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par Vincent Vantighem
le 12 Janvier 2023
Il va devoir passer de l’autre côté des barreaux… Khalid El Khal, l’ancien chef de la division 3 du centre pénitentiaire de Fresnes (Val-de-Marne), a été condamné, mercredi 11 janvier, à quatre ans de prison ferme pour « corruption passive » et « association de malfaiteurs » par le tribunal judiciaire de Créteil. Sa peine a été assortie d’un mandat de dépôt à effet différé, ce qui signifie que l’ancien surveillant pénitentiaire va recevoir une convocation du procureur ultérieurement pour savoir où et quand il sera incarcéré. Le tribunal a également prononcé une interdiction définitive de la fonction publique et la confiscation des sommes saisies lors de la procédure.
Car Khalid El Khal a été condamné pour avoir touché de l’argent en échange d’avantages accordés à trois détenus dont il avait la surveillance, entre janvier 2016 et mars 2018, à la prison de Fresnes. Et pas n’importe lesquels… Ces trois prisonniers « privilégiés » étaient les très médiatiques Arnaud Mimran et Fabrice Touil considérés comme deux des cerveaux de « l’arnaque à la taxe carbone » ainsi qu’Éric Robic, un Français qui avait tué une Israélienne à Tel-Aviv en 2011 dans un accident de voiture avant de prendre la fuite.
Téléphones en cellule, douches multipliées, parloirs plus fréquents et surtout beaucoup moins de fouilles : les trois détenus sont soupçonnés d’avoir bénéficié d’un traitement de faveur en détention après avoir soudoyé Khalid El Khal.
Des enveloppes contre un traitement de faveur en détention
Lors de l’audience, en novembre, les prévenus ont vigoureusement contesté les faits, certains parlant de simples « fanfaronnades ». Mais le tribunal n’a pas été convaincu et les a condamnés sur la foi du volumineux dossier de preuves apporté par l’accusation. Car le problème, c’est que les remises d’enveloppes en liquide ont été accréditées par des écoutes et certains témoins lors de l’enquête. Et même par Fabrice Touil, lui-même, qui avait admis, en audition devant le juge, avoir remis une liasse de 5 000 euros en liquide à Khalid El Khal, après avoir recouvré la liberté.
Difficile de faire autrement : la voiture dans laquelle l’échange a eu lieu avait été, préalablement, sonorisée par les policiers. « L’objectif annoncé par [cette remise d’argent] était de poursuivre le schéma de corruption déjà mis en place [à l’intérieur de la prison] », notamment pour s’assurer de bonnes conditions de détention en cas de nouvelle incarcération et pour que Fabrice Touil obtienne des renseignements sur son dossier judiciaire, a jugé le tribunal.
Les prévenus ont décidé de faire appel du jugement
Arnaud Mimran a, lui, été reconnu coupable d’avoir corrompu le surveillant pénitentiaire afin que celui-ci joue un rôle dans son transfert à la prison du Havre (Seine-Maritime) qu’il souhaitait rejoindre. Quant au dernier des prisonniers, Éric Robic, le surveillant lui aurait accordé « une bienveillance particulière » dans la gestion de plusieurs incidents en détention et de lui avoir obtenu un poste « d’auxiliaire de sport » qui lui garantissait deux douches quotidiennes.
Ce dernier est le seul à avoir été relaxé par le tribunal judiciaire de Créteil. Finalement, Arnaud Mimran a écopé d’une peine de deux ans de prison avec maintien en détention et d’une amende de 100 000 euros. Fabrice Touil, absent tout au long du procès, a été condamné, lui, à quatre ans d’emprisonnement avec mandat d’arrêt.
Des peines lourdes qui ont suscité l’indignation des avocats de la défense. « Nous allons faire appel. La sévérité de ce jugement donne raison à la requête en dépaysement que nous avions faite au début de l’instruction, ont réagi Philippe Ohayon, Paul Aprile et Vera Goguidze. Le tribunal de Créteil ne pouvait pas juger sereinement un directeur de détention de la prison de son ressort ! » Il y aura donc un deuxième procès sur toute cette affaire.
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