Lexbase Fiscal n°462 du 17 novembre 2011 : Fiscalité des entreprises

[Le point sur...] Restructuration et transmission des PME et ETI non cotées : la punition fiscale

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par Vincent Grandil, Avocat fiscaliste, Associé au sein de Altexis, Société d'avocats membre du réseau Law & Numbers

le 17 Novembre 2011

Les petites et moyennes entreprises (PME) (1), si on exclut les très petites entreprises (TPE), occupent chacune entre 10 et 250 personnes. Elles ont un chiffre d'affaires annuel compris entre 2 millions et 50 millions d'euros ou un total bilan n'excédant pas 43 millions d'euros.
Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) (2) se situent entre les PME et les grandes entreprises (GE). Elles emploient chacune entre 250 et 5 000 salariés et ont, soit un chiffre d'affaires annuel compris entre 50 millions et 1,5 milliard d'euros, soit un total bilan n'excédant pas 2 milliards d'euros.
Au 1er janvier 2010, la France comptait 27 093 PME de plus de 50 salariés (3) et environ 4 831 ETI (4). Sur ces 32 000 entreprises, seules 133 sont cotées sur Alternext (5), soit moins de 0,01 % d'entre elles. Ces entreprises sont la richesse de la France. Les PME et les ETI emploient en effet plus de 70 % des actifs travaillant dans le secteur privé, et produisent plus de 60 % de la valeur ajoutée française (6). Leur bonne santé économique est un facteur clé de la compétitivité de l'économie française et de sa capacité à créer des emplois. Si, depuis 15 ans, les gouvernements successifs ont multiplié les dispositifs en faveur de la création d'entreprises, tout en s'assurant de la compétitivité des grandes entreprises, les PME et les ETI ont été oubliées. Exclues des facilitées accordées aux "start-up" et soumises à des obligations administratives envahissantes quasi identiques à celles des grandes entreprises, les PME-ETI françaises ne grandissent pas. Alors qu'une PME américaine aura, en moyenne, doublé ses effectifs 7 ans après sa création, une PME française n'aura connu qu'une croissance de 7 % (7).
De nombreux obstacles ont été identifiés. On cite couramment les obstacles administratifs, l'incapacité à innover, l'absence de réactivité à la demande domestique et internationale, une insuffisance de taille pour pénétrer les marchés internationaux, etc.. Ces obstacles ne sont pourtant que la conséquence d'une insuffisance chronique d'autofinancement des entreprises françaises. Celui-ci est deux fois moindre que celui des entreprises allemandes et anglaises (8). Or, on sait que l'autofinancement d'une entreprise est le moyen de financement le plus sain par lequel une entreprise peut financer sa croissance. C'est l'argent dont elle dispose sans avoir besoin de s'endetter auprès des banques pour investir dans l'innovation, dans de nouveaux produits ou pour s'internationaliser. Comme on le sait, l'autofinancement d'une entreprise s'analyse en additionnant ses amortissements et le bénéfice laissé dans l'entreprise après avoir payé ses impôts, ses charges sociales et versé un dividende aux actionnaires.

Il est établi que seules 16,4 % des PME et 30,6 % des ETI ont versé un dividende en 2007 (9). Ces dividendes ont représenté environ 5 % de la valeur ajoutée (10) qu'elles ont produite (11). Le montant des dividendes versés n'est donc pas responsable de l'insuffisance de l'autofinancement des PME et des ETI françaises. Les règles d'amortissement étant normalisées, ces derniers ne peuvent pas non plus être à l'origine de l'insuffisance constatée.

Restent les prélèvements obligatoires. Les entreprises françaises sont largement plus imposées que TOUTES leurs concurrentes étrangères. Elles supportent un taux de prélèvement obligatoire de 17,9 % alors qu'il est de 10,9 % en Allemagne et de 9,2 % au Royaume-Uni (12). Cette réalité est d'autant plus préoccupante que le poids des prélèvements obligatoires pèse plus lourdement sur les PME-ETI que sur les grandes entreprises.

Le Conseil des prélèvements obligatoire a, en effet, constaté que les PME-ETI françaises acquittaient proportionnellement jusqu'à 3,7 fois plus d'impôt sur les sociétés que les grandes entreprises. En effet, alors que l'impôt sur les sociétés est de 33,33 % pour toutes les entreprises et de 15 % sur les plus petites, les grandes entreprises cotées ne supportent qu'un impôt représentant 8 % de leurs profits, alors que les PME et les ETI versent un impôt allant jusqu'à 30 % de leur bénéfice (13). Cette pénalisation fiscale des PME et des ETI non cotées se poursuit au niveau de leur restructuration (I) et de leur transmission (II).

I - Les mesures fiscales discriminatoires pénalisant la restructuration des PME-ETI non cotées

Les PME et les ETI ont régulièrement besoin de se restructurer pour s'adapter à l'évolution de leur marché.

Les dispositions de l'article 219 I-a quinquies du CGI (N° Lexbase : L1295IRE) exonéraient, jusqu'à présent, les plus-values de cession des titres de participation détenus depuis au moins deux ans, sous réserve de la taxation au taux normal de l'IS d'une quote-part de frais et charges de 5 %. Cette imposition a été portée à 10 % à compter du 1er janvier 2011. L'immense majorité des PME et ETI détient directement les titres de leurs filiales. Elle n'a le plus souvent ni le temps, ni les ressources humaines et financières lui permettant de détenir ses participations par l'intermédiaire d'une holding située dans un pays étranger qui exonère ces plus-values. En effet, cette exonération est aujourd'hui très largement répandue, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Union européenne. De plus, de nombreuses conventions fiscales font obstacle à l'application de l'article 244 bis B du CGI (N° Lexbase : L3260IGT), qui autorise la France, sous réserve des conventions internationales, à taxer les plus-values de cession des participations dépassant 25 % réalisées par des personnes physiques ou morales qui résident hors de France. Les PME et les ETI supporteront donc encore une fois seules l'essentiel du poids de l'accroissement de cet impôt, et ce même si elles ont prévu de réinvestir le produit de la cession dans leur activité.

Cette pénalisation fiscale, ciblée sur les PME et les ETI, est encore aggravée par l'introduction d'une "exit tax" applicable aux transferts de domicile fiscal intervenus à compter du 3 mars 2011 (14). Cette mesure risque de se révéler particulièrement handicapante pour les PME et les ETI dans lesquelles les dirigeants sont le plus souvent les principaux actionnaires. En effet l'exit tax prévoit l'imposition immédiate des plus-values latentes sur les participations d'au moins 1 % dans les bénéfices sociaux d'une société, à l'exception des Sicav, ou dont la valeur excède 1,3 million d'euros. Cette imposition immédiate peut intervenir alors même qu'aucune cession n'est intervenue et que le propriétaire des titres est, par conséquent, dans l'impossibilité financière d'acquitter cette imposition. Sauf à obtenir un sursis de paiement, l'exit tax équivaut donc à interdire aux actionnaires de PME ou d'ETI de déménager hors de France. Certes, le sursis de paiement est prévu. Il est automatique pour l'Union européenne et pour certains pays de l'Espace économique européen. Il peut être obtenu sur demande pour les autres pays. Le sursis est toutefois subordonné à la constitution de garanties avant le départ de France. Comme il est à peu près certain que quasiment aucun dirigeant de PME ou d'ETI ne sera en mesure de constituer des garanties à hauteur de la plus-value latente existant sur les titres de leur société, on peut raisonnablement anticiper le fait que les dirigeants de PME et d'ETI qui souhaiteraient s'installer au Brésil, en Inde, en Australie, en Chine, à Singapour, aux Emirats au Canada ou aux USA, pour ne citer que ces pays, pour y développer leurs affaires verra son projet très singulièrement compliqué, voire rendu impossible.

La complexité ubuesque de cette disposition (15), la lourdeur des obligations déclaratives, ainsi que la sévérité des sanctions financières, voire pénales, attachées à tout manquement devraient suffire à décourager les quelques téméraires qui seraient, malgré tout, tentés par une implication personnelle dans le développement de leur société à l'étranger. Ce n'est pas l'opacité entourant la possibilité d'obtenir une dispense de garanties lorsque le contribuable justifie de raisons professionnelles, qui suffira à édulcorer les effets totalement négatifs de cette mesure sur la mobilité internationale, que le législateur essaye de favoriser par ailleurs.

Après avoir dissuadé de façon singulièrement efficace nos dirigeants de PME et d'ETI de quitter le territoire français, il ne restera plus qu'à s'interroger longuement sur les solutions permettant de stopper la diminution continue de la part de la France dans les échanges mondiaux (16).

On ne peut s'empêcher de rappeler que l'exit tax sera, en revanche, sans effet sur les plus grands groupes cotés, dont la direction est distincte de l'actionnariat. Ceux-ci peuvent, en effet, à tout moment, se soustraire à tous ces obstacles inutiles en transférant leur siège dans un autre Etat membre de l'Union européenne en franchise d'impôt. Le management, à la différence des dirigeants de PME-ETI, pourra suivre sans aucune difficulté.

II - Les mesures fiscales discriminatoires pénalisant la transmission des PME-ETI non cotées

C'est un truisme que de dire qu'une transmission d'entreprise se prépare si on souhaite qu'elle soit réussie. Inversement, si elle est mal préparée, elle peut compromettre sa pérennité. Pour la France, la bonne transmission de ses PME-ETI constitue un défit majeur. En effet, 27 % de ces entreprises seront transmises d'ici 2020 (17). Elles représentent plus d'un million d'emplois. Pour les PME et les ETI, la question de la transmission se présente différemment selon qu'il s'agit de la première transmission par le fondateur (A) ou d'une transmission par les enfants ou les petits-enfants du fondateur (B).

A - Première transmission par le fondateur

La plupart des fondateurs recherchent d'abord leur(s) successeur(s) au sein de leur cercle familial. A défaut, ils se tournent vers leurs salariés ou un repreneur externe.

A ce stade, la transmission concerne, en général, l'ensemble des actions d'une entreprise qui n'a que rarement développé plusieurs activités autonomes. Il n'est donc pas nécessaire de procéder à la séparation préalable des activités (18).

Fiscalement et juridiquement, le parcours est en général assez classique. L'actionnaire apporte ses actions à une société holding de contrôle qu'il crée à cette occasion et qu'il soumet à l'impôt sur les sociétés. En contrepartie de son apport, il reçoit des actions de la holding nouvellement créée. L'imposition de la plus-value dégagée à l'occasion de cet échange bénéficie automatiquement d'un sursis d'imposition qui durera jusqu'à la cession des actions de la nouvelle holding (19). L'interposition de la holding de contrôle entre l'actionnaire et sa société se fait donc sans frottement fiscal.

Cette opération est très utile car elle permet de conserver une unité de direction de la société transmise malgré la division ultérieure de son capital lors de la transmission. En effet, le dirigeant pourra confier la direction de la société transmise au(x) successeur(s) qu'il choisira, tout en divisant son capital entre ses donataires, héritiers et/ou ses légataires.

La seconde étape consiste à assurer la pérennité du contrôle familiale sur la société transmise. Celle-ci est, en principe, assurée par la signature d'un engagement collectif de conservation des actions de la holding entre le fondateur et les donataires/héritiers continuateurs. Cet engagement permettra, le moment venu, aux donataires/héritiers de bénéficier d'un abattement de 75 % sur la valeur des titres transmis pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit (20).

Le bénéfice de cet engagement est essentiel. A défaut, le poids des droits de succession serait tel, qu'il imposerait soit la revente de la société transmise, soit un endettement très lourd mettant gravement en péril sa pérennité.

De façon surprenante, ce mécanisme est, sans logique apparente, plus sélectif pour les sociétés non cotées alors même qu'elles représentent plus de 99,99 % des PME et des ETI (21).

En effet, une des conditions (22) de validité de cet engagement de conservation, encore appelé "pacte Dutreil", prévoit que les signataires s'engagent collectivement à conserver ces titres pour une durée minimale de deux ans à compter de l'enregistrement de l'acte constatant la succession ou la donation (23). Or, cet engagement doit porter sur au moins 34 % des titres (24) pour les sociétés non cotées, alors qu'il est limité à 20 % pour les sociétés cotées.

Dans la mesure où, sur les 32 000 PME et ETI françaises, seules 133 étaient cotées en 2010, on ne peut que s'interroger sur la pertinence de cette distinction. Il semble en effet paradoxal de favoriser les participations familiales dans les entreprises cotées qui portent pourtant sur des sommes bien plus importantes, pour traiter plus sévèrement les PME-ETI familiales qui ont ouvert leur capital au cercle familial. Une extension du seuil de 20 % à l'ensemble des entreprises semblerait plus en harmonie avec l'objectif de faciliter la transmission des PME-ETI.

B - Transmissions effectuées par les enfants ou les petits-enfants du fondateur

Les transmissions effectuées par les enfants ou les petits enfants du fondateur sont plus délicates. Bien souvent, les successeurs ont continué à développer la PME qui est souvent devenue une ETI ou est en passe de le devenir. Plusieurs membres du groupe familial participent à sa gestion. Plusieurs métiers différents ont souvent été développés et sont hébergés au sein de différentes sociétés filiales. Les différentes activités du groupe fonctionnent avec une certaine autonomie de gestion. La transmission à la génération suivante est donc plus délicate car les stratégies des différents membres du cercle familial élargi peuvent diverger de façon très sensible.

S'il n'existe pas de successeurs, la solution est généralement simple : la société est vendue à un tiers. S'il existe plusieurs successeurs potentiels au sein du groupe familial, mais que faute d'une majorité (25), il est impossible de les départager, la pérennité des activités du groupe impose une répartition des filiales du groupe entre les différents successeurs.

Il convient de souligner que cette problématique ne peut exister qu'au sein des sociétés dans lesquelles la direction opérationnelle est assurée personnellement par les actionnaires majoritaires. Cette situation est la règle dans les PME et les ETI non cotées qui représentent, comme on l'a vu, 99,99 % des sociétés de cette catégorie. Elle est, en revanche, marginale dans les sociétés cotées, pour lesquelles le pouvoir opérationnel et l'actionnariat sont souvent séparés. En effet, la dispersion de l'actionnariat au-delà du groupe familial permettra, en principe, d'aboutir assez facilement à la désignation d'un dirigeant unique. Le risque de blocage est donc évité.

La pérennité des PME et ETI françaises non cotées d'une certaine importance passe donc très largement par un mécanisme leur permettant de séparer leurs activités entre les successeurs à un coût fiscal qui ne compromette pas leur pérennité.

Cette question est d'importance car elle concerne une grande partie des 10 000 entreprises qui seront transmises d'ici la fin de la décennie.

Au premier abord, on pourrait penser que le législateur a anticipé cette question en exonérant les plus-values de cession des titres de participation, sous réserve de la taxation d'une quote-part de frais et charges de 10 % (26).

La séparation serait, dès lors, relativement simple. Chacun des successeurs intéressés par la reprise d'une ou plusieurs filiales de la société transmise constituerait une holding de reprise et lui apporterait les titres qu'il détient dans la société transmise. Comme nous l'avons vu ci-dessus, cette opération se ferait en franchise d'impôt.

La/les holding(s) de reprise s'endetterai(en)t alors auprès d'une banque et rachèterai(en)t une partie des filiales transmises. La société d'origine percevrait le prix de vente et paierait l'impôt correspondant. Celui-ci s'élèverait à 10 % de la plus-value réalisée imposée au taux de 33,33 %, soit donc un impôt égal à 3,33 % de la plus-value. Le prix de vente, diminué de cet impôt, serait alors reversé sous forme de dividende aux holdings de reprise, à concurrence de leur participation dans la société d'origine. En application du régime mère-fille, la/les holding(s) acquitterai(en)t un impôt de 33,33 % sur 5 % du montant des dividendes reçus, soit donc un impôt de 1,67 % (27). L'ensemble de la transmission des sociétés opérationnelles générerait un frottement fiscal de 5 % (3,33 % + 1,67 %) du montant de la plus-value de cession. Le cas échéant, les sociétés immobilières supporteraient une imposition au taux de droit commun soit 33,33 %. Le dividende reçu permettrait à la/les holding(s) de rachat de rembourser immédiatement la plus grande partie de l'emprunt contracté. La capacité d'autofinancement des filiales transmises ne serait pas durablement anéantie.

Cette solution serait doublement bénéficiaire pour l'Etat. Il bénéficierait d'une rentrée fiscale non négligeable, tout en permettant une transmission viable de ses PME-ETI. En effet, ces dernières, malgré un taux de prélèvement déjà considérable (28), conserveraient leurs chances de poursuivre leur développement sous la conduite des successeurs.

Cette solution semble malheureusement écartée par l'administration qui semble y voir une scission partage déguisée susceptible de relever de l'abus de droit. Cette opération serait alors taxée comme une dissolution de société (29) et encourrait une pénalité de 80 % (30). Sans même envisager cette pénalité, il est inutile de souligner qu'aucune entreprise, aussi solide soit-elle, n'est en mesure d'acquitter et de survivre au paiement d'une telle somme d'impôt.

Cette position est d'autant plus surprenante que cette même opération, réalisée avec un investisseur tiers, ne serait pas remise en cause.

Si cette position était confirmée, il n'existerait alors en droit français aucune solution, compatible avec le rythme des affaires, qui permette à une PME-ETI non cotée de transmettre ses activités à plusieurs successeurs historiques.

Nos amis allemands que nous admirons pour le nombre impressionnant de PME-ETI florissantes qu'ils possèdent, ont largement anticipé ces difficultés. Outre que leurs entreprises supportent un taux de prélèvement obligatoire presque moitié moindre à celui de leurs concurrentes françaises, leur transmission est grandement facilitée.

En effet en Allemagne, et dans l'hypothèse étudiée ci-dessus, la société d'origine pourra apporter les actions d'une ou plusieurs filiales à la holding de reprise constituée par le successeur. En contrepartie, le successeur remettra ses actions dans la société d'origine. Cette opération se fera en franchise totale d'impôt si le successeur détient ses actions dans la société d'origine depuis au moins 5 ans et s'il s'engage à ne pas revendre les actions de la holding de rachat, ni celles des filiales reprises, pendant 5 ans. Il est, en outre, nécessaire que les filiales apportées aient été constituées depuis plus de 3 ans. Si ces conditions n'étaient pas respectées et que l'opération devenait taxable, elle serait taxée comme la cession de titres de participation, soit donc une taxation à l'impôt sur les sociétés de 5 % de la plus-value réalisée. Somme toute un risque acceptable en cas d'erreur d'appréciation (31).

Alors qu'il existe un consensus sur la nécessité de favoriser le développement et la transmission des PME et des ETI, le pragmatisme devrait être de mise dans l'application des règles fiscales. Bloquer fiscalement l'adaptation et la transmission des PME-ETI est une stratégie doublement perdante. Dans l'immédiat l'Etat se prive d'une ressource fiscale. En effet, le choix n'est pas entre un impôt élevé ou un impôt plus réduit, le choix est entre un impôt réduit et pas d'impôt du tout, dès lors que le contribuable est dans l'impossibilité de s'acquitter de l'impôt élevé demandé. A terme, l'Etat s'expose à un accroissement de ses dépenses en devant prendre en charge les conséquences sociales liées à la disparition de l'entreprise qu'il a empêché de s'adapter et dont il a asséché la capacité d'autofinancement. Comment dit-on ? "Tuer la poule aux oeufs d'or".


(1) Décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008, relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique, art. 3. (N° Lexbase : L3154ICS). Les définitions retenues par le décret sont similaires à celle prévues par l'article 2 de la recommandation de la Commission des Communautés européennes du 6 mai 2003 (2003/361/CE), concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises.
(2) Décret précité, art. 3.
(3) Entreprises selon le nombre de salariés et l'activité, (étude de l'INSEE).
(4) Recherche sur la base de données "Diane" (3 109 entreprises répondent aux 3 critères d'effectif, de chiffre d'affaires et de total de bilan, 3 164 entreprises répondent aux critères d'effectif et de chiffre d'affaires, 3 164 entreprises répondent aux critères d'effectif et de chiffre d'affaires et 4 831 entreprises répondent au critère d'effectif et de bilan). A titre d'information, 6 302 répondent aux critères de bilan et de chiffre d'affaires et 6 685 répondent au critère de chiffre d'affaires.
(5) Le marché boursier dédié aux PME-ETI, (étude NYSE Alternext du 17 mai 2010).
(6) Enquête Eurostat 2003.
(7) Pourquoi nos PME ne grandissent pas, Anne Dumas, Juillet 2006, Institut Montaigne.
(8) Etude de la Fondation iFRAP - Fondation reconnue d'utilité publique qui analyse l'efficacité des politiques publiques et des administrations.
(9) Rapport "Cotis" p. 74, Partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France, INSEE.
(10) Valeur ajoutée = Ventes de marchandises et de services
- Coût d'achat des marchandises vendues
+/- Production immobilisée ou stockée
+ Marge commerciale
- Consommations de l'exercice en provenance de tiers
(11) A titre de comparaison, les PME et ETI reversent entre 73 % et 100 % de la valeur ajoutée produite sous forme de salaires (rapport "Cotis" précité).
(12) Chambre de commerce et d'industries de Paris, Taux de prélèvements obligatoires des entreprises, baromètre-indicateur- 2011
(13) Rapport du Conseil des prélèvement obligatoires.
(14) CGI, art. 167 bis (N° Lexbase : L9110IQH).
(15) L'article 167 bis du CGI comporte 3 162 mots !!!
(16) Performances à l'exportation de la France et de l'Allemagne, étude du Conseil d'analyse économique, p. 20.
(17) Conseil Economique et Social, Oséo-BDPME.
(18) La séparation préalable des activités sera évoquée dans le paragraphe consacré aux transmissions effectuées par les enfants ou les petits-enfants du fondateur.
(19) CGI, art. 150-0 B (N° Lexbase : L2312HL9).
(20) CGI, art. 787 B (N° Lexbase : L8959IQU).
(21) En 2010, la France comptait 27 093 PME de plus de 50 salariés et 4 831 ETI, dont seules 133 étaient cotées sur Alternext, soit plus de 99,99 % non cotées.
(22) D'autres conditions s'appliquent :
- le défunt ou le donataire, seul ou avec son conjoint ou partenaire de PACS, doit détenir les titres nécessaires à la conclusion de l'engagement depuis au moins 2 ans ;
- le défunt, le donataire, son conjoint ou son partenaire de PACS exerce dans la société depuis plus de 2 ans son activité principale ou, lorsque la société est soumise à l'IS, l'une des fonctions de direction énumérées à l'article 885 O bis, 1° du CGI (N° Lexbase : L8986IQU) ;
- un des signataires de l'engagement collectif doit exercer dans la société une des fonctions visée ci-dessus pendant la durée de l'engagement collectif et pendant les 3 années qui suivent la transmission.
(23) Pour les actes authentiques, on retient la date de l'acte.
(24) L'engagement est limité à 20 % des titres pour les sociétés cotées. Il convient toutefois de rappeler que sur les 32 000 PME et ETI françaises, seules 133 sont cotées. On ne peut que s'interroger sur la pertinence de cette distinction pour ce type d'entreprise. Dans la mesure où le seuil de 20 % ne concerne que les participations dans les grandes entreprises, l'extension du seuil de 20 % à l'ensemble des entreprises semblerait équitable et marquerait un engagement autre que verbal en faveur des PME et des ETI.
(25) Par exemple, deux actionnaires à 50/50.
(26) CGI, art. 219 I-a quinquies.
(27) CGI, art. 145 (N° Lexbase : L3391IGP) et 216 (N° Lexbase : L0666IPD).
(28) Comme déjà indiqué plus haut, les entreprises françaises supportent un taux de prélèvement obligatoire de 17,9 % alors qu'il est de 10,9 % en Allemagne et de 9,2 % au Royaume-Uni.
(29) CGI, art. 201 (N° Lexbase : L1704HNG) et 221 (N° Lexbase : L5208IMT), sur l'imposition immédiate des bénéfices et plus-values non encore taxés et l'imposition du boni de liquidation.
(30) CGI, art. 1729, b (N° Lexbase : L4733ICB).
(31) Les analyses concernant la fiscalité allemande ont été effectuées par Monsieur Christian Gerow, Steuerberater, Associé du cabinet EGSZ, Membre fondateur du réseau Law & Number.

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