Cahiers Louis Josserand n°2 du 23 février 2023 : Affaires

[Chronique] Droit des affaires

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par Mme Cécile Granier, Maître de conférences, Université Jean Moulin Lyon 3, M. Jordi Mvitu-Muaka, Doctorant, Université Jean Moulin Lyon 3 et M. Julien Muller, Doctorant contractuel, Centre de droit de l’entreprise, Équipe de recherche Louis Josserand

le 26 Juin 2024

Loyers commerciaux et Covid-19 : mise en perspective de la jurisprudence lyonnaise avec la jurisprudence nationale

♦ CA Lyon, 8e chambre, 12 janvier 2022, n° 21/02572 N° Lexbase : A10967IG

♦ CA Lyon, 8e chambre, 6 avril 2022, n° 21/05532 N° Lexbase : A44147SB

1. Devoir ou ne pas devoir ? Telle est la lancinante interrogation qui préoccupe les preneurs depuis plus de deux ans à propos des loyers commerciaux correspondant aux périodes de fermeture administrative imposée par les pouvoirs publics pour lutter contre l’épidémie de Covid-19. Cette incertitude n’a pas tardé à se déverser sur les juridictions et à donner naissance à un abondant contentieux, dont la première étape prend bien souvent la forme d’une action en référé du bailleur visant à obtenir le paiement à titre provisionnel des loyers non versés ou à faire constater l’acquisition de la clause résolutoire du fait du manquement du preneur à son obligation de paiement. La cour d’appel de Lyon ne fait pas exception : durant la période couverte par cette chronique, plusieurs décisions rendues statuent sur des demandes de cette nature et certaines d’entre elles seront au cœur de notre propos.

2. Éclaircissements jurisprudentiels nationaux. Les incertitudes et le contentieux corrélatif devraient cependant se réduire du fait des avancées jurisprudentielles significatives réalisées ces derniers mois. Le 30 juin dernier, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a, tout d’abord et pour la première fois, statué sur la recevabilité des multiples arguments soulevés par les preneurs au soutien des demandes de non-paiement des loyers couvrant les périodes de fermeture administrative (Cass. civ. 3, 30 juin 2022, n° 21-20.127, FS-B N° Lexbase : A858778K, n° 21-20.190, FS-B N° Lexbase : A859678U, n° 21-19.889, FS-D N° Lexbase : A194279S). Le résultat est sans appel et penche nettement en faveur des bailleurs puisqu’aucun fondement n’a trouvé grâce aux yeux de la Cour de cassation. La force majeure (C. civ. art. 1218 N° Lexbase : L0930KZH et C. civ., anc. art. 1148 N° Lexbase : L0865KZ3), le manquement à l’obligation de délivrance du bailleur (C. civ., art. 1719 N° Lexbase : L8079IDL), la perte de la chose louée (C. civ., art. 1722 N° Lexbase : L1844ABW), le manquement à l’exigence de bonne foi (C. civ., art. 1104 N° Lexbase : L0821KZG et C. civ., anc. art. 1134 N° Lexbase : L0857KZR) sont, tour à tour et sans ambiguïté, balayés. La force obligatoire du bail commercial en ressort indemne et les clauses instituant une obligation de paiement restent la loi à laquelle doivent se conformer les preneurs. Ce sont ensuite trois décisions récentes qu’il faut signaler (Cass. civ. 3, 23 novembre 2022, n° 22-13.773, inédit N° Lexbase : A35258XT, n° 22-12.753, FS-B N° Lexbase : A10768UE, n° 21-21.867, FS-B N° Lexbase : A10758UD). Outre le fait que l’une d’entre elles confirme le raisonnement développé quelques mois plus tôt, elles statuent sur la portée de clauses contractuelles invoquées au soutien d’une demande de suspension de paiement des loyers commerciaux, notamment pendant les périodes de fermeture administrative.

3. Comparaison avec la jurisprudence lyonnaise. Cette actualité invite à rapprocher ces solutions nouvelles des décisions relatives à des problématiques semblables rendues antérieurement par la cour d’appel de Lyon. La probabilité que les juges lyonnais reprennent les solutions émanant de la Cour de cassation est en effet conséquente. Rappelons d’ailleurs qu’à défaut de précision, ce qui est le cas dans les décisions citées, les normes jurisprudentielles nouvelles sont directement applicables aux affaires en cours et plus généralement aux faits passés en raison de la nature rétroactive de la jurisprudence. En cas de divergence avec la jurisprudence nationale, l’on peut donc raisonnablement présager une évolution prompte de la jurisprudence lyonnaise. Deux décisions de la cour d’appel de Lyon offrent un matériau adapté pour jouer au jeu des ressemblances puisqu’elles se prononcent sur chacune des problématiques soumises à la Cour de cassation. Dans les deux cas d’espèce, un preneur (le même) avait cessé de payer les loyers des nombreux baux commerciaux qu’il avait conclus dans le cadre de son activité professionnelle à compter du 1er avril 2020. Dans les deux affaires, les bailleurs avaient en réponse saisi le juge des référés pour qu’il soit ordonné au preneur de payer les loyers dus à titre provisionnel sur le fondement de l’article 835, alinéa 2 du Code de procédure civile N° Lexbase : L8607LYG. Dans l’une des hypothèses, les bailleurs demandaient également que soit constatée l’acquisition de la clause résolutoire sur le fondement de l’article 834 du Code de procédure civile N° Lexbase : L8604LYC. Les multiples fondements légaux invoqués par le preneur pour justifier le non-paiement sont, dans les deux décisions, écartés par la cour d’appel de Lyon. Dans une très large mesure, cette solution sera postérieurement confirmée par la Cour de cassation (I). À l’inverse, l’argument contractuel avancé par le preneur, tenant en l’existence de clauses de suspension des loyers applicables à l’épidémie de Covid, fait mouche et conduit la cour d’appel à retenir le caractère contestable de l’obligation de paiement ainsi que l’existence d’une contestation sérieuse. Or dans trois affaires présentant une forte similitude, la Cour de cassation retient une analyse qui, en substance, infirme la solution de la cour d’appel de Lyon (II).

I. Le rejet des fondements légaux confirmé

4. Convergence franche. Dans chacune des affaires et au regard de l’incertitude ambiante, le preneur invoquait une panoplie assez complète de fondements légaux pour démontrer le caractère sérieusement contestable de l’obligation de paiement des loyers ainsi que l’existence d’une contestation sérieuse. Il s’agissait de faire échouer l’action en référé, mais des arguments similaires peuvent être invoqués au fond pour neutraliser l’obligation de paiement du preneur dans des hypothèses voisines. Sont ainsi avancés l’existence d’un événement de force majeure, un manquement du bailleur à son obligation de délivrance justifiant la mise en œuvre d’une exception d’inexécution, la disparition de la cause (C. civ., anc. art. 1131 N° Lexbase : L0829KZQ C. civ. anc.), le manquement à l’exigence de bonne foi et, enfin, la théorie de l’imprévision (C. civ., art. 1195 N° Lexbase : L0909KZP). Dans la décision du 6 avril, de façon étonnante, la cour d’appel ne se prononce pas sur la pertinence de ces arguments pour mieux se focaliser sur la clause de suspension des loyers. À l’inverse, dans la décision du 12 janvier, la juridiction écarte la force majeure, le manquement du bailleur à son obligation de délivrance, la perte de la chose louée, l’absence de cause et in fine la bonne foi. Ce rejet franc et global sera réitéré quelques mois plus tard par la Cour de cassation (v. les arrêts du 30 juin, précités). La Haute juridiction a notamment précisé à propos du manquement à l’obligation de délivrance et de la perte de la chose louée que ces arguments étaient insusceptibles de fonder une contestation sérieuse, confirmant ainsi que la voie du référé est ouverte pour les bailleurs (Cass. civ. 3, 30 juin 2022, n° 21-20.127, FS-B N° Lexbase : A858778K et n° 21-21.867, FS-B N° Lexbase : A10758UD). Sur ces points, la motivation retenue par la cour d’appel de Lyon rejoint globalement celle de la Cour de cassation, qui l’étoffe néanmoins un peu. La non-imputation au bailleur de l’impossible exploitation du fonds de commerce pendant les périodes de fermeture administrative – cela n’étant pas de « son fait », mais de celui du législateur – est une considération déterminante pour la cour d’appel puis pour la Cour de cassation. Pour écarter la perte de la chose louée, les deux juridictions refusent d’assimiler l’interdiction d’exploiter à une destruction de la chose, même partielle. La juridiction lyonnaise le justifie de façon simple et claire en adoptant une conception purement matérielle de la destruction. En se référant au caractère « général et temporaire de la mesure », la Cour de cassation semble adouber cette motivation, bien qu’elle adopte une conception a priori élargie de la destruction en recourant à une formule plus complexe (« l’interdiction étant sans lien direct avec la destination contractuelle des lieux »). Si en ce qui concerne l’essentiel, les décisions de la cour d’appel de Lyon convergent avec les décisions nationales postérieures, il est toutefois possible de déceler quelques légères divergences.

5. Divergences légères. Une première différence concerne la motivation venant au soutien du rejet de la force majeure. Dans sa décision du 12 janvier, la cour d’appel écarte cette qualification en se fondant sur le défaut d’irrésistibilité de la pandémie en considération notamment de la nature monétaire de l’obligation de paiement des loyers. La troisième chambre civile choisit pour sa part de se fonder sur la qualité de la partie invoquant la force majeure au sein du rapport contractuel. Reprenant une solution récente (Cass. civ. 1, 25 novembre 2020, n° 19-21.060, FS-P+B+I N° Lexbase : A551737H), elle a rappelé que seul le débiteur d’une obligation peut invoquer la force majeure (v. les arrêts du 30 juin, précités). Dès lors, le créancier de l’obligation de jouissance du local commercial ne saurait s’en prévaloir. En soi, l’analyse de la cour d’appel de Lyon n’est pas remise en cause, la Cour de cassation se place simplement sur un terrain autre, qui présente l’avantage notable d’éviter toute discussion casuistique sur la caractérisation de la force majeure. Dans le cadre de décisions futures, la cour d’appel de Lyon devrait donc reprendre cet argumentaire, soit en le substituant, soit en l’ajoutant à celui développé dans la décision du 12 janvier. Si cette conception restrictive de la force majeure peut être discutée, elle constitue une source indéniable de sécurité juridique. Remarquons ensuite que l’argument de la bonne foi est rejeté encore plus sèchement que dans la décision de la Cour de cassation du 30 juin où elle est invoquée (Cass. civ. 3, 30 juin 2022, n° 21-20.190, FS-B N° Lexbase : A859678U), alors qu’on avait déjà pu considérer qu’elle y était réduite à « une portion congrue » (voir D., 2022, obs. D. Houtcieff, p. 1145). Aucune obligation de report ou de négociation ne peut être imposée au bailleur sur ce fondement. En effet, selon la cour d’appel, « les bailleurs n’ont fait preuve d’aucune mauvaise foi en se limitant à exiger le paiement d’un loyer incontestablement dû, ce qui n’est que la stricte application du contrat de bail ». Enfin, la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur la pertinence de l’argument fondé sur la cause, à l’inverse de la cour d’appel de Lyon. Cette dernière retient son existence au moment de la formation du contrat, ce qui est suffisant pour conclure au caractère inopérant de cet argument. Le bien-fondé de cette solution classique et la position tranchée de la Cour de cassation devraient a priori la conduire à retenir une solution similaire si la question lui était soumise à l’avenir. On le voit donc, les divergences entre les solutions rendues à propos des arguments légaux invoqués au soutien des demandes de non-paiement restent légères. Il en va différemment concernant l’applicabilité des clauses de suspension des loyers.

II. L’admission de l’argument contractuel infirmée

6. Identification d’une contestation sérieuse par la cour d’appel de Lyon. Dans ses deux décisions, la juridiction lyonnaise ne fait pas droit aux demandes en référé au motif qu’il existe une contestation sérieuse affectant l’obligation de paiement des loyers. À cette fin, elle se fonde sur une clause invoquée par le preneur, dont la teneur est légèrement variable selon le contrat de bail. La stipulation en cause prévoit que, dans l’hypothèse où « la non-sous-location du bien » (sont ici en cause des résidences de tourisme) proviendrait notamment « de la survenance de circonstances exceptionnelles et graves (telles que l’incendie de l’immeuble, etc.) affectant le bien et ne permettant pas une occupation effective et normale », le paiement du loyer sera suspendu jusqu’à un événement contractuellement déterminé (soit jusqu’au mois suivant la fin du trouble de jouissance, soit pendant le trouble de jouissance en fonction des contrats de bail). Ces clauses empruntent au mécanisme légal de la force majeure l’un de ses effets – la suspension de l’exigibilité de l’obligation – tout en s’en émancipant par l’adoption d’une définition autonome des événements susceptibles de générer une telle suspension. Toute la question est donc de savoir si la qualification de « circonstances exceptionnelles et graves affectant le bien et ne permettant pas une occupation effective et normale » peut englober l’épidémie de Covid-19. Pour la cour d’appel, une réponse positive est parfaitement plausible. Elle affirme ainsi dans les deux décisions envisagées que « la pandémie, par sa nature et sa résonance mondiale, est susceptible de constituer une circonstance exceptionnelle et grave, qui a affecté le bien loué et son exploitation puisqu’il ne pouvait plus être occupé », ajoutant même que cette qualification est « à l’évidence » envisageable (v. CA Lyon, 12 janvier 2022, précité N° Lexbase : A10967IG). Cette analyse la conduit à retenir que la clé de résolution de ces deux litiges réside dans l’interprétation de la clause, tant en ce qui concerne son applicabilité aux faits que la durée de ses effets, c’est-à-dire de la suspension de l’obligation de paiement. Or cette tâche n’est plus celle du juge de l’évidence, et nécessite une intervention du juge au fond. La cour d’appel déboute par conséquent les bailleurs de leurs actions en référé. Ces deux décisions étaient donc incontestablement de nature à nourrir les espoirs des preneurs et de leurs conseils ainsi qu’à atténuer la sèche fin de non-recevoir résultant des arrêts du 30 juin. L’éclaircie aura néanmoins été de courte durée, car ces espoirs semblent largement remis en cause par les décisions de la Cour de cassation du 23 novembre dernier.

7. Neutralisation des clauses par la Cour de cassation. Le preneur concerné par les décisions de la cour d’appel de Lyon ayant une activité nationale, d’autres cours avaient été saisies d’une difficulté juridique en tout point similaire. C’était notamment le cas des juridictions d’appel parisienne et nancéienne. À la différence des magistrats lyonnais, ces dernières ont retenu que cette même clause n’était pas susceptible de générer une contestation sérieuse s’opposant aux demandes de paiement provisionnel des loyers (CA Nancy, 5e ch. com., 9 février 2022, n° 21/01758 N° Lexbase : A79067MR ; CA Paris, 1-8, 4 mars 2022, n° 21/11534 N° Lexbase : A61747PD). Saisie de pourvois à l’encontre de ces décisions, la Cour de cassation approuve cette conclusion et conclut à leur rejet. À nouveau, la position nationale penche largement en faveur des bailleurs, puisque la troisième chambre civile approuve de façon assez nette les juridictions du fond d’avoir retenu que la clause litigieuse n’est pas applicable à l’épidémie de Covid-19 et ce, sans même qu’il soit besoin de l’interpréter. En effet, là où le doute semblait largement permis pour la juridiction lyonnaise, les juges nancéiens et parisiens, suivis par la Cour de cassation, ne lui laissent aucune place considérant que le bien, en lui-même, n’est pas affecté par la pandémie. La comparaison de cette motivation avec celle retenue par la cour d’appel de Lyon permet d’identifier le cœur de la divergence. Cette dernière a considéré qu’en l’absence de précisions contractuelles supplémentaires, le terme de « bien » devait s’entendre largement comme visant la chose dans sa dimension matérielle, mais aussi dans ses conditions d’exploitation. Elle semble pour cela s’appuyer sur le fait que « les circonstances exceptionnelles et graves » ont pour effet d’empêcher « une occupation effective et normale » du local, ce qui peut renvoyer à son exploitation. À l’inverse, la Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir considéré que les mesures gouvernementales n’affectaient pas le bien en lui-même, mais seulement ses conditions d’exploitation. Cette rhétorique rejoint celle développée pour écarter la perte de la chose louée au sens de l’article 1722 du Code civil N° Lexbase : L1844ABW : ce n’est pas le bien intrinsèquement qui est affecté par les mesures gouvernementales, mais la possibilité d’y exploiter le fonds de commerce qui y est logé. L’une des considérations juridiques déterminantes résidait dans les caractères de la stipulation. Les juges parisiens et nancéiens mettaient en avant la précision et la clarté de la clause pour écarter tout recours à l’interprétation, comme le prévoit l’article 1192 du Code civil N° Lexbase : L0901KZE. Dans ce contexte, il apparaît justifié qu’ils se soient arrêtés au sens littéral des termes sans s’aventurer dans une recherche de la commune intention des parties (C. civ., art. 1188 N° Lexbase : L0905KZK), qui aurait pu tourner à l’avantage des bailleurs. À l’inverse, les juges lyonnais ne se prononcent pas sur ces caractéristiques, mais concluent toutefois à un besoin d’interprétation. Deux hypothèses sont alors envisageables : soit les magistrats ont fait fi de l’article 1192 du Code civil N° Lexbase : L0901KZE, soit ils ont considéré que la clause manquait de précision et de clarté, ce qui les autorisait à ne pas s’arrêter au sens littéral du terme « bien ». Quoi qu’il en soit, voilà les rédacteurs de clause de force majeure prévenus : pour donner sa pleine efficacité à ce type de stipulation, il faudra expressément viser les événements affectant le bien, mais aussi ses conditions d’exploitation.

8. Perspectives. Dans ce contexte et eu égard aux décisions de la cour d’appel de Lyon, deux perspectives sont envisageables. Tout d’abord, dans l’hypothèse où des pourvois auraient été formés contre ces décisions, la reprise de l’argumentation validée par la troisième chambre civile dans les décisions du 23 novembre pourrait bien aboutir à une cassation. Ensuite, l’intégration immédiate des solutions issues de ces décisions par la cour d’appel de Lyon pourrait désormais la conduire à faire droit aux demandes en référé même en présence d’une clause de force majeure, laissant à nouveau les preneurs bien démunis.

Par Cécile Granier

 

Le maintien de l’impossibilité pour la victime d’agissements frauduleux de se prévaloir des règles de vigilance du Code monétaire et financier contre la banque domiciliataire des comptes de l’auteur

♦ CA Lyon, 1re ch. civ. A, 29 septembre 2022, n° 14/00361

♦ CA Lyon, 1re ch. civ. A, 13 octobre 2022, n° 16/06692

Sans conteste, le choix du paiement d’une prestation par virement ou prélèvement bancaire offre une apparence de sécurité que ne présente pas le paiement en espèce. Lorsque cette sécurité est entachée par la fraude du bénéficiaire des sommes versées, la victime peut tenter de reprocher à la banque dépositaire des comptes un manquement à son obligation générale de vigilance (Cass. civ. 28 janvier 1930, Ducrocq, RTD civ., 1930. 369, obs. R. Demogue). Parce qu’elle est la plus même de découvrir les opérations frauduleuses de son client dans ses comptes, cette obligation d’origine jurisprudentielle impose, dans certaines circonstances, à la banque de s’immiscer dans les affaires de son client pour effectuer certaines vérifications (J. Lasserre-Capdeville, M. Storck, M. Mignot, J.-Ph. Kovar, et N. Éreséo, Droit bancaire, Dalloz, coll. Précis, 3e éd., 2021, n° 271). Cela dit, l’étendue des cas d’application de ce contrôle est souvent difficile à déterminer, et certaines victimes tentent régulièrement de s’appuyer sur l’échec des mesures de vigilance spécifiquement prévues pour la prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme pour parvenir à démontrer la faute de la banque. Par deux arrêts récents, la cour d’appel de Lyon a rejeté cette analyse qui méconnaît la spécificité de l’obligation de vigilance des articles L. 561-5 et suivants du Code monétaire et financier N° Lexbase : L5147LBA, dont le manquement ne peut aboutir qu’à une sanction disciplinaire de la banque fautive (Cass. com., 28 avril 2004, n° 02-15.054, publié au bulletin N° Lexbase : A9943DBU, Bull. civ. IV, n° 72 ; Cass. com., 21 septembre 2022, n° 21-12.335, F-B N° Lexbase : A25258KQ)

Dans le premier des deux arrêts, la victime invoquait le défaut de vigilance de la banque à l’égard d’un client qui exerçait une activité de gestion de patrimoine sans agrément. La société gestionnaire de patrimoine avait reçu sur une courte période les sommes investies par ses clients sur ses comptes et les avait immédiatement transférées vers les comptes détenus par le gérant de la société et son épouse. Cette société fera l’objet d’une liquidation amiable sans que les fonds reçus ne soient restitués à ses clients.

Le second arrêt portait sur l’action de deux époux victimes des manœuvres d’une société de construction fictive dirigée par un gérant faisant l’objet d’une interdiction de gérer et d’une interdiction bancaire. Les époux avaient engagé la société fictive pour les travaux de construction de leur logement. La société de construction interrompit les travaux immédiatement après le paiement fait par les époux. Ces sommes ont au demeurant été immédiatement transférées à une société domiciliée en Lettonie. Les époux ont alors agi contre la banque de la société de construction à qui ils reprochent d’avoir ouvert un compte bancaire à la demande du gérant alors que celui-ci faisait l’objet d’une interdiction bancaire, ceci sans avoir recueilli toutes les informations utiles ni avoir procédé à un examen renforcé que lui imposait l’article L. 561-10-2, II, du Code monétaire et financier N° Lexbase : L5140LBY alors que des sommes importantes avaient été encaissées dès l’ouverture du compte et que ce compte avait présenté de multiples anomalies dans le cadre de son fonctionnement.

Dans les deux arrêts, les règles de vigilance propres à la lutte contre le blanchiment d’argent ont été invoquées (II) parce qu’elles pouvaient apporter plus de souplesse dans l’appréciation des critères de la faute de la banque (I).

I. L’appréciation stricte de la faute de la banque

L’obligation de vigilance est une exception au principe de non-immixtion de la banque dans les opérations effectuées par son client. Cette exception est interprétée de façon stricte. Ainsi, c’est seulement lorsque la banque enregistre une opération qui démontre des anomalies apparentes que sa responsabilité peut être engagée. S’agissant de l’appréciation de l’anomalie apparente, la jurisprudence admet facilement son existence lorsque cette anomalie peut être détectée par le simple examen des actes en raison d’une irrégularité manifeste (imitation grossière d’une signature, falsification, etc.), alors que les irrégularités qui n’apparaissent pas dans les actes, mais résultent du schéma des opérations réalisées, entraînent une sanction lorsque certains éléments du contexte sont caractérisés, par exemple des mouvements très nombreux sans justification apparente et des virements de sommes créditées sur des comptes étrangers (Cass. com., 22 novembre 2011, n° 10-30.101, F-P+B N° Lexbase : A0013H3U, Bull. civ. IV, n° 190 ; JCP, 2012. 105, note J. Lasserre-Capdeville ; JCP E, 2012, n° 5, p. 1349, obs. J. Stoufflet ; RDBF, 2012, comm. 37, obs. F.-J. Crédot et Th. Samin).

Dans les deux arrêts rendus par la cour d’appel de Lyon, les anomalies émanaient moins d’irrégularités matérielles dans les actes liés aux opérations effectuées que des incohérences plus insidieuses liées au contexte des opérations. En effet, les juges d’appel ont fait droit dans leur première décision à la banque qui avançait qu’elle était tenue de constituer le compte de la société de gestion de portefeuille sur la seule base des documents communiqués (statuts, extrait Kbis) de telle sorte qu’il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir vérifié si cette société avait obtenu l’agrément pour exercer des activités de gestion de portefeuille pour le compte de tiers. Dans le second arrêt, les juges déclarent que les diligences de la banque soumise à une demande d’ouverture de compte d’une personne faisant l’objet d’interdiction de gérer et d’une interdiction bancaire se limitent à vérifier les pièces produites par celle-ci, notamment l’injonction de la Banque de France au titre de la procédure dite « du droit au compte » de l’article L. 312-1 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L2068MAT.

La cour d’appel de Lyon considère également non établi le caractère apparent des irrégularités dans l’enregistrement des mouvements de fonds litigieux. Bien souvent, ce qui doit attirer l’attention de la banque sont les flux de fonds qui, par leur montant et par leur répétition, constituent des indices d’une opération illicite réalisée par son client. Dans les deux arrêts, les deux clients exerçaient des activités qui mettaient ces sociétés en disposition d’encaisser des montants élevés. Comme l’indique la cour d’appel de Lyon, l’activité de gestion de portefeuille pour le compte de tiers implique nécessairement des mouvements de fonds nombreux. De même, une société de construction de maisons individuelles est fortement susceptible de percevoir dans le cadre de son activité des sommes importantes liées à la commande de ses prestations. Ainsi, même lorsque ces opérations interviennent dans de périodes courtes, en l’espace de quelques mois par exemple, les montants impliqués ne peuvent pas être considérés en tant que tels comme des indicateurs d’une anomalie apparente.

Face à la difficulté de caractériser l’anomalie de l’opération, les plaideurs tentent continuellement au soutien de leurs prétentions d’utiliser les règles de vigilance propres à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme pour démontrer la faute de la banque. Cet argument, qui entraînait la modification de l’objet de la preuve du fait fautif, n’a pas été suivi par les juges d’appel dans les deux arrêts rendus.

II. La tentative d’assouplissement de la preuve de la faute de la banque

Les articles L. 561-5 et suivants du Code monétaire et financier N° Lexbase : L5147LBA mettent à la charge des banques la vérification des opérations de leurs clients en fonction de la connaissance qu’ils ont de leur activité. Lorsqu’à l’entrée en relation d’affaires la banque remarque des indices laissant supposer que son client pourrait prochainement s’impliquer dans des activités criminelles (corruption, blanchiment d’argent, financement du terrorisme, etc.), elle doit adapter son contrôle des opérations passées par ce dernier. De même, la banque doit toujours être alertée par les transactions passées par un client qui, soit par leur montant, soit par leur répétition, permettent de suspecter la présence d’une activité criminelle liée aux mouvements de fonds effectués. On comprend alors l’intérêt pour les plaideurs de mobiliser ce fondement particulier pour démontrer la faute de la banque. En effet, cette obligation s’impose à la banque même lorsque l’opération passée par son client ne présente pas d’anomalies apparentes. À l’aide de ce fondement, l’objet de la preuve peut changer de portée, car les plaideurs doivent simplement prouver le défaut de contrôle de la banque même lorsque l’illicéité de l’opération ne peut qu’être supposée en raison des circonstances.

La cour d’appel de Lyon rejette cette analyse dans ses deux arrêts. Les juges rappellent avec clarté que cette vigilance spéciale s’inscrit dans la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. De fait, les diligences imposées au titre de la législation anti-blanchiment n’ont pas pour finalité la protection d’intérêts privés, mais uniquement celui de l’intérêt général, ce qui empêche les plaideurs de se prévaloir de l’inobservation d’obligations résultant de ces textes pour réclamer des dommages et intérêts à la banque. Les deux arrêts reprennent une position de la Cour de cassation constante depuis 2004. Cette jurisprudence, force est de le constater, limite donc les possibilités d’actions contre la banque pour les opérations réalisées par son client ayant porté préjudice à un tiers.

Par Jordi Mvitu-Muaka

 

Preuve de la disproportion du cautionnement : le décalage temporel entre l’établissement de la fiche de renseignements et la conclusion du contrat de sûreté versus la mauvaise foi de la caution

♦ CA Lyon, 3e ch. A, 30 juin 2022, n° 19/04320 N° Lexbase : A4974794

Il n’est plus à démontrer que le législateur français porte un soin particulier au sort des cautions, et particulièrement lorsqu’il s’agit de personnes physiques. Parmi l’attirail des moyens de défense dont celles-ci disposent, figure l’exigence pour le créancier professionnel de ne pas leur faire souscrire d’engagement de caution dont le montant était, lors de sa souscription, manifestement disproportionné à leurs revenus et patrimoines. Les règles gouvernant la preuve de cette disproportion sont essentielles, mais parfois délicates à appréhender, comme l’illustre l’arrêt rendu, le 30 juin 2022, par la cour d’appel de Lyon.

En l’espèce, une caution personne physique s’était engagée au profit d’une banque afin de garantir une partie d’un prêt souscrit par une société. Pour ce faire, la caution a complété, le 10 septembre 2013, une fiche de renseignements, soit près de trois mois avant la conclusion du contrat de cautionnement. En septembre 2015, la société fut placée en liquidation judiciaire et la banque déclara sa créance au titre du prêt. Le créancier, après avoir tenté, sans succès, de poursuivre le débiteur principal, assigna la caution en paiement. Le tribunal de commerce de Lyon, par un jugement du 27 mai 2019, fit droit à la demande du créancier et condamna la caution à y procéder. Cette dernière interjeta appel le 20 juin 2019, en prétendant que son engagement était, lors de sa souscription, manifestement disproportionné à ses biens et revenus. La caution faisait valoir que sa situation patrimoniale avait évolué au cours des trois mois qui séparaient l’établissement de la fiche et la conclusion du contrat de sûreté. En effet, durant cette période, elle a vu ses revenus diminuer en raison du fait qu’elle ait quitté son emploi pour assurer la fonction de gérant de la société emprunteuse. Dès lors, elle entendait que ses revenus lors de la conclusion du cautionnement soient pris en considération pour l’appréciation de la disproportion de son engagement, et non ceux indiqués sur la fiche de renseignements. La cour d’appel ne fait pas droit à sa demande et confirme, sur ce point, le jugement rendu en première instance. Elle relève que la caution avait, onze jours après avoir complété la fiche, sollicité le bénéfice de l’aide au retour à l’emploi (ARE) auprès de Pôle emploi, ce dont il résultait qu’elle « n’a donc pas complété la fiche patrimoniale de manière sincère, de sorte que cette dernière, qui ne peut se prévaloir de sa propre turpitude, ne saurait utilement reprocher à la banque de ne pas avoir procédé à une actualisation de sa situation patrimoniale ». La cour considère alors qu’il « doit donc être tenu compte de la situation patrimoniale de l’appelante telle que résultant de cette fiche de renseignement ».

Cet arrêt livre un enseignement intéressant concernant la preuve de la disproportion de l’engagement de la caution. En la matière, il revient naturellement à la caution, qui invoque ce moyen de défense, de démontrer que son engagement était disproportionné (v. par exemple Cass. com., 29 novembre 2017, n° 16-19.416, F-D N° Lexbase : A4705W4Z). Cependant, en pratique, bien que ce ne soit pas une obligation (v. Cass. com., 13 septembre 2017, n° 15-20.294, F-P+B+I N° Lexbase : A4157WRE), le créancier professionnel diligent sollicitera de la caution qu’elle remplisse une fiche de renseignements concernant sa situation patrimoniale. Celle-ci permettra non seulement d’apprécier la solvabilité de la caution – et donc la valeur de la sûreté proposée –, mais aussi de mesurer le caractère proportionné de son engagement. Mais ce ne sont pas les seules vertus de l’établissement d’une telle fiche pour le créancier, la jurisprudence considère, en effet, que la caution est tenue par les informations qu’elle y a indiquées. Elle ne peut ensuite démontrer que son engagement était, en réalité, disproportionné en se prévalant d’éléments qui ne figuraient pas sur la fiche ou encore en prétendant qu’elle avait surévalué son patrimoine et ses revenus (v. en ce sens Cass. com., 12 juin 2019, n° 18-11.067, F-D N° Lexbase : A5886ZEQ). Le créancier pouvant alors s’en tenir aux déclarations de la caution, sauf anomalies apparentes (v. par exemple Cass. com., 24 janvier 2018, n° 16-15.118, F-D N° Lexbase : A8602XB9). Cette exception à la liberté de la preuve, dont jouit par principe la caution, met a priori le créancier à l’abri de toute remise en cause ultérieure du cautionnement sur ce fondement. Encore faut-il qu’il n’existe aucun décalage temporel entre l’établissement de la fiche de renseignements et la conclusion du contrat de cautionnement, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. En effet, la cour d’appel laisse entendre que la caution pouvait démontrer que sa situation patrimoniale avait évolué entre les deux dates. Il semble alors que, malgré l’établissement d’une fiche de renseignements, la caution n’est pas nécessairement tenue par celle-ci, dès lors qu’elle n’a pas été établie concomitamment au contrat de cautionnement. Cette appréciation apparaît tout à fait fidèle à la lettre des anciens articles L. 332-1 N° Lexbase : L1162K78 et L. 343-4 N° Lexbase : L1103K7Y du Code de la consommation et à celle du nouvel article 2300 du Code civil N° Lexbase : L0174L8X. Sous réserve du retour à meilleure fortune de la caution, maintenu pour les cautionnements souscrits avant le 1er janvier 2022, ces dispositions prévoient que la disproportion de l’engagement est appréciée au jour de sa souscription et l’établissement d’une fiche de renseignements ne déroge pas à cette règle. Il s’agit simplement d’un outil permettant concrètement d’apprécier son caractère proportionné (rappr. Cass. com., 18 janvier 2017, n° 15-12.723, F-P+B N° Lexbase : A7045S9S), lequel doit être vérifié lors de la conclusion du contrat de sûreté. Ainsi, la caution est liée par ses déclarations uniquement dans la mesure où celles-ci sont concomitantes à son engagement. À défaut, elle demeure libre de démontrer que sa situation patrimoniale a évolué entre ces deux dates (v. en ce sens Cass. com., 3 octobre 2018, n° 17-20.271, F-D N° Lexbase : A5409YE3).

Les conseillers lyonnais subordonnent néanmoins la possibilité pour la caution de démontrer l’évolution de sa situation à ce qu’elle ait fait preuve de bonne foi dans les informations fournies au créancier. En effet, comme l’arrêt le rapporte, la caution avait déclaré les revenus issus de son emploi, alors qu’elle savait pertinemment que, dans les jours qui suivaient, elle allait le « quitter » pour assurer ensuite les fonctions de dirigeant de la société emprunteuse. En atteste la demande de la caution adressée à Pôle emploi afin d’obtenir le bénéfice de l’ARE, formulée onze jours après avoir rempli la fiche de renseignements. L’invocation, en l’espèce, de l’adage nemo auditur propriam turpitudinem allegans illustre l’exigence de loyauté et de bonne foi qui irrigue toute la matière contractuelle (C. civ., art. 1104 N° Lexbase : L0821KZG). Le contrat de cautionnement n’y échappe pas, et ce même lorsqu’il s’agit d’apprécier la proportionnalité de l’engagement souscrit, laquelle se veut, pourtant, uniquement arithmétique et donc objective (v. en ce sens D. Houtcieff, note sous Cass. com., 8 janvier 2020, Rev. sociétés, 2020, p. 293, spéc. n° 5). La mauvaise foi dont la caution a fait preuve dans ses déclarations est sanctionnée, ici, non pas par l’impossibilité d’invoquer ce moyen de défense comme l’ont suggéré plusieurs auteurs (v. en ce sens M. Bourassin, « Quelle réforme pour la formation du cautionnement ? », in Quelle réforme pour le droit des sûretés ?, dir. Y. Blandin et V. Mazeaud, Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 2019, n° 17 et 23 ; D. Houtcieff, note préc., n° 9), mais par le refus que celle-ci procède à une réévaluation de sa situation. Ainsi, quoique par un moyen détourné, la caution n’a pu échapper à son engagement, les biens et revenus déclarés dans la fiche de renseignements ne laissant pas apparaître de disproportion manifeste au montant du cautionnement souscrit.

Si, depuis l’ordonnance du 15 septembre 2021, le cautionnement disproportionné est moins sévèrement sanctionné pour le créancier – celui-ci subissant dorénavant une simple réduction de son montant et non plus une déchéance totale de son droit à l’égard de la caution –, les créanciers professionnels qui ont eu la prudence de faire établir une fiche de renseignements devront être particulièrement vigilants lorsque cette dernière n’est pas concomitante à la conclusion du contrat de sûreté. Dans cette situation, il ne peut que leur être conseillé d’exiger de la caution qu’elle certifie, à nouveau, l’actualité des informations délivrées antérieurement.

Par Julien Muller

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