convention [...], les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans l'Etat où ils sont situés".

29. Mais l'Assemblée plénière considère que cet échange de lettres, qui avait pourtant cristallisé l'ensemble du débat et constituait le moyen essentiel du pourvoi, est surabondant pour résoudre le problème.

La question de la portée de l'échange de lettres était effectivement périphérique au conflit principal et brouillait incontestablement le débat.

Dans un commentaire d'une grande clarté relatif à l'arrêt du 9 octobre 2012, Bruno Gouthière avait parfaitement montré que l'échange de lettres ne pouvait, contrairement à ce qu'avait affirmé la Chambre commerciale de la Cour de cassation, avoir étendu le champ d'application du paragraphe 1er de l'article 2 de la Convention (17). Un tel accord entre fonctionnaires non ratifié ne peut étendre le champ d'application d'un traité international. Il ne s'agit nullement d'un avenant au traité. C'était donc à tort, à son avis, que la Cour de cassation avait donné à cet échange de lettres une portée juridique qu'il n'avait pas. Tout au plus, reconnaissait-il qu'il s'agissait d'une interprétation éventuellement intéressante que le juge de l'impôt pouvait prendre en considération s'il le souhaitait, pourvu que cette interprétation s'appuie sur des textes et qu'elle soit suffisamment étayée.

30. Le fait de déterminer si cet échange de lettres étendait ou restreignait la portée (juridique ?) de l'article 2 de la Convention n'avait ainsi aucun sens. D'autant que l'échange de lettres, en reprenant fidèlement la lettre de l'article 1655 ter du CGI (N° Lexbase : L1910HMP), visait exclusivement des sociétés très particulières dont les parts donnent vocation à la jouissance ou à l'attribution de lots de copropriété d'un immeuble alors que la société monégasque en cause ne rentrait en aucune façon dans cette catégorie.

C'est donc avec une grande habilité que l'Assemblée plénière surmonte la difficulté qui lui était posée en énonçant, à juste titre, que le recours à l'échange de lettres est surabondant pour débouter l'administration fiscale, et implicitement, mais sûrement qu'une lecture littérale de la Convention suffit.

Selon le premier avocat général dans cette affaire, la solution "résulte d'une disposition claire, c'est-à-dire insusceptible d'interprétation contraire, de la Convention bilatérale passée entre les deux Etats" et doit à son sens être considéré comme décisif (18).

31. Par là même, la Haute juridiction de l'ordre judiciaire rejoint la jurisprudence du Conseil d'Etat qui privilégie également cette méthode d'interprétation.

Cette lecture stricte de la Convention est suffisante pour régler le conflit, dès lors que l'Assemblée plénière avait pris soin de qualifier préalablement les parts sociales en cause de "biens incorporels de nature mobilière". En effet, dès cette qualification posée, l'affaire était entendue puisque, de toutes les manières, l'article 2 ne vise que les immeubles et droits immobiliers, tandis que l'article 6 mentionne expressément les parts sociales.

La question essentielle consistait effectivement à qualifier juridiquement les parts sociales litigieuses.

C - La qualification des parts sociales des sociétés à prépondérance immobilière

32. L'Assemblée plénière répond de manière directe à la question principale portant sur la qualification des parts sociales de la société monégasque.

33. La question de la qualification d'un bien (meuble ou immeuble) est, a priori, une question différente de celle de la localisation de ce bien (France ou Monaco). Si un bien est qualifié d'immeuble, mais se trouve localisé à Monaco, l'application de la Convention franco-monégasque implique que l'imposition de ce bien transmis par le décès de son propriétaire résidant à Monaco relève de cet Etat et non de la France.

L'Assemblée plénière ne répond pas à la question de la localisation du bien. Mais dès lors qu'elle affirme que les parts sociales litigieuses sont des "biens incorporels de nature mobilière", on peut aisément en déduire qu'il s'agit de biens meubles localisés à Monaco. En effet, les valeurs mobilières émises par une société qui a son siège social à Monaco sont considérées comme situées à Monaco (19).

34. En revanche, la Cour de cassation ne précise pas si elle s'est contentée de la définition civile des parts sociales ou si elle a recherché une définition "fiscale". En effet, la jurisprudence du Conseil d'Etat tend à faire prévaloir les définitions données par les textes fiscaux, lorsqu'il y a conflit avec d'autres textes. Par exemple, les juges suprêmes administratifs ont retenu une définition "fiscale" de la notion d'immeuble (immeuble par nature) et non pas une définition "civile" (immeuble par destination) dans un arrêt rendu en 2002 (20).

Pour déterminer si la Cour de cassation a préféré privilégier le droit civil au détriment du droit fiscal, il convient d'entrevoir la qualification des parts sociales en question sous le prisme de ces deux domaines de droit.

35. Rappelons que la division des biens en biens meubles et immeubles fonde l'ensemble des règles concernant le droit des biens (C. civ., art. 516 N° Lexbase : L1056ABQ et s.). Si le langage quotidien réduit le mot "immeuble" à la désignation d'un bâtiment urbain, il n'en est pas de même dans le langage juridique où le mot désigne tout un ensemble de biens et de droits. Si les biens qui ne peuvent être déplacés sont des immeubles, sont aussi juridiquement des biens immobiliers certains droits comme l'usufruit, les servitudes, les hypothèques et les actions judiciaires qui tendent à la revendication de la propriété immobilière. Dès lors, il est parfaitement envisageable que des parts sociales ou des actions puissent être analysées, éventuellement, comme des droits immobiliers particuliers.

36. Cependant, selon l'article 529, alinéa 1er du Code civil (N° Lexbase : L3103ABK), "sont meubles par la détermination de la loi les obligations et actions qui ont pour objet des sommes exigibles ou des effets mobiliers, les actions ou intérêts dans les compagnies de finance, de commerce ou d'industrie, encore que des immeubles dépendant de ces entreprises appartiennent aux compagnies. Ces actions ou intérêts sont réputés meubles à l'égard de chaque associé seulement, tant que dure la société". Il en ressort que les actions d'une société par actions sont des biens meubles quand bien même cette société ne posséderait que des immeubles. Toutefois, l'article 529 ne concerne que les actions et non, à proprement parler, les parts sociales. L'extension de la solution aux parts sociales s'explique par la théorie sous-jacente qui la justifie. En effet, c'est parce que la société a la personnalité juridique que les biens qu'elle possède ne sont pas la copropriété des associés. Les associés ont un droit de créance contre la société leur permettant de récupérer la valeur de leurs apports et d'avoir droit à une quote-part des bénéfices. Si les associés disposent d'un droit de propriété, ce droit s'exerce directement sur les actions qui étaient matérialisées à l'origine par des titres papier. Si les actions, comme toutes les valeurs mobilières, ont été dématérialisées en 1981, elles conservent leur qualification de biens meubles incorporels.

Comme c'est la théorie de la personnalité morale qui justifie la solution pour les actions, l'analyse doit en être identique pour les parts sociales depuis que toutes les sociétés acquièrent la personnalité juridique à compter de leur immatriculation.

37. En revanche, dès que la personnalité morale s'efface, il est possible d'estimer que les titulaires de parts sociales ont un droit direct sur l'immeuble, justifiant la qualification réelle immobilière de leurs droits. Cette analyse a pu être faite (21) à propos des parts de sociétés civiles d'attribution créées par la loi du 28 juin 1938, reprise aujourd'hui, à la suite de la loi du 16 juillet 1971 (N° Lexbase : L4688GU8), dans les articles L. 212-1 (N° Lexbase : L7217ABW) et suivants du Code de la construction et de l'habitat. Philippe Malinvaud fait, à cet égard, observer que si le législateur a tendance à donner à ces parts le statut d'immeubles, la jurisprudence applique le régime des meubles pour résoudre les problèmes non réglés par la loi. Pour lui ces sociétés sont d'une transparence particulièrement affirmée et d'une personnalité morale ténue, ce qui se manifeste tant en matière fiscale qu'en matière civile (22). Toujours en suivant cette idée, la Cour de cassation reconnaît aux juges du fond le droit de requalifier la cession de parts sociales en cession d'immeubles, dès lors qu'en réalité la société n'est qu'une coquille vide (23).

Cependant, et il convient de la souligner avec force, la Cour de cassation n'a jamais affirmé que les parts sociales d'une société civile immobilière étaient des immeubles.

Au contraire, elle affirme avec force que ces parts ont un caractère mobilier (24).

38. Qu'en est-il maintenant dans la loi ou la jurisprudence fiscale ?

Sans conteste, le droit fiscal a tendance à lever plus facilement le voile de la personnalité morale des sociétés lorsque ces dernières possèdent des immeubles. Ainsi l'article 728 du CGI (N° Lexbase : L7961HLG) prévoit que : "Sans préjudice des dispositions de l'article 1655 ter, les cessions d'actions ou de parts conférant à leurs possesseurs le droit à la jouissance d'immeubles ou de fractions d'immeubles sont réputées avoir pour objet lesdits immeubles ou fractions d'immeubles pour la perception des droits d'enregistrement". De même l'article 1655 ter du CGI prévoit que "les sociétés qui ont, en fait, pour unique objet soit la construction ou l'acquisition d'immeubles ou de groupes d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance, soit la gestion de ces immeubles ou groupes d'immeubles ainsi divisés, soit la location pour le compte d'un ou plusieurs des membres de la société de tout ou partie des immeubles ou fractions d'immeubles appartenant à chacun de ces membres, sont réputées, quelle que soit leur forme juridique, ne pas avoir de personnalité distincte de celle de leurs membres pour l'application des impôts directs". Dans ce cas, le principe de transparence fiscale s'applique pour la perception des droits de mutation par décès, la société est considérée comme n'ayant pas de personnalité distincte de celle de ses associés et la mutation des parts sociales est considérée comme ayant pour objet (25) :

- les locaux à la propriété ou à la jouissance desquels les droits sociaux donnent vocation, si la mutation intervient postérieurement à l'établissement d'un état de division et à l'affectation d'un local déterminé à chaque groupe d'actions ou de parts ;
- une quote-part de l'actif social représenté par les droits sociaux, si la mutation intervient avant l'établissement de l'état de division.

39. Cependant, Bruno Gouthière considère que les titres de sociétés transparentes sont réputés ne pas avoir de personnalité juridique distincte de celle de leurs membres, si bien qu'il est possible de soutenir que les titres de ces sociétés doivent être traités comme des immeubles pour l'application des conventions fiscales (26).

Quoi qu'il en soit, ces remarques ne concernent que des sociétés immobilières de copropriété et non les sociétés à prépondérance immobilière.

Or, dans notre affaire, les juges du fond avaient qualifié la société monégasque de société à prépondérance immobilière.

40. L'article 726 du CGI (N° Lexbase : L9764I3Z), relatif aux cessions de droits sociaux, précise qu'est "à prépondérance immobilière la personne morale [...] dont l'actif est, ou a été au cours de l'année précédant la cession des participations en cause, principalement constitué d'immeubles ou de droits immobiliers situés en France ou de participations dans des personnes morales [...] elles-mêmes à prépondérance immobilière". La société à prépondérance immobilière n'est donc pas une société de copropriété, mais une société de gestion. Elle ne se confond pas avec les immeubles dont elle est propriétaire, mais a une existence en dehors de chacun d'entre eux : il n'est pas question de les partager, mais de les exploiter. Or, si le législateur français a décidé que la mutation à titre gratuit de sociétés de cette sorte devait être imposée en France au même taux que pour les mutations d'immeubles, il n'en a pas, pour autant, fait des biens immobiliers. Bien au contraire, l'article 726 commence par indiquer que "les cessions de droits sociaux sont soumises à un droit d'enregistrement dont le taux est fixé [...]". Au demeurant, comme le relève Laurent Le Mesle, si les parts de "SCI" relevaient, par nature, de la rubrique "immeubles et droits immobiliers", les conventions les plus récentes (avec l'Allemagne, l'Italie...) n'auraient pas eu besoin de le préciser expressément (27). On soulignera également que plusieurs réponses ministérielles allaient dans ce sens (28) et que, dans une instruction du 26 avril 1999 (29), l'administration avait précisé qu'aucune des 35 Conventions fiscales conclues par la France en matière de droits de mutation à titre gratuit, y compris, par conséquent, la Convention franco-monégasque, ne permettait l'application du 2ème alinéa de l'article 750 ter, 2° du CGI. Pour finir, on rappellera que le rapport du ministère des Finances et de l'Industrie "sur les relations économiques et financières entre la France et la Principauté de Monaco" d'octobre 2000 (30) propose de "modifier la convention de 1950 sur les successions, notamment s'agissant de l'imposition des parts de SCI monégasques propriétaires de biens immobiliers situés en France. La Convention actuelle permet en effet aux héritiers de parts de SCI monégasques propriétaires de biens immobiliers situés en France d'éluder l'impôt sur les successions lorsque le défunt résidait à Monaco". La réforme n'a jamais abouti contrairement à ce qui s'est passé pour la Convention sur les revenus.

41. Pour conclure, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation a parfaitement énoncé que les parts sociales de la société monégasque, même si elle est à prépondérance immobilière, sont des biens incorporels de nature mobilière. Qu'en appliquant ensuite scrupuleusement la Convention franco-monégasque, sans procéder à une interprétation déformante, la Haute cour pouvait souverainement en déduire que ces parts relevaient de l'article 6 qui vise précisément les parts sociales et non l'article 2 qui concerne les immeubles et droits immobiliers. Qu'en conséquence, c'était donc bien la Principauté de Monaco qui était investie du droit d'imposer ces parts aux droits de mutation à titre gratuit. Au final, à défaut de réellement promouvoir la règle de la supériorité des conventions fiscales sur le droit interne, la Haute juridiction propose une règle de raison en écourtant le raisonnement pour répondre rapidement et sans détour à la question de fond.


(1) D. Hadjiveltchev et F. Roux, Les parts sociales sont-elles des immeubles ? La Cour de Cassation n'en doute point !, Option Finance, 10 décembre 2012 : les auteurs estiment que l'article 750 ter du CGI "se limite à définir si un bien est français ; il ne qualifie pas la nature du bien. Ainsi, selon ce texte, les titres de sociétés qui détiennent des immeubles en France peuvent être considérés (sous certaines conditions) comme des biens français. Les titres ne sont pour autant pas qualifiés d'immeubles". Cette analyse s'appuie assurément sur la lettre de l'alinéa 4 de l'article 750 ter, 2°. Il s'agirait d'un texte de "territorialité". Cette analyse suppose, néanmoins, que l'on fasse abstraction de la notion d'immeuble possédé indirectement, puisque, dans cette situation, l'immeuble est réputé faire partie de la succession dès lors qu'il est situé en France et la qualification ou la localisation des parts sociales n'a donc plus d'importance.
(2) B. Gouthière, Les impôts dans les affaires internationales, éd. Fr. Lefebvre, 9ème éd., n° 46700 et s..
(3) Cass. com. 9 octobre 2012, n° 11-22.023, F-P+B (N° Lexbase : A3451IUD), Bull n° 180 ; B. Gouthière, Convention franco-monégasque : droits de succession, éd F. Lefebvre, FR 50 /12, n° 8, questions d'actualité ; D. Gutmann et E. Pornin, Octobre 2011-octobre 2012 : la fiscalité du patrimoine en évolution constante, Droit et patrimoine, février 2013, chron. n° 56 ; D. Hadjiveltchev et F. Roux, Les parts sociales sont-elles des immeubles ? La Cour de cassation n'en doute point !, Option Finance, 10 décembre 2012 ; Ch. Laroche, Convention franco-monégasque : détermination du lieu d'assujettissement aux droits de succession d'immeubles représentés par des titres, Revue de droit fiscal, 7 février 2013, comm. 144.
(4) En ce sens Avis de l'avocat général, L. Le Mesle, sous Ass. plén. 2 octobre 2015.
(5) Références précitées.
(6) B. Gouthière, article précité.
(7) D. Hadjiveltchev et F. Roux, article précité.
(8) CE Ass., 28 juin 2002, n° 232276, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0219AZ7), Rec. CE 2002, p. 233 ; Dr. fisc., 2002, n° 36, comm. 657 ; Dr. fisc., 2002, n° 36, étude 28, P. Dibout, L'inapplicabilité de l'article 209 B du CGI face à la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 (à propos de l'arrêt CE, ass., 28 juin 2002), Dr. sociétés, 2002, comm. 184, note J.-L. Pierre, RJF, 10/2002, n° 1080, chron. L. Olléon, p. 755, BDCF, 10/2002, n° 120, concl. S. Austry, Rev. Sociétés, 2002, p. 538 et s., obs. O. Fouquet, LPA, 17 août 2002, p. 4 et s., note B. Boutemy, E. Meier et Th. Perrot, Bull. Joly Sociétés, 2002, n° 200, note C. Nouel et S. Reeb, BGFE, 2002, n° 4, p. 3 et s., obs. E. Davoudet, FR Lefebvre, 34/2002, p. 14, obs. N. Chahid-Nouraï et P. Couturier, GAJF, 4ème éd., n° 4 ; CE 3° et 8° s-s-r., 13 juillet 2007, n° 290266, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A2858DX7), Rec. CE 2007, tables, p. 776, Dr. fisc., 2007, n° 43, comm. 937, note J.-Ch. Gracia, RJF, 11/2007, n° 1302, BDCF, 11/2007, n° 132, concl. F. Séners.
(9) D. Gutmann, Droit fiscal des affaires, Monchrestien-Lextenso éd., 6ème éd., n° 66.
(10) J.-L. Pierre, Titres détenus par un non-résident dans une société à prépondérance immobilière étrangère propriétaire d'immeubles en France, JCP, éd. E, 2010, 1462.
(11) Ibid.
(12) Cass. com., 26 octobre 2010, n° 09-15.044, FS-P+B (N° Lexbase : A0311GDU), Bull. n° 160.
(13) J.-P. Maublanc, Taxation rétroactive à l'ISF, sur leur patrimoine mondial, des Français établis à Monaco depuis 1989, Droit fiscal, 2011, n° 3, comm. 117.
(14) B. Gouthière, Les impôts dans les affaires internationales, précité, n° 10232.
(15) En ce sens, B. Gouthière, préc., n° 10490.
(16) En ce sens, Avis de L. Le Mesle, p. 5.
(17) Cass. com., 9 octobre 2012, préc. ; B. Gouthière, Convention franco-monégasque : droits de succession, préc..
(18) Avis L. Le Mesle, préc..
(19) B. Gouthière, Les impôts dans les affaires internationales, préc., n° 48060.
(20) CE 9° et 10° s-s-r., 27 mai 2002, n° 125959, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A8154AYN), RJF, 8-9/02, n° 900, conclusions G. Goulard au BDCF, 8-9/02, n° 104 ; B. Gouthière, Les impôts dans les affaires internationales, préc., n° 9450.
(21) M.-C. de Lambertye-Autrand, La distinction des meubles et immeubles en droit international privé, Thèse Paris 1, 2001.
(22) Ph. Malinvaud, La distinction des meubles et immeubles à l'épreuve des sociétés d'attribution, études offertes à Roger Houin, Dalloz-Sirey, 1985, p. 201.
(23) Cass. civ. 3, 5 mai 1981, n° 79-17.115, publié au bulletin (N° Lexbase : A1879CGP), Bull. civ. III, n° 90 : "L'arrêt, par motifs propres et adoptés, énonce souverainement que la société n'a été qu'une technique de commercialisation, que la cession de parts sociales n'a été qu'une forme juridique dénuée d'effets réels, les cessionnaires n'ayant jamais été effectivement associés puisque l'acte de cession entraînait immédiatement partage et attribution à l'acquéreur d'un lot privatif et de tantièmes de parties communes, et que par le biais d'une société civile d'attribution et sous la forme d'une cession de parts, les consorts avaient procédé à des ventes d'immeuble achevé".
(24) Cass. civ. 3, 9 avril 1970, n° 68-13.956 (N° Lexbase : A6556AGW), Bull. civ. III, n° 234, JCP éd G, II, 16925, note Petot-Fontaine ; Cass. civ. 3, 15 mai 1970, n° 68-13.973, publié au bulletin (N° Lexbase : A5562CHH), Bull. civ. III, n° 340 ; Cass. civ. 3, 23 octobre 1974, n° 73-12.024, publié au bulletin (N° Lexbase : A7371CIT), Bull. civ. III, n° 375, RTD Com., 1975, p. 326, note Saint-Alary.
(25) Rapport M. Dagneau sous Ass. plén. 2 octobre 2015, p. 15.
(26) B. Gouthière, Les impôts dans les affaires internationales, préc., n° 48125.
(27) Avis L. Le Mesle, sous Ass. plén. 2 octobre 2015.
(28) Réponse faite à Charles Ehrmann, député : "les transmissions par décès de parts d'une société civile, quelles que soient la nature et la localisation de ses actifs, sont imposables en France si le défunt avait son domicile en France au moment de son décès" (Rép ministérielle n° 52230 à Monsieur Charles Ehrmann, JOAN Q, 24 février 1992, p. 884). Voir également la (réponse à M. Patriat, JOAN, 25 septembre 1989, n° 12663, p. 4260.
(29) BOI-ENR-DMTG-10-10-30, n° 420 (N° Lexbase : X8211ALP).
(30) La documentation française.

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