Réf. : Loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L7825K7X)
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par Olivier Dord, Professeur agrégé de droit public, Université Paris Ouest - Nanterre La Défense (CRDP)
le 05 Mai 2016
A - La codification des principales obligations jurisprudentielles
De façon symbolique, la loi du 20 avril 2016 donne une nouvelle rédaction à l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 qui ouvre son chapitre IV désormais intitulé "Des obligations et de la déontologie". Dégagés par la jurisprudence du Conseil d'Etat, les principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique restent absents des statuts généraux successifs depuis 1946. Ils sont enfin codifiés dans le Titre Ier de l'actuel statut. Le premier alinéa de l'article 25 rappelle désormais que chaque fonctionnaire exerce ses fonctions "avec dignité, impartialité, intégrité et probité". Les alinéas suivants consacrent les obligations de neutralité et de laïcité et évoquent leurs conséquences pour les agents et les usagers : l'interdiction de manifester, en service, leurs opinions religieuses est à la charge des premiers ; l'égalité de traitement et le respect de leur liberté de conscience et de leur dignité bénéficient aux seconds. L'article 25 confirme aussi que le chef de service doit veiller au respect de ces principes dans les services placés sous son autorité. Conformément à la jurisprudence "Jamart" (1), il peut aussi préciser ces principes en les adaptant aux missions particulières d'un service.
B - Le renforcement de la prévention des conflits d'intérêts
Reprenant certaines propositions du rapport de la Commission Sauvé (2), les articles 25 bis à 25 quinquies nouveaux de la loi "Déontologie" renforcent de façon substantielle la prévention des conflits d'intérêts dans la fonction publique. Selon l'étude d'impact du projet de loi, il s'agit d'ériger chaque fonctionnaire en premier gardien des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique. Le I de l'article 25 bis lui impose désormais de "veille[r] à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d'intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver". A cette fin, la notion juridique de conflit d'intérêts est définie en reprenant les termes de l'article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013, relative à la transparence de la vie publique (N° Lexbase : L3622IYS) (3). Au surplus, les obligations du fonctionnaire qui est confronté à une situation de conflit d'intérêts sont précisées. Notamment, celui qui pense se trouver dans une telle situation doit saisir son supérieur hiérarchique. Il revient à ce dernier de confier, le cas échéant, le traitement du dossier ou l'élaboration de la décision à une autre personne (article 25 bis -II). Des obligations déontologiques et de prévention des conflits d'intérêts comparables sont énoncées pour les militaires et insérées dans le Code de la Défense (C. déf., art. L. 4122-3 N° Lexbase : L8010K7S et s.).
Le dispositif de lutte contre les conflits d'intérêts dans la fonction publique est complété par l'instauration d'obligations déclaratives renforcées pour les fonctionnaires objectivement exposés à un risque de conflit d'intérêts. Un décret en Conseil d'Etat détermine les catégories d'agents ou d'emplois concernés, en fonction tant de leur niveau hiérarchique que de la nature des fonctions exercées. Le non-respect de ses obligations est justiciable de sanctions pénales (article 25 sexies)
En premier lieu, un nouvel article 25 ter subordonne la nomination dans un emploi qui le justifie à la transmission préalable par le fonctionnaire d'une déclaration de ses intérêts à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Dès la nomination du fonctionnaire, cette déclaration est transmise par l'autorité de nomination à l'autorité hiérarchique dont l'agent relève pour ses nouvelles fonctions. Dans le cas ou l'autorité hiérarchique ne peut apprécier si le fonctionnaire se trouve en situation de conflit d'intérêts, elle transmet sa déclaration d'intérêts à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique instituée par la loi du 11 octobre 2013 précitée. Si elle constate un conflit d'intérêts, la Haute Autorité adresse une recommandation à l'autorité hiérarchique qui l'a saisie. Il revient à cette dernière de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin au conflit d'intérêts ou d'enjoindre au fonctionnaire de faire cesser cette situation dans un délai qu'elle fixe. Enfin, au titre du IV de l'article 25 ter, la déclaration d'intérêt ne comporte, en principe, aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé. Elle est annexée au dossier du fonctionnaire selon des modalités garantissant sa confidentialité.
En deuxième lieu, le nouvel article 25 quater impose au fonctionnaire exerçant des responsabilités en matière économique ou financière et dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient de prendre toutes dispositions pour que les instruments financiers qu'il possède à titre privé soient gérés, pendant la durée de ses fonctions, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part. Le fonctionnaire justifie des mesures prises auprès de la Haute Autorité.
En dernier lieu, selon le nouvel article 25 quinquies, le fonctionnaire nommé dans un emploi qui le justifie adresse au président de la Haute Autorité, dans un délai de deux mois suivant sa nomination, une déclaration de situation patrimoniale concernant la totalité de ses biens propres ainsi que, le cas échéant, ceux de la communauté ou les biens indivis. Dans les deux mois qui suivent la cessation de ses fonctions, le même fonctionnaire adresse une nouvelle déclaration de situation patrimoniale au président de la Haute Autorité. Cette dernière apprécie alors la variation de la situation patrimoniale de l'intéressé. La déclaration de situation patrimoniale n'est ni versée au dossier du fonctionnaire, ni communicable aux tiers.
En matière de cumuls d'activités, l'obligation pour le fonctionnaire de se consacrer entièrement au service de l'intérêt général est consacrée à l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983. Outre les interdictions déjà imposées, il est dorénavant aussi proscrit aux fonctionnaires de cumuler, avec l'exercice d'un emploi à temps complet donnant lieu à un service à temps plein : la création ou la reprise de toute entreprise privée, ou impliquant l'affiliation au régime d'auto-entrepreneur ; l'occupation d'un autre emploi permanent à temps complet. L'autorisation d'accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise n'est plus accordée de plein droit. Elle peut l'être sous réserve des nécessités du service et compte tenu des possibilités d'aménagement de l'organisation du travail, pour une durée maximale de deux ans renouvelable un an, après examen de la commission de déontologie.
C - L'insertion de la commission de déontologie dans le statut général
De façon générale, la loi "Déontologie" a un double impact sur la commission de déontologie de la fonction publique. Au plan formel, l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (N° Lexbase : L8653AGL), est abrogé. Ses dispositions figurent désormais dans le nouvel article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983. Au plan matériel, la commission voit ses compétences étendues au-delà du contrôle du pantouflage des agents publics dans le secteur privé au profit d'une supervision plus générale de la déontologie dans les trois versants de la fonction publique.
La compétence générale attribuée à la commission de déontologie est désormais en pleine adéquation avec son nom. Selon le nouvel article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983, en effet, elle "est placée auprès du Premier ministre pour apprécier le respect des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique". Plus précisément la loi du 20 avril 2016 lui confère une compétence consultative nouvelle en matière de respect des obligations déontologiques énoncées par le statut général. Sur saisine de l'administration, elle rend un avis sur les projets de texte, élaborés pour l'application des articles 6 ter A (lanceurs d'alerte crimes et délits), 25 à 25 ter (déclarations d'intérêts), 25 quater (déclarations de patrimoine), 25 septies (interdiction des cumuls) et 28 bis (référent déontologue). Elle émet aussi, de sa propre initiative, des recommandations sur l'application de ces articles. Elle formule enfin, sur saisine de l'administration, des recommandations sur l'application de ces mêmes articles à des situations individuelles.
En matière de contrôle du départ des agents publics dans le secteur privé, la commission voit ses attributions à la fois simplifiées et renforcées. La nouvelle loi met fin à la distinction entre les cas de saisine obligatoire et les cas de saisine facultative afin de réduire l'incertitude sur le fondement de la saisine de la commission et de renforcer l'exhaustivité du contrôle des pantouflages. Désormais, la saisine préalable de la commission est obligatoire pour tout fonctionnaire qui cesse définitivement ou temporairement ses fonctions ou, le cas échéant, pour l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine (art. 25 octies-III). Au surplus, la commission apprécie désormais, pour chaque dossier dont elle est saisie, si l'activité privée que projette d'exercer le fonctionnaire risque de porter atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance, à la neutralité du service ou à tout autre principe déontologique cité à l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 (ex-contrôle "déontologique") ou de placer l'intéressé en situation de commettre l'infraction prévue à l'article 432-13 du Code pénal (N° Lexbase : L3748IYH) (ex-contrôle "pénal"). Enfin, le champ des activités privées contrôlées est étendu. La formulation retenue vise dorénavant "tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé". Selon l'étude d'impact, entrent désormais dans le champ du contrôle les entreprises privées disposant d'un monopole (RTE-EDF transport) ou des entités telles que l'ADEME ou la Caisse des dépôts et consignations. Enfin l'article 25 octies renforce la portée des avis rendus par la commission. Désormais, les avis d'incompatibilité mais aussi les avis de compatibilité avec réserves lient l'employeur public et s'imposent à l'agent.
D - L'aide à la déontologie
A titre particulier, la loi étend le champ de la protection statutaire dont bénéficient certains fonctionnaires lanceurs d'alerte. Après le harcèlement moral et sexuel et les crimes et délits, les situations de conflits d'intérêts sont prises en compte. Selon l'article 6 ter A modifié de la loi du 13 juillet 1983, un fonctionnaire ne peut pas être sanctionné pour avoir dénoncé, de bonne foi, un conflit d'intérêts aux autorités judiciaires ou administratives. En outre, aucune mesure qui viendrait freiner sa carrière ne peut être prise à son encontre. Le témoignage de mauvaise foi, avec l'intention de nuire ou avec la connaissance au moins partielle de l'inexactitude des faits rendus publics ou diffusés est en revanche pénalement puni.
De façon plus générale, la loi donne désormais à tout fonctionnaire le droit de consulter un référent déontologue. Celui-ci est chargé d'apporter tout conseil utile afin de faire respecter les obligations et des principes déontologiques consacrés dans la loi du 13 juillet 1983. Cette fonction de conseil s'exerce sans préjudice de la responsabilité et des prérogatives du chef de service. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités et critères de désignation des référents déontologues.
E - Les dispositions relatives aux membres des juridictions administratives et financières
La déontologie des membres des juridictions administratives et financières fait l'objet de dispositions particulières. Celles-ci sont insérées, pour les premières, dans le Code de justice administrative et, pour les secondes, dans le Code des juridictions financières. Elles confortent les mécanismes existants comme les chartes et les collèges de déontologie.S'agissant des membres du Conseil d'Etat, l'article L. 131-2 modifié du Code de justice administrative (N° Lexbase : L8078K7C) précise désormais, en vertu de la jurisprudence constitutionnelle (4), qu'ils exercent leurs fonctions "en toute indépendance". De façon plus générale, la loi "Déontologie" conforte les mécanismes de prévention existants comme les chartes et les collèges de déontologie. Elles imposent aussi des obligations renforcées à leurs membres. Doit notamment être citée la conception extensive du devoir de réserve qui résulte de la formulation selon laquelle leurs membres doivent s'abstenir "de tout acte ou comportement à caractère public incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions". La remise d'une déclaration d'intérêts à leur autorité hiérarchique est en outre généralisée pour l'ensemble des membres des juridictions administratives et financières. Enfin, lors de leur prise et leur cessation de fonctions, le vice-président du Conseil d'Etat et les présidents de section, le premier président de la Cour des comptes, les présidents de chambre et les procureurs financiers, ainsi que tous les chefs de juridiction adressent une déclaration de situation patrimoniale au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
En dehors de la déontologie, la loi introduit plusieurs autres modifications notables pour les juridictions administratives ou financières. Des conseillers d'Etat en service extraordinaire peuvent désormais être nommés pour exercer des fonctions juridictionnelles. À la Cour des comptes, il est créé des conseillers maîtres et des conseillers référendaires en service extraordinaire. Au plan sémantique, la loi parfait la juridictionnalisation de certaines appellations. Ainsi la formule "magistrats des tribunaux et cours administratives d'appel" est généralisée dans le Code de justice administrative. Au Conseil d'Etat, les sous-sections deviennent des chambres. La loi comporte aussi quelques innovations en matière procédurale. Il est désormais possible d'attribuer des litiges en premier et dernier ressort aux cours administratives d'appel. Un référé peut être examiné par une formation composée de trois juges.
II - La modernisation des droits et obligation des fonctionnaires
A - La mobilité des fonctionnaires
Afin de rendre plus lisible les outils qui favorisent la mobilité des fonctionnaires, trois modifications principales sont introduites. En premier lieu, le régime des positions statutaires est simplifié. Elles passent de six à quatre. La position hors-cadre est supprimée. Idem pour celle d'accomplissement du service national et des activités de réserve qui devient un congé de la position d'activité. Le nouvel article 12 bis de la loi du 13 juillet 1983 dispose désormais : "Le fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes : 1° Activité ; 2° Détachement ; 3° Disponibilité ; 4° Congé parental". En second lieu, certaines modalités de la position d'activité sont réformées et harmonisées entre les trois versants. Inutilisé et décrié, le dispositif de réorientation professionnelle des fonctionnaires de l'Etat introduit en 2009 est abrogé. La mise à disposition fait l'objet d'une nouvelle réforme. Elle est désormais possible auprès d'un groupement d'intérêt public, d'une institution ou d'un organe de l'Union européenne ou d'un Etat étranger. Le périmètre de la mise à disposition au sein d'organismes contribuant à la mise en oeuvre d'une politique publique doit être circonscrit par décret en Conseil d'Etat. Enfin, la possibilité de déroger à l'obligation de remboursement de la mise à disposition d'un fonctionnaire est étendue aux versants territorial et hospitalier de la fonction publique.
B - L'extension du champ de la protection fonctionnelle
L'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 relatif à la protection fonctionnelle du fonctionnaire reçoit une nouvelle rédaction. Le champ de cette garantie statutaire bénéficie d'une double extension. D'une part, elle s'applique désormais aux proches de tout fonctionnaire lorsqu'ils sont victimes d'agression du fait des fonctions de ce dernier ou pour engager une action contre ses agresseurs. Sont concernés le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité du fonctionnaire, ses enfants et ses ascendants directs. Il s'agit de la généralisation d'une situation que la loi réservait jusque-là à certaines catégories d'agents publics (policiers, gendarmes, agents pénitentiaires). D'autre part, les faits qui ouvrent droit à la protection fonctionnelle sont étendus, conformément à la jurisprudence aux actes de harcèlement et aux "atteintes volontaire à l'intégrité physique de l'agent". En outre, la protection fonctionnelle concerne aussi désormais le fonctionnaire entendu en qualité de témoin assisté, placé en garde à vue ou qui se voit proposer une mesure de composition pénale. Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions et les limites de la prise en charge des frais engagés par la collectivité publique.
C - La réforme de la procédure disciplinaire
Du projet initial de modernisation et d'harmonisation des procédures disciplinaires dans les trois versants de la fonction publique, il ne reste que deux éléments d'inégale importance. À titre principal, la loi met fin à l'imprescriptibilité traditionnelle de l'action disciplinaire. L'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit désormais qu'aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu connaissance des faits passibles de sanction. Cette prescription de l'action disciplinaire permet de sécuriser à la fois la situation des fonctionnaires et les poursuites engagées par l'employeur public à propos de faits anciens. En cas de poursuites pénales exercées à l'encontre du fonctionnaire, ce délai est toutefois interrompu jusqu'à la décision définitive de la justice judiciaire.
A titre secondaire, la loi clarifie la situation du fonctionnaire suspendu qui fait l'objet de poursuites pénales. Désormais, après quatre mois de suspension sans qu'aucune décision de l'autorité disciplinaire ne soit intervenue, le fonctionnaire qui ne fait l'objet d'aucune poursuite pénale est rétabli dans ses fonctions. Il en est de même en cas de poursuites pénales sauf si les mesures prises par l'autorité judiciaire ou l'intérêt du service s'y opposent. Si l'agent poursuivi pénalement n'est pas rétabli, la loi offre une alternative nouvelle à l'employeur public. L'agent peut être affecté provisoirement, sous réserve de l'intérêt du service, dans un emploi compatible avec les mesures judiciaires dont il fait l'objet. Il peut aussi être détaché d'office, à titre provisoire, dans un autre corps ou cadre d'emplois pour occuper un emploi compatible avec de telles mesures. L'autorité judiciaire et la commission administrative paritaire sont informées du changement de situation du fonctionnaire.
III - De l'exemplarité des employeurs publics
A - L'égalité entre hommes et femmes
La loi du 20 avril 2016 favorise une nouvelle fois l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales. Trois secteurs sont concernés. D'une part, la commission de déontologie de la fonction publique comprend un nombre égal de femmes et d'hommes. D'autre part, les listes de candidats aux élections professionnelles seront composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes représentés au sein de l'instance concernée. En outre, les conseils supérieurs et le conseil commun de la fonction publique sont désormais également soumis aux règles de la représentation équilibrée des femmes et des hommes.
B - L'amélioration de la situation des contractuels
De façon autant paradoxale que didactique, la loi du 20 avril 2016 introduit dans le Titre Ier du statut général des fonctionnaires un nouvel article 32 consacré aux agents contractuels. Ce terme se substitue à celui de "non-titulaires". Il rappelle que ces agents non titulaires sont recrutés après appréciation de leur aptitude à exercer les fonctions à pourvoir. Il précise aussi le périmètre des droits et obligations énoncées par la loi du 13 juillet 1983 qui leur sont applicables : les garanties du chapitre II, le I de l'article 23 bis (décharges de service) et le chapitre IV relatif aux obligations et à la déontologie sauf son article 30.
Sur le fond, la loi prolonge de deux ans, jusqu'au 12 mars 2018, le "plan Sauvadet" de lutte contre la précarité issu de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, relative à l'accès à l'emploi titulaire (N° Lexbase : L3774ISL). Les conditions d'accès à ce dispositif sont améliorées.
Enfin, la possibilité pour les emplois permanents de l'Etat et de ses établissements publics de déroger à la règle de leur occupation de principe par un fonctionnaire est confortée. Cette dérogation vise les emplois publics qui requièrent des qualifications professionnelles particulières indispensables à l'exercice de leurs missions spécifiques et pour lesquelles il n'existe pas de corps de fonctionnaires. Elle est désormais accordée pour une durée déterminée, à l'issue de laquelle sa justification doit être de nouveau examinée. En revanche, les agents désormais recrutés sur ces emplois le sont par contrat à durée indéterminée.
C - L'amélioration du dialogue social
A l'initiative du Gouvernement, la loi du 20 avril 2016 modifie les modalités de calcul de la règle de l'accord majoritaire dans les négociations sociales. Il prévoit que, pour déterminer le seuil des 50 %, seuls sont pris en compte les suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales habilitées à négocier et à signer un accord, c'est-à-dire celles disposant d'au moins un siège dans l'organisme de consultation concerné.
IV - Les dispositions relatives à la fonction publique territoriale
Il convient de réunir dans ce dernier point certaines des nombreuses dispositions relatives à la fonction publique territoriale. Comme toujours, cette dernière a fait l'objet d'une attention particulière de la part du Sénat lors des débats parlementaires. Les principaux apports sont les suivants. Tout d'abord, sur le modèle de l'Etat, il est créé dans chaque collectivité territoriale ou établissement public des commissions consultatives paritaires. Elles connaissent des décisions individuelles prises à l'égard des agents contractuels et de toute question d'ordre individuel concernant leur situation professionnelle. Elles sont présidées par l'autorité territoriale et par un magistrat de l'ordre administratif lorsqu'elles siègent en tant que conseil de discipline. Ensuite, les centres de gestion de la fonction publique territoriale, qui assurent depuis 1984 une partie de la gestion des ressources humaines des collectivités territoriales, sont dotés de deux compétences obligatoires nouvelles : le secrétariat des commissions consultatives paritaires et la fonction de référent déontologue. Ils voient en outre l'exercice de leurs compétences facultatives sécurisé. La nouvelle rédaction de l'article 25 de la loi du 26 janvier 1984 précise ainsi que "les centres de gestion peuvent assurer toute tâche administrative et des missions d'archivage, de numérisation, de conseils en organisation et de conseils juridiques, à la demande des collectivités et établissements". Ensuite, la loi du 20 avril 2016 introduit une dégressivité de la rémunération des fonctionnaires momentanément privés d'emploi. Celle-ci s'étend de moins 5 % chaque année à partir de la troisième année jusqu'au moins 50 % la douzième année. La prise en charge sur le long terme des agents victimes d'incidents de carrière constitue en effet une charge financière lourde pour les collectivités dont ils sont issus. Enfin, la période d'inscription sur les listes des lauréats d'un concours de la territoriale est portée à quatre ans afin de lutter contre le phénomène des "reçus-collés".
La loi du 20 avril 2016 requiert une vingtaine de décrets d'application. Au titre de l'article 38 de la Constitution (N° Lexbase : L0864AHH), elle autorise également le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures relatives, notamment, au statut des membres des juridictions administratives et financières, à la modernisation des conditions d'affectations de certains fonctionnaires et, pour la énième fois, à l'adoption de la partie législative d'un Code général de la fonction publique.
(1) CE, 7 février 1936, n° 43321 (N° Lexbase : A8004AY4).
(2) Commission de réflexion pour la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, Pour une nouvelle déontologie de la vie publique, 26 janvier 2011.
(3) "Au sens de la présente loi, constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif de ses fonctions".
(4) Cons. const., décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980 (N° Lexbase : A8015ACT), Rec., p. 46.
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