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par Marie Le Guerroué
le 09 Juillet 2020
« Ce n’est pas le ministère de la guerre, même si j’ai cru entendre ces mots, mais celui des libertés ».
C’est avec ces premiers mots que le nouveau ministre de la Justice a pris ses nouvelles fonctions mardi 7 juillet 2020 place Vendôme. Eric Dupond-Moretti succède ainsi à Nicole Belloubet en poste depuis le 21 juin 2017.
Lors de cette passation de pouvoirs, la désormais ancienne Garde des Sceaux a rappelé les réformes engagées sous son ministère et, particulièrement, la « loi de programmation et de réforme pour la Justice » avec l’augmentation du budget de la Justice de 23 %, la réorganisation du service public de la Justice, le défi du numérique et la réforme des peines. Elle a, ensuite, passé le relai au nouveau ministre sur des dossiers majeurs : le Code de la justice pénale des mineurs, l’ouverture de la PMA aux couples de femmes, le parquet européen, la juridiction environnementale, l’application de la loi « Justice », la mission « Perben » et les deux projets de réformes constitutionnelles dont la réforme du parquet.
Nicole Belloubet a enfin souligné la nécessité d’une « communauté judiciaire unie » pour mener à bien ces chantiers.
C’est la base même de cette unité que le nouveau ministre a voulu poser en rappelant qu’il ne « faisait de guerre à personne ». Répondant ainsi aux craintes de la présidente de l’Union syndicale de la magistrature qui a vu dans sa nomination « une déclaration de guerre ».
Celui qui connait la Justice « humainement, intimement et charnellement » et dit en avoir vu le « meilleur et le pire » et notamment « les conditions de travail déplorables dans lesquels se débattent quotidiennement magistrats et greffiers » a exprimé son souhait d’améliorer la Justice française « en [gardant] le meilleur et en [changeant] le pire ».
Il a ainsi détaillé sa feuille de route avec la remise à plat de l’ordonnance de 1958, la réforme « tant attendue » du parquet, la PMA et la réforme de l’ordonnance de 1945.
Il a indiqué son souhait de voir « les enquêtes préliminaires [restées] préliminaires pour qu’elles ne soient pas éternelles comme c’est parfois le cas » faisant ici référence à l’enquête du parquet national financier dans laquelle il a avait été mis sur écoute. Il a ajouté qu'il demanderait à la Direction des affaires criminelles et des grâces de lui faire des propositions en ce sens.
C’est aussi, le renforcement de la présomption d’innocence et du secret de l’enquête que le nouveau ministre a appelé de ses vœux. « La Justice ne se rend pas dans la rue, ni sur les réseaux sociaux, ni dans les médias » a-t-il rappelé. Ajoutant et empruntant les mots de François Mitterrand : « l’honneur des hommes pas plus aujourd’hui qu’hier ne mérite d’être jeté aux chiens ». Le nouveau ministre n’a pas manqué d’ajouter son souhait de voir les victimes systématiquement entendues et de voir restaurer le secret professionnel des avocats. Il a, enfin, rappelé les « conditions de vie inhumaines et dégradantes » des prisonniers et assuré de son « indéfectible soutien » le personnel pénitentiaire à qui il a réservé sa première visite de ministre. Il a assuré aux professionnels de la Justice qu’il serait le Garde des Sceaux du dialogue et qu’il accepterait la contradiction. Les derniers mots du Garde des Sceaux n’ont pas été sans raisonner avec l’actualité de ces derniers mois et la dénonciation du racisme au sein des forces de l’ordre : « Je serai un Garde des Sceaux de sang mêlé, mon ministère sera aussi celui de l’antiracisme et des droits de l’Homme ».
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