La lettre juridique n°225 du 27 juillet 2006 : Collectivités territoriales

[Textes] Les contrats urbains de cohésion sociale se substituent aux contrats de ville

Réf. : Circulaire du ministre de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement du 24 mai 2006, relative à l'élaboration des contrats urbains de cohésion sociale (N° Lexbase : L3052HKA)

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le 07 Octobre 2010

Un nouveau cadre contractuel de la politique de la ville en faveur des quartiers en difficulté a été initié par le comité interministériel des villes et du développement urbain (CIV) du 9 mars 2006. Les contrats de ville arrivent à échéance au 31 décembre 2006. Ils sont remplacés par les contrats urbains de cohésion sociale. La circulaire du 24 mai 2006 en fixe le cadre et le calendrier de mise en oeuvre (circulaire du ministre de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement du 24 mai 2006, relative à l'élaboration des contrats urbains de cohésion sociale N° Lexbase : L3052HKA). Le nouveau dispositif reste dans la continuité : il réaffirme les principes de mobilisation des politiques de droit commun, l'intercommunalité, la constitution d'équipes dédiées, la liaison rénovation urbaine et politique de la ville, la nécessité d'observer et évaluer... La diversité des situations locales, mieux prise en compte, devrait permettre de consacrer un effort de rattrapage important aux territoires qui cumulent les difficultés. Autre nouveauté : les crédits seront désormais principalement mobilisés à travers l'opérateur de l'Etat qu'est l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances et non plus la délégation interministérielle à la ville (DIV). Un engagement pluriannuel garantira la pérennité des engagements de l'Etat, et permettra, notamment, de conclure des conventions pluriannuelles avec les associations qui jouent un rôle pivot dans le quartier et dont l'action est la plus efficiente (1). 1. Du contrat de ville au contrat urbain de cohésion sociale

Pour la période 2000-2006 et pour une mobilisation de fonds publics à hauteur de 2,4 milliards d'euros, 247 contrats de ville ont été conclus au bénéfice de plus de 1 300 quartiers et 6 millions d'habitants. L'Etat et les collectivités territoriales se sont engagés à mettre en oeuvre des actions concertées dans le but d'améliorer la vie quotidienne des habitants dans les quartiers et territoires urbains connaissant des difficultés (chômage, violence, logement...) ainsi que de prévenir les risques d'exclusion sociale et urbaine. Ce contrat a été conçu comme un outil unique de politique de la ville face aux multiples procédures contractuelles qui préexistaient.

La complexité et le manque de visibilité des actions des contrats de ville ont suscité les critiques. La DIV a relevé l'important décalage entre les intentions et les réalisations ainsi que les carences en matière de développement économique et d'emploi lors de l'évaluation qu'elle a pu réaliser sur les contrats de ville à mi-parcours (publiée en avril 2005). Un rapport parlementaire dresse en juin 2005 un bilan mitigé et propose un nouveau cadre contractuel, simplifié et clarifié dont s'est inspiré le Gouvernement.

Le maintien sous condition de rénovation des contrats de ville après 2006 a été annoncé par le ministre délégué à la Ville le 12 juillet 2005. Le comité interministériel à la ville (CIV) du 9 mars 2006 leur confère la nouvelle dénomination de "contrats urbains de cohésion sociale" afin de signifier leur réforme par la simplification des contenus, de leur mise en oeuvre et l'amélioration de leur évaluation.

2. Définition et cadre du CUCS

La circulaire définit le contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) comme "le cadre de mise en oeuvre du projet de développement social et urbain en faveur des habitants de quartiers en difficulté reconnus comme prioritaires". Le contenu des futurs CUCS, articulé autour de trois axes, permet de définir plus clairement les engagements respectifs :

- un projet urbain de cohésion sociale, en référence aux objectifs de résultat de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine (art. 1 et 2 N° Lexbase : L3558BLD), pour l'amélioration de la vie quotidienne et la promotion de l'égalité des chances des habitants et la meilleure intégration de ces quartiers dans la ville et l'agglomération ;

- des programmes d'actions pluriannuels déclinant ce projet sur des champs et des quartiers prioritaires, avec des objectifs précis, lisibles et directement évaluables. Les engagements de chacun des partenaires sont précisés, tant dans le cadre de leurs politiques de droit commun que des moyens spécifiques dédiés à ces quartiers ;

- les modalités de mise en oeuvre, d'évaluation, de suivi et d'adaptation du projet urbain de cohésion sociale et des programmes d'action.

Le CUCS est global et cohérent : il prend en compte toutes les politiques structurelles ayant une influence sur les quartiers et développées au niveau communal ou intercommunal. Il intègre et met en cohérence les dispositifs : convention de rénovation urbaine, programme local de l'habitat, zones franches urbaines, plan local d'insertion par l'économie, équipe de réussite éducative, contrat éducatif local, contrat local de sécurité, charte de cohésion sociale... A l'inverse, l'existence d'une telle politique structurelle n'implique pas que le site relève automatiquement de la géographie prioritaire des CUCS.

Le préfet de département a dressé une liste des quartiers prioritaires et des communes concernées (ou EPCI), avant le 30 juin dernier. Elle dessine la géographie d'intervention. Cet inventaire a été établi avec les élus, la DIV et les préfets de région sans que l'enveloppe globale régionale de fonds spécifique ne varie pour autant. Lors de la transmission des propositions, le préfet a fait connaître à la DIV l'éventuelle persistance d'une divergence avec les élus. La liste définitive a dû être arrêtée le 30 juin 2006.

Trois catégories de communes sont concernées :
- les communes "dans lesquelles une intervention massive et coordonnée de l'ensemble des moyens disponibles est absolument indispensable" ; - les communes "qui ont des quartiers dans lesquels les difficultés sociales et économiques sont moindres mais pour lesquels la mobilisation des moyens spécifiques au-delà des moyens de droit commun est néanmoins nécessaire" ;
- "les communes qui ont des quartiers où les actions à mettre en oeuvre relèvent davantage de la prévention ou de la coordination de droit commun". La situation de décrochage des quartiers peut être d'intensité différente. Son appréciation guide le caractère prioritaire des territoires comme le précise une note de la DIV du 2 juin 2006 (adressée par courriel aux préfets). Le classement des communes découle du nombre et de l'intensité des difficultés des quartiers sur leur territoire.

3. Elaboration du contrat

Le préfet du département et le maire (ou le président de l'EPCI) élaborent conjointement le CUCS et en sont les signataires après examen par le préfet de région. L'opportunité d'associer d'autres collectivités territoriales et partenaires doit être saisie en fonction de leurs compétences et le respect de leurs orientations : la signature par les régions et départements reste à leur demande, celle des partenaires principaux (bailleurs sociaux ou CAF) doit être sollicitée.

La définition du projet doit impliquer l'ensemble des partenaires (services de l'Etat et des collectivités territoriales, bailleurs sociaux, associations, juridictions, acteurs économiques...) dans le but de développer une approche commune. L'efficacité de l'intervention sociale dépend du partenariat du conseil général, celle de l'intervention pour le développement économique et la formation professionnelle dépend du partenariat de la région. La circulaire détermine l'architecture du contrat (projet urbain, programmes d'action et modalités d'évaluation). L'Etat contractualisera prioritairement dans les cinq champs définis lors du CIV du 9 mars 2006 : l'habitat et le cadre de vie ; l'accès à l'emploi et le développement économique ; la réussite éducative ; la santé ; la citoyenneté et la prévention de la délinquance. Le préfet de région veille à la coordination avec les contrats de projet Etat-régions (CPER) afin que le volet territorial complète l'enveloppe attribuée aux CUCS.

Les crédits de droit commun sont engagés prioritairement afin que ces moyens constituent le socle des engagements des partenaires. Ainsi, chaque partenaire s'engage prioritairement sur son domaine de compétences et d'interventions. L'Etat mobilise ses moyens budgétaires de droit commun. Les agglomérations sont invitées à mobiliser leurs moyens et compétences. Les conseils généraux sont sollicités sur le champ de l'action sociale, les conseils régionaux sur le champ de la formation professionnelle et du développement économique. Les crédits spécifiques sont mieux ciblés afin de recentrer l'aide de l'Etat sur les territoires où la seule solidarité locale ne suffit pas à assurer la cohésion sociale et territoriale. Un effort de rattrapage plus important pourra être consacré à certains territoires qui connaissent un cumul de difficultés. Des enveloppes globales régionales indicatives de crédits spécifiques ont été précisées par la DIV aux préfets de département à la fin mai. La liste des communes et des quartiers retenus ont permis aux préfets de régions, en collaboration avec la DIV, de déterminer avant fin juin une estimation des enveloppes disponibles pour chaque CUCS.

L'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ANCSEC) est l'opérateur de l'Etat qui mobilisera principalement ces crédits. Sa création devrait simplifier les procédures d'attribution des subventions et la signature des conventions pluriannuelles avec les communes mais aussi avec les associations.

Les signatures devront avoir lieu entre le 15 décembre 2006 et le 15 janvier 2007 après que l'ensemble des projets de contrats ait été adressé au préfet de région qui examinera la cohérence financière du dispositif pour le 31 octobre prochain.

4. Mise en oeuvre et évaluation

Le pilotage stratégique est sous la responsabilité du préfet et du maire (ou du président de l'EPCI). Il associe les divers partenaires tout en restant resserré. Le pilotage technique relève de l'échelle communale ou intercommunale. L'équipe opérationnelle peut être placée auprès du maire, de l'agglomération ou d'un groupement d'intérêt public. Elle doit en particulier comporter un responsable chargé de l'ingénierie sociale. Relais auprès des habitants et des associations, interface avec les professionnels des institutions, elle doit aussi être le support technique à la préparation des décisions politiques.

L'évaluation est présente dès la signature de la convention par la définition de critères. Les programmes d'action feront l'objet de bilans annuels (éventuellement fusionnés avec le rapport annuel de suivi local des ZUS et celui sur l'usage de la DSUCS). La mesure des moyens de droit commun mis en oeuvre est soulignée.

A l'échéance de trois ans, les contrats feront l'objet d'une évaluation devant permettre d'apprécier l'écart entre les résultats et les objectifs, éventuellement de les réorienter de manière substantielle.


Nicolas Wismer
Collaborateur juridique à des associations de collectivités territoriales
Chargé d'enseignement en droit public à l'IEP de Lyon


(1) Le commentaire de la circulaire est rédigé à partir des informations présentes sur le site http://www.cohesionsociale.gouv.fr/. La liste des communes concernées est en ligne sur le site http://i.ville.gouv.fr/.

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