La lettre juridique n°912 du 30 juin 2022 : Avocats/Honoraires

[Brèves] Honoraire de résultat en cas de dessaisissement de l’avocat : quel office du juge ?

Réf. : Cass. civ. 2, 16 juin 2022, n° 20-21.473, FS-B N° Lexbase : A482677U

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par Marie Le Guerroué

le 30 Juin 2022

► Il résulte des articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 10 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 que si l'avocat ne peut réclamer un honoraire de résultat que lorsqu'il a été mis fin à l'instance par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable, une convention d'honoraires peut prévoir les modalités de sa rémunération en cas de dessaisissement avant l'obtention d'une telle décision ; il appartient alors au juge de l'honoraire de rechercher si l'avocat a contribué au résultat obtenu et de réduire cet honoraire s'il présente un caractère exagéré au regard du résultat obtenu ou du service rendu

Faits et procédure. Un client avait confié la défense de ses intérêts dans un litige relatif à l'indemnisation d'un préjudice corporel à un avocat. Une convention d'honoraires avait été conclue et prévoyait un honoraire de résultat, notamment en cas de dessaisissement. Le client débouté de sa demande en première instance, avait confié à un autre avocat le soin de former appel et de suivre l'instance d'appel, au terme de laquelle il avait obtenu la condamnation du défendeur à lui verser une certaine somme en réparation de son préjudice. Le premier avocat avait saisi le Bâtonnier de son Ordre d'une demande en fixation d'honoraires.

Ordonnance. Pour fixer l'honoraire complémentaire au regard du résultat obtenu en appel, l'ordonnance rendue par le premier président de la cour d'appel de Toulouse relève qu'aux termes de la convention d'honoraires, « dans l'hypothèse où [le client] viendrait à retirer son dossier à [l’avocat] pour une raison quelconque à l'issue de la procédure de première instance clôturée par un jugement frappé d'appel, jugement assorti en tout ou partie de l'exécution provisoire, ou à n'importe quel moment de la procédure, [l’avocat] est autorisé à conserver sur son compte CARPA la moitié de l'honoraire complémentaire défini aux présentes jusqu'à ce qu'intervienne la décision au second degré » et que la convention ajoute que « dans la même hypothèse, mais en présence d'un jugement non assorti de l'exécution provisoire et en cas de décision favorable rendue par la cour d'appel, [l’avocat] sera également en droit de percevoir la moitié de l'honoraire complémentaire ». L'ordonnance relève encore que, bien qu'en première instance la décision ait été défavorable au client, l’avocat a accompli un certain nombre de diligences dont 14 rendez-vous, l'échange de nombreuses correspondances, la rédaction de deux assignations en référé et une assignation au fond, l'assistance de son client lors de deux réunions d'expertise, la rédaction d'un dire à expert, ou encore l'assistance lors de l'audience de référé et de l'audience au fond. L'ordonnance retient que le paiement, malgré le dessaisissement anticipé de l'avocat, de l'honoraire de résultat convenu entre les parties à hauteur de 10 % HT des sommes effectivement perçues, réduit de moitié, ne présente pas de caractère exagéré au regard du service rendu.

Réponse de la Cour. La Cour de cassation rend sa décision au visa des articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ et 10 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 N° Lexbase : Z69805QC. Elle en déduit que si l'avocat ne peut réclamer un honoraire de résultat que lorsqu'il a été mis fin à l'instance par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable, une convention d'honoraires peut prévoir les modalités de sa rémunération en cas de dessaisissement avant l'obtention d'une telle décision. Il appartient alors au juge de l'honoraire de rechercher si l'avocat a contribué au résultat obtenu et de réduire cet honoraire s'il présente un caractère exagéré au regard du résultat obtenu ou du service rendu. Pour la Haute juridiction, en se déterminant comme précité, sans rechercher si l’avocat avait contribué au résultat obtenu, le premier président a privé sa décision de base légale.

Cassation. La Cour casse et annule, par conséquent, l'ordonnance précédemment rendue entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Toulouse.

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