Le Quotidien du 7 juin 2022 : Bancaire

[Brèves] Crédit immobilier, déchéance du terme et incident de paiement

Réf. : Cass. civ. 1, 25 mai 2022, n° 21-14.713, F-B N° Lexbase : A14927YW

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par Jérôme Lasserre-Capdeville

le 03 Juin 2022

Après avoir relevé qu’à la suite de la déchéance du terme prononcée en raison de la communication par les emprunteurs de renseignements inexacts au moment de la souscription du prêt, ceux-ci étaient redevables du solde du prêt devenu intégralement exigible et n’avaient pas payé cette somme, c’est à bon droit qu'une cour d'appel en déduit que ce prêt a fait l’objet d'un incident de paiement caractérisé au sens de l'article 4 de l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, justifiant son refus de procéder à la mainlevée de l'inscription des emprunteurs à ce fichier.

Le droit régissant le crédit immobilier suscite, ces derniers mois, de plus en plus de décisions remarquées de la part de la Cour de cassation (v. not. Cass. civ. 1, 20 octobre 2021, n° 20-13.661, F-B N° Lexbase : A525049C, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 693 N° Lexbase : N9191BY3 ; Cass. civ. 1, 10 novembre 2021, n° 19-25.105, F-D N° Lexbase : A74707BB, J. Lasserre-Capdeville, in Pan., Lexbase Affaires, janvier 2022, n° 703, spéc. n° 138 à 143 N° Lexbase : N0220BZ8 ; Cass. civ. 1, 10 novembre 2021, n° 19-24.386, FS-B N° Lexbase : A45187BX, J. Lasserre-Capdeville, in Pan. préc., spéc. n°  151 à 156 ; Cass. com., 9 février 2022, n° 20-17.551, F-B N° Lexbase : A68157MD, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, février 2022, n° 706 N° Lexbase : N0428BZU ; Cass. civ. 1, 20 avril 2022, n° 20-23.617, FS-B N° Lexbase : A08607UE, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, avril 2022, n° 715 N° Lexbase : N1303BZB). Tel est à nouveau le cas dans un arrêt du 25 mai 2022.

Celui-ci nous donne ainsi des précisions sur la notion d’incident de paiement prévue par l’article 4 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers N° Lexbase : L2707INL. Pour mémoire, il résulte de cette disposition que constituent des incidents de paiement caractérisés, pour un même crédit comportant des échéances, les défauts de paiement atteignant un montant cumulé au moins égal :

  • pour les crédits remboursables mensuellement, à la somme du montant des deux dernières échéances dues ;
  • pour les crédits qui ont des échéances autres que mensuelles, à l'équivalent d'une échéance, lorsque ce montant demeure impayé pendant plus de soixante jours.

Faits et procédure. En l’espèce, le 6 novembre 2014, une banque a consenti à M. C. et Mme B. un prêt destiné à l’acquisition d’un bien immobilier. Les conditions générales du contrat prévoyaient à l’article 17 une exigibilité du prêt par anticipation en cas de fourniture de renseignements inexacts par l'emprunteur sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt.

Or, le 21 juin 2016, soutenant que les emprunteurs avaient communiqué des renseignements mensongers au moment de la souscription du prêt, la banque s’est prévalue de l'article 17 pour prononcer la déchéance du terme et, le 30 juin 2016, elle a informé les emprunteurs d’un signalement auprès du fichier des incidents des crédits aux particuliers de la Banque de France (FICP). On rappellera que ces clauses sont aujourd’hui régulièrement admises, du moment qu’elles sont suffisamment précises (Cass. civ. 1, 28 novembre 2018, n° 17-21.625, F-D N° Lexbase : A9253YNZ ; Cass. civ. 1, 20 janvier 2021, n° 18-24.297, FS-P+I N° Lexbase : A00014DE, J. Lasserre-Capdeville Lexbase Affaires, janvier 2021, n° 663 N° Lexbase : N6197BYS  ; CA Versailles, 13 janvier 2022, n° 20/06116 N° Lexbase : A19407IP).

Le 26 avril 2018, l’établissement prêteur a délivré un commandement de payer le solde du prêt aux emprunteurs qui l’avaient assigné devant le juge de l’exécution en annulation du commandement et en mainlevée de l’inscription au FICP.

La cour d’appel de Rouen a, par une décision du 10 décembre 2020, rejeté cette demande de mainlevée de l'inscription au FICP.

Pourvoi. Les emprunteurs ont  alors formé un pourvoi en cassation. Selon les intéressés, ne constitue pas un incident de paiement caractérisé, pour l’application de l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursements de crédit aux particuliers, le défaut de paiement qui est provoqué par l'exigibilité de l'intégralité du montant du prêt, résultant du prononcé de la déchéance du terme par la banque quand cette déchéance du terme ne fait pas suite à un incident de paiement. Dès lors, en énonçant que l'inscription au FICP serait justifiée par le fait qu'à raison de la déchéance du terme prononcée sur le fondement de prétendues déclarations inexactes lors de la souscription du prêt, les époux C. seraient redevables de la somme de 273 946,48 euros devenue intégralement exigible, la cour d’appel aurait violé l’article 4 de l'arrêté du 26 octobre 2010.

Décision. La Cour de cassation ne partage pas cette solution. Ainsi, après avoir relevé qu’à la suite de la déchéance du terme prononcée en raison de la communication par les emprunteurs de renseignements inexacts au moment de la souscription du prêt, ceux-ci étaient redevables d’une certaine somme et n'avaient pas payé cette dernière, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que ce prêt a fait l'objet d'un incident de paiement caractérisé, justifiant son refus de procéder à la mainlevée de l'inscription des emprunteurs au FICP. Le moyen n’est donc pas fondé et le pourvoi est rejeté.

Observations. Cette solution échappe à la critique. En effet, l’article 4 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, mentionné précédemment, ne fait pas de différence entre les créances constituant un incident de paiement. Cette dernière notion pouvait donc être caractérisée alors même que la somme impayée correspondait au capital restant dû, à la suite de l’application d’une clause de déchéance du terme. L’inscription au FICP était, en conséquence, parfaitement légitime ici. Aucune mainlevée de l'inscription ne pouvait logiquement être admise.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le crédit immobilier, Le régime juridique commun à l'ensemble des crédits immobiliers, in Droit bancaire, (dir. J. Lasserre-Capdeville), Lexbase N° Lexbase : E0212Z3A.

 

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