Lexbase Public n°369 du 9 avril 2015 : Environnement

[Textes] Bulletin droit de l'environnement du cabinet DS Avocats : application en France de la règlementation relative aux produits biocides

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le 09 Avril 2015

Les produits biocides sont des substances chimiques ou biologiques ou des mélanges les contenant, destinés à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l'action ou à les combattre. La règlementation relative aux produits biocides est fixée, au niveau communautaire, par le Règlement (UE) n° 528/2012 du 22 mai 2012, relatif à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits biocides (N° Lexbase : L6768ITT) (ci-après "le Règlement"), entré en vigueur au 1er septembre 2013. En droit interne français, le décret n° 2014-1175 du 13 octobre 2014, relatif aux procédures d'approbation, de mise à disposition sur le marché et de déclaration des produits biocides et des substances actives biocides (N° Lexbase : L4236I4N), a précisé le régime juridique applicable aux produits biocides. Ainsi, les évolutions règlementaires récentes en matière de produits biocides portent, d'une part, sur l'adaptation des textes internes aux exigences du Règlement (I) et, d'autre part, sur des mesures spécifiques au droit français (II).

I - L'accompagnement en droit français du Règlement

La règlementation nationale a été adaptée pour permettre l'application du Règlement, sur les plans législatif (A) et règlementaire (B). Rappelons, à titre préalable, que le Règlement prévoit :

- une articulation avec les dispositions du Règlement (CE) n° 1272/2008 du 16 décembre 2008, relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances chimiques et des mélanges (N° Lexbase : L4612ICS), dit Règlement "CLP" ;
- l'obligation de réalisation de fiches de données de sécurité conformes à l'article 31 du Règlement "REACH" (Règlement (CE) n° 1907/2006 du 18 décembre 2006, concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances N° Lexbase : L4612ICS).

A - Sur les dispositions législatives

La loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable (N° Lexbase : L3830IX7), dite loi "Ddadue", comprend des obligations d'information (1) et des restrictions et sanctions (2).

1 - Sur les obligations d'information

Aux termes des articles L. 522-2 (N° Lexbase : L4115IXP) et L. 522-3 (N° Lexbase : L4114IXN) du Code de l'environnement, le responsable de la mise à disposition sur le marché d'un produit biocide doit :

- déclarer ce produit au ministre chargé de l'environnement préalablement à la première mise à disposition sur le marché ;
- fournir les informations nécessaires sur ce produit, dont sa composition, notamment aux organismes chargés de la toxicovigilance, en vue de permettre de prévenir les effets sur la santé ou de répondre à toute demande d'ordre médical destinée au traitement des affections induites par ce produit ou émanant des services d'urgence ;
- déclarer chaque année les quantités de ce produit mises sur le marché l'année précédente.

Par ailleurs, le responsable de la mise à disposition sur le marché d'une substance ou d'un produit biocide déclare à l'autorité administrative les informations dont il a connaissance, ou peut raisonnablement avoir connaissance et qui peuvent avoir des conséquences sur le maintien de cette substance ou de ce produit sur le marché.

2 - Sur les mesures de restrictions et les sanctions applicables

Aux côtés des mesures de restriction que peut adopter l'administration, des sanctions administratives et pénales sont définies au niveau national.

Sur les restrictions pouvant être imposées par l'administration (C. env., art. L. 522-10 N° Lexbase : L4107IXE et L. 522-12 N° Lexbase : L4105IXC)

Afin de protéger la santé humaine ou animale ou l'environnement ou afin de limiter la mise à disposition sur le marché de produits insuffisamment efficaces, l'autorité administrative peut :

- demander des modifications de l'étiquetage, et/ou ;
- refuser ou restreindre l'autorisation de ces produits.

Ces restrictions s'inscrivent dans le cadre d'une reconnaissance mutuelle ou d'une autorisation de commerce parallèle relative à des produits biocides déjà autorisés dans un Etat membre.

L'autorité administrative peut également limiter ou interdire provisoirement la mise à disposition sur le marché ou l'utilisation d'un produit biocide :

- soit en cas de non-respect d'exigences du Règlement, s'il bénéficie d'une autorisation simplifiée accordée par un autre Etat membre ;
- soit par la mise en jeu d'une clause de sauvegarde portant sur la mise en oeuvre de mesures provisoires en cas de risque sérieux pour la santé humaine, la santé animale ou l'environnement.

3 - Sur les sanctions administratives et pénales applicables

Au plus tard six mois après la constatation du non-respect d'exigences du Règlement, l'administration peut adresser une mise en demeure préalable à la personne concernée de régulariser sa situation, après l'avoir invité à prendre connaissance du dossier et à présenter ses observations dans un délai n'excédant pas trois mois.

En cas de non-respect de la mise en demeure préalable dans le délai imparti, l'autorité administrative peut :

- ordonner une mesure d'interdiction d'utilisation des substances, produits et articles traités ;
- ordonner la récupération et l'élimination des substances, produits et articles mis à disposition sur le marché en méconnaissance de la règlementation applicable.

Les sanctions pénales encourues, fixées par l'article L. 522-16 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L4104IXB), prévoient que les violations des dispositions du Règlement sur les items suivant :

- mise à disposition sur le marché d'une substance active biocide, d'un produit biocide ou d'un article traité : sont punies de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ;
- utilisation des produits biocides : sont punies de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.

Il doit être ici précisé que les montants maximums des amendes encourues sont multipliés par cinq pour les personnes morales.

B - Sur les dispositions règlementaires

Le décret n° 2014-1175 du 13 octobre 2014 permet, à titre principal, de préciser les différentes procédures applicables en droit interne pour l'application du Règlement.

Ce décret définit ainsi les autorités compétentes et fixe les délais applicables pour différentes demandes d'approbation ou de renouvellement d'une substance active biocide, d'autorisations de mise à disposition sur le marché d'un produit biocide ou de modification de ces autorisations ainsi que d'autorisation de commerce parallèle.

Ainsi, la procédure d'évaluation des substances et produits est confiée à l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). La décision d'autorisation de mise sur le marché d'un produit biocide revient, quant à elle, au ministre chargé de l'Environnement.

Dans le cadre d'une procédure de reconnaissance mutuelle entre Etats membres, une décision d'autorisation de mise sur le marché pourra être prise en l'absence d'avis émis par l'ANSES dans les délais impartis. Dans ce cas, la décision du ministre sera fondée sur la décision délivrée pour le même produit par l'Etat membre en charge de l'évaluation.

Les différentes demandes susmentionnées sont soumises au versement de redevances à l'ANSES, qui doivent couvrir l'ensemble des dépenses engagées pour la conservation, l'examen, l'exploitation et l'expertise des informations fournies par le demandeur.

L'arrêté du 13 juin 2014, fixant le montant de la rémunération due au titre de l'approbation et de l'autorisation de mise sur le marché des substances et produits biocides (N° Lexbase : L5662I34), prévoit les montants de ces redevances. A titre d'illustration :

- la redevance pour l'évaluation d'un dossier de demande d'approbation d'une substance active, pour un type de produit biocide est fixée à 200 000 euros ;
- la redevance pour l'évaluation d'un dossier de demande de première autorisation de mise sur le marché d'un produit biocide, pour un type de produit biocide et une catégorie d'utilisateur est fixée à 40 000 euros.

Un encadrement juridique complémentaire à celui issu du Règlement est mis en oeuvre au niveau national (II.)

II - Les dispositions spécifiques au droit français

Une autorisation transitoire doit être obtenue pour certains produits biocides, dans l'attente de leur prise en compte dans le dispositif règlementaire européen (A). Par ailleurs, un certificat a été créé pour l'utilisation et la distribution de produits biocides exclusivement destinés aux professionnels (B).

A - Sur l'autorisation transitoire de certains produits biocides

Dans l'intérêt de la santé publique et de l'environnement, les produits biocides suivants peuvent être interdits ou voir leurs conditions d'utilisation déterminées par l'autorité administrative (article 13 de la loi "Ddadue").

Sont concernés les produits biocides destinés à certains usages professionnels et visant à l'assainissement et au traitement antiparasitaire des locaux, matériels, véhicules, emplacements et dépendances utilisés :

- pour le transport, la réception, l'entretien et le logement des animaux d'élevage, ou pour la préparation et le transport de leur nourriture, à l'exception de certains désinfectants ;
- pour la récolte, le transport, le stockage, la transformation industrielle et la commercialisation des produits d'origine animale et végétale ;
- pour la collecte, le transport et le traitement des ordures ménagères et des déchets d'origine animale ou végétale ;

Sont également concernés les produits biocides rodenticides.

Ces produits doivent avoir fait l'objet d'autorisations transitoires avant leur mise à disposition sur le marché, après avoir satisfait aux conditions suivantes :

- la (ou les) substance(s) active(s) contenue(s) dans le produit figure(nt), pour le type de produit revendiqué, dans le programme de travail d'examen de l'Union européenne des substances actives ;
- aucune des substances actives contenues dans le produit ne doit faire l'objet d'une interdiction de mise sur le marché ;
- le produit doit être suffisamment efficace dans les conditions normales d'utilisation, contenir une teneur minimale en amérisant pour les produits rodenticides et respecter les conditions d'étiquetage des produits biocides.

Un guide pour le dépôt des dossiers relatifs aux demandes d'autorisation transitoire de mise à disposition sur le marché de certains produits biocides, daté du 9 février 2015, a été mis en ligne sur le site du helpdesk biocides, géré par l'ANSES.

Ce guide comprend en annexe une matrice des usages pouvant être autorisés pour les produits soumis à autorisation transitoire.

B - Sur la création du certibiocide

La loi "Ddadue" a prévu que les conditions d'exercice de l'activité de vente et de l'activité d'application à titre professionnel de produits biocides et d'articles traités pouvaient être réglementées en vue d'assurer l'efficacité de ces produits et de prévenir les risques pour l'homme et l'environnement susceptibles de résulter de ces activités.

Dans ce cadre, l'arrêté du 9 octobre 2013, relatif aux conditions d'exercice de l'activité d'utilisateur professionnel et de distributeur de certains types de produits biocides (N° Lexbase : L5472IYC), a créé le "certibiocide".

Le certibiocide est un certificat devant être détenu par les personnes exerçant les activités de distribution et d'utilisation de produits biocides exclusivement destinés aux professionnels. Il a une validité de cinq ans et sera obligatoire à compter du 1er juillet 2015.

Le certibiocide s'obtient après une formation de trois jours abordant l'ensemble des points nécessaires à une utilisation efficace et plus sûre des produits biocides. Les personnes déjà titulaires d'un certificat "certiphyto" valide dans les catégories "utilisation à titre professionnel des produits phytopharmaceutiques" et/ou "mise en vente, vente des produits phytopharmaceutiques" peuvent obtenir le certificat "biocide" après une formation réduite à une journée.

Par exception, le certibiocide ne sera pas exigé par les personnes détenant ou utilisant des produits biocides dans un cycle de transformation / production dans des usages industriels ou agricoles et agro-alimentaires.

Depuis l'adoption du décret n° 2014-1175 du 13 octobre 2014, la définition du cadre juridique national permettant l'application du dispositif règlementaire européen relatif aux produits biocides a été finalisée.

Parallèlement au dispositif règlementaire européen, le système d'autorisation transitoire spécifique au droit français est un dispositif d'accompagnement pour la période durant laquelle certains produits biocides ne sont pas encore intégrés au dispositif règlementaire européen, étant donné que les substances actives qu'ils contiennent n'ont pas encore été évaluées dans le cadre du programme d'examen communautaire relatif aux substances actives se trouvant déjà sur le marché à la date du 14 mai 2000, en tant que substances actives de produits biocides.

Lorsque toutes les substances actives concernées auront été évaluées, le système d'autorisation transitoire nationale disparaîtra alors, purement et simplement, pour laisser uniquement place au dispositif règlementaire européen.

Il convient de noter que la durée du programme d'examen communautaire des substances actives a été prolongée a plusieurs reprises, pour, in fine, se terminer au 31 décembre 2024 au plus tard.

DS Avocats - www.dsavocats.com

Contacts :

Patricia Savin (savin@dsavocats.com)

Yvon Martinet (martinet@dsavocats.com)

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