Réf. : Cass. civ. 1, 8 juillet 2020, n° 18-20.961, F-P+B (N° Lexbase : A12383RB)
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N4133BYQ
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 16 Juillet 2020
► L'absence de décision irrévocable sur la recevabilité d'une action en recherche de paternité ne peut constituer un motif légitime, même au regard du droit au procès équitable, pour refuser de se soumettre à une expertise biologique ordonnée à l'occasion de cette action par le tribunal, s’agissant d’une mesure qui, destinée à lever les incertitudes d’un enfant sur ses origines, doit être exécutée avec célérité.
En l’espèce, par acte du 22 juin 2011, la mère d’un enfant né en 2003, sans filiation paternelle déclarée, agissant en qualité de représentante légale du mineur, avait assigné le requérant en recherche de paternité.
Recevabilité de l’action/forclusion (non). Ce dernier faisait tout d’abord grief à un arrêt rendu le 24 octobre 2014 de déclarer recevable l'action en recherche de paternité. Il faisait valoir que la mère avait attendu le 22 juin 2011, soit plus de huit ans après la naissance de son fils, le 21 mars 2003, pour agir en recherche de paternité contre lui, sur le fondement de l'article 328 nouveau du Code civil (N° Lexbase : L3419IQP) ; or, selon lui, en affirmant que la forclusion tirée de la loi ancienne n'était pas opposable à cette action, peu important que l'article 20-IV ne vise pas l'article 328 du Code civil, la cour d'appel avait violé les articles 20-IV de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 (N° Lexbase : L8392G9P), 328 nouveau du Code civil et 340-4 ancien du même code (N° Lexbase : L2833ABK).
Il n’obtiendra pas gain de cause devant la Haute juridiction qui vient ici préciser qu’il résulte des articles 327 (N° Lexbase : L8829G9U) et 328 (N° Lexbase : L3419IQP) du Code civil, d'une part, que l'action en recherche de paternité est réservée à l'enfant, d'autre part, que pendant la minorité de celui-ci, le parent à l'égard duquel la filiation est établie a seul qualité pour exercer l'action en recherche de paternité. Il en résulte que l'article 20, IV, de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005, qui prévoit, au titre des dispositions transitoires, que l'action prévue par l'article 327 du Code civil peut être exercée sans que puisse être opposée la forclusion de deux ans tirée de la loi ancienne, dès lors qu'à la date d'entrée en vigueur de cette ordonnance, le 1er juillet 2006, la prescription de dix ans prévue par l'article 321 du même code (N° Lexbase : L8823G9N) n'est pas acquise, s'applique lorsque l'action est exercée par le représentant légal de l'enfant mineur sur le fondement de l'article 328 du Code civil.
Après avoir énoncé à bon droit que l'article 20, IV, de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 est applicable à toutes les actions en recherche de paternité intentées postérieurement au 1er juillet 2006, qu'elles soient exercées par la mère pendant la minorité de l'enfant ou par l'enfant lui-même devenu majeur et relevé que l'action en recherche de paternité avait été engagée par la mère de l'enfant, en qualité de représentante légale de ce dernier, postérieurement à l'entrée en vigueur de ces dispositions et dans le délai de dix ans requis par l’article 321 du Code civil, la cour d'appel en avait exactement déduit que celle-ci était recevable.
Expertise biologique/motif légitime de ne pas y procéder (non). Il faisait ensuite grief à l’arrêt du 8 juin 2018 de l’avoir déclaré père l’enfant, soutenant que constituait un motif légitime de refuser de se soumettre à l’expertise biologique judiciairement ordonnée, la circonstance que la question de la recevabilité de l’action intentée contre soi n’avait pas été définitivement tranchée.
L’argument est écarté par la Cour suprême qui, après avoir en effet rappelé que, selon l'article 310-3 du code civil, l'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder, énonce clairement que l'absence de décision irrévocable sur la recevabilité d'une action en recherche de paternité ne peut constituer un motif légitime, même au regard du droit au procès équitable, pour refuser de se soumettre à une expertise biologique ordonnée à l'occasion de cette action par le tribunal, s’agissant d’une mesure qui, destinée à lever les incertitudes d’un enfant sur ses origines, doit être exécutée avec célérité.
Elle approuve alors les conseillers d’appel qui, après avoir, par motifs propres et adoptés, retenu que l'action était recevable et relevé que le requérant avait volontairement mis en échec l'expertise génétique ordonnée par le tribunal en faisant le choix de ne pas déférer aux convocations qui lui avaient été adressées, en vertu de la décision ordonnant l’expertise, laquelle était exécutoire, avaient décidé, à bon droit, que ce dernier ne disposait d'aucun motif légitime pour s'opposer à la réalisation de l'expertise génétique et qu'il se déduisait de son refus de s'y soumettre un indice supplémentaire de sa paternité.
Pour aller plus loin : cf. l’Ouvrage « La filiation », L'examen sanguin et l'expertise génétique aux fins d'établissement de la filiation naturelle (N° Lexbase : E4353EYU). |
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