La lettre juridique n°937 du 9 mars 2023 : Baux d'habitation

[Brèves] Droit de préemption subsidiaire du locataire : quid de la commission d’agence ?

Réf. : Cass. civ. 3, 1er mars 2023, n° 21-22.073, FS-B N° Lexbase : A17999GQ

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 13 Mars 2023

► Le locataire qui exerce son droit de préemption subsidiaire en acceptant l'offre notifiée par le notaire, qui n'avait pas à être présentée par l'agent immobilier mandaté par le propriétaire pour rechercher un acquéreur, ne peut se voir imposer le paiement d'une commission renchérissant le prix du bien.

Dans un arrêt rendu le 3 juillet 2013, la troisième chambre civile avait été amenée à se prononcer sur la question de savoir si le locataire exerçant son droit de préemption peut être tenu au paiement de la commission d’agence, en y apportant une réponse négative : « Le locataire titulaire d'un droit de préemption acceptant l'offre de vente du bien qu'il habite qui n'a pas à être présenté par l'agent immobilier, mandaté par le propriétaire pour rechercher un acquéreur, ne peut se voir imposer le paiement d'une commission renchérissant le prix du bien » (Cass. civ. 3, 3 juillet 2013, n° 12-19.442, FS-P+B N° Lexbase : A5601KIB).

La question s’est posée à nouveau dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 1er mars 2023, à ceci près qu’il ne s’agissait pas du droit de préemption initial du locataire, mais du droit de préemption subsidiaire, qui naît à son profit lorsque, après avoir refusé d’exercer son droit de préemption, la vente est finalement proposée à un tiers à un prix ou à des conditions plus avantageuses. C’est l’article 15, II, alinéa 4, de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 N° Lexbase : Z87268SM, qui octroie ce droit au preneur : « dans le cas où le propriétaire, après un refus de l'offre initiale de vente adressée au locataire, décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l'acquéreur, le notaire doit, lorsque le bailleur n'y a pas préalablement procédé, notifier au locataire ces conditions et prix à peine de nullité de la vente et cette notification vaut offre de vente au profit du locataire ».

La solution ainsi retenue dans l’arrêt rendu le 3 juillet 2013 pouvait-elle être étendue dans le cas du droit de préemption subsidiaire du locataire ?

La cour d’appel d’Amiens ne l’avait pas admis, ayant retenu qu'à la suite du refus initial des locataires, les bailleurs avaient conclu un mandat avec l'agence immobilière, laquelle avait effectué une réelle prestation de recherche d'acquéreurs qu'elle avait ensuite présentés aux vendeurs afin que soit signé le « compromis » de vente, que ce n’était que treize jours plus tard qu'une offre avait été faite aux locataires qui avaient exercé leur droit de préemption, que la prestation de l'agence immobilière ne s’était pas limitée à la présentation d'une offre aux locataires et que, compte tenu du caractère déterminant de l'intervention de celle-ci, la commission était justifiée, que les locataires, en se substituant aux acquéreurs, avaient accepté d'acquérir aux mêmes conditions et en étaient redevables (CA Amiens, 11 mai 2021, n° 19/05641 N° Lexbase : A46984RG).

Mais sa décision est censurée par la Cour suprême, qui énonce la solution précitée en introduction, au visa de l’article  15, II, alinéa 4, de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989, et de l’article 6 de la loi n° 70-9, du 2 janvier 1970 N° Lexbase : L7536AIX, dont il résulte que « le droit à rémunération de l'agent immobilier, auquel un mandat de recherche a été confié, suppose une mise en relation entre le vendeur et l'acquéreur ».

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