Le Quotidien du 4 mai 2021 : Procédure pénale

[Brèves] Conditions légales de la détention provisoire : la seule constatation de l’existence de raisons plausibles de l’implication dans les faits ne suffit pas

Réf. : Cass. crim., 16 mars 2021, n° 20-87.092, FS-P (N° Lexbase : A48374LQ)

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N7075BYP

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par Adélaïde Léon

le 03 Mai 2021

► La seule constatation de l’existence de raisons plausibles de l’implication de l’intéressé dans les faits pour lesquels il est mis en examen ne permet pas de déduire l’existence d’indices graves ou concordants de la participation de celui-ci à ces mêmes faits, cette dernière exigence étant plus stricte que la première.

Rappel des faits. Un individu a été mis en examen des chefs d’importation de stupéfiants et association de malfaiteurs, en récidive. À l’issue de son interrogatoire de première comparution, il a été placé sous mandat de dépôt à durée déterminée. Le juge des libertés et de la détention a refusé que l’intéressé soit placé en détention provisoire et l’a placé sous contrôle judiciaire. Le procureur de la République a relevé appel de cette décision.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a ordonné le placement de l’individu en détention provisoire en retenant qu’il existait des raisons rendant plausible l’implication de celui-ci dans les infractions pour lesquelles il était mis en examen.

Ce dernier a formé un pourvoi contre cette décision.

Moyens du pourvoi. Il est fait grief à la chambre de l’instruction d’avoir infirmé l’ordonnance de placement sous contrôle judiciaire en se fondant sur l’existence de raisons rendant plausibles l’implication du mis en examen alors qu’il lui appartient, à chaque stade de la procédure, de s’assurer de l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux faits reprochés. Or en l’espèce, l’arrêt retient l’existence de ces raisons par la seule référence abstraite à la nature d’actes d’investigation sans en préciser la teneur. En ne relevant aucun indice grave ou concordant, la chambre de l’instruction n’a pas réuni les conditions légales de la détention provisoire. Enfin, la juridiction d’appel n’a par ailleurs pas répondu au mémoire par lequel le mis en examen faisait valoir l’absence d’indice grave ou concordant faute d’acte préparatoire et de tout commencement d’exécution.

Décision. La Chambre criminelle casse et annule l’arrêt au visa des articles 80-1 (N° Lexbase : L2962IZQ) et 137 (N° Lexbase : L9393IEM) du Code de procédure pénale et 5, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH) (N° Lexbase : L4786AQC).

La Cour rappelle qu’il résulte des textes du Code de procédure pénale que les mesures de sûreté ne peuvent être prononcées qu’à l’égard de la personne à l’encontre de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont le juge d’instruction est saisi. Il résulte par ailleurs de l’article de la CESDH que la chambre de l’instruction doit, à chaque stade de la procédure, s’assurer, même d’office, que les conditions légales des mesures de sûreté sont réunies et donc constater expressément l’existence de tels indices.

En l’espèce, la juridiction d’appel s’était limitée à relever l’existence de raisons plausibles de l’implication de l’intéressé dans les faits pour lesquels il était mis en examen. Or, cette seule constatation ne permet pas de déduire l’existence d’indices graves ou concordants de la participation de celui-ci à ces mêmes faits, cette dernière exigence étant plus stricte que la première.

La Chambre de l’instruction ne s’était donc pas assuré que les conditions légales des mesures de sûreté étaient réunies avant de prononcer le placement en détention provisoire.

Contexte. Après avoir désigné l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de la personne mise en examen aux faits reprochés parmi les conditions légales de la détention provisoire (Cass. crim., 14 octobre 2020, n° 20-82.961, FS-P+B+I N° Lexbase : A50093XS), la Cour de cassation était venue préciser le champ d’application et la nature du contrôle de l’existence d’indices graves ou concordants en matière de mesure de sûreté (Cass. crim., 27 janvier 2021, n° 20-85.990, FS-P+B+I N° Lexbase : A65064DC). La Haute juridiction avait rappelé qu’il appartient à la chambre de l’instruction, à chaque stade de la procédure, même d’office, de s’assurer que les conditions légales de la détention provisoire sont réunies et notamment de contrôler l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux faits reprochés. Dans une décision du 9 février 2021, la Chambre criminelle a affirmé qu’il appartient aux juges de vérifier, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure au moment où ils statuent, que les pièces du dossier établissent, d’une part, l’existence d’agissements susceptibles de caractériser les infractions pour lesquelles la personne est mise en examen, selon la qualification notifiée à ce stade, et, d’autre part, la vraisemblance de leur imputabilité à celle-ci (Cass. crim., 9 février 20201, n° 20-86.339, FS-P+I N° Lexbase : A21694GG).

Aujourd’hui, la Cour vient une fois encore préciser ses exigences en matière de contrôle des conditions légales des mesures de sûreté en décidant que la seule constatation de l’existence de raisons plausibles de l’implication de l’intéressé dans les faits pour lesquels il était mis en examen ne permet pas de déduire l’existence d’indices graves ou concordants de la participation de celui-ci à ces mêmes faits, cette dernière exigence étant plus stricte que la première.

Pour aller plus loin :

  • C. Porteron, Précisions sur l’étendue du contrôle de la chambre de l’instruction concernant les mesures de sûreté, Lexbase Pénal, mars 2021 (N° Lexbase : N6774BYK) ;
  • N. Catelan, ÉTUDE : Les mesures de contrainte au cours de l’instruction : contrôle judiciaire, assignation à résidence et détention provisoire, La détention provisoire, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E0810Z9U).

 

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