La lettre juridique n°565 du 3 avril 2014 : Éditorial

Taubira : bis repetita ?

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N1669BUD

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

le 03 Avril 2014


Les discussions furent sans doute âpres mais, finalement, à la lecture de la nouvelle convention d'assurance-chômage, signée le 22 mars 2014, elle ne pouvait vraiment pas accepter une rupture conventionnelle, même si son bilan pouvait paraître en demi-teinte.

180 jours de carence avant indemnisation : un sacré "différé d'indemnisation", qui aurait fait réfléchir plus d'un, avant de prendre ses "clics et ses clacs" et de poser ses valises... même sous les tropiques.

Et, de toute manière, la rupture conventionnelle est "has been". Pour la première fois depuis cinq ans, le nombre de ruptures n'a pas progressé en 2013, se stabilisant à moins de 320 000 sur l'année. Et, le nombre de demande d'homologation est même en léger recul, début 2014 ; point d'embellie économique, juste une pression des prélèvements sociaux de plus en plus lourde qui freine certains candidats. Alors, lorsque l'on est une icône de la modernité en matière de questions de société, lorsque l'on a été l'hardie promotrice de l'emblématique loi relative au mariage pour tous, on évite de tomber dans le piège de l'optimisation indemnitaire. Et, même si à compter du 1er juillet prochain, la malheureuse mode du licenciement pour motif économique risque bien de refaire surface, au regard de son régime imposable plus favorable, on peine à croire qu'un Etat, même en faillite, se sépare de l'un de ses "serviteurs" les plus zélés, pour un tel motif...

Voici donc Madame le Garde des Sceaux renouvelée dans ses fonctions dans le cadre du deuxième Gouvernement de la mandature.

Le premier avantage de son maintien est la stabilité de l'administration de la Justice au moment où celle-ci est décriée et où les justiciables peinent à lui accorder leur confiance. Elle connaît les dossiers en cours et, pour accélérer les réformes, ce n'est pas un mince atout.

Le deuxième avantage est qu'elle la cote... auprès de la famille juridique et judiciaire la plus peuplée : les avocats. Lors des dernières manifestations réunissant le ministre de la Justice et la profession, le Président du Conseil national des barreaux, le Président de la Conférence des Bâtonniers et les Bâtonnier et vice-Bâtonnier du barreau de Paris, les relations n'avaient pas été aussi cordiales et respectueuses, voire constructives à l'occasion des réflexions sur la Justice du XXIème siècle, depuis longtemps... D'ailleurs, cinq minutes après l'annonce sur le perron de l'Elysée, Pierre-Olivier Sur et Laurent Martinet félicitaient Christiane Taubira pour son maintien au poste de Garde des Sceaux. "Elle bénéficie de notre confiance et d'une désormais longue amitié avec le barreau de Paris. Nous savons qu'elle aura à coeur de maintenir le dialogue constructif avec les 26 500 avocats parisiens", précisaient-ils.

Enfin, sa force de travail et de conviction n'est pas une légende urbaine ; et, il va falloir en redoubler au vu des retards enregistrés sur certains dossiers épineux. Le premier d'entre eux, la réforme pénale, censée "développer les alternatives à l'incarcération" et "mettre un terme à la surpopulation carcérale", sujet de passes d'armes médiatiques avec le nouveau premier des ministres, notamment quant à la suppression des peines plancher, requiert immédiatement son engagement ; l'examen dudit projet ayant soigneusement été repoussé après les élections municipales. Il reste encore à renforcer la justice de proximité, à renforcer la protection des sources pour les journalistes, à renforcer les droits et libertés numériques et à recruter des imams dans les prisons. Quid de la réforme du Conseil supérieur de la magistrature passée à la trappe dès l'été 2013 ? Les perspectives sénatoriales semblent définitivement compromettre ce projet-ci, du moins.

Saura-t-elle emporter l'adhésion sur une réforme pénale jugée radicale par certains alors que les équilibres politiques sont fragiles ? Saura-t-elle peser de tout son poids politique face à un ministre de l'Intérieur devenu Premier ministre ? Saura-t-elle trouver les moyens budgétaires de ses ambitions affichées, alors que la dette galope ? Saura-t-elle déjouer les "conservatismes judiciaires" et imposer sa marque et son rythme ? Saura-t-elle faire oublier la convocation du procureur général de Paris, pour lui demander de quitter son poste en raison de sa "sensibilité politique" ?

Autant de questions qui appellent des rapides réponses pour ne pas décevoir les attentes des citoyens-justiciables et des professionnels du droit, sur la protection des droits et des libertés.

"Echouer, c'est avoir la possibilité de recommencer de manière plus intelligente" disait Henry Ford...

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