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par Grégory Singer, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
le 30 Avril 2013
Concernant la mobilité interne qui vise à organiser la mobilité au sein de la même entreprise et à permettre la mobilité professionnelle et géographique, son organisation collective doit être négociée tous les trois ans, le refus du salarié entraîne son licenciement pour motif économique [ndlr : le texte actuellement en discussion prévoit qu'en cas de refus, le salarié sera licencié pour motif économique dans le cadre d'une procédure individuelle] et les clauses du contrat de travail contraires à l'accord sont suspendues. Maître Violaine Manez et Maître Marine Monges se demandent quel est le périmètre de mobilité à prendre en compte (entreprise ou groupe) et quelles sont les limites [ndlr : le parlement a limité cette mobilité à l'intérieur seulement de l'entreprise].
Sur le terrain de la mobilité externe, l'ANI crée un droit à une période de mobilité volontaire sécurisée dans les entreprises de plus de 300 salariés qui permet de changer d'emploi sans prendre de risque et qui se rapproche du congé sabbatique. Ce droit est subordonné à la signature d'un avenant au contrat de travail et la démission s'effectue sans préavis si le salarié ne souhaite par revenir dans son entreprise d'origine au terme de la période de mobilité. Peut-on cependant envisager d'y recourir dans le cadre d'un PSE s'interrogent nos intervenantes ?
Pourront également mis en place des accords de maintien dans l'emploi organisant une variation à la hausse ou à la baisse du temps de travail [ndlr : le projet de loi prévoit que l'accord ne devra cependant pas négocier de durées inférieures à 35 heures] et de la rémunération dans des proportions non forcément équivalentes afin d'obtenir des effets sur l'emploi. Il est recensé deux types d'accords :
- les accords défensifs par lesquels l'employeur s'engage à ne pas licencier ou à ne pas fermer des sites en échange de concessions salariales ;
- les accords offensifs par lesquels l'employeur s'engage à embaucher en contrepartie des mêmes concessions.
La question de l'articulation accord collectif/contrat de travail est au coeur de l'efficacité du système. Il sera nécessaire de trouver des solutions pour que l'accord négocié s'impose aux salariés [ndlr : le projet de loi prévoit actuellement que les clauses du contrat de travail contraires à l'accord sont suspendues pendant la durée d'application de celui-ci], définir la nature de la rupture du contrat de travail en cas de refus par le salarié des dispositions de l'accord d'entreprise [ndlr : le projet de loi prévoit que lorsqu'un ou plusieurs salariés refusent l'application de l'accord à leur contrat de travail, leur licenciement repose sur un motif économique, est prononcé selon les modalités d'un licenciement individuel pour motif économique et ouvre droit aux mesures d'accompagnement que doit prévoir l'accord], encadrer les conséquences de la sortie de ce dispositif ("retour à la normalité"). Aucun licenciement pour motif économique ne sera possible pendant la durée de l'accord (deux ans maximum) lequel devra prévoir : une clause pénale qui trouvera à s'appliquer dès lors qu'il est incontestable que l'employeur n'a pas respecté les termes de l'accord ; les conséquences d'un retour à meilleure fortune sur la situation des salariés qui ont consenti des efforts. Le projet de loi prévoit que l'accord de maintien dans l'emploi ne peut avoir pour effet ni de diminuer la rémunération des salariés dont le salaire est compris entre 1 et 1,2 fois le Smic, ni de ramener la rémunération des autres salariés en-deça 1,2 fois le Smic (soit 1 716,26 euros, au 1er janvier 2013). Les dirigeants salariés qui exercent leur responsabilité dans le périmètre de l'accord devront également participer aux mêmes efforts que ceux qui sont demandés aux salariés. Il en est, de même, des mandataires sociaux.
Le constat de "grave difficulté conjoncturelle" sera établi sur la base d'un "diagnostic" offrant un nouveau cas de recours à l'expert comptable du CE dont les services sont étendus à la négociation de l'accord.
Quelques questions sont à anticiper :
- l'articulation avec les autres normes collectives (accords collectifs, usages) ;
- l'articulation de la négociation de ce type d'accord avec les obligations d'information consultation des IRP (CE, CHSCT) ;
- la situation des salariés qui entrent ou qui sortent en cours d'application de l'accord
- les sanctions attachées aux licenciements économiques intervenant en violation de ces accords ;
- le contrôle du motif économique des licenciements intervenant en cas de refus individuels.
Le projet de loi de sécurisation de l'emploi renforce la GPEC en incluant 4 nouveaux thèmes de négociation triennale : la consultation du CE sur les orientations stratégiques, la mobilité interne, la politique de formation professionnelle, les perspectives de recours aux différentes formes de contrat de travail (notamment les CDD et les contrats d'intérim). La GPEC peut également porter sur les conditions dans lesquelles les entreprises sous-traitantes peuvent être informées des orientations stratégiques de l'entreprise ayant un effet sur leurs métiers, l'emploi et les compétences et sur les modalités de leur association au dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
L'ANI et le projet de loi formule une réforme du licenciement économique "de grande ampleur". La procédure de licenciement collectif pour motif économique et le contenu du PSE devront être fixés, soit par accord collectif majoritaire (50 % des suffrages exprimés au 1er tour des dernières élections professionnelles), validé par la Direccte, soit par un document unilatéral de l'employeur, homologué par la Direccte. Nos intervenantes soulignent quelques conséquences pratiques. L'employeur devra choisir entre la négociation d'un accord collectif majoritaire et l'élaboration d'un document unilatéral. Il semblerait qu'il soit possible de cumuler l'accord collectif et le document unilatéral sur différentes mesures [ndlr : le projet de loi prévoit actuellement qu'à défaut d'accord collectif, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi] ainsi que l'accord de méthode. Elles indiquent également le rôle accru de l'administration dans le cadre des licenciements économique de "grande ampleur" et du juge administratif qui contrôlera la validité du PSE, au détriment du juge judiciaire.
Un dialogue social transparent gouverne le projet de loi de sécurisation de l'emploi en renforçant les prérogatives d'information des institutions représentatives du personnel (IRP) et des salariés, notamment, sur les orientations stratégiques. La consultation des IRP va bénéficier d'une meilleure sécurité juridique. Une des principales nouvelles obligations est la création d'une base de données unique. Les principaux objectifs de cette base de données sont de regrouper et remplacer l'information récurrente déjà diffusée dans les entreprises, d'être un support pour une réflexion des parties sur la stratégie de l'entreprise et de permettre aux IRP de disposer en continu d'une information mise à jour régulièrement. L'entreprise devra présenter de nouvelles informations supplémentaires, notamment, sur les activités sociales et culturelles, la rémunération des financeurs/actionnaires, les flux financiers à destination de l'entreprise (subventions, crédit d'impôt), les transferts internes au groupe. Le comité d'entreprise sera désormais consulté sur les orientations stratégiques de l'entreprise, le crédit d'impôt compétitivité emploi, les propositions de reprise de site.
Vont être également mis en place des administrateurs salariés afin de favoriser la prise en compte du point de vue des salariés sur la stratégie de l'entreprise. Il est à noter que les salariés administrateurs auront plus de pouvoirs que la délégation du CE au conseil de surveillance ou d'administration alors que le niveau d'information est inférieur. La protection spécifique au titre de cette nouvelle fonction pour ce nouvel administrateur salarié n'est pas expressément prévue alors qu'il renonce à ses mandats.
Pour intégrer au mieux ces changements, Maître Violaine Manez et Maître Marine Monges estiment qu'il serait préférable d'anticiper volontairement la mise en oeuvre de certaines dispositions de la loi. Il est également recommandé de prévoir la communication entre DG, DRH, DAF et comités internes et préparer le plus tôt possible la documentation nécessaire. Il conviendrait également d'identifier les documentations/informations disponibles dans l'entreprise pour établir un diagnostic des informations manquantes à mettre en place dans le cadre des nouvelles consultations et réfléchir au support le plus adapté à votre entreprise pour la création de la base unique.
Nos intervenantes soulignent le fait qu'il est important de surveiller les négociations de branche (santé et prévoyance, modalités d'organisation du temps partiel, complément d'heures par avenant en cas de temps partiel), de suivre les négociations des partenaires sociaux concernant la modulation des cotisations chômage (futur avenant à l'actuelle convention assurance chômage) et la prochaine convention assurance-chômage (droits rechargeables). Il est indispensable pour les entreprises de répertorier les obligations liées à leur taille :
- +/- 50 salariés (entreprise): information du CE ou des DP, mobilité interne, procédures de licenciement collectif ;
- +/- 300 salariés (entreprise): date de mise en oeuvre de la base de données unique, application du dispositif afférent à la mobilité volontaire (externe) sécurisée ;
- + 5 000 salariés (entreprise ou groupe): désignation d'administrateurs salariés.
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