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N3448BTU
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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
le 27 Mars 2014
Après réception, le 10 septembre dernier, du rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) sur "la protection du consommateur : rationalité limitée et régulation", et fidèle au vade-mecum du nouveau Gouvernement, le ministre délégué souhaite d'abord lancer une concertation avec les associations de consommateurs et les partenaires sociaux pour préparer son projet de loi "Consommation" dans lequel figurerait ce nouveau dispositif. Il est à craindre que, à l'image des précédentes concertations, les entreprises freinent des quatre fers, quand les associations de consommateurs se rêvent en "super héros" pourfendeurs des maux de l'économie et de la consommation -excusez la tautologie !-.
D'après les premiers éléments communiqués, soit les consommateurs qui s'estiment lésés adhèrent d'eux-mêmes à la plainte en cours, ce qui suppose que celle-ci soit connue ; soit tous les consommateurs lésés sont inclus de facto, et doivent se manifester s'ils ne veulent pas y participer. Pour le ministre délégué, ce sont les associations de consommateurs qui centraliseraient les actions pour ne pas multiplier les procédures, et il appartiendrait au juge de déclarer l'action recevable ou non.
"Le but, c'est d'en faire un instrument dissuasif qui permette de restaurer la confiance des consommateurs dans l'entreprise", précise le relayeur de ce projet : une arme de "dissuasion contentieuse" en somme ; la confiance partenariale version guerre froide !
Les recommandations formulées par le CAE sont minces : un coût de participation faible pour les plaignants ; éviter les rentes au bénéfice des intermédiaires ; et un champ d'application le plus large possible. C'est donc aux partenaires de s'entendre pour assurer l'efficacité du dispositif qui ne vaudra que pour autant qu'il ne sera peu ou pas, au final, employé et, tout à la fois, éviter les dérives anglo-saxonnes d'une judiciarisation excessive de la consommation -qui rappelons-le est le principal moteur de la croissance en France-.
Les avocats, qui ne sont pas les derniers concernés par un tel dispositif, se sont réunis en assemblée générale les 6 et 7 juillet 2012, pour adopter plusieurs motions ou résolutions favorables à l'introduction de l'action de groupe en droit français. Ils préconisent, eux aussi, que le champ d'application d'une telle action soit général et ouvert. Pour la profession, ce dispositif doit concerner tous les types de victimes (personnes physiques, morales, professionnels ou non) et de dommages (corporels, moraux , économiques, matériels). Et, l'option opt-in, consistant à n'intégrer à l'action que les personnes qui se sont manifestées, a leur préférence. Le point de friction réside, on le devine, sur la représentation du groupe ainsi défendu à l'instance. Pour les avocats, seuls à même d'assurer garantie et sécurité juridiques, la représentation du groupe ne doit pas être dévolue exclusivement aux associations de consommateurs. Le groupe doit pouvoir, au contraire, être librement constitué, en-dehors d'une association, par des personnes physiques ou morales victimes du fait justifiant l'action et décidant ensemble de recourir à un avocat. Et, cette représentation devant les tribunaux doit, naturellement, être dévolue aux avocats.
On le voit bien, les principaux protagonistes sont dans les starting blocks. Si les entreprises préfèrent, bien entendu, la médiation, plus discrète qu'un contentieux de groupe, la nouvelle majorité parlementaire, plus sourde aux desideratas des grands patrons que la précédente législature, pourrait bien accorder aux consommateurs le sésame qu'ils réclament depuis longtemps maintenant...
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