Les personnes morales ne peuvent se prévaloir du droit au respect de la vie privée ; telle est la solution qui se dégage de l'arrêt rendu le 17 mars 2016 par la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 17 mars 2016, n° 15-14.072, FS-P+B+I
N° Lexbase : A6437Q7K). En l'espèce, Mme C. était propriétaire d'un immeuble, qu'elle avait donné à bail à son fils pour y développer une activité de location saisonnière et de réception, et dont l'accès s'effectuait par un passage indivis desservant également la porte d'accès au fournil du fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie exploité par une société. Reprochant à M. et Mme C. d'avoir installé sur leur immeuble un système de vidéo-surveillance et un projecteur dirigés vers ledit passage, la société avait saisi le juge des référés, sur le fondement de l'article 809 du Code de procédure civile, pour obtenir le retrait de ce dispositif, ainsi qu'une provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice résultant de l'atteinte à sa vie privée et de son préjudice moral. Pour ordonner le retrait du matériel de vidéo-surveillance et du projecteur, la cour d'appel d'Orléans avait relevé que l'usage de ce dispositif n'était pas strictement limité à la surveillance de l'intérieur de la propriété de M. et Mme C., que l'appareil de vidéo-surveillance enregistrait également les mouvements des personnes se trouvant sur le passage commun, notamment au niveau de l'entrée du personnel de la société, et que le projecteur, braqué dans la direction de la caméra, ajoutait à la visibilité ; elle avait retenu que l'atteinte ainsi portée au respect de la vie privée de la société constituait un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser (CA Orléans, 17 novembre 2014, n° 14/01423
N° Lexbase : A3301M3N). A tort. La décision est censurée, au visa des articles 9 du Code civil (
N° Lexbase : L3304ABY) et 809 du Code de procédure civile (
N° Lexbase : L0696H4K), par la Cour suprême qui relève que, si les personnes morales disposent, notamment, d'un droit à la protection de leur nom, de leur domicile, de leurs correspondances et de leur réputation, seules les personnes physiques peuvent se prévaloir d'une atteinte à la vie privée au sens de l'article 9 du Code civil, de sorte que la société ne pouvait invoquer l'existence d'un trouble manifestement illicite résultant d'une telle atteinte.
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