La lettre juridique n°825 du 28 mai 2020 : Internet

[Brèves] Inconstitutionnalité des dispositions organisant l'accès de la HADOPI à tous documents, dont des données de connexion des internautes

Réf. : Cons. const., décision n° 2020-841 QPC, du 20 mai 2020 (N° Lexbase : A83343LA)

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N3425BYI

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[Brèves] Inconstitutionnalité des dispositions organisant l'accès de la HADOPI à tous documents, dont des données de connexion des internautes. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/58202572-breves-inconstitutionnalite-des-dispositions-organisant-lacces-de-la-hadopi-a-tous-documents-dont-de
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par Vincent Téchené

le 27 Mai 2020

► Dans une décision du 20 mai 2020, le Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2020-841 QPC, du 20 mai 2020 N° Lexbase : A83343LA) censure des dispositions organisant l'accès de la HADOPI à tous documents, dont des données de connexion des internautes (C. prop. intell., art. L. 331-21 N° Lexbase : L3539IES).

L’affaire. Le Conseil constitutionnel a été saisi par le Conseil d'Etat (CE 10° ch., 12 février 2020, n° 433539 N° Lexbase : A35313EI) d'une QPC relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des trois derniers alinéas de l'article L. 331-21 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi « HADOPI » (loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 N° Lexbase : L3432IET).

En vertu de l'article L. 336-3 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L8870IEA), le titulaire d'un accès à des services de communication au public en ligne a l'obligation de veiller à ce que cet accès ne fasse pas l'objet d'une utilisation à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d'œuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou par un droit voisin, sans l'autorisation des titulaires de ses droits, lorsqu'elle est requise. Au sein de la HADOPI, la commission de protection des droits est chargée, lorsqu'elle est saisie d'un manquement à cette obligation, de prendre les mesures destinées à en assurer le respect. Il s'agit d'adresser aux auteurs des manquements à l'obligation précitée une recommandation leur rappelant le contenu de cette obligation, leur enjoignant de la respecter et leur indiquant les sanctions encourues à défaut. Les dispositions du Code de la propriété intellectuelle faisant l'objet de la QPC confèrent aux agents de la HADOPI le droit d'obtenir, d'une part, communication, par les opérateurs de communication électronique, de l'identité, de l'adresse postale, de l'adresse électronique et des coordonnées téléphoniques de l'abonné dont l'accès à des services de communication au public en ligne a été utilisé en violation de l'obligation précitée et, d'autre part, communication et copie de tous documents, quel qu'en soit le support, y compris les données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique.

Selon les associations requérantes, ces dispositions méconnaissaient le droit au respect de la vie privée, la protection des données à caractère personnel et le secret des correspondances.

La décision.

  • En ce qui concerne le droit de communication portant sur certaines informations d'identification de l'abonné

Le Conseil constitutionnel juge que, la communication de l'identité, de l'adresse postale, de l'adresse électronique et des coordonnées téléphoniques de l'abonné n'est pas assortie d'un pouvoir d'exécution forcée et n'est ouvert qu'aux agents publics de la Haute autorité, dûment habilités et assermentés, qui sont soumis, dans l'utilisation de ces données, au secret professionnel. En outre, ces informations sont nécessaires à la Haute autorité pour leur adresser la recommandation leur rappelant leur obligation. Elles présentent donc un lien direct avec l'objet de la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits. Par ces motifs, le Conseil constitutionnel juge que le dernier alinéa de l'article L. 331-21 du Code de la propriété intellectuelle est conforme à la Constitution, hormis le mot « notamment ».

  • En ce qui concerne le droit de communication portant sur tous documents et les données de connexion

En revanche, le Conseil constitutionnel juge que, en faisant porter le droit de communication sur « tous documents, quel qu'en soit le support » et en ne précisant pas les personnes auprès desquelles il est susceptible de s'exercer, le législateur n'a ni limité le champ d'exercice de ce droit de communication, ni garanti que les documents en faisant l'objet présentent un lien direct avec le manquement à l'obligation énoncée à l'article L. 336-3 du Code de la propriété intellectuelle, qui justifie la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits. En outre, ce droit de communication peut également s'exercer sur toutes les données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique. Or, compte tenu de leur nature et des traitements dont elles peuvent faire l'objet, de telles données fournissent sur les personnes en cause des informations nombreuses et précises, particulièrement attentatoires à leur vie privée. Elles ne présentent pas non plus nécessairement toutes de lien direct avec le manquement à l'obligation énoncée à l'article L. 336-3.

Par ces motifs, le Conseil constitutionnel juge contraires à la Constitution les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 331-21 du Code de la propriété intellectuelle ainsi que le mot « notamment » figurant au dernier alinéa du même article.

Report de l’abrogation. L'abrogation immédiate de ces dispositions étant susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives, il juge qu'il y a lieu de reporter au 31 décembre 2020 la date de leur abrogation.

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