Réf. : Cass. civ. 1, 25 juin 2008, n° 06-19.556, M. Devis Mascia, FS-P+B (N° Lexbase : A3605D9E)
Lecture: 4 min
N6484BGA
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par David Bakouche, Professeur agrégé des Facultés de droit
le 07 Octobre 2010
La jurisprudence et la doctrine affirment, classiquement, que l'action de in rem verso a un caractère subsidiaire (6). Il en résulte, d'abord, que l'action doit être écartée lorsque l'appauvri dispose à l'égard de l'enrichi d'un autre moyen d'obtenir satisfaction (7), ou bien lorsqu'il a la possibilité, à cette fin, d'agir contre un tiers, une caution par exemple (8). On déduit, ensuite, de l'exigence de subsidiarité que l'action de in rem verso est exclue lorsque l'action normale dont disposait l'appauvri lui est fermée par l'effet d'une règle de droit. Ainsi a-t-il été jugé que l'action fondée sur l'enrichissement sans cause ne peut-être admise qu'à défaut de toute autre action ouverte au demandeur ; qu'elle ne peut l'être, notamment, pour suppléer à une autre action que le demandeur ne peut intenter par suite d'une prescription, d'une déchéance ou forclusion ou par l'effet de l'autorité de la chose jugée ou parce qu'il ne peut apporter les preuves qu'elle exige ou par suite de tout autre obstacle de droit (9).
On remarquera que, en l'espèce, si la Cour qualifie l'action de in rem verso de "subsidiaire", elle censure tout de même les juges du fond qui, pour rejeter la demande, avaient relevé "qu'une telle action n'est pas ouverte pour suppléer une absence de preuves de l'existence du contrat de mandat de gestion allégué" par le demandeur. On pourrait ainsi s'interroger, à la suite de ce qui a été rappelé précédemment, sur le point de savoir si la Cour n'est pas de fait prête à admettre l'action de in rem verso malgré l'existence d'un obstacle de droit au jeu de l'action ordinaire. Certaines décisions avaient, au reste, déjà permis de se poser la question (10). A suivre donc...
(1) Cass. req., 15 juin 1892, Grands arrêts de la jurisprudence civile, 11ème éd., n° 227.
(2) En ce sens, J. Carbonnier, Droit civil, T. 4, Thémis, n° 307.
(3) Voir J. Djoudi, La faute de l'appauvri : un pas de plus vers une subjectivisation de l'enrichissement sans cause, D., 2000, chron., p. 609.
(4) Cass. civ. 1, 15 décembre 1998, n° 96-20625, M. de Bartillat c/ Société RMV GITEM, publié (N° Lexbase : A6428CHK), RTDCiv., 1999, p. 400, obs. Mestre ; Cass. com., 19 mai 1998, n° 96-16.393, Société UGC ciné cité Ile-de-France c/ Société Agora cinémas et autres (N° Lexbase : A2752ACW), RTDCiv., 1999, p. 106, obs. Mestre.
(5) Cass. civ. 1, 11 mars 1997, n° 94-17.621, Société Flandrin Capucines et autre c/ Société financière de banque et autre (N° Lexbase : A9966ABQ), D., 1997, p. 407, note Billiau ; Cass. civ. 1, 3 juin 1997, n° 95-13.568, M. Vallet c/ Compagnie La Préservatrice foncière et autres (N° Lexbase : A0425ACQ), JCP éd. G, 1998, II, 10102, note Viney.
(6) Cass. civ., 2 mars 1915, DP, 1920, 1, 102 ; Grands arrêts de la jurisprudence civile n° 228 ; Cass. civ. 3, 4 décembre 2002, n° 01-03.907, FS-P+B (N° Lexbase : A1891A4S) ; Cass. civ. 1, 14 janvier 2003, n° 01-01.304, F-P (N° Lexbase : A6835A4W) ; Cass. civ. 1, 26 septembre 2007, n° 06-14.422, Mme Odyle Tapie-Debat, épouse Castetbieilh, F-P+B (N° Lexbase : A5818DY7) ; P. Drakidis, La "subsidiarité", caractère spécifique et international de l'action d'enrichissement sans cause, RTDCiv., 1961, p. 577 et s..
(7) Cass. civ. 1, 24 octobre 1973, n° 71-14.159, Sakamoto c/ Doale (N° Lexbase : A4591AYP), Bull. civ. I, n° 280 ; Cass. com., 15 mars 1988, n° 86-16.691, Société anonyme générale française d'emballage (GEFREM) c/ Société de droit allemand Deutsche Apparate Vertriebs Organisation GMBH et COHG dite DAVO et autre (N° Lexbase : A7752AAD), JCP éd. G, 1988, IV,192.
(8) Cass. com., 10 octobre 2000, n° 98-21.814, Société Pleine Forme c/ Banque populaire de la région économique de Strasbourg (N° Lexbase : A7786AHT), Bull. civ. IV, n° 150.
(9) Cass. civ. 3, 29 avril 1971, n° 70-10.415, Dame Masselin c/ Decans, publié (N° Lexbase : A4284CKU), Bull. civ. III, n° 277 ; Cass. com., 10 octobre 2000, préc., Bull. civ. IV, n°150.
(10) Cass. civ. 1, 14 mars 1995, n° 92-21.919, M. Claude Massa c/ M. Roland Henry et autres (N° Lexbase : A0200CTL), JCP éd. G, 1995, II, 22516, note Roussel ; Cass. civ. 1, 3 juin 1997, n° 95-13.568, préc..
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:326484