La responsabilité des propos dénigrants à l'égard d'une compagnie aérienne ainsi que d'un appel à
boycott diffusés sur internet doit être imputée à leurs auteurs et non aux journalistes et internautes qui les ont relayés. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 21 novembre 2013 (CA Paris, Pôle 1, 2ème ch., 21 novembre 2013, n° 12/23396
N° Lexbase : A8895KP7). Dans cette affaire, le Conseil national de l'immigration (CNI), qui est une association ayant notamment pour objet de représenter et organiser la défense des intérêts de la communauté algérienne établie en France, et un mouvement collectif similaire constitué sous la forme d'une association non déclarée ont dénoncé la cherté du prix des billets d'avion à destination de l'Algérie, pratiqué par une compagnie aérienne. Cette dernière leur reprochant des propos constitutifs d'actes de dénigrement les a assignés devant le juge des référés. C'est dans ces circonstances que la cour d'appel a estimé que ces propos, dont la responsabilité ne peut être imputée qu'aux intimés qui les ont tenus et non aux journalistes ou internautes qui n'ont fait que les reproduire, et faisant mention de pratiques illicites passibles de sanctions devant les autorités compétentes, comportent des insinuations de nature à jeter le discrédit sur une compagnie aérienne, et sont comme tels constitutifs d'un dénigrement fautif. Revêtent le même caractère fautif les appels massifs à
boycott, sur internet et relayés par la presse. La cour retient ainsi que, si la critique de prix élevés, seraient-ils qualifiés d'exorbitants, relève du droit de libre critique qui appartient à tout consommateur, ce droit dégénère en abus lorsque, comme en l'espèce, la cherté des prestations de l'entreprise ciblée est dénoncée, sous le titre "
Stop à la vaste opération d'enfumage et d'escroquerie organisée !", ou les termes "
l'arnaque cessera", les vocables utilisés, à connotation pénale, procédant de toute évidence d'une intention malveillante, dépassant le droit d'information. Dès lors, en présence de ces propos, c'est à tort que le premier juge a retenu l'absence de tout comportement déloyal de nature à jeter le discrédit, le trouble illicite étant manifestement caractérisé. Aussi, convient-il, selon la cour, de prendre les mesures de nature à faire cesser ce trouble, en condamnant les intimés à arrêter immédiatement de tenir des propos dénigrants et de les condamner à procéder au retrait des articles litigieux (cf. l’Ouvrage "Le droit de la responsabilité" N° Lexbase : E4087ETK).
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