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par Sylvian Dorol, Commissaire de justice associé (VENEZIA), Directeur scientifique de la revue Lexbase Contentieux et recouvrement, Expert près l’UIHJ
le 03 Juillet 2024
Mots-clés : commissaire de justice • saisie-attribution • commandement de quitter les lieux • contentieux locatif • état des lieux • procédures civiles d’exécution • constat
La revue Lexbase Contentieux et Recouvrement vous propose de retrouver la sixième chronique illustrée par les plus récentes décisions jurisprudentielles sous la forme d’un contenu original rédigé par Sylvian Dorol, correspondant également à l’évolution du Bulletin d’informations de VENEZIA, édité en partenariat avec les éditions juridiques Lexbase.
I. Procédure civile : signification à domicile
- CA Amiens, 30 mai 2024, n° 23/00080 N° Lexbase : A46005GH
- CA Lyon, 12 juin 2024, n° 23/07019 N° Lexbase : A47505IR
- CA Aix-en-Provence, 12 juin 2024, n° 23/07832 N° Lexbase : A46645IL
III. Élection de domicile et signification
- CA Lyon, 12 juin 2024, n° 23/06363 N° Lexbase : A46235I3
IV. Saisie par déclaration et article 648 du Code de procédure civile
- CA Bastia, 5 juin 2024, n° 23/00487 N° Lexbase : A97945GT
I. Procédure civile : signification à domicile
Une ordonnance d'injonction de payer a été rendue par le tribunal d'instance d'Amiens en date du 9 septembre 1998. Le 19 avril 2022, le créancier fait délivrer à son débiteur un commandement de payer avec dénonciation d'un procès-verbal d'immobilisation avec enlèvement dressé le 11 avril 2022 portant sur un véhicule de marque Mercedes-Benz Classe CLS. Cette voiture est vendue le 18 octobre 2022.
Le débiteur conteste la mesure le lendemain.
En première instance, le juge de l’exécution :
Le créancier conteste ce jugement au motif que l'ordonnance d'injonction de payer en date du 9 septembre 1998 n'est en aucun cas prescrite, l'article L. 111-4 du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L5792IRX qui a ramené le délai de prescription des titres exécutoires à dix ans tel que résultant de la loi nouvelle du 17 juin 2018, n'ayant pas lieu de s'appliquer, le délai expirant donc le 17 juin 2018 alors qu’un itératif commandement aux fins de saisie-vente a été délivré au débiteur le 11 juillet 2017. Il introduit donc un « référé premier président » afin de suspendre l’exécution provisoire de la décision rendue par le juge de l’exécution.
Cependant, la cour d’appel juge que la demande de suspension de l'exécution provisoire a pour objet d'empêcher la poursuite d'une mesure d'exécution forcée de la part du créancier muni d'un titre exécutoire à l'encontre du débiteur. Or, le jugement qui se prononce sur la nullité de la procédure qui a conduit à la vente par adjudication du véhicule est dépourvu d'effet suspensif, dans la mesure où il ne se prononce pas sur la poursuite d'une voie d'exécution forcée et ne peut donc faire l'objet d'un sursis à exécution.
Pour la cour d’appel d’Amiens, un jugement du juge de l’exécution qui annule une procédure d’exécution ne peut donc voir son exécution provisoire suspendue… Une conclusion étrange, bien que le raisonnement juridique soit fondé !
Selon acte sous seing privé du 14 avril 2014, il a été donné à bail, à compter du 11 avril 2014, à une société un local commercial. Les propriétaires étaient les parents (nus-propriétaires) et sa fille (usufruitière).
En date des 22 et 25 novembre 2022, un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail a été délivré au débiteur pour un montant de 25 320,95 euros. Puis, le débiteur remet à l'huissier, dans le délai d'un mois de la délivrance du commandement de payer, onze chèques pour apurement de la dette, cet accord ayant reçu dument exécution puisque l'étude a encaissé le premier chèque.
Le paiement est reconnu valable en raison d’un mandat apparent.
Dans cette décision d’espèce, la cour d’appel affirme « qu’il est de principe qu'un congé notifié pour une date prématurée n'est pas nul, mais prend effet à la date pour laquelle il aurait dû être donné. Toutefois, faute pour le bailleur d'avoir joint au congé la notice d'information prescrite par l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits et se croire obligé de libérer les lieux dans les six mois suivant la réception de la lettre recommandée, alors que, le bail ayant pris effet le 5 juin 2008 et ayant été tacitement reconduit par périodes triennales, la date de sa prochaine échéance était le 5 juin 2020 ». En l’espèce, la bailleresse avait donné prématurément congé pour le 31 janvier 2019, afin de reprendre le logement pour y loger sa grand-mère. Le locataire, dans l'ignorance de ses droits, avait libéré les lieux dès le 26 novembre 2018. Le bailleur est donc condamné à la somme de 5 070 euros à titre de dommages-intérêts.
III. Élection de domicile et signification
C’est une affaire somme toute classique qu’a tranchée la cour d’appel de Lyon le 12 juin dernier. Dans le cadre d’un contentieux locatif (mais la solution s’applique plus largement), une partie contestait la signification d’actes de commissaires de justice. En effet, ces procès-verbaux avaient été délivrés à l’adresse des lieux loués, et non à l’adresse qui figurait dans l’avenant au bail. Pour le locataire, le commissaire de justice avait l'obligation légale affectée de l'ordre public au titre de l'article 648 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6811H7E, de procéder à la double signification des actes de procédure au domicile figurant dans le bail et à l'adresse des lieux loués, dès la délivrance de l'assignation.
La cour d’appel, tout en relevant qu’aucun grief n’est argué par le locataire, retient la validité des actes en affirmant que la délivrance de ces actes a été régulièrement effectuée, dès lors que le contrat de bail contient une clause d'élection de domicile aux termes de laquelle le preneur fait élection de domicile dans les lieux loués.
IV. Saisie par déclaration et article 648 du Code de procédure civile
La question de l’article 648 du Code de procédure civile et de sa sanction revient régulièrement dans le contentieux de l’exécution, comme en témoigne l’affaire tranchée par la cour d’appel de Bastia.
Pour mémoire, l'article 648 du Code de procédure civile dispose, notamment, que « Tout acte d'huissier de justice indique », indépendamment des mentions prescrites par ailleurs : « 2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ».
En l’espèce, un créancier a saisi par déclaration le véhicule de son débiteur, lequel conteste la validité de l’acte au motif que le procès-verbal ne porte ni les date et lieu de naissance du créancier, ni sa nationalité.
La cour d’appel Bastia balaie cependant la contestation au motif que l'article 114 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1395H4G dispose qu'« aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public ». Elle en conclut qu’en l'espèce, le débiteur saisi n'invoque aucun grief au soutien de ce qui est une simple remarque tendant à retarder la validation de la procédure de saisie engagée à son encontre…
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