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par Olivier Dubos, Professeur de droit public à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
le 21 Octobre 2011
Helaba est l'une des plus grandes banques allemandes et a le statut d'organisme de droit public. Elle a bénéficié d'un apport d'1,264 milliard d'euros provenant d'un fond comprenant les créances du Land de Hessen issues des crédits à faible taux accordés pour la promotion de la construction de logements sociaux. Cet apport a été fait sous la forme d'un apport tacite en capital. La Commission a estimé qu'une partie de cet apport tacite était constitutive d'une aide d'Etat et devait faire l'objet d'une restitution. En revanche, elle a estimé que l'autre partie n'était pas constitutive d'une aide. C'est cet aspect de la décision qui était contesté devant le Tribunal de l'Union européenne. L'argument principal reposait sur l'utilisation, par la Commission, du critère de l'investisseur privé. Selon ce critère, une mesure étatique constitue une aide si l'entreprise bénéficiaire reçoit un avantage économique qu'elle n'aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché. Dans la mesure où il s'agit d'une appréciation particulièrement complexe, le juge ne procède qu'à un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation. Dans l'affaire en cause, deux aspects ont été particulièrement discutés devant le Tribunal : le modèle progressif adopté par l'apport litigieux (A), et sa nature même (B).
A - Le modèle progressif
Une partie de l'apport litigieux était à la disposition d'Helaba pour garantir ses activités commerciales alors que l'autre partie ne l'était pas. Pour cette dernière, la Commission avait conclu à l'existence d'une aide dans la mesure où elle ne faisait pas l'objet d'une rémunération. Pour la partie à disposition d'Helaba, avait été mis en place un modèle progressif qui permettait de verser la rémunération (1,4 %) non pas sur la totalité de l'apport, mais sur des tranches prévues à l'avance. En réalité, il avait été stipulé dans le contrat que ces différentes tranches n'étaient pas toutes accessibles à la banque pour le développement de ces activités commerciales. Pour le Tribunal, il était, dès lors, logique que le Land ne soit rémunéré que pour les tranches effectivement consacrées au développement des activités commerciales. Les autres tranches ne doivent être rémunérées qu'à un taux plus faible pris en compte par la Commission pour calculer le montant de l'aide versée par le Land, et devant donc faire l'objet d'une action en restitution.
B - La nature de l'apport tacite
Le Land avait procédé à un apport tacite en capital. Cet apport devait servir de fonds propres de garantie pour la banque Helaba. Ce type de fonds constitue un mécanisme hybride car il revêt à la fois les caractéristiques d'un titre de participation et d'un titre de créance. Il était convenu qu'Helaba verserait en contrepartie une rémunération de 1,4 % au Land. Pour que ce montage financier puisse bien constituer un apport tacite en capital et non pas une aide, le Tribunal s'assure d'abord que, dans l'hypothèse d'une faillite, ce capital sera remboursé avant le capital social lui-même. Se fiant à des rapports d'expertises fournis par République fédérale d'Allemagne, le Tribunal conclut que tel est bien le cas.
Il a, ensuite, examiné le profil de rentabilité de l'apport en capital du Land à Helaba. Il était, en effet, convenu, dans le contrat, une rémunération fixe, du moins aussi longtemps que la banque ne subissait pas de pertes. En revanche, lorsqu'il y a apport en capital social et non pas apport tacite, la rémunération varie par nature en fonction des bénéfices réalisés. Le Tribunal considère que n'est pas pertinent le fait que le versement de la rémunération, même si celle-ci est fixe, dépende de ce que la banque n'enregistre pas un déficit annuel et de ce que ledit versement ne donne pas lieu à un tel déficit. Cet élément est commun à tous les apports tacites reconnus en tant que fonds propres de base, dans la mesure où une telle condition est fixée par la loi allemande qui régit les apports tacites.
Il convenait, par ailleurs, d'examiner le volume de l'apport du Land au regard des fonds propres d'Helaba. A partir du moment où est admis le modèle progressif, il apparaissait que devait être seulement prise en compte la part de l'apport consacrée à l'expansion des activités commerciales. Dès lors, il ne fallait pas considérer la totalité de l'apport, mais simplement les différentes tranches mobilisées pour le développement des activités commerciales. Etait, en outre, contestée l'importance de l'apport litigieux au regard du capital social. Cet apport représentait, en effet, 40 % du capital d'Helaba. Ce point était important car, selon les critères prudentiels traditionnels, un apport tacite ne peut dépasser 15 % du capital social. Toutefois, le Tribunal estime que les banques publiques des Länders n'ont pas le même profil de risque que les banques privées. Dès lors, il ne lui paraît pas inconcevable qu'un apport tacite puisse représenter 40 % du capital social de la banque.
Il convenait, enfin, de tenir compte de la situation du marché au moment de l'apport litigieux. Le Tribunal rappelle, tout d'abord, que la comparaison entre le comportement des investisseurs publics et celui des investisseurs privés doit être établie par rapport à l'attitude qu'aurait eu, lors de l'opération en cause, un investisseur privé, eu égard aux informations disponibles et aux évolutions prévisibles à ce moment. Dès lors, la Commission n'était pas tenue de se prononcer uniquement au regard des conditions du marché au moment du versement de l'apport en cause, mais elle pouvait, également, se fonder sur certaines évolutions qui pouvaient raisonnablement être envisagées par les opérateurs économiques.
Selon l'article 108, paragraphe 3, TUE, "la Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché intérieur, aux termes de l'article 107, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que cette procédure ait abouti à une décision finale". Le Tribunal rappelle fort logiquement que "la Commission ne peut, par conséquent, s'en tenir à la phase préliminaire de l'article 88, paragraphe 3, CE pour prendre une décision favorable à une mesure étatique que si elle est à même d'acquérir la conviction, au terme d'un premier examen, que cette mesure ? soit ne constitue pas une aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, [devenu article 107 TUE] soit, si elle est qualifiée d'aide, est compatible avec le marché commun" (point n° 125). L'ouverture de la procédure de l'article 108, paragraphe 2, TUE (ex-article 88 CE) permet, en effet, aux différents parties intéressées (Etat, entreprise bénéficiaire, entreprises concurrentes) de présenter leurs observations.
Selon une jurisprudence classique de la Cour, la Commission doit donc ouvrir cette procédure dès qu'elle éprouve "des difficultés sérieuses" pour apprécier si la mesure étatique est compatible avec le marché commun (CJCE, 20 mars 1984, aff. C-84/82, République fédérale d'Allemagne c/ Commission des Communautés européennes N° Lexbase : A8187AUR, Rec., p. 1451). La Commission se trouve donc dans une situation de compétence liée. Toutefois, par pragmatisme, il est admis que, dès la phase de l'article 108, paragraphe 3, TUE, la Commission puisse engager un dialogue non seulement avec l'Etat qui a procédé à la notification, mais, également, avec les entreprises concurrentes.
Evidemment, l'incertitude de cette solution résulte de l'interprétation de la notion de "difficultés sérieuses". Le Tribunal rappelle que "l'existence de telles difficultés doit être recherchée tant dans les circonstances d'adoption de l'acte attaqué que dans son contenu, d'une manière objective, en mettant en rapport les motifs de la décision avec les éléments dont la Commission disposait lorsqu'elle s'est prononcée sur la compatibilité des aides litigieuses avec le marché commun" (point n° 127). Il appartient au requérant de rapporter la preuve de l'existence de difficultés sérieuses. En l'espèce, le requérant arguait simplement que la Commission avait appliqué de manière erronée le critère de l'investisseur privé. Or, le Tribunal rappelle que "l'examen de l'existence de difficultés sérieuses ne vise pas à savoir si la Commission a correctement appliqué l'article 87 CE, mais à établir si elle disposait, au jour où elle a adopté la décision attaquée, d'informations suffisamment complètes pour apprécier la compatibilité de la mesure litigieuse avec le marché commun" (point n° 129). Dès lors, la Commission n'a pas commis d'illégalité en refusant d'ouvrir la procédure de l'article 108, paragraphe 2, TUE.
Le soutien financier de la République française au Centre d'exportation du livre français (CELF) a fait l'objet de nombreuses procédures devant les juridictions administratives françaises et devant les juridictions de l'Union européenne. Le CELF est une société anonyme coopérative qui est commissionnaire à l'exportation. Elle exporte, ainsi, des ouvrages français à l'étranger, et est chargée d'une mission de promotion de la culture française. Elle a bénéficié entre 1980 et 2002 de subventions d'exploitation versées par l'Etat. La Cour de justice s'est prononcée sur l'interdiction, pour le juge national, de surseoir à statuer dans l'attente de la décision définitive de la Commission (B), et la notion de circonstance exceptionnelle permettant la limitation de l'obligation de récupération (C). Pour bien comprendre ces deux aspects, il convient, au préalable, de rappeler les nombreux antécédents procéduraux de cette affaire (A).
A - Les procédures devant les juridictions communautaires et nationales
Un concurrent du CELF a déposé plainte devant la Commission qui a estimé l'aide compatible avec le marché commun et n'a pas soulevé d'objection. Cette décision a été annulée par le TPICE, lequel a estimé que la Commission aurait dû engager la procédure contradictoire de l'article 108, paragraphe 2, TUE (TPICE, 18 septembre 1995, aff. T-49/93, Société internationale de diffusion et d'édition (SIDE) c/ Commission des Communautés européennes N° Lexbase : A3133AWX). La Commission a, par la suite, déclaré l'aide illégale car elle n'avait pas fait l'objet de la notification prévue à l'article 108, paragraphe 3 TUE, mais compatible avec le marché commun. Cette décision a, également, été annulée par le Tribunal au motif que la Commission avait commis une erreur manifeste d'appréciation dans la définition du marché pertinent et ne pouvait donc déclarer l'aide compatible. Une troisième fois, la Commission a déclaré l'aide compatible. Cette décision a aussi été annulée par le Tribunal. Le 8 avril 2009, la Commission a alors repris la procédure afin de permettre à toutes les parties intéressées de présenter leurs observations en vue d'une décision finale.
Le Conseil d'Etat a d'abord été saisi d'un pourvoi contre un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 4ème ch., 5 octobre 2004, n° 01PA02717, Ministre de la Culture N° Lexbase : A9745ESQ) qui enjoignait au CELF de rembourser à l'Etat les aides dont il avait bénéficié. Le Conseil d'Etat a décidé de saisir la Cour de justice d'une question préjudicielle. Cette dernière a estimé que "l'article 88, paragraphe 3, dernière phrase, CE doit être interprété en ce sens que le juge national n'est pas tenu d'ordonner la récupération d'une aide mise à exécution en méconnaissance de cette disposition, lorsque la Commission [...] a adopté une décision finale constatant la compatibilité de ladite aide avec le marché commun au sens de l'article 87 CE. En application du droit communautaire, il est tenu d'ordonner au bénéficiaire de l'aide le paiement d'intérêts au titre de la période d'illégalité. Dans le cadre de son droit national, il peut, le cas échéant, ordonner, en outre, la récupération de l'aide illégale, sans préjudice du droit de l'Etat membre de mettre celle ci à nouveau à exécution, ultérieurement. Il peut, également, être amené à accueillir des demandes d'indemnisation de dommages causés en raison du caractère illégal de l'aide". Elle a, par ailleurs, ajouté que "dans une situation procédurale telle que celle du litige au principal, l'obligation, résultant de l'article 88, paragraphe 3, dernière phrase, CE, de remédier aux effets de l'illégalité d'une aide s'étend, également, aux fins du calcul des sommes à acquitter par le bénéficiaire, et sauf circonstances exceptionnelles, à la période écoulée entre une décision de la Commission [...] constatant la compatibilité de cette aide avec le marché commun et l'annulation de ladite décision par le juge communautaire" (CJCE, 12 février 2008, aff. C-199/06, Centre d'exportation du livre français (CELF) et Ministre de la Culture et de la Communication c/ Société internationale de diffusion et d'édition (SIDE) N° Lexbase : A7461D44, Rec., p. I-469).
Dans son arrêt du 19 décembre 2008 (CE 9° et 10° s-s-r., 19 décembre 2008, n° 274923, Centre d'exportation du livre français N° Lexbase : A8789EB7), le Conseil d'Etat a enjoint au ministre de la Culture de procéder au recouvrement d'intérêts sur les aides pour la période comprise entre le début du versement de l'aide, en 1980, et sa décision procédant au renvoi préjudiciel à la Cour de justice. La même obligation est imposée au ministre pour la période débutant à la date de la décision de renvoi et la date à laquelle l'aide aura, de manière définitive, était considérée compatible, ou à la date à laquelle il aura été procédé à la restitution de l'aide incompatible.
Pour ce qui concerne le remboursement de l'aide elle-même, le Conseil d'Etat a décidé de poser une nouvelle question préjudicielle à la Cour de justice en raison de la dernière décision d'annulation du Tribunal intervenue postérieurement à l'arrêt préjudiciel de la Cour. Il souhaitait savoir si le juge national avait le pouvoir de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Commission se soit prononcée sur la compatibilité de l'aide. Il voulait, par ailleurs, savoir si, dans l'hypothèse où la Commission a déclaré à trois reprises l'aide compatible avec le marché commun, avant que ces décisions soient annulées par le Tribunal, une telle situation est susceptible de constituer une circonstance exceptionnelle pouvant conduire le juge national à limiter l'obligation de récupération de l'aide.
B - L'interdiction pour le juge national de surseoir à statuer dans l'attente de la décision définitive de la Commission
De manière tout à fait cohérente, la Cour de justice rappelle que, dans l'hypothèse où une décision de la Commission a été annulée par le juge communautaire, cette décision est supposée n'avoir jamais existé. Il s'agit d'une conséquence du caractère rétroactif de l'arrêt. Dès lors, la juridiction nationale se trouve, également, dans la même situation que si elle était saisie d'une demande de restitution dans l'hypothèse où l'aide n'aurait pas été notifiée. En effet, dans une telle situation, il n'existe aucune décision de compatibilité de l'aide de la Commission.
La Cour de justice rappelle de manière classique "que l'article 88, paragraphe 3, CE confie aux juridictions nationales la mission de sauvegarder, jusqu'à la décision finale de la Commission, les droits des justiciables face à une méconnaissance éventuelle, par les autorités étatiques, de l'interdiction édictée par cette disposition" (point n° 26). L'effet direct ainsi reconnu à cette disposition rend la mission du juge national relativement complexe dans la mesure où seule la Commission a, par ailleurs, le pouvoir de déclarer l'aide compatible avec le marché commun. Dès lors, la Cour de justice a jugé, dans l'arrêt "SFEI" (CJCE, 11 juillet 1996, aff . C-39/94, Syndicat français de l'Express international et autres c/ La Poste N° Lexbase : A4973AW4, Rec., p. I-3547), qu'en dépit de l'ouverture d'une procédure devant la Commission, les juridictions nationales devaient protéger les droits des justiciables (des entreprises concurrentes au bénéficiaire de l'aide) découlant de l'obligation de notification de l'article 108 TUE, paragraphe 3. Les juridictions nationales ont, par conséquent, l'obligation de prononcer les mesures propres à remédier à l'illégalité de la mise à exécution des aides, afin que le bénéficiaire ne puisse les percevoir jusqu'à la décision de la Commission.
La Cour en déduit alors logiquement qu'"une décision de sursis à statuer produirait, de facto, le même résultat qu'une décision de rejet de la demande de mesures de sauvegarde. Elle aboutirait, en effet, à ce qu'aucune décision sur le bien-fondé de cette demande ne soit prise avant la décision de la Commission. Elle reviendrait à maintenir le bénéfice d'une aide pendant la période d'interdiction de mise à exécution, ce qui serait incompatible avec l'objet même de l'article 88, paragraphe 3, CE [devenu article 108 TUE] et priverait cette disposition de son effet utile" (point n° 31). Cela conduirait à remettre en cause l'effectivité des procédures nationales.
Dès lors, il appartient à la juridiction nationale de prononcer des mesures de sauvegarde sous trois conditions : l'on doit être en présence d'une aide, que celle-ci soit versée ou ait déjà été versée, et il ne doit pas exister de circonstances exceptionnelles rendant "inappropriées" (sic !) cette aide. La Cour précise que les mesures de sauvegarde consistent à ordonner la restitution de l'aide ou, tout le moins, à ordonner le versement des fonds sur un compte bloqué, afin que le bénéficiaire n'en conserve pas la disposition. Cette dernière possibilité a été suggérée par une communication de la Commission relative à l'application des règles en matière d'aides d'Etat par les juridictions nationales. La Cour précise, en outre, qu'une simple condamnation au paiement d'intérêts sur des sommes qui demeureraient dans les comptes de l'entreprise ne respecterait pas l'obligation de "standstill" édictée à l'article 88, paragraphe 3, CE. Elle estime, de manière fort cohérente, que l'entreprise n'aurait pas nécessairement pu obtenir sur le marché bancaire un prêt d'un égal montant aux aides versées.
Il restait donc à la Cour à se prononcer sur la notion de circonstances exceptionnelles.
C - La notion de circonstance exceptionnelle permettant la limitation de l'obligation de récupération
La Cour de justice avait jugé que "la possibilité, pour le bénéficiaire d'une aide illégale, d'invoquer des circonstances exceptionnelles, qui ont légitimement pu fonder sa confiance dans le caractère régulier de cette aide, et de s'opposer, par conséquent, à son remboursement, ne saurait certes être exclue" (CJCE, 20 septembre 1990, aff. C-5/89, Commission des Communautés européennes c/ République fédérale d'Allemagne N° Lexbase : A9405AUU, Rec., p. I-3437, spéc. n° 16). La Cour visait, ici, l'hypothèse dans laquelle l'entreprise bénéficiaire de l'aide pouvait légitimement penser que l'aide avait fait l'objet d'une notification par l'Etat. Dans son premier arrêt "CELF" (CJCE, 12 février 2008, aff. C-199/06, précité), la Cour avait souligné le caractère spécifique de l'affaire dans laquelle trois décisions de la Commission, déclarant la compatibilité de l'aide, avaient déjà été adoptées, mais dont deux avaient été annulées. Le contexte des deux affaires était donc différent.
La Cour avait alors souligné, et elle le rappelle de nouveau, "qu'une confiance légitime du bénéficiaire de l'aide ne peut naître d'une décision positive de la Commission, d'une part, lorsque cette décision a été contestée dans les délais de recours contentieux puis annulée par le juge communautaire, ni, d'autre part, tant que le délai de recours n'est pas expiré ou, en cas de recours, tant que le juge communautaire ne s'est pas définitivement prononcé" (point n° 45). La suite de la motivation n'est guère charitable pour le Conseil d'Etat français et pour la Commission européenne. Elle laisse, en effet, entendre que, dès le premier arrêt "CELF", il était clair que l'existence d'une série de décisions positives de la Commission, ensuite annulées par le TPIUE, ne constituait pas une circonstance exceptionnelle. La survenance d'une troisième annulation n'y change rien. La Cour souligne, non sans malice, que "la succession peu courante de trois annulations traduit, a priori, la difficulté de l'affaire et, loin de faire naître une confiance légitime, apparaît plutôt de nature à accroître les doutes du bénéficiaire quant à la compatibilité de l'aide litigieuse". Il s'agit là d'une allusion à peine voilée à la complaisance de la Commission à l'égard des autorités françaises...
Olivier Dubos, Professeur de droit public à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
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