Réf. : CJUE, 9 juillet 2020, aff. C-264/19 (N° Lexbase : A80903QP)
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par Vincent Téchené
le 15 Juillet 2020
► Dans le cadre du téléversement d’un film sur une plateforme vidéo en ligne sans l’accord du titulaire du droit d’auteur, la Directive n° 2004/48 du 29 avril 2004, relative au respect des droits de propriété intellectuelle (N° Lexbase : L2091DY4), n’oblige pas les autorités judiciaires à ordonner à l’exploitant de la plateforme vidéo de fournir l’adresse courriel, l’adresse IP ou le numéro de téléphone de l’utilisateur ayant téléversé le film litigieux ;
La Directive, qui prévoit la fourniture des « adresses » des personnes ayant porté atteinte à un droit de propriété intellectuelle, vise uniquement l’adresse postale.
Faits et procédure. Des films ayant été téléversés sur la plateforme vidéo YouTube, sans l’accord du titulaire des droits d’exploitation exclusifs sur ces œuvres en Allemagne, et visionnés de nombreuses fois, le titulaire des droits a exigé, de la part de YouTube et de Google, sa société mère, qu’elles lui fournissent un ensemble d’informations relatives à chacun des utilisateurs ayant procédé au téléversement. Les deux sociétés ont refusé de fournir les informations relatives à ces utilisateurs, en particulier, leurs adresses courriel et numéros de téléphone ainsi que les adresses IP utilisées par ceux-ci tant au moment du téléversement des fichiers concernés qu’au moment du dernier accès à leur compte Google/YouTube. Dans ces conditions, le juge allemand saisi du litige a décidé de surseoir à statuer et de poser à la CJUE des questions préjudicielles afin de savoir si de telles informations relèvent de la notion d’« adresses », au sens de la Directive n° 2004/48.
Décision. La Directive prévoit en effet que les autorités judiciaires peuvent ordonner la fourniture des informations sur l’origine et les réseaux de distribution des marchandises ou des services qui portent atteinte à un droit de propriété intellectuelle. Parmi ces informations figurent notamment les « adresses » des producteurs, distributeurs et fournisseurs des marchandises ou des services contrefaisants.
La Cour a constaté, en premier lieu, que, s’agissant du sens habituel du terme « adresse », celui-ci ne vise que l’adresse postale, c’est-à-dire le lieu de domicile ou de résidence d’une personne déterminée. Il s’ensuit que ce terme, lorsqu’il est utilisé sans autre précision, tel que dans la Directive n° 2004/48, ne vise pas l’adresse courriel, le numéro de téléphone ou l’adresse IP. En deuxième lieu, les travaux préparatoires ayant conduit à l’adoption de la Directive ne comportent aucun indice de nature à suggérer que le terme « adresse » devrait être compris comme visant non seulement l’adresse postale, mais également l’adresse courriel, le numéro de téléphone ou l’adresse IP des personnes visées. En troisième lieu, l’examen d’autres actes de droit de l’Union visant l’adresse courriel ou l’adresse IP fait apparaître qu’aucun de ceux-ci n’utilise le terme « adresse », sans autre précision, pour désigner le numéro de téléphone, l’adresse IP ou l’adresse courriel. Cette interprétation est, selon la Cour, conforme à la finalité poursuivie par la disposition de la Directive n° 2004/48 portant sur le droit d’information. La Cour a donc conclu que la notion d’« adresses » figurant dans la Directive n° 2004/48 ne vise pas, en ce qui concerne un utilisateur ayant téléversé des fichiers portant atteinte à un droit de propriété intellectuelle, son adresse courriel, son numéro de téléphone ni l’adresse IP utilisée pour téléverser ces fichiers ou l’adresse IP utilisée lors de son dernier accès au compte utilisateur.
La Cour a néanmoins précisé que les États membres ont la faculté d’accorder aux titulaires de droits de propriété intellectuelle le droit de recevoir une information plus étendue.
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