Réf. : CE 9°-10° ch. réunies, 20 mai 2022, n° 449385, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A91437XW
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par Marie-Claire Sgarra
le 08 Juin 2022
► Le Conseil d’État est venu compléter sa jurisprudence relative à l’évaluation de la valeur d’usufruit des titres d’une société non cotée.
Les faits :
Méthode d'évaluation mise en œuvre par le vérificateur. Le vérificateur a déterminé la valeur attendue de l'usufruit des parts de la SCEV en effectuant la moyenne arithmétique des valeurs obtenues à l'aide, d'une part, de la méthode de la valeur actualisée des flux de revenus futurs, en capitalisant le montant du dividende moyen distribué les trois années précédant la cession en litige, à partir d'un taux de rendement et d'un taux de croissance des dividendes sur la durée de l'usufruit, et d'autre part de la méthode de la valeur en pleine propriété des titres, l'usufruit étant déterminé à partir du taux de rendement des titres sur la durée de l'usufruit. ► En appel, la cour a relevé que la valeur de l'usufruit des titres en litige ainsi obtenue était supérieure de 69 % à la valeur déclarée par les contribuables s'agissant des titres démembrés durant une période de dix ans et de 114 % pour ceux portant sur une durée de dix-sept ans. Méthode alternative d'évaluation de l'usufruit proposée par les contribuables. La société civile proposait, dans le dernier état de ses écritures d'appel, une méthode alternative d'évaluation de l'usufruit des titres de la SCEV fondée sur le solde actualisé de la trésorerie disponible correspondant à la différence entre l'excédent brut d'exploitation et le besoin en fonds de roulement, les annuités d'autofinancement des investissements et la rémunération des associés, sans justifier des motifs pour lesquels elle entendait modifier pour l'avenir sa pratique antérieure constante de distribution de la totalité de ses bénéfices comptables. ► La cour d’appel a jugé que cette méthode se bornait à déterminer l'endettement financier de la SCEV et sa trésorerie disponible et ne permettait pas, par suite, de déterminer le montant des distributions prévisionnelles attendu par l'usufruitier. |
Solution du Conseil d’État.
En cas de démembrement de droits sociaux, l’usufruitier, conformément à l’article 582 du Code civil qui lui accorde la jouissance de toute espèce de fruits, n’a droit qu’aux dividendes distribués. Il en résulte que l’évaluation du revenu futur attendu par un usufruitier de parts sociales ne peut avoir pour objet que de déterminer le montant des distributions prévisionnelles, qui peut être fonction notamment des annuités prévisionnelles de remboursement d’emprunts ou des éventuelles mises en réserves pour le financement d’investissements futurs, lorsqu’elles sont justifiées par la société.
En l’absence d’argumentation des contribuables tirée de ce que le montant des distributions prévisionnelles tel que déterminé par le vérificateur serait surévalué en tant qu’il ne prendrait pas en compte certains éléments susceptibles de l’affecter qu’ils étaient seuls en mesure de justifier, notamment le solde de la trésorerie disponible, et alors que, depuis sa création, la totalité des bénéfices de la société est distribuée et appréhendée par les associés, par perception de numéraire ou inscription au crédit des comptes courants d’associés, le juge ne méconnaît pas son office en s’abstenant de rechercher si la méthode mise en œuvre par l’administration a tenu compte de tels éléments.
Le pourvoi des requérants est rejeté.
Précisions. Le Conseil d’État a jugé, dans un arrêt du 30 septembre 2019, que dans le cas d'une société non cotée, la valeur vénale des titres « doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue. L'évaluation des titres d'une telle société doit être effectuée, par priorité, par référence au prix d'autres transactions intervenues dans des conditions équivalentes et portant sur les titres de la même société ou, à défaut, de sociétés similaires. En l'absence de telles transactions, celle-ci peut légalement se fonder sur la combinaison de plusieurs méthodes alternatives ». Ainsi, l’évaluation du revenu futur attendu par un usufruitier de parts sociales tient nécessairement compte du montant des distributions prévisionnelles. Lire en ce sens, F. Chidaine, Valorisation de l’usufruit temporaire de parts sociales de sociétés civiles immobilières, Lexbase Fiscal, octobre 2019, n° 799 N° Lexbase : N0776BYE. |
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