Lexbase Fiscal n°520 du 21 mars 2013 : Fiscalité immobilière

[Evénement] Winter Real Estate Conference 2013 - Compte rendu de la conférence organisée par Arsene Taxand le 28 février 2013

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[Evénement] Winter Real Estate Conference 2013 - Compte rendu de la conférence organisée par Arsene Taxand le 28 février 2013. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/8034775-evenementiwinterrealestateconferencei2013compterendudelaconferenceorganiseepararsene
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par Sophie Cazaillet, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

le 21 Mars 2013

Le 28 février 2013, le cabinet Arsene Taxand a reçu les professionnels du droit à l'hôtel Bristol, pour sa Winter Real Estate Conference de l'année 2013. Le thème de ce petit déjeuner portait, comme son intitulé l'indique, sur l'actualité en matière de fiscalité immobilière. Deux grands sujets ont occupé cette matinée : l'actualité immobilière en matière d'impôt sur les sociétés, et l'actualité de la TVA immobilière (ou plutôt, d'application de la TVA à l'immobilier). L'immobilier, qui a connu une période de gloire pendant les années 2000, soutenu par une fiscalité avantageuse, notamment sur les SIC et les EPCI, a été diversement appréhendé par les dernières lois de finances de la fin de l'année 2012. Ainsi, alors que les personnes physiques ont vu leur niveau d'imposition fiscale augmenter fortement sur leur impôt immobilier (notamment en ce qui concerne les gains de cession), le parc immobilier des sociétés a été épargné. Dans un contexte budgétaire très dur, l'immobilier professionnel s'en sort mieux que l'immobilier résidentiel. Toutefois, les praticiens retiennent leur souffle, et craignent que l'année 2013 voit la fiscalité immobilière se tendre fortement, notamment depuis l'annonce faite par Jérôme Cahuzac, selon laquelle l'Etat aura besoin de 6 milliards d'euros supplémentaires. Peu sont les secteurs d'impôt qui n'ont pas encore subi un durcissement, et qui sont donc les cibles de ce besoin de liquidités. François Lugand, associé, et son équipe reviennent sur les mesures fiscales que les sociétés immobilières doivent connaître. I - L'actualité de la fiscalité immobilière en matière d'impôt sur les sociétés

Stéphanie Hamis et Driss Tof, avocats, ont présenté à l'auditoire les changements introduits, notamment, par les deux dernières lois de finances (loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012, de finances pour 2013 N° Lexbase : L7971IUR, et loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012, de finances rectificative pour 2012 N° Lexbase : L7970IUQ).

L'année 2012 a été riche en lois de finances (quatre en tout), et en émotions. En effet, ce qui ressort de ces textes, c'est un sentiment d'insécurité juridique. Entre la rétroactivité des mesures, la complexité croissante des textes avec des rédactions souvent confuses, l'introduction d'une nouvelle doctrine (le "BoFip - Impôts"), opposable à compter du 12 septembre 2012, et la hausse du nombre de contrôles fiscaux, le contribuable s'y perd. Et les conseils doivent se concentrer de plus en plus pour démêler les textes et leurs dates d'entrée en vigueur.

A - Le rabot sur les charges financières

Le rabot sur les charges financières, opéré par la loi de finances pour 2013 (loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012), concerne toutes les sociétés soumises à l'IS (ce qui exclut les SCI et les SNC soumises à l'IR), tous les emprunts, futurs et en cours au 31 décembre 2012, quelle que soit la qualité du prêteur (lié ou non lié, français ou étranger) et peu important la destination des fonds empruntés (acquisition d'immobilisations, financement de l'activité, etc.). Son champ est donc aussi large que possible.

Le rabot s'apprécie sur les charges financières nettes, c'est-à-dire sur le montant total des charges financières rémunérant les sommes laissées ou mises à disposition de l'entreprise, duquel est déduit le montant total des produits financiers rémunérant des sommes laissées ou mises à disposition par l'entreprise. Ces charges incluent celles issues de locations financières (location avec option d'achat et crédit-baux) et de locations mobilières intragroupe dont le montant est diminué de l'amortissement pratiqué chez le bailleur.

Le dispositif se déclenche lorsque le montant ainsi calculé est supérieur à 3 millions d'euros. En deçà de ce montant, les charges sont déductibles. Au-delà, les intérêts ne seront déductibles qu'à hauteur de 85 % pour les exercices ouverts en 2012 et 2013, et 75 % à compter des exercices ouverts en 2014. Le solde non déductible ne peut pas être reporté au titre des exercices ultérieurs.

Dans un groupe intégré, le seuil s'apprécie au niveau du groupe, ce qui fait de cette mesure un dispositif sévère pour ces derniers. Le plafonnement s'applique à la charge financière nette externe.

Le plafonnement s'applique après prise en compte des autres régimes de limitation : hors intégration fiscale, il s'agit du taux limite des intérêts (CGI, art. 39-1-3 N° Lexbase : L3894IAH et 212, I N° Lexbase : L5196IRU), du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation (CGI, art. 212, II), de l'amendement "Carrez" (CGI, art. 209, IX N° Lexbase : L0159IWS), et du dispositif général de limitation de la déductibilité des charges financières (CGI, art. 212 bis N° Lexbase : L0040IWE) ; dans une intégration fiscale, il s'agit du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation (CGI, art. 223 B, al. 14 à 19 N° Lexbase : L9519ITQ), de l'amendement "Charasse" (CGI, art. 223 A, al. 7 N° Lexbase : L5189IRM), et du dispositif général de limitation de la déductibilité des charges financières (CGI, art. 223 B bis N° Lexbase : L0041IWG).

Ce dispositif s'applique aux exercices clos au 31 décembre 2012, sauf pour certains contrats administratifs en cours (DSP, CSP, concessions, PPP, bail emphytéotique).

B - La non déductibilité des aides financières entre entreprises liées

Avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012, de finances rectificative pour 2012 (N° Lexbase : L9357ITQ), le 4 juillet 2012, l'abandon de créance à caractère financier consenti par une société mère à sa filiale en difficulté, détenue à 100 %, était déductible à hauteur de la situation nette négative réelle de la filiale. Cette situation n'est plus. En effet, la loi précitée a supprimé la possibilité, pour l'entreprise qui consent l'abandon, de déduire l'aide qu'elle a apportée à ses filiales, françaises comme étrangères.

Ainsi, et désormais, seuls les abandons de créance à caractère commercial et les abandons de créances consentis à des sociétés "en difficulté financière" demeurent déductibles. La société "en difficulté financière" est une société qui connaît une procédure de conciliation en application d'un accord homologué ou une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.

Il est à noter que cette mesure impacte également le calcul de la valeur ajoutée de l'entreprise. Les abandons de créance à caractère financier ne font plus l'objet d'un traitement spécifique.

Quid du cas dans lequel une société mono-programme a vendu son actif et ne dispose plus que d'une dette intragroupe ? Sa mère a trois choix : soit elle procède à une TUP avec sa fille, opération qui à l'avantage de la neutralité fiscale ; soit elle effectue un abandon de créance, mais dans ce cas il faudra veiller à ouvrir une procédure de conciliation au moins ; soit elle procède à la liquidation de la fille, et dans ce cas il lui sera possible de déduire une perte sur créance irrécouvrable, sans que la fille soit imposée.

C - La contribution de 3 %

La contribution additionnelle de 3 % sur les distributions de dividendes s'applique aux revenus distribués dont la mise en paiement intervient à compter du 17 août 2012 (loi n° 2012-958 du 16 août 2012, de finances rectificative pour 2012, art. 6).

Elle concerne toutes les sociétés soumises à l'IS en France. Sont exclues, notamment, les PME au sens de la réglementation européenne (moins de 250 salariés, moins de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires et moins de 43 millions d'euros en total bilan). Ces seuils sont appréciés au niveau consolidé. Echappent aussi à la contribution, les sociétés immobilières et les OPC.

Dans le secteur de l'immobilier, les distributions entre SIIC (si la société bénéficiaire des distributions détient, directement ou indirectement et de manière continue au cours de l'exercice, au moins 95 % de la société distributrice) sont exonérées de façon permanente. Les distributions obligatoires réalisées par des SIIC dont la mise en paiement intervient entre le 1er janvier et le 31 décembre 2013 bénéficient d'une exonération temporaire. Seuls les montants distribués au-delà de l'obligation légale supportent la contribution.

Les sommes concernées sont les dividendes et les revenus réputés distribués (dans ce cas, c'est une double peine qui s'applique, puisque la contribution est calculée sur le montant redressé). Toutefois, les distributions en actions (effectuées en application de l'article L. 232-18 du Code de commerce N° Lexbase : L6298AI4) sont exclues du champ de la contribution, sous certaines conditions. De plus, la contribution ne s'applique pas aux dividendes distribués entre des sociétés appartenant à un groupe d'intégration fiscale. Il n'est fait aucune référence au résultat de l'entreprise, ce qui signifie qu'une filiale déficitaire peut se trouver redevable.

Attention ! Seront, notamment, soumis à la contribution de 3 %, en leur qualité de revenus distribués, les intérêts excédentaires (CGI, art. 39-1-3), et certains chefs de redressements fiscaux (acquisition à prix minoré par exemple).

En revanche, ne sont pas considérés comme des revenus distribués et ne seront pas soumis à la contribution de 3 %, les intérêts non-déductibles en vertu des règles de sous-capitalisation (CGI, art. 212, II) et les intérêts non-déductibles en vertu du dispositif général de limitation de la déductibilité ou "rabot" (CGI, art. 212 bis). Ces exclusions ressortent d'une précision apportée par l'administration dans un projet d'instruction non encore soumis à consultation publique.

Le paiement de la contribution de 3 % s'effectue lors du premier versement d'acompte d'IS qui suit le mois de mise en paiement des dividendes. Le montant de la contribution ne souffre pas les réductions ou crédits d'impôt, ni les créances fiscales de toute nature.

Au niveau comptable, la contribution est comptabilisée en taxe additionnelle à l'IS, inscrite au compte 6952. Son montant n'est pas prélevé sur le montant des distributions. Elle a un impact sur les capacités distributives de la société distributrice en N+1.

D - La retenue à la source sur les OPC

A la suite de l'arrêt rendu par la CJUE le 10 mai 2012 (CJUE, aff. C-338/11 N° Lexbase : A9035IKT), la retenue à la source sur les dividendes distribués à des OPCVM, OPCI et des Sicaf étrangers a été supprimée. Toutefois, elle subsiste, au taux de 30 %, si certaines conditions ne sont pas réunies (si les organismes ne lèvent pas de capitaux auprès d'un certain nombre d'investisseurs en vue de les investir, conformément à une politique d'investissement définie, dans l'intérêt de ces investisseurs ; et s'ils ne présentent pas des caractéristiques similaires à celles d'organismes de placement collectif de droit français), au taux de 55 % si le paiement s'effectue dans un ETNC, et au taux de 15 % si la distribution est opérée par une SIIC, une SPPICAV et leurs filiales.

L'exonération s'applique sur les produits prélevés sur les résultats exonérés des SPPICAV, des SIIC, les filiales de SIIC et les filiales de SPPICAV (pour la part des produits distribués à des bénéficiaires autres que des SPPICAV) et distribués à des organismes de placement collectif français ou étrangers.

Le champ d'application de l'exonération comprend les sociétés distributrices ayant leur siège en France, et qui distribuent des dividendes à des organismes de droit français (OPCVM, OPCI, Sicaf) et des organismes constitués sur le fondement d'un droit étranger et levant des capitaux auprès d'un certain nombre d'investisseurs en vue de les investir, conformément à une politique d'investissement définie, dans l'intérêt de ces investisseurs au sens de l'article 4 de la Directive dite "AIFM" (Directive 2011/61/UE N° Lexbase : L7631IQP), présentant des caractéristiques similaires à celles des organismes de placement collectif de droit français (OPCVM, c'est-à-dire Sicav et FCP, OPCI, c'est-à-dire Sppicav et FPI et Sicaf). A défaut de satisfaction à ces conditions, la retenue à la source est maintenue et appliquée aux produits distribués aux OPC étrangers.

En conclusion, dans le cas où une SAS percevrait des distributions de la part d'une SIIC, seule la contribution de 3 % sera applicable, au titre de 2014 (en 2013, les SIIC sont exonérées). Si cette SAS, qui a opté pour le régime de filiale de SIIC, distribue des dividendes à un OPCVM, la retenue à la source de 15 % s'applique, ainsi que la contribution de 3 %. La distribution opérée par un OPCI vers la SAS est exonérée de contribution de 3 % et de retenue à la source de 15 %. En effet, ne sont pas concernées par la contribution de 3 %, les distributions opérées par des filiales de SIIC ou d'OPCI et par des OPCI eux-mêmes.

Si une SIIC distribue des dividendes à une autre SIIC, seule la contribution de 3 % s'applique. Elle s'applique aussi aux distributions faites aux actionnaires, et à celles effectuées vers un OPCVM. Cette dernière opération subit, en outre, la retenue à la source de 15 %.

Si un OPCI et ses filiales (SIIC, OPCVM et autres actionnaires) distribuent des dividendes à une SAS, ni la contribution de 3 %, ni la retenue à la source ne s'appliquent. Toutefois, les distributions effectuées par l'OPCI vers l'OPCVM subissent la retenue à la source de 15 %.

E - Les droits de mutation sur sociétés immobilières

La loi de finances pour 2012 (loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 N° Lexbase : L4993IRD) a substantiellement modifié l'assiette du droit d'enregistrement en cas de cession de société à prépondérance immobilière. Ainsi, l'article 726 du CGI (N° Lexbase : L4619ISU) dispose, désormais, que : "[...] l'assiette du droit d'enregistrement comprend, à concurrence de la fraction des titres cédés, la valeur réelle des biens et droits immobiliers détenus, directement ou indirectement, au travers d'autres personnes morales à prépondérance immobilière, après déduction du seul passif afférent à l'acquisition desdits biens et droits immobiliers, ainsi que la valeur réelle des autres éléments d'actifs bruts".

Cette rédaction laisse planer des incertitudes quant à son champ d'application. Ainsi, quid de la dette pour financer la construction ou les travaux de rénovation ? de la dette de refinancement de l'actif immobilier ? de la dette pour financer l'acquisition des titres de SPI (même si, a priori, elle ne serait pas déductible) ? de la dette d'acquisition d'autres actifs (a priori, elle ne serait pas déductible non plus) ?

Cette mesure s'applique-t-elle aux actions de SPPICAV ?

L'administration fiscale n'ayant pas encore publié ses commentaires précisant la notion de "passif afférent à l'acquisition", la rédaction peu précise de l'article est source d'insécurité juridique.

II - L'actualité de la fiscalité immobilière en matière de TVA

En matière de TVA immobilière, ce sont Michaël Taïeb et Ghislain de Pazzis, avocats, qui officient.

A - La dispense de TVA sur les cessions d'immeubles

L'article 257 bis du CGI (N° Lexbase : L7414IGP) prévoit le régime de la dispense de TVA sur les cessions d'immeuble affecté à une activité taxable réalisées entre deux assujettis.

Pour les immeubles entrant de plein droit dans le champ de la TVA, les deux assujettis bénéficient d'une dispense de taxation à la TVA. En outre, le vendeur est dispensé de régulariser la TVA qu'il a antérieurement déduite.

Dans certains cas, la dispense ne peut pas s'appliquer. C'est le cas lorsque l'immeuble est comptabilisé en stock au bilan du vendeur. Toutefois, dans ce cas, et afin d'éviter que le vendeur ne supporte le coût définitif de régularisation de la TVA antérieurement déduite, il peut opter pour l'application de la TVA à la cession.

La dispense ne s'applique pas non plus en cas d'immeuble vacant. Mais l'administration admet la dispense, à la double condition que le vendeur ait opté à la TVA sur les loyers pour cet immeuble et qu'il ait signé un mandat de commercialisation pour la recherche de locataires.

Enfin, dans le cas où l'immeuble est partiellement affecté à une activité non taxable à la TVA, la dispense applicable si les différentes activités sont taxables d'une part, et dans le champ des activités exonérées d'autre part. Il est à noter que le vendeur risque de ne pas pouvoir bénéficier de la dispense s'il affecte partiellement l'immeuble à une activité hors champ, par exemple en cas de mise à disposition à titre gratuit. Quelles sont les solutions qui s'offrent à lui ? Il y en a deux. Soit le vendeur prévoit un bail avec loyer pour les surfaces en cause, soit il examine le découpage cadastral.

B - La TVA et les frais de cession

De manière générale, si la déduction des frais de cession est possible, elle est encadrée par des conditions très strictes.

Ainsi, pour les cessions de participation, qui sont des opérations exonérées de TVA, la déductibilité de la TVA sur les frais de cession a été longtemps refusée par l'administration fiscale. En 2010 pourtant, le Conseil d'Etat s'est aligné sur la jurisprudence communautaire, et a admis la déduction (CE 3° et 8° s-s-r., 23 décembre 2010, n° 307698, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6971GNI).

Concernant les cessions d'immeuble, si la cession est soumise à la TVA, alors la taxe grevant les frais de cession sont déductibles. Si la cession est dispensée de TVA, le droit à déduction s'effectue à hauteur du prorata (frais généraux - transfert d'universalité). Enfin, si la cession est exonérée de TVA, la position de l'administration suit celle prévue en cas de cession de participation (voir supra).

La situation actuelle permet de déduire la TVA ayant grevé les frais engagés en vue de la cession (brokers, conseils), mais selon des critères stricts. En effet, il est opéré une distinction entre les dépenses "préparatoires", et les dépenses "inhérentes" à la cession. Les dépenses préparatoires sont celles intervenant en amont de la décision de céder. Elles sont présumées être des frais généraux, ce qui implique la possibilité de déduire la TVA. Les dépenses inhérentes, quant à elles, sont celles engagées pour réaliser la cession. Elles sont présumées se rapporter à la cession, et donc la TVA n'est pas déductible. Toutefois, elle peut l'être si le cédant rapporte la preuve que ces frais n'ont pas été incorporés au prix de cession des titres ou de l'immeuble.

Attention ! En pratique, le prestataire établit une facture unique, qui ne distingue pas entre les dépenses préparatoires et les dépenses inhérentes. L'ensemble de ces sommes facturées sont présumées être inhérentes à l'opération de cession.

Le cabinet Arsene Taxand recommande donc à ses clients de toujours insérer à l'acte une clause prévoyant que chaque partie garde à sa charge les coûts qu'elle a engagés dans le cadre de l'opération.

Enfin, il est à noter que le droit de déduction est exclu lorsque la cession présente un caractère patrimonial. Ce caractère résulterait du fait que le produit de cession est distribué aux actionnaires (notamment sous forme de dividendes).

C - La TVA et les franchises de loyer

Les professionnels de la TVA ont remarqué que, depuis quelque temps, l'administration tentait un nouveau cas de redressements, portant sur les franchises de loyer. Le service a tendance, aujourd'hui, à opérer des rappels de TVA sur le montant de la franchise qui est octroyée. Selon lui, la franchise n'est pas une simple réduction de prix octroyée par le bailleur, mais elle constitue la contrepartie d'un service qui lui est rendu par le preneur. La qualification de contrepartie fait entrer la franchise dans le champ d'application de la TVA.

En quoi consiste une franchise de loyer ? Le bailleur réduit, parfois jusqu'à zéro, le montant du loyer dû par son preneur à bail, qui s'engage sur une période plus longue (et ainsi renonce à sa faculté de résiliation triennale), ou effectue des travaux d'aménagement, etc..

Si la franchise est considérée comme étant un geste commercial du bailleur, en principe, la franchise ne constitue qu'une modalité de détermination et de versement du prix. Il n'y a donc aucun service distinct, la TVA n'est pas due.

Si la franchise naît de la réalisation de travaux d'aménagement par le locataire, Arsene Taxand considère que des travaux d'aménagements répondant aux besoins propres du preneur ne bénéficient pas au bailleur. De plus, si le bail prévoit la remise en état des locaux au terme du bail, il n'y a là aucune prestation de service taxable. La TVA ne s'applique pas.

Si la franchise est motivée par la renonciation du locataire à la faculté de résiliation triennale, cette dernière étant nécessairement et intimement liée au contrat de bail, le preneur ne rend pas un service distinct, et la TVA n'est pas due.

En revanche, dans le cas du locataire dit "locomotive", il existe un risque d'assujettissement à la TVA de la franchise de loyer. La CJUE, dans une décision du 9 janvier 2001 (CJUE, aff. C-409/98 N° Lexbase : A4484AWY), a en effet décidé que si le fait, pour le locataire, de s'engager à devenir locataire et à payer le loyer ne constitue pas une prestation de services rendue au propriétaire, il en va différemment lorsque des circonstances particulières (cas dans lequel un locataire prestigieux accepte de rester dans les locaux afin que le propriétaire puisse attirer d'autres locataires par sa présence) démontrent l'existence d'un service distinct rendu au propriétaire par le locataire.

Que faire pour éviter un redressement de l'administration sur les franchises de loyer ? Dès la rédaction du contrat de bail, il peut être utile de déconnecter la franchise des obligations du preneur, et d'intégrer cette notion dans la clause de prix. De plus, le traitement comptable de la franchise de loyer doit faire ressortir une réduction de chiffre d'affaires pour le bailleur (et non une charge), et un réduction de charge pour le preneur (et non un produit). En outre, la rédaction d'une "side-letter", dans laquelle les parties s'engagent réciproquement à régulariser la situation au cas où l'une d'elles est redressée, peut être opportune. Enfin, les parties peuvent faire une demande de rescrit à l'administration fiscale, afin de sécuriser définitivement leur opération.

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