Saisis d'une demande en contrefaçon à la suite du non-respect d'un accord de coexistence de marques, les juges ne doivent pas apprécier la gravité du manquement à l'accord, mais le risque de confusion dans l'esprit du public créé par la similitude des marques en présence et des produits. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 février 2015 (Cass. com., 10 février 2015, n° 13-24.979, FS-P+B
N° Lexbase : A4253NB7). En l'espèce un laboratoire pharmaceutique est titulaire d'une marque française "Lehning" et de la marque communautaire "Lehning", notamment en classe 5, pour désigner les produits pharmaceutiques, vétérinaires et désinfectants. Ayant constaté qu'une société, qui commercialise des produits destinés aux animaux, avait la marque française "Lehring Naturellement efficace" pour désigner, notamment en classe 5, des produits recoupant certains de ceux visés dans l'enregistrement de ses marques, le laboratoire pharmaceutique a contesté cette demande d'enregistrement. Un accord de coexistence entre les marques est intervenu. Invoquant le non-respect de cet engagement, le laboratoire pharmaceutique a assigné en contrefaçon de marque et concurrence déloyale son cocontractant. La cour d'appel rejette cette demande, retenant, tout d'abord, que la défenderesse avait globalement très rapidement fait le nécessaire pour modifier ses documents afin de se conformer à l'accord de coexistence intervenu et que les manquements constatés, telle la persistance du terme "Lehring" en gros caractères sur son site internet jusqu'en 2012, ne constituent pas des fautes d'une gravité suffisante pour constituer des actes de contrefaçon de marque. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel au visa des articles L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle (
N° Lexbase : L3730ADI) et 9, § 1, du Règlement n° 207/2009 (
N° Lexbase : L0531IDZ) : "
en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en raison de la similitude des marques en présence et des produits désignés à l'enregistrement, le non-respect des engagements contractuels constaté n'était pas de nature à engendrer un risque de confusion dans l'esprit du public, la cour d'appel a privé sa décision de base légale". En outre, l'arrêt d'appel l'arrêt retient également que les manquements constatés ne constituent pas des fautes d'une gravité suffisante pour constituer des actes de concurrence déloyale. Sur point, la Haute juridiction censure également l'arrêt d'appel, au visa de l'article 1382 du Code civil : "
en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en raison de la similitude des signes en présence et des activités exercées par les sociétés, l'emploi du terme "Lehring", en plus gros caractères, sur le site internet n'était pas de nature à engendrer dans l'esprit du public un risque de confusion avec la dénomination sociale, le nom commercial et le nom de domaine de la société Lehning, la cour d'appel a privé sa décision de base légale".
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