La lettre juridique n°919 du 6 octobre 2022 : Avocats/Procédure

[Brèves] Différends entre avocats de barreaux différents : faute de décision du Bâtonnier tiers dans le délai imparti, la saisine de la cour d’appel est une simple faculté et une nouvelle demande d’arbitrage peut être formulée

Réf. : Cass. civ. 1, 14 septembre 2022, n° 21-10.911, F-D N° Lexbase : A47888I8

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[Brèves] Différends entre avocats de barreaux différents : faute de décision du Bâtonnier tiers dans le délai imparti, la saisine de la cour d’appel est une simple faculté et une nouvelle demande d’arbitrage peut être formulée. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/88690332-brevesdifferendsentreavocatsdebarreauxdifferentsfautededecisiondubatonniertiersdansle
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par Adélaïde Léon

le 06 Octobre 2022

► Lorsqu’un litige oppose des avocats de barreaux différents, la procédure de l’article 179-2 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991, prévoit la saisie d’un Bâtonnier d’un barreau tiers. Lorsqu’à l’expiration du délai, éventuellement prolongé, dont dispose le Bâtonnier tiers pour statuer, celui-ci n’a pas pris de décision, la saisine de la cour d’appel dans le délai d'un mois constitue une simple faculté, non exclusive de celle de saisir le Bâtonnier d’une nouvelle demande d’arbitrage.

Rappel des faits et de la procédure. À l’occasion d’un différend opposant des avocats de barreaux différents, le Bâtonnier de Nantes a été saisi en qualité de Bâtonnier tiers. Après avoir prolongé de quatre mois le délai initial de quatre mois dont il disposait pour statuer, le Bâtonnier n’a pas pris de décision.

À la suite d’une nouvelle demande d’arbitrage, la présidente du Conseil national des barreaux, saisie par les Bâtonniers des deux barreaux auxquels appartenaient les confrères en litige, a désigné le Bâtonnier de Bordeaux pour arbitrer ce différend.

En cause d’appel. Le premier président près la cour d’appel de Bordeaux a déclaré irrecevable le recours des intéressés au motif que, le Bâtonnier de Nantes n’ayant pas statué dans le délai prescrit, la seule voie de recours était l’appel dans le mois ayant suivi l’expiration du délai de quatre mois et non la réouverture d’une seconde procédure de Bâtonnier tiers. Le premier président avait en outre précisé qu’il importait peu que le second Bâtonnier tiers ait été régulièrement saisi.

Les intéressés ont formé un pourvoi contre cet arrêt.

Moyens du pourvoi. Il était fait grief au premier président de la cour d’appel d’avoir déclaré irrecevables les recours des avocats en litige. Les auteurs du pourvoi considéraient que, dans l’hypothèse où le Bâtonnier ne rend pas de décision dans le délai prévu par l’article 179-5, alinéa 1er du décret du 27 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID, la saisine de la cour d’appel n’est pas une voie de recours mais constitue une simple faculté pour les parties. Ils soutenaient que l’absence d’exercice de cette faculté ne les privait pas, sous réserve de la prescription, d’engager une nouvelle procédure devant le Bâtonnier.

Décision. La première chambre civile de la Cour de cassation casse l’arrêt du premier président de la cour d’appel de Bordeaux au visa des articles 179-2 et 179-5 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991.

La Cour rappelle la procédure édictée par le premier de ces arrêts laquelle organise le règlement des différends opposant des avocats de barreaux différents et prévoit les modalités de désignation du Bâtonnier d’un barreau tiers. La Haute juridiction souligne ensuite que selon le second article, le Bâtonnier désigné rend sa décision dans un délai de quatre mois (lequel peut être prolongé de quatre mois selon la complexité du différend).

La difficulté de cette affaire porte plus spécifiquement sur le dernier alinéa de l’article 179-5 précité, lequel prévoit que lorsque le Bâtonnier n’a pas pris de décision dans le délai imparti, « chacune des parties peut saisir la cour d’appel dans le mois qui suit l’expiration de ces délais ».

La Cour déduit de cette phrase que lorsque le Bâtonnier n’a pas statué dans le délai de quatre mois éventuellement prolongé, la saisine de la cour d’appel dans le délai d’un mois est une simple faculté. Les confrères en litige demeurent, selon la Cour, libres de saisir le Bâtonnier d’une nouvelle demande d’arbitrage.

C’est donc à tort que la cour d’appel avait jugé que la seule voie de recours après la décision du Bâtonnier de Nantes était l’appel dans le mois ayant suivi l’expiration du délai de quatre mois.

Pour aller plus loin : H. Bornstein, ÉTUDE : Les rapports entre avocats et avec les professionnels de Justice, Le règlement des conflits entre avocats de barreaux différents, in La profession d’avocats, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E39583RZ.

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