Réf. : Cass. soc., 14 décembre 2022, n° 21-19.628, F-D N° Lexbase : A96628ZU
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par Lisa Poinsot
le 12 Janvier 2023
► Une analyse statistique fondée sur la consonance du nom des salariés recrutés peut laisser supposer l’existence d’une discrimination à l’embauche.
Faits et procédure. Un salarié intérimaire, ayant effectué des contrats de mission en raison d’un accroissement temporaire de l’activité d’une société utilisatrice, saisit la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de ses contrats de mission en CDI et d’une demande en paiement de dommages et intérêts au titre d’une discrimination à l’embauche.
La cour d’appel (CA Chambéry, 20 mai 2021, n° 20/00391 N° Lexbase : A34054SW) retient que le salarié produit une analyse faite à partir du registre unique du personnel communiqué par l’employeur et sur l’organigramme de la société à partir duquel il a fait des analyses statistiques. De ces analyses, le salarié en a conclu que :
L’analyse du salarié porte sur le fait que, sur 269 salariés en « contrat à durée déterminée intérim », 22 ont un patronyme extraeuropéen.
La cour d’appel a pu en déduire que ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer une discrimination à l’embauche.
Les juges du fond retiennent par ailleurs que l’employeur n’apporte pas d’analyse réfutant celle faite par le salarié. Les quatre exemples apportés par l’employeur ne sont pas suffisants pour réfuter l’argumentation du salarié.
Par conséquent, les juges du fond déclarent le salarié victime de discrimination à l’embauche et condamnent l’employeur à lui payer des dommages et intérêts à ce titre.
L’employeur forme un pourvoi en cassation en arguant, notamment, que la seule comparaison du pourcentage de salariés ayant un patronyme à consonance européenne et de salariés ayant un patronyme à consonance extraeuropéenne embauchés par une entreprise, indépendamment du nombre de candidatures reçues, du profil et qualification des candidats et de la nature du poste à pourvoir, est insuffisante à laisser supposer une discrimination à l'embauche systémique à raison du nom ou de l'origine des salariés et, a fortiori, une discrimination à l'encontre d'un salarié. Dès lors que le choix de l'employeur entre plusieurs candidats est fondé sur un motif étranger à l'origine ou au nom de famille du candidat retenu, les autres candidats ne peuvent s'estimer victimes d'une discrimination fondée sur leur origine ou leur nom de famille.
Pour rappel. En cas de litige, le salarié doit apporter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. S’il y a suffisamment d’éléments en ce sens, il revient ensuite à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs et étrangers à toute discrimination (C. trav., art. L. 1134-1 N° Lexbase : L2681LBW). Les juges apprécient alors ces éléments de fait dans leur ensemble (Cass. soc., 29 juin 2011, n° 10-15.792, FS-P+B N° Lexbase : A6497HU8). |
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.
Pour aller plus loin :
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