En vertu de l'article 38 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse (
N° Lexbase : L7589AIW), "
il est interdit de publier les actes d'accusation et tous autres actes de procédure criminelle ou correctionnelle avant qu'ils aient été lus en audience publique et ce, sous peine d'une amende de 3 750 euros". Dans un arrêt rendu le 11 mars 2014, la première chambre civile de la Cour de cassation estime que ces dispositions n'ont pas lieu d'être appliquées s'agissant de la publication de pièces issues de l'instruction judiciaire en cours dans le cadre de l'affaire du "Mediator", dès lors que cette affaire a trait à un problème de santé publique et qu'informer à son sujet revêt un caractère d'intérêt général (Cass. civ. 1, 11 mars 2014, n° 12-29.419, FP-P+B
N° Lexbase : A9359MGQ ; cf. l’Ouvrage "Droit de la responsabilité" N° Lexbase : E4106ETA). En l'espèce, Mme J. avait publié dans un journal du 7 février 2012 un article consacré au produit dénommé "Mediator" sous le titre "
Chez S., on l'appelait le 'Merdiator'", comprenant dix extraits du procès-verbal d'audition, en qualité de témoin, de Mme J., désignée par son prénom, lors de la procédure d'instruction ouverte au tribunal de grande instance de Paris et ayant donné lieu à la mise en examen de M. S. et de plusieurs sociétés du groupe qu'il dirige pour escroquerie, tromperie aggravée et obtention indue d'une autorisation administrative. La société des laboratoires S. avaient assigné le directeur de la publication du journal, Mme J. et la société éditrice du journal, sur le fondement de l'article 38 de la loi du 1881, afin d'obtenir des dommages-intérêts, ainsi que la publication du jugement à intervenir, par extraits, dans le journal en cause et dans trois autres journaux ; elle faisait grief à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 24 octobre 2012 de la débouter de ses demandes (CA Paris, Pôle 2, 7ème ch., 24 octobre 2012, n° 12/13784
N° Lexbase : A8780IUQ). En vain. La Cour suprême approuve les juges d'appel ayant relevé que l'affaire du "Mediator" avait trait à un problème de santé publique et qu'informer à son sujet revêtait un caractère d'intérêt général. Aussi, ayant constaté que la publication des citations extraites des procès-verbaux d'audition contenait le témoignage non décisif d'une visiteuse médicale, recueilli au cours d'une information complexe et de longue durée, sans que soient connues l'échéance ni même la certitude d'un procès, la cour d'appel avait pu en déduire que cette publication n'avait pas porté atteinte au droit à un procès équitable ni à l'autorité et à l'impartialité de la justice, de sorte que l'application de l'article 38 de la loi du 29 juillet 1881 à la publication litigieuse constituait une ingérence disproportionnée dans l'exercice de la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (
N° Lexbase : L4743AQQ) ; les juges d'appel avaient ainsi légalement justifié leur décision.
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