La lettre juridique n°946 du 18 mai 2023 : Harcèlement

[Le point sur...] Le harcèlement sexuel en entreprise et la question de l’attitude ambiguë

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par Élise Fabing, Avocate associée et Marion Stephan, Avocate, Alkemist Avocats

le 17 Mai 2023

Mots-clés : harcèlement sexuel • attitude ambiguë • salariés • victime • agissements sexistes • séduction réciproque • situation intimidante, hostile ou offensante

Le harcèlement sexuel en entreprise a connu plusieurs évolutions récentes en matière légale et en matière jurisprudentielle.

Ces évolutions permettent une meilleure protection des salariés et témoignent d’une avancée dans les droits des victimes même si persiste un doute quant aux contours de la définition du harcèlement sexuel. Notamment, la question de l’attitude ambiguë de la victime et de sa participation aux agissements de harcèlement sexuel dont elle fait l’objet fait débat en jurisprudence. Dans certains cas, une telle attitude écarte la qualification de harcèlement sexuel. Dans d’autres, ces agissements ne reposent pas nécessairement sur un consentement entre deux personnes placées sur un pied d’égalité, de telle sorte qu’ils ne sont pas de nature à écarter la qualification de harcèlement sexuel.


I. L’élargissement de la définition légale du harcèlement sexuel

En droit du travail, le harcèlement sexuel a fait son apparition par le biais d’une loi du 2 novembre 1992 N° Lexbase : L0260AIH qui introduit sa définition au sein du Code pénal et du Code du travail. Le harcèlement sexuel y était alors défini, à l'article 222-33 du nouveau Code pénal N° Lexbase : L6229LLB comme « le fait de harceler autrui en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ».

L’article L. 122-46 du Code du travail N° Lexbase : L5584ACS disposait quant à lui qu’« aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié pour avoir subi ou refusé de subir ces agissements, pour en avoir témoigné, ou pour les avoir relatés ».

À l’époque, le harcèlement sexuel en entreprise ne pouvait donc être caractérisé que dans le cadre d’une relation hiérarchique entre la victime et l’auteur des faits. Tous les agissements entre collègues d’un même niveau ou sans lien hiérarchique échappaient donc à la qualification de harcèlement sexuel.

Une refonte de la définition du harcèlement sexuel est ensuite intervenue 2012 [1] avec l’introduction de la notion de harcèlement sexuel assimilé. Désormais, les salariés sont protégés contre les faits :

  • « soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
  • soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers » [2].

Ces dernières années, le législateur a également introduit d’autres notions annexes du harcèlement sexuel pour renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Par le biais de la loi du 17 août 2015 N° Lexbase : L2618KG3, la notion d’agissements sexistes, définie comme « tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant » [3] a émergé. En 2018, la notion d’outrage sexiste a été créée prohibant le fait « d’imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit créé à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante » [4].

Enfin, la loi du 2 août 2021, entrée en vigueur le 31 mars 2022, a élargi la définition de harcèlement sexuel et prévoit que celui-ci pourra désormais être reconnu lorsque des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste sont commis.

Alignant la définition en droit du travail sur la définition présente dans le Code pénal, le harcèlement sexuel pourra également être qualifié lorsque les propos ou comportements sont imposés à une seule victime par plusieurs personnes. La notion de répétition est donc conservée, mais analysée du point de vue de la victime et pas seulement du point de vue de l’auteur.

Le droit du travail français connait donc une multiplication des comportements prohibés susceptibles d’être qualifiés de harcèlement sexuel. Même si persiste un doute quant aux contours de cette définition légale enrichie, les juges nous éclairent sur l’interprétation qu’il convient d’en donner en adoptant une interprétation pratique de ces règles.

II. État de la jurisprudence sur le harcèlement sexuel

Sans surprise, le fait de prononcer des propos ou d’adopter des comportements ouvertement sexistes, grivois ou obscènes est considéré de manière constante par les juges comme portant atteinte à la dignité du salarié et est constitutif d’un harcèlement sexuel.

À titre d’illustration, le fait pour un salarié d’avoir notamment prononcé les propos suivants « [s]i tu ne le fais pas tu auras la fessée. Tu aimes les fessées » ou encore de demander à une salariée de « relever davantage son tee-shirt », est caractéristique d’une situation de harcèlement sexuel [5].

Il convient de préciser, que contrairement au droit pénal, le droit du travail ne suppose pas de démontrer un élément intentionnel du harcèlement sexuel. Peu importe donc que le salarié concerné n’ait pas eu conscience d’avoir imposé les actes litigieux à la victime.

Selon la Cour de cassation, le harcèlement sexuel peut être constitué même si le responsable hiérarchique qui, a imposé aux victimes, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle les ayant placées dans une situation intimidante, hostile ou offensante objectivement constatée, ignorait la portée de ses agissements [6].

Dans un tel cas, la jurisprudence reconnaît même des circonstances aggravantes dans la mesure où ce supérieur hiérarchique a abusé de sa place de partie « forte » au contrat au détriment de sa subordonnée [7].

Aussi, la position hiérarchique des harceleurs présumés, si elle n’est plus une condition requise pour caractériser un harcèlement sexuel, elle peut constituer un indice de la création d’un environnement hostile. La jurisprudence reconnaît ainsi que le fait de tenir des propos grivois est constitutif d’un harcèlement sexuel au motif notamment que ces propos avaient été tenus par un supérieur hiérarchique [8].

Pour renforcer la prévention en santé au travail, la définition du harcèlement sexuel ne suppose plus forcément une répétition. Un seul acte grave peut suffire pour caractériser un tel harcèlement. La Cour de cassation a pu condamner l’auteur d’un fait unique grave, et ce, alors que les faits sont corroborés par un seul témoin direct.

En effet, par un arrêt du 17 mai 2017, rendu au visa de l’article L. 1153-1 du Code du travail N° Lexbase : L4433L7C, la Cour de cassation a retenu l’existence d’un harcèlement sexuel, en raison des propos tenus par un employeur qui conseillait à une salariée qui se plaignait de coups de soleil de « dormir avec lui dans sa chambre », « ce qui lui permettrait de lui faire du bien » [9].

III. La question des moyens de preuve du harcèlement sexuel en débat

S’agissant de la charge de la charge de la preuve, il est rappelé que celle-ci est partagée entre le salarié, qui doit rapporter des éléments des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, et l’employeur qui doit, quant à lui, prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement [10].

Un tel régime de partage de la charge de la preuve est destiné à atténuer la difficulté pour la victime de prouver ces agissements litigieux qui interviennent souvent à l’oral.

Dans plusieurs jurisprudences, il peut être constaté que les juges reconnaissent l’existence d’un harcèlement sexuel dès lors que les faits relatés par le salarié sont corroborés uniquement par des attestations de collègues, y compris lorsqu’ils sont témoins indirects. Dans le même sens, les juges prennent en considération les faits dénoncés lorsqu’ils sont confirmés par des constatations médicales et par des proches qui ont pu observer une dégradation de l’état psychique de la salariée [11].

Il est toutefois souvent très compliqué d’obtenir des témoignages de collègues toujours en poste par peur de représailles quand les faits de harcèlement sexuel ne se déroulent tout simplement pas à huis clos.

Se pose alors la question des enregistrements clandestins qui reste toujours délicate. Dans un premier temps, ce type de preuve a été systématiquement été considéré comme illicite et rejeté par les juges [12]. Le Défenseur des droits [13] et certaines associations, dont l’AVFT (Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail), ont alors milité pour une prise en compte de ce moyen de preuve au regard des difficultés probatoires évoquées ci-dessus. Depuis, la Cour de cassation a semblé infléchir sa jurisprudence en admettant, au profit de l’employeur, la recevabilité de certains moyens de preuve illicites en imposant aux juges du fond de rechercher si « l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi » [14].

Vivement critiquées pour l’atteinte portée au respect de la vie privée des salariés, ces jurisprudences récentes pourraient, réciproquement, être utilisées par les victimes de harcèlement sexuel afin d’apporter la preuve de leurs allégations au moyen d’enregistrements clandestins réalisés à l'insu de l’employeur. En ce sens, deux cours d’appel ont d’ores et déjà accepté la recevabilité de tels enregistrements [15].

Il n’en demeure pas moins que la captation clandestine de sons ou d’images à l’insu d’une personne reste susceptible de constituer une infraction pénale sanctionnée par un an emprisonnement et de 45 000 € d’amende [16].

Des précisions en jurisprudence restent donc attendues afin de permettre aux salariés, si tel est le sens de la jurisprudence de la Chambre sociale, d’utiliser ce mode de preuve sans risquer de poursuites pénales de nature à fortement décourager toute action se fondant uniquement sur un enregistrement clandestin.

Des premiers éléments de réponse sont attendus prochainement puisque la Chambre sociale de la Cour de cassation vient de saisir son Assemblée plénière sur cette question d’articulation entre droit à la preuve et loyauté de la preuve [17].

IV. La notion d’attitude ambiguë de la victime en matière de harcèlement sexuel

L’absence de consentement de la victime est un des éléments constitutifs du harcèlement sexuel. Si la loi n’exige pas que la victime le formule expressément, elle suppose dans sa définition même que les agissements doivent être imposés par leur auteur et donc subis par la victime.

La Cour de cassation estime ainsi qu’il y a harcèlement sexuel dès lors que la victime exprime clairement son refus à l’auteur des agissements : ce refus peut être verbal, mais peut aussi prendre la forme d’un silence face aux agissements ou d’une alerte à des collègues ou auprès d’un supérieur hiérarchique.

Cette notion de consentement, dont la définition est difficilement appréhendable et en constante évolution, est évidemment sujette à interprétation. Dans ces conditions, les juges ont été amenés à considérer que l’attitude de la victime, même si elle ne relevait pas d’un consentement exprès, pouvait constituer une forme d’acceptation. Cela a donné lieu à plusieurs jurisprudences sur l’attitude ambiguë des victimes.  

En 2013, la Cour de cassation a ainsi jugé que si les faits dénoncés s’inscrivent dans un contexte de familiarité réciproque entre la victime présumée et l’auteur des faits, le harcèlement sexuel doit être écarté. La victime présumée adopterait dès lors une attitude ambiguë, excluant l’existence d’un harcèlement, peu importe qu’elle ait dénoncé par la suite les faits litigieux [18].

La cour d’appel de Versailles s’est également prononcée récemment en ce sens en jugeant que des échanges de SMS à caractère sexuel entre deux salariés devaient s’analyser en un jeu de séduction réciproque et n’étaient pas constitutifs de harcèlement sexuel. Dans les faits de l’espèce, la salariée produisait plusieurs SMS à connotation sexuelle, établissant ainsi des faits précis et concordants permettant de présumer l’existence d’un harcèlement. Toutefois, l’employeur produisait d’autres échanges de SMS démontrant que la salariée avait participé à un jeu de séduction réciproque. Elle avait notamment invité le salarié accusé à dîner chez elle, l’avait présenté à cette occasion à ses proches [19].

Récemment, la Cour de cassation a de nouveau jugé que, lorsque la salariée s’estimant victime de harcèlement a adopté une « attitude très familière de séduction », « ambiguë » et a « volontairement participé à un jeu de séduction réciproque », la qualification de harcèlement sexuel peut être écartée [20].

V. Ces jurisprudences sur l’attitude ambiguë ne doivent pas être généralisées  

Généraliser l’exclusion d’un harcèlement sexuel dans l’hypothèse d’une attitude jugée ambiguë de la part du salarié serait toutefois extrêmement dangereux. Cela reviendrait à nier totalement l’incidence que peut avoir l’existence d’un lien de subordination ou des rapports hiérarchiques sur la réponse et l’attitude du salarié faisant face à de tels agissements. En pratique, l’emprise d’un supérieur hiérarchique ou le contexte professionnel peut souvent amener le salarié à penser qu’il serait préférable « d’entrer dans le jeu » plutôt que de dénoncer les agissements subis, de peur que cela conduise à son exclusion professionnelle.

Ces jurisprudences sur l’attitude ambiguë sont à relativiser et il convient de prêter une attention toute particulière aux faits précis de l’espèce qui sont déterminants dans les décisions rendues par les juges du fond.

Dans l’arrêt précité de 2019, notamment, la Cour de cassation précise expressément que la solution qu’elle rend repose sur « l'absence de toute pression grave ou de toute situation intimidante, hostile ou offensante à l'encontre de la salariée » [21].

Ainsi, même lorsque la salariée s’estimant victime de harcèlement a participé aux échanges dont elle se plaint, l’existence d’une pression grave ou d’une situation intimidante, hostile ou offensante permet de retenir la qualification de harcèlement sexuel.

Il convient également de relever qu’aux termes du même arrêt, bien que le harcèlement sexuel n’ait pas été retenu en l’espèce, le licenciement pour faute du salarié auteur des SMS « au contenu déplacé et pornographique » a été validé, entérinant par là le caractère inconvenant de tels propos.

En effet, selon la Cour de cassation, les responsabilités hiérarchiques du salarié et l’usage de son téléphone professionnel pour l’envoi de tels messages écrits entraînaient la perte de « toute autorité et toute crédibilité dans l'exercice de sa fonction de direction ». Ainsi selon la Cour, « ces faits se rattachaient à la vie de l'entreprise, pouvaient justifier un licenciement disciplinaire et constituaient une cause réelle et sérieuse de licenciement » [22].

Aussi, la jurisprudence a reconnu que l’employeur ne peut se prévaloir de « relations ambiguës » existant entre deux salariés pour « expliquer » une attitude caractérisant un harcèlement sexuel, dans la mesure où même une « grande complicité » n’autorise pas ce type de comportement émanant d’un supérieur hiérarchique sur le lieu de travail [23] .

De la même manière, la jurisprudence a reconnu que l’ambiance grivoise et généralisée, à laquelle a participé une salariée, n’est pas de nature à excuser les agissements répétitifs ayant eu pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique et mentale, en ce qu’ils constituent des faits de harcèlement moral et sexuel [24].

Dans un contexte où l’employeur avait instauré une ambiance pornographique sur le lieu de travail et avait envoyé à une salariée de nombreux messages à caractère sexuel demandant notamment l’envoi de photos dénudées ou contenant des propositions de nature sexuelle, le conseil de prud’hommes de Paris a également considéré qu’il existait un harcèlement sexuel, peu important que la salariée ait pu être amenée à participer cette ambiance. En effet, la manière d’être autoritaire et n’autorisant pas la contestation de l’employeur, sa position de force sur le marché en question pouvant avoir un impact sur la future carrière de la salariée et le fait qu’il existait un rapport d’autorité ont amené le juge départiteur à considérer que la salariée n’était pas en position d’exprimer son désaccord sur ces pratiques [25].

Les juges du fond ne peuvent donc pas faire l’économie de l’analyse des relations entre les parties et de l’environnement professionnel pour déterminer si l’attitude du salarié est de nature ou non à l’exclure l’existence d’un harcèlement sexuel.

Selon les circonstances, l’employeur informé de l’ambiance sexualisée de son entreprise peut donc parfaitement être responsable des agissements litigieux et ne peut s’en dédouaner au seul motif que la victime aurait participé à des échanges de nature ambiguë.

VI. Une réparation civile encore timide et peu dissuasive

Sur le plan civil, la reconnaissance de l’existence d’un harcèlement sexuel ouvre droit à une réparation et à l’octroi de dommages et intérêts.

En premier lieu, le salarié victime d’un harcèlement sexuel qui aurait été licencié pourra solliciter la nullité de cette mesure et demander, soit sa réintégration dans l’entreprise avec le paiement des salaires qui auraient dû lui être versés depuis son éviction, soit le versement d’une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois par dérogation au « barème Macron » plafonnant les indemnités dues en cas de licenciement [26].

L’existence de faits de harcèlement sexuel est également de nature à justifier une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail émanant du salarié qui donnera lieu à la même indemnisation qu’en cas de licenciement nul [27].

Les salariés peuvent enfin solliciter des dommages et intérêts distincts en réparation des préjudices subis du fait du harcèlement sexuel et, le cas échéant, du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat [28].

Il ressort toutefois de l’analyse des décisions rendues par les juges du fond que cette indemnisation reste en moyenne relativement faible au regard de la gravité des faits en question. Le montant moyen des dommages et intérêts octroyé en cas de reconnaissance d’un harcèlement sexuel serait ainsi limité à 10 000 € [29].

À cela s’ajoute une durée moyenne de procédure dissuasive, comprise entre 2 et 3 ans entre la saisine du conseil de prud’hommes et la décision définitive de la cour d’appel.

En pratique, le chemin des victimes vers la reconnaissance d’un harcèlement sexuel et d’une réparation est donc long et complexe, ce qui a souvent pour effet de les conduire à accepter une transaction avec leur employeur. Une telle transaction contiendra toutefois nécessairement une clause de confidentialité allant souvent jusqu’à interdire au salarié de témoigner pour d’autres collègues qui se trouveraient dans la même situation, maintenant ainsi une certaine omerta au sein de l’entreprise.

Pour conclure, si certaines améliorations légales ont été constatées ces dernières années, la jurisprudence relative à l’attitude ambiguë des salariés nous rappelle que la protection des victimes de harcèlement sexuel requiert une vigilance de chaque instant et un discernement constant afin de contourner des écueils comme celui de la « victime parfaite » qui déporterait l’attention sur l’attitude de la victime plutôt que sur les agissements subis et l’environnement de travail au sein de l’entreprise


[1] À la suite d’un élargissement de la notion par la loi n° 2002-73, du 17 janvier 2002, de modernisation sociale N° Lexbase : L1304AW9 jugée trop imprécise par le Conseil constitutionnel qui en a abrogé les dispositions par sa décision n° 2012-240 QPC du 4 mai 2012 N° Lexbase : A5658IKR.

[2] C. trav., art. L. 1153-1 N° Lexbase : L8840ITL, dans sa version du 8 août 2012 au 31 mars 2022.

[3] C. trav., art. L. 1142-2-1 N° Lexbase : L5440KGL.

[4] C. pén., art. R. 625-8-3 N° Lexbase : L3437MHR.

[5] CA Toulouse, 16 mars 2018, n° 17/00581 N° Lexbase : A1121XHY.

[6] Cass. crim., 18 novembre 2015, n° 14-85.591, FS-P+B+I N° Lexbase : A1106NXA.

[7] Cass. soc., 24 septembre 2008, n° 06-46.517, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4541EAG.

[8] CA Versailles, 27 mars 2019, n° 16/04067 N° Lexbase : A1795Y7M.

[9] Cass. soc., 17 mai 2017, n° 15-19.300, FS-P+B N° Lexbase : A4797WDZ.

[10] C. trav., art. L. 1154-1 N° Lexbase : L6799K9P.

[11] CA Limoges, 13 octobre 2015, n° 14/01164 N° Lexbase : A1437NTE.

[12] Cass. soc., 20 novembre 1991, n° 88-43.120, publié N° Lexbase : A9301AAQ ; Cass. soc., 23 mai 2007, n° 06-43.209, FS-P+B+I N° Lexbase : A3964DWQ.

[13] Défenseur des droits, avis n° 18-03 relatif au harcèlement sexuel, recommandation n° 14 [en ligne].

[14] Cass. soc., 25 novembre 2020, n° 17-19.523, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A5510379 ; Cass. soc., 10 novembre 2021, n° 20-12.263, FS-B N° Lexbase : A45237B7.

[15] CA Bourges, 26 mars 2021, n° 19/01169 N° Lexbase : A39289UZ ; CA Toulouse, 10 mai 2019, n° 17/02966 N° Lexbase : A9740ZAY.

[16] C. pén., art. 226-1 N° Lexbase : L8546LXS.

[17] Cass. soc., 1er février 2023, n° 20-20.648, FS-D N° Lexbase : A50289BT.

[18] Cass. soc., 10 juillet 2013, n° 12-11.787, FS-D N° Lexbase : A8574KIE.

[19] CA Versailles, 26 mai 2021, n° 17/04734 N° Lexbase : A13574TG.

[20] Cass. soc., 25 septembre 2019, n° 17-31.171, F-D N° Lexbase : A0351ZQ3.

[21] Cass. soc., 25 septembre 2019 , précité.

[22] Cass. soc., 25 septembre 2019, précité.

[23] CA Paris, 18 mai 2011, n° 09/07491 N° Lexbase : A8891GQD.

[24] CA Paris, 1er février 2011, n° 08/10437 N° Lexbase : A8966UNE.

[25] CPH Paris, jugement de départage du 14 novembre 2022, n° RG F 20/08722.

[26] C. trav., art. L. 1152-3 N° Lexbase : L0728H9T et L. 1235-3-1 N° Lexbase : L1441LKL.

[27] Cass. soc., 26 mars 2014, n° 12-21372, FP-P+B N° Lexbase : A2434MIY.

[28] Cass. soc., 17 mai 2017, n° 15-19.300, FS-P+B N° Lexbase : A4797WDZ.

[29] Moyenne calculée avec les décisions disponibles sur Predictice au 2 mai 2023 (144 décisions de cour d’appel).

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